"Le gouvernement favorise systématiquement les policiers."
L'avocat Arié Alimi dénonce la complicité de l'État face aux violences policières et les injustices de traitement entre une affaire impliquant un policier et un citoyen lambda. Son livre "L'Etat hors-la-loi" vient de paraître aux éditions de La Découverte.
L'avocat Arié Alimi dénonce la complicité de l'État face aux violences policières et les injustices de traitement entre une affaire impliquant un policier et un citoyen lambda. Son livre "L'Etat hors-la-loi" vient de paraître aux éditions de La Découverte.
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00:00 Il y a un traitement inégalitaire évident entre les policiers lorsqu'ils commettent
00:03 des crimes et le reste de la population.
00:05 S'agissant des violences policières, oui, l'État est en la loi.
00:08 On ne doit plus parler de bavure.
00:10 Ça fait partie du système.
00:11 Le pouvoir fonctionne peut-être, grâce et quelquefois avec les violences policières.
00:16 Oui, c'est assez étonnant que le président de la République, le ministre de l'Intérieur
00:21 disent expressément les violences policières, ça n'existe pas.
00:23 Il y a une forme d'omerta.
00:26 Ça fonctionne un peu, sans vouloir exagérer, comme une organisation criminelle où on se
00:30 soutient et on essaye de garder le silence.
00:32 C'est difficile de dire et de comparer la police et quelquefois le système judiciaire
00:37 et l'État à une organisation criminelle, mais force est de constater qu'il y a tellement
00:41 de violences policières aujourd'hui et si peu de violences qui sont poursuivies que
00:45 ça commence à y ressembler.
00:46 À chaque fois qu'il y a une violence qui est commise, à chaque fois qu'il y a des
00:49 avocats qui vont déposer plainte, ça n'est pas que le policier qui va être visé, c'est
00:53 sa hiérarchie et donc c'est le cœur même de l'État et du pouvoir qui est visé.
00:57 Évidemment, dans ces moments, la raison d'État va prendre le relais et c'est extrêmement
01:02 violent pour les victimes parce qu'ils vont avoir tout l'État et toute la police qui
01:08 vont se mettre contre eux.
01:10 Il y a quelque chose qui est assez récurrent dans les affaires de violences policières,
01:14 c'est que dès le départ, on va nous parler du contexte.
01:16 Oui mais attention, c'était très compliqué, il y avait beaucoup de violences, c'était
01:19 pratiquement une guerre.
01:20 Tout le but de cette manœuvre, de cette démarche, c'est justement d'essayer d'amoindrir
01:25 la responsabilité pénale des fonctionnaires de police.
01:28 Souvent, c'est difficile d'identifier les policiers impliqués, notamment dans le maintien
01:31 de l'ordre.
01:32 Pourquoi ? Parce que normalement, vous savez, les policiers doivent porter un numéro matricule
01:35 qu'on appelle le RIO et souvent, ces policiers, ils cachent le RIO ou bien tout simplement,
01:40 ils ne le mettent pas.
01:41 Ensuite, de plus en plus, les policiers mettent des cagoules.
01:43 Là par exemple, à Marseille, pendant les émeutes, lorsque Mohamed Bendris, lorsque
01:47 Eddy, lorsque d'autres ont été soit tués, soit blessés gravement, eh bien on a des
01:52 policiers du RAID qui sont méconnaissables.
01:54 Donc il suffit de dire "bah c'est pas moi".
01:55 Il y a plein de raisons pour lesquelles finalement, c'est difficile pour la justice de travailler.
02:01 Mais la meilleure raison peut-être, c'est que la justice n'a pas forcément envie de
02:05 poursuivre ces policiers.
02:06 Les violences policières, ce n'est pas un grand tout.
02:07 Il y a les violences policières ethno-raciales contre les personnes issues de l'immigration
02:11 dans les quartiers populaires.
02:12 Il y a les violences contre les personnes qui s'expriment politiquement, notamment dans
02:16 les manifestations.
02:17 Et puis il y a ces violences maintenant contre les personnes qui sont au volant de leur véhicule,
02:22 qui n'obéissent pas forcément à la police quand il y a des contrôles, qui aboutissent
02:26 souvent à des morts.
02:27 Il y a une forme de restauration du pouvoir de vie et de mort.
02:29 Quand on compare le traitement judiciaire des personnes qui sont arrêtées dans les
02:34 manifestations ou dans les émeutes avec le traitement judiciaire des fonctionnaires de
02:37 police, on se dit "mais il y a effectivement une rupture d'égalité, il y a un traitement
02:41 inégalitaire évident entre les policiers lorsqu'ils commettent des crimes ou des délits
02:46 et le reste de la population".
02:48 Sauf que le code pénal et le code de procédure pénal ne prévoient pas qu'il y ait une différence.
02:53 Donc il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.
02:55 Pendant très longtemps, l'IGPN essayait de couvrir toutes les affaires de violences
03:00 policières.
03:01 Il faut que l'IGPN, ça change, que ce ne soit pas des policiers qui enquêtent sur
03:03 des policiers.
03:04 On s'est rendu compte que le maintien de l'ordre avait beaucoup évolué entre notamment
03:09 les années 60 où la doctrine du maintien de l'ordre c'était plutôt de laisser à
03:11 distance, d'éviter les blessures, d'éviter les contacts.
03:14 Et progressivement, on a vu qu'il y avait une doctrine différente, qu'il y avait de
03:20 la part des policiers des ordres qui leur étaient donnés qui consistaient à aller
03:24 au contact des manifestants, à utiliser des armes.
03:27 Toutes ces armes évidemment ne sont pas adaptées au maintien de l'ordre.
03:30 Pourquoi ? Parce que le maintien de l'ordre c'est des masses, des foules.
03:33 Comment vous voulez être précis dans une manifestation ? Et pourtant, la France continue
03:37 à les utiliser.
03:38 Plus le pouvoir politique est fragile, plus il y a des violences policières.
03:42 Et ça s'explique tout simplement parce qu'un pouvoir politique qui n'est pas très
03:46 légitime et qui n'a pas d'autorité naturelle à l'égard de sa population va plutôt
03:50 utiliser la violence et la répression contre la contestation sociale.
03:53 Et évidemment, le gouvernement que nous avons aujourd'hui le montre pleinement.
03:57 Il favorise systématiquement les policiers.
03:59 Ils n'ont aucune parole pour les victimes.
04:01 Ils ne vont jamais voir les familles de victimes, même quand il y a des morts.
04:05 A une époque, ce n'était pas le cas.
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