Mathieu Bock-Côté propose un décryptage de l’actualité des deux côtés de l’Atlantique dans #FaceABockCote
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00:00 Bonsoir à tous, il est presque 19h, vous regardez Face à Boccote.
00:04 Bonsoir Mathieu.
00:05 Bonsoir.
00:06 Ravi d'être avec vous pour passer une heure ensemble ainsi qu'avec Arthur de Vatrigan.
00:10 Bonsoir.
00:10 Directeur de la rédaction de L'Incorrect.
00:13 On montre la couverture d'ailleurs peut-être de L'Incorrect du mois.
00:16 Cette question laïcité, une illusion perdue.
00:19 On va parler de beaucoup de sujets dans cette émission,
00:21 mais d'abord c'est l'heure du rappel des titres avec Mathieu Deveze.
00:24 Bonsoir Mathieu.
00:25 Bonsoir Thomas, bonsoir à tous.
00:26 Le bilan ne cesse de s'alourdir au Maroc, plus de 1000 personnes sont mortes
00:31 dans un puissant séisme qui a frappé le pays la nuit dernière.
00:34 Un séisme de magnitude 7 dont l'épicentre a été enregistré au sud-ouest de Marrakech.
00:40 Il s'agit du plus puissant séisme à frapper le royaume.
00:43 Et sachez que la tour Eiffel sera éteinte ce soir à 23h en hommage aux victimes.
00:48 Le gouvernement demande un effort de solidarité aux distributeurs de carburant.
00:52 La ministre de la Transition énergétique organisera une réunion avec eux mardi.
00:56 Agnès Pagny-Runacher souhaite notamment les convaincre de prolonger les opérations de vente à prix coûtant.
01:02 Ces derniers jours, les prix de l'essence ont parfois dépassé la barre des 2 euros le litre.
01:06 Enfin en rugby, l'Irlande débute parfaitement sa Coupe du Monde.
01:10 Une victoire écoutée bien, 82 à 8 face à la Roumanie à Bordeaux.
01:14 12 essais inscrits, aucun blessé.
01:16 Oui, le 15 de trèfle n'a pas fait de détail pour son entrée dans la compétition.
01:20 C'est d'ailleurs la plus large victoire de l'histoire de l'Irlande en Coupe du Monde.
01:25 Merci beaucoup Mathieu et à tout à l'heure pour un nouveau point complet sur l'actualité.
01:30 Au sommaire ce soir, dans votre premier édito Mathieu, vous souhaitez revenir sur la controverse autour du Puy du Fou.
01:36 Un reportage diffusé cette semaine était consacré aux coulisses du parc ATM Vendée 1.
01:40 Vous pointez une forme de malhonnêteté de la part de cette émission du service public.
01:45 Un procès médiatique à charge dont vous nous direz en quoi il vous pose problème.
01:50 Pour votre second édito, il sera question de l'amitié dans le débat public.
01:54 Est-il possible de déjeuner avec quelqu'un qui ne pense pas comme soi ?
01:57 Peut-on encore fréquenter des personnes avec qui on ne partage pas les mêmes idées ?
02:01 Comment et pourquoi la gauche se fait la police des dîners ?
02:04 Vous répondrez à toutes ces questions.
02:06 Ce sera aussi l'occasion de rendre hommage à Jacques Julliard, intellectuel, qui nous a quittés ce vendredi
02:10 et qui a incarné d'une certaine manière ce dépassement des clivages.
02:13 Enfin, votre invité ce soir c'est Olivier Dard, historien.
02:17 On parlera du concept d'extrême droite.
02:19 Que signifie-t-il réellement ? Qu'est-ce qui se cache derrière cette dénomination politique ?
02:24 Réponse dans la deuxième partie de cette émission.
02:27 Mathieu, depuis jeudi soir, le Puy du Fou, le grand parc historique de Vendée créé par Philippe Devilliers,
02:45 est au cœur de l'actualité. On connaît la raison.
02:47 Il était la cible d'une émission de Complément d'enquête sur France 2.
02:50 Et c'est sur cette controverse que vous souhaitiez revenir dans votre première édition.
02:54 Controverse est un terme poli. Je pourrais parler plus simplement d'un procès à charge,
03:01 une volonté non seulement de nuire au Puy du Fou, mais de le souiller.
03:06 Une volonté de détruire qui est assez fascinante.
03:09 D'autant, ne l'oublions pas, Complément d'enquête est une émission du service public.
03:12 Donc les Français financent à même leurs impôts.
03:15 Une émission qui fonctionne, ce n'est pas la seule soit dit en passant, vous pourriez me dire.
03:19 Plusieurs émissions, mais une en particulier, qui travaille globalement à salir, à souiller, à détruire,
03:26 déconstruire, dit-on de manière plus savante, tout ce que les Français peuvent aimer
03:30 parce que le patriotisme en lui-même serait toxique, j'y reviendrai.
03:33 Les méthodes, pourquoi je dis que c'était une volonté de souiller, les méthodes étaient fascinantes.
03:38 On les connaît, on connaît ce type de documentaire-là, musique sur le mode un peu suspense, inquiétant.
03:43 On a l'impression qu'on est quelque part dans un film d'horreur qui se passe au Wyoming en 1903.
03:48 Et là, on sent qu'il va y avoir des enfants tueurs et des enfants tués.
03:52 On a l'impression que tout ça, c'est la mise en scène d'une maison d'horreur.
03:57 Or, ensuite, il y a l'utilisation abusive du conditionnel qui permet de lancer toutes les rumeurs malveillantes
04:06 à propos d'un homme, de sa famille ou d'une institution sans s'engager.
04:11 Il se pourrait qu'on dit qu'est-il possible que l'utilisation du conditionnel,
04:17 qui est une méthode faussement prudente, qui sert en fait à multiplier les calomnies.
04:24 Et, je le redis, tout ça par l'argent public.
04:27 Ah oui, ce qui est pas mal aussi, mobilisation de témoins qui sont manifestement des anciens compagnons de route
04:34 qui étaient là il y a 25 ans et qui sont censés dire la vérité des origines de l'entreprise du Puy-de-Fou.
04:41 Et ils sont là pour nous dire, je vais vous dire à quel point c'est horrible tout cela.
04:45 On les sent souvent dévorés par le ressentiment, la jalousie.
04:51 Le cœur humain est un cœur avec plein de petites saletés.
04:54 Et là, c'est l'occasion pour plusieurs médiocres de prendre leur revanche
04:59 en cherchant à vomir ce qu'ils ont peut-être déjà adoré.
05:02 Tout ça pour dire que Complément d'Enquête ne cherchait pas la vérité, mais cherchait le scandale.
05:08 Et pour obtenir le scandale, Complément d'Enquête était prête à prendre tous les moyens nécessaires
05:12 pour en arriver justement à créer ce scandale, ce sentiment d'effroi.
05:15 Oh là là, le Puy-de-Fou c'est terrible. Je ne suis pas certain que le résultat soit atteint.
05:19 Alors, que reproche-t-on exactement au Puy-de-Fou?
05:22 Alors, deux choses pour l'essentiel. La première, c'est de miser sur les bénévoles.
05:26 Alors là, c'est assez fascinant parce que le Puy-de-Fou est effectivement une entreprise immense,
05:29 c'est une structure complexe où il y a des employés, il y a donc des professionnels, il y a des bénévoles.
05:34 Mais à travers tout ça, et puis la chose est assez clairement distinguée, c'est pareil.
05:39 Ce qui est assez fascinant dans ce procès, c'est qu'on ne comprend pas la psychologie du bénévole.
05:43 On ne comprend pas pourquoi des hommes et des femmes à peu près normalement équilibrés
05:48 voudraient se joindre à une entreprise comme le Puy-de-Fou.
05:51 Quelle est l'explication qui nous est proposée à demi-mot?
05:54 On nous présente les Puy-Follets, c'est le nom qui est donné aux gens qui participent à cette entreprise.
05:58 Globalement, comme des paysans arriérés un peu débiles qu'on attirait à la kermesse
06:04 en leur promettant du saucisson et du pinard.
06:07 On leur dit « Venez regarder ces... » et là c'est assez fascinant.
06:10 C'est sur le mot « Regardez ces attardés qui vont s'amuser à jouer aux chevaliers,
06:14 qui vont s'amuser à servir la cervoise, qui vont s'amuser... »
06:18 Et autrement dit, ce sont des débiles qui seraient conscrits par Philippe de Villiers,
06:21 qui seraient un exploiteur de pauvres personnes, de pauvres airs.
06:25 C'est absolument atroce ce que le documentaire ne parvient pas à comprendre.
06:30 C'est qu'il y a des gens qui sont quelquefois désireux de participer à quelque chose qui les dépasse,
06:35 de participer à quelque chose qui les inspire.
06:37 Et le Puy-de-Fou, pour ceux qui s'y rendent, ceux qui y participent,
06:40 c'est justement la possibilité de participer à la renaissance, d'abord de l'identité vendéenne,
06:45 mais aussi c'est une manière de participer...
06:48 C'est le grand contraire de l'époque, le grand contraste.
06:50 D'un côté il y a Mickey, et ainsi de suite, c'est très bien Mickey,
06:52 mais de l'autre côté, c'est le divertissement qui conduit à l'approfondissement.
06:55 C'est l'histoire, c'est la culture, c'est l'enracinement.
06:58 Et pour un esprit de gauche sectaire et médiatique, tout cela est incompréhensible
07:02 et relève presque de la démence.
07:04 En fait, pour ces gens, pour ce journalisme d'enquête version commissaire politique,
07:09 on est en fait devant des gens qui trouvent l'ivresse de la destruction.
07:13 Et c'est assez triste.
07:15 Ce qu'on reproche aussi, évidemment, c'est la dimension du symbole qu'est le Puy-de-Fou.
07:18 Donc de quoi est-il le symbole? Mais de l'histoire vendéenne.
07:21 De l'histoire vendéenne qui est le moment, l'acte inaugural de la tentation totalitaire dans la modernité.
07:26 C'est-à-dire, pourquoi est-ce qu'on veut dépopulationner la Vendée?
07:30 Alors je précise que dans le documentaire, il y a une contestation des massacres de Vendée,
07:34 ou alors ils sont nommés... Oui, il y en a, mais peut-on vraiment parler d'une volonté de détruire,
07:38 d'extermination? Non, c'est une guerre civile.
07:40 D'ailleurs, il n'y en a pas eu tant que ça. C'est assez fascinant.
07:43 Qu'est-ce que c'est la guerre de Vendée?
07:44 C'est quand même la volonté, c'est la scène inaugurale qui consiste à dire
07:48 que ces gens doivent disparaître parce qu'ils ne sont pas assez modernes.
07:51 Il y a la révélation des modernes qui dit que l'homme doit d'abord être l'homme des droits de l'homme
07:55 avant d'être l'homme de sa culture, de son pays, de son enracinement, de son bocage.
07:59 Le bocage inspiré de Philippe de Villiers, on pourrait dire ça comme ça.
08:02 Eh bien, on doit les détruire parce que ce sont des hommes qui refusent la prochaine étape de la modernité.
08:07 Ils témoignent d'un attachement à leur identité.
08:10 Donc on doit les détruire. Et c'est assez fascinant.
08:13 On peut dire que la révolte inaugurale des temps modernes, celle des Vendéens,
08:16 c'est la révolte d'un homme qui refuse d'être réduit à une abstraction.
08:19 L'homme abstrait les droits de l'homme.
08:21 Et la Vendée, de ce point de vue, c'est assez intéressant,
08:23 c'est le moment qui annonce plusieurs autres moments.
08:27 Ensuite, les coulacs, c'est-à-dire la liquidation des catégories sociales jugées périmées,
08:31 le bois mort de l'humanité, et aujourd'hui probablement, les peuples historiques d'Occident
08:35 qu'on voudrait faire disparaître symboliquement ou immoler symboliquement sur l'autel de la diversité.
08:42 Donc il y a une leçon vendéenne, une leçon universelle vendéenne en quelque sorte.
08:47 Et on ne le pardonne pas.
08:49 Philippe de Villiers trouve le moyen de plonger dans l'histoire de Vendée
08:52 pour féconder symboliquement et culturellement l'histoire de France.
08:55 On ne lui pardonne pas.
08:57 J'ajoute une chose qui me semble très importante.
08:59 Il y a, au plus du fou, une esthétique.
09:02 Une esthétique qui nous incite à aimer le beau.
09:04 Alors puisqu'on est dans une époque très particulière,
09:06 qui nous incite à toujours déconstruire davantage, à aimer le lait.
09:10 C'est ce fantasme aujourd'hui d'une humanité flasque,
09:13 une humanité en haillons, une humanité aux cheveux bleus, roses, mauves, tout ça.
09:18 Une humanité dans la déconstruction permanente.
09:20 Et le plus du fou dit, non, un instant, vous pouvez admirer, il y a une verticalité,
09:23 et vous pouvez admirer à travers cela l'histoire de France.
09:26 Et le plus du fou dit finalement, vous pouvez aimer l'histoire,
09:28 à travers l'histoire de la Vendée, vous pouvez aimer l'histoire de France.
09:31 Et ça c'est très important, je me permets de le dire à un dernier moment là-dessus.
09:34 Il y a ceux qui ont vu la Cinescémie.
09:37 Si on était Vendée, on pourrait se dire franchement, on n'a pas envie de pardonner.
09:40 Mais pourtant, au terme de la Cinescémie, il y a un moment de pardon.
09:43 Et c'est fascinant, c'est la réconciliation des deux Frances, si je peux me permettre,
09:47 par l'expérience des tranchées, 1914, mais au-delà de ça, c'est le pardon.
09:51 Le pardon qui féconde l'avenir, à bien des manières.
09:54 Donc c'est une histoire qui pousse à aimer la France,
09:57 qui pousse à trouver dans l'histoire de Vendée des leçons universelles,
10:02 qui pousse à aimer le beau.
10:03 On ne le pardonne pas ça à Philippe de Villiers.
10:05 Autrement dit, à vous entendre, on ne pardonne pas au Puy du Fou de chanter la France.
10:09 Et finalement, c'est un peu la même chose qu'on reproche hier au spectacle d'ouverture de la Coupe du Monde de rugby.
10:13 Absolument, absolument d'accord avec vous.
10:15 C'est ce qui s'est passé.
10:16 Alors qu'est-ce qu'on voit hier ?
10:17 On voit un spectacle qui enthousiasme tout le monde.
10:19 C'est la France de toujours.
10:21 C'est la France telle qu'on se la représente.
10:22 C'est la France qu'on vient, lorsqu'on vient de l'étranger, on vient en France.
10:25 On se dit, c'est ça la France, c'est ce qu'on veut voir en France.
10:28 Et là, tout le monde a aimé, sauf le village gaulois inversé qui s'appelle Libération,
10:34 qui propose une lecture dégoûtée de ce qui s'est passé hier.
10:38 Pour eux, c'était le contraire de ce que doit être la France.
10:40 C'est une France périmée, une France décatie, une France désuète, probablement une France d'extrême droite.
10:44 Le mot était dans l'article, évidemment.
10:46 Parce qu'aimer la France traditionnelle, la France de toujours, la France qui donne l'image de ce qu'a toujours été la France,
10:53 c'est vu comme une forme de pathologie régressive, inquiétante.
10:57 Et on comprend ce que serait la France idéale de Libé et de ceux qui ont détesté le spectacle d'hier.
11:02 C'est une France mi-Djellaba, mi-cheveux bleus.
11:05 Mais il nous est permis de le répondre non, merci, nous préférons la France portée hier par Jean Dujardin.
11:10 Entre le mépris pour les Puy du Fou et le mépris pour le spectacle d'hier soir, il y a derrière ça chaque fois le mépris de la France.
11:16 Arthur de Vatrigon, que vous évoque les propos de Mathieu Boquecôté, à la fois sur le Puy du Fou,
11:22 mais aussi, on le comprend, le parallèle avec cette cérémonie d'ouverture hier de la Coupe du monde de rugby.
11:26 Il a des propos, Mathieu a des propos durs.
11:29 Bon, après je le comprends, parce que la France, c'est un peu sa princesse.
11:32 Donc forcément, dès qu'un lombric débarque de nulle part, elle lui explique qu'elle est aussi repoussante qu'un autifa,
11:37 et aussi désagréable qu'une néo-féministe à cheveux blancs ou à cheveux bleus, ça énerve.
11:41 Après, il faut essayer de se mettre à la place du journaliste qui a fait l'enquête.
11:45 On lui a sereiné pendant des années que la culture, l'imaginaire, l'art, tout ça, c'est la propriété exclusive de la gauche.
11:52 On lui a expliqué que plus c'était laid, plus c'était classe.
11:56 Plus on déconstruisait, plus c'était intelligent.
11:58 On lui a expliqué en long, en large et surtout de travers que célébrer, c'était pas bien.
12:02 C'est un truc de catholique, c'est errance, tout ça.
12:04 Qu'il fallait mieux se flageller.
12:06 Flageller les autres aussi, tout en ricanant, surtout les pouilleux, tous ceux qu'on n'aime pas, le petit peuple, là.
12:12 On lui a expliqué aussi pendant des années, manuel scolaire à la pluie,
12:16 que la République était née de l'amour de son prochain, qu'on pouvait danser nue déguisé comme des licornes,
12:21 que les guêpes ne piquaient pas, que les petits anges ne partaient pas trop tard,
12:25 que les migrants débarquaient comme des rois mages en récitant de Victor Hugo.
12:29 Bref, que Charette était polysexuel, Charette le héros vendéen était polysexuel.
12:33 Tendance queer, qu'avant 89 c'était la préhistoire, que le panache, l'honneur, tout ça, ce sont des vieilles valeurs de collabos.
12:39 Et là on lui dit "vas-y, tu vas faire une enquête au puits du fou".
12:42 Vous imaginez le choc qu'il a, le type, c'est un monde complètement différent sur lequel il tombe.
12:46 Un parc d'attractions qui fait la nique et miquait, multi récompensés, record de spectateurs,
12:51 qui est beau, qui est épique, qui est positif, qui rend fier les gens, bref,
12:55 tout le truc qui va vous refiler le choléra à Libé en une seconde avec ça.
12:58 Parce qu'en fait pour eux, Villiers et Sarkly, ils ne respectent pas la règle.
13:02 La règle c'est quand on parle de la France, il faut lui cracher dessus.
13:05 Ça, ça s'appelle l'esprit France Inter, c'est un truc de rebelles là.
13:08 Il faut le faire sinon vous êtes blacklisté.
13:10 Et honnêtement, on voyait bien, vous savez, à la fin de l'émission, on le voit dans son fauteuil en train d'interroger,
13:14 un fauteuil rouge, donc on voit bien que le petit l'ombrique, là, dans son fauteuil rouge de roi Thelay,
13:18 il n'était pas très à l'aise. On sent que le journaliste, ce n'est pas sa vocation.
13:21 En fait, il aura préféré être contre l'or fiscal.
13:23 C'est pour ça qu'il prie dans sa passion et il dit oui, mais finalement, le statut de bénévole,
13:27 le statut de salarié, voilà, on sent que ses parents l'ont forcé à perpétuer cette tradition
13:31 du journaliste de gauche qu'on appelle un vendélateur.
13:34 Bon, il le fait malgré lui.
13:36 Bon, voilà, et on lui a refourgué en plus dans les pattes des historiens,
13:38 expert en massacre qui lui explique avec l'affirmant tel des Turcs,
13:41 non, il n'y a pas de génocide, ce n'est pas 300 000, c'est 200 000.
13:44 Il y a des erreurs, la preuve, par exemple, il décrive une scène où on voit une guillotine
13:47 qui se balade, une guillotine ambulante.
13:49 Oui, ça existe la guillotine ambulante, ce n'est pas un massacre.
13:52 Mais il y a des petits enfants qui sont derrière.
13:54 Oui, mais c'est faux parce qu'en fait, les enfants, ils n'ont pas été guillotinés.
13:56 J'avoue, là, c'est vrai, la tradition républicaine, c'est de balancer les gamins dans les fours à pain vivants.
14:00 Moi, je ne sais pas vous, mais entre se faire tronçonner par une lame un peu rouillée
14:04 ou finir en pizza, je préfère la première option encore.
14:06 Donc, je comprends qu'ils soient encore décontenancés parce que la réalité, c'est que cette gauche n'aime pas la France.
14:11 Ou elle aime la France uniquement quand elle est rabougrie, petite, coupable, quand elle est sale.
14:15 Et le pu du fou, justement, elle offre ce que la gauche a essayé d'offrir à une époque,
14:19 et ce qu'elle n'offre plus du tout, et ce qui rend fou, c'est d'être acteur.
14:22 C'est-à-dire, elle offre un rêve, elle offre un imaginaire.
14:25 Un imaginaire, justement, qui fait que c'est un phare qui illumine le monde
14:27 et qui fait qu'il y a peut-être encore des Français qui, un jour,
14:30 accepteront de mourir pour que ce phare reste allumé encore longtemps.
14:34 On va passer à votre deuxième édito.
14:36 Mathieu, vous nous proposez aujourd'hui un sujet un peu décalé de l'actualité.
14:39 Vous voulez revenir sur ce que vous appelez la police des amitiés et des déjeuners.
14:43 Ah oui, alors ça m'a obsédé.
14:45 En fait, la vérité, chère Amie, c'est que ça m'obsède depuis des semaines, sinon des mois.
14:49 Et je vais vous raconter quelques histoires.
14:51 Deux histoires, avant de conclure en me permettant un éloge de Jacques Julliard,
14:55 qui était le contraire de l'esprit sectaire qui domine aujourd'hui à gauche et dans les médias.
14:59 Mais, point de départ, l'histoire de tout le débat autour de Geoffroy Lejeune,
15:03 au moment de sa nomination au JDD, je crois en juin, si je ne me trompe pas.
15:07 Alors là, évidemment, Geoffroy Lejeune est annoncé.
15:09 Je ne reviens pas sur l'ensemble des insultes qui ont été lancées contre lui
15:12 et qui relèvent de la diffamation pure et simple,
15:14 qui relèvent encore une fois de la volonté de détruire,
15:16 d'une volonté de nous condamner à la peine de mort sociale,
15:18 d'une volonté de... En fait, c'est fascinant à gauche, c'est la passion du commissaire politique.
15:23 Mais, quoi qu'il en soit, je ne reviens pas sur les termes utilisés.
15:25 Mais je reviens sur une partie du procès qui lui est fait,
15:28 c'est le rapport de Geoffroy Lejeune à l'amitié.
15:31 Qu'est-ce qu'on lui dit? Premièrement, on dit, vous savez, Geoffroy Lejeune,
15:34 il a une bonne bouille, il a une tête sympathique,
15:37 ce type est capable de s'entendre avec tout le monde.
15:39 C'est vraiment, on dit de lui que c'est un bon ami.
15:41 N'est-ce pas la preuve qu'il est fourbe?
15:43 Parce que s'il a vraiment les idées qu'on lui prête,
15:47 qui étaient des idées monstrueuses, si je me fie à ce que je disais,
15:50 eh bien, son amabilité, sa gentillesse, sa courtoisie
15:54 ne serait que le masque, en fait, d'une nature fourbe et détestable,
15:58 et il faut pour cela l'exposer pour dévoiler qui est le vrai Geoffroy Lejeune,
16:03 qui serait enfin un personnage absolument infréquentable.
16:06 Donc ça, c'est toujours la théorie du masque.
16:09 Ces gens-là, ils utilisent le mot «extrême droite»,
16:11 ensuite, ils nous expliquent que ces gens-là se cachent,
16:13 l'extrême droite, entre guillemets, c'est une théorie démonologique.
16:16 La ruse du diable serait de faire croire qu'il n'existe pas,
16:19 la ruse de l'extrême droite, entre guillemets, serait de faire croire qu'elle n'existe pas,
16:23 et plus encore, de faire croire qu'elle est sympathique.
16:25 Alors là, de quelle manière on réussit à exposer Geoffroy Lejeune là-dedans?
16:28 D'abord, en mentionnant ses amitiés.
16:30 Et là, il y a la catégorie «Geoffroy se revendique ami de»,
16:35 ou «Geoffroy et certains sont amis avec lui».
16:37 Premier élément, c'est le concept «ami revendiqué de».
16:41 J'utilise vraiment ce concept parce que ça revenait toujours,
16:44 c'est par rapport à Marion Maréchal.
16:46 On disait «Geoffroy Lejeune, ami revendiqué de Marion Maréchal».
16:51 C'est assez fascinant comme formule.
16:53 Comme si une telle amitié était en fait le signe d'un esprit mauvais.
16:57 Quoi? Vous osez être ami avec cette personne?
16:59 Et pire encore, vous l'assumez comme si la personne en question,
17:02 Marion Maréchal, était indigne d'amitié, indigne d'appréciation,
17:05 comme s'il était insensé et illégitime de vouloir l'avoir comme amie.
17:09 Parce qu'elle est d'une telle nature, on suppose, vu les étiquettes qu'on lui colle,
17:12 qu'être ami avec elle, c'est déjà être coupable avec elle.
17:15 Donc on utilisait la police des amitiés, «ami revendiqué de».
17:20 Premier élément.
17:21 Ensuite, on a fait la traque aux amis de Geoffroy Lejeune.
17:24 Et ça c'est assez intéressant.
17:26 On a dit «Ha! Ha! Qui est ami avec lui?»
17:28 Et là on découvre qu'il y a des gens aussi qui sont classés comme de gauche.
17:31 Donc on a des «woe sound» ou des gens qui se contrefichent d'avoir une étiquette collée au front.
17:35 Ah là c'est embêtant parce que là on avait des petits spécialistes de la délation sur les réseaux sociaux,
17:39 mais dans les journaux qui disaient «cette personne, ce chanteur, cette personne, ce comédien,
17:44 cette personne, cet humoriste, sont-ils vraiment amis avec Geoffroy Lejeune?
17:47 Vous devez vous justifier, mes amis, justement de cette amitié.
17:51 Comment osez-vous le fréquenter?
17:53 Si vous le fréquentez, sachant qu'il est toxique, sachant qu'il est contaminant,
17:56 sachant qu'il est contaminé, sachant qu'il vous contaminera, êtes-vous vous-même déjà contaminé?»
18:01 Et là, donc il y avait cette idée, on faisait la liste des amitiés en poussant les gens à dénoncer publiquement
18:05 leur amitié avec Geoffroy Lejeune.
18:07 Autrement dit, si tu conservais ta place dans le système, dénonce ta place.
18:11 Et là il y en a un, j'aurais la politesse de ne pas le nommer, qui dit publiquement
18:15 «Oui, oui, je suis ami avec lui, mais pas autant qu'on le dit, parce que j'ai des amis de gauche,
18:20 de droite, de centre.» Alors, le type croyait s'en sauver.
18:24 Réponse des commissaires politiques et des tchekistes du moment,
18:27 «Ah, vous êtes un peu amis avec lui. Mais pourquoi vous êtes quand même un peu amis avec lui?
18:30 Qu'est-ce que ça dit sur vous? Est-ce que vous êtes un peu complice de l'extrême droite?»
18:34 Donc on était en ce moment dans la police des amitiés, et plus encore,
18:37 il y avait ensuite la police des dîners, et j'y arriverai dans un instant.
18:40 Donc on faisait la liste, où est-ce qu'on l'a vu déjeuner? Où est-ce qu'on l'a vu dîner?
18:43 Avec qui? Qui se tient avec lui sans gêne et sans honte?»
18:46 Autrement dit, il y avait cette idée qu'il fallait exposer intégralement de la vie de cet homme,
18:50 avec cette idée qu'il prenne dans la tête de nos amis journalistes de gauche,
18:53 que s'ils le sont exposé, tout le monde voudra s'en sauver,
18:56 parce que ce serait impensable d'être ami avec Geoffroy Lejeune.
18:59 Qu'on me permette, quant à moi, de dire que je suis ami revendiqué de Geoffroy Lejeune,
19:02 et j'espère que pour cela, nos amis de gauche m'en voudront pour longtemps.
19:06 Donc ça, c'était votre premier exemple, Geoffroy Lejeune.
19:08 Vous disiez que vous aviez une deuxième histoire à nous raconter.
19:10 Ah oui, Rachel Kahn, une de nos collègues, qui quelquefois on trouve sur les plateaux de CNews,
19:15 qui a écrit un très beau livre, « Racée », une femme de qualité.
19:18 Et là, elle s'en eut la controverse médienne, rappelez-vous.
19:21 Controverse assez particulière où, médienne avec sa subtilité,
19:24 de la qualifier de « resch... » comment on dit? « resch... » « kahn-pé ».
19:28 Autrement dit, jeu de mots sur subtil et nuancé, sur le fait que,
19:32 sur le parcours familial de cette femme, en disant globalement,
19:37 si on voulait une mot sur le mode exterminatoire.
19:40 Pour d'autres personnes, on les a poursuivies longtemps pour ça.
19:42 Quoi qu'il en soit, là, elle se défend et là, les gens disent « un instant ».
19:47 « Rachel Kahn, vous savez, elle a déjà déjeuné ou dîné avec Marine Le Pen. »
19:52 Là, elle répond « oui, d'accord, mais on m'a proposé de la rencontrer,
19:55 c'est une figure politique importante, je suis curieux de savoir c'est quoi son point de vue.
19:58 Quand je déjeune ou je dîne avec quelqu'un, ça ne veut pas dire que je suis d'accord avec cette personne.
20:01 Il est possible, vous savez, de déjeuner ou dîner avec quelqu'un,
20:03 sans être immédiatement contaminé, sans être hypnotisé, sans qu'il nous jette un sort.
20:07 Bon. Eh bien non, apparemment, la police des déjeuners et des dîners disait « ce déjeuner et ce dîner vous fait franchir la ligne rouge ».
20:13 Et là, plus encore, la pauvre, on lui reprochait, je me permets de le mentionner,
20:16 d'avoir eu une photo avec moi dans Paris Match,
20:18 au moment où on sortait tous les deux au livre sur à peu près le même sujet.
20:20 Alors, je précise que si on avait deux livres avec deux points de vue,
20:24 c'est qu'on n'était pas sur la même ligne.
20:25 Donc, c'était deux personnes qui sont d'accord sur certains points, en désaccord sur d'autres.
20:30 Eh bien, ces deux personnes, du simple fait qu'ils se soient connus un moment,
20:34 ça veut dire qu'ils se sont serrés la main, ils ont fait une interview ensemble,
20:36 eh bien, c'est bien la preuve qu'elle est contaminée,
20:38 parce qu'elle ose parler à ceux que l'on voudrait décréter « infréquentables ».
20:42 Alors, encore une fois, le principe de non-contamination s'appliquait.
20:45 La police des déjeuners, la police des dîners, la volonté de tuer socialement quelqu'un
20:49 en lui interdisant de voir d'autres, des gens qui ne sont pas marqués dans la secte de la gauche revendiquée.
20:55 Et vous nous dites aussi que l'amitié est possible entre gens de gauche et de droite.
20:59 Et vous voulez rendre hommage à Jacques Julliard, un grand intellectuel qui vient de nous quitter.
21:02 Oui, alors Jacques Julliard, 90 ans, je serai rapide pour donner la parole à Arthur,
21:06 mais un grand intellectuel, en effet, historien, journaliste, penseur,
21:10 qui avait... donc c'est un homme de gauche qui se revendiquait de gauche, j'insiste,
21:14 mais qui était d'abord un homme de liberté, un homme qui n'était pas sectaire,
21:18 un homme qui acceptait de débattre avec tout le monde, un homme qui acceptait de lire tout le monde,
21:22 qui avouait même ses lectures.
21:24 Donc, par exemple, c'est un lecteur des plus grands écrivains français,
21:27 mais c'était aussi un lecteur, par exemple, d'Alain de Benoît,
21:30 le philosophe associé historiquement à la Nouvelle-Droite,
21:33 et que dans le milieu de la gauche progressiste et mondaine, on prononce ce nom,
21:36 et c'est comme si on venait de prononcer «on est sorti de l'enfer».
21:39 Ben, il dit «non, c'est un auteur que je trouve intéressant sur certains points,
21:42 et je suis pas d'accord avec lui sur d'autres, mais j'accepte de le lire
21:44 parce que je ne reconduis pas le certificat d'interdiction sociale sur les gens
21:49 simplement parce que ma bonne réputation voudrait que je m'en tienne très loin».
21:53 Voilà un homme qui avait le sens de la liberté, de l'échange,
21:55 un homme avec une immense culture, et je voulais lui rendre échange
21:58 de ce point de vue, simplement, un homme qui avait le sens de l'amitié
22:01 et qui n'était pas sectaire.
22:03 Arthur de Vatrigo, un mot sur cette police des dîners et des déjeuners
22:06 que nous dénoncent aujourd'hui, Mathieu Bocote.
22:08 Je connais des gens de gauche qui ont des amis que je ne voudrais même pas avoir comme ennemis,
22:12 mais bon, ça c'est leur problème.
22:14 C'est assez fascinant, c'est d'avoir toujours ce côté binaire,
22:17 c'est que pour eux, on est entier, alors voilà, on ne peut pas avoir de séparation,
22:20 on ne peut pas penser quelque chose et avoir des amis autrement,
22:22 et tout est politique.
22:24 Ok, on sait que la gauche est cette gauche utopique
22:27 qui imagine pouvoir installer le paradis sur terre,
22:30 et donc à partir du moment où vous êtes certain de pouvoir,
22:32 ou en tout cas, vous pensez que c'est possible, vous êtes prêt à éliminer tout le monde,
22:34 y compris les tuer, d'abord socialement, puis après plus s'il le faut.
22:37 Mais ça c'est le problème de la gauche, moi ce que je ne comprends pas,
22:39 c'est pourquoi la droite s'est contentée trop longtemps de supporter son bon chez,
22:43 alors peut-être par politesse, peut-être par charité,
22:45 on voit quand même beaucoup plus en plus par lâcheté, par ignorance,
22:48 elle a même réussi à accepter d'endosser des crimes
22:51 qu'elle n'avait pas commis elle-même, ce qui est assez fascinant quand même,
22:54 jusqu'à être prête même à dénoncer son voisin en lui expliquant
22:56 "lui encore plus à droite que moi, lui encore plus puant, donc voilà, ça serait bien".
22:59 Rien de l'obliger la droite à être soumise,
23:01 surtout qu'on n'a pas de leçons pour les gens de droite
23:04 à recevoir d'une partie de la gauche qui a son lot de saloperies et d'horreur dans le XXe siècle.
23:09 Donc la gauche fasse ça ok, mais elle le fait parce que ça fonctionne,
23:13 la droite devrait en fait soit se dire "je m'en fiche",
23:16 soit leur répondre, mais en tout cas jamais se soumettre.
23:19 On marque une pause, on revient dans quelques instants pour la deuxième partie de Face à Boccote.
23:24 On recevra l'historien Olivier Dard, à tout de suite.
23:26 De retour dans la deuxième partie de Face à Boccote,
23:33 toujours avec vous Mathieu Boccote, Arthur Devat-Trigan,
23:36 et Olivier Dard nous a rejoint en plateau pour l'entretien qui va se dérouler d'ici quelques instants.
23:40 Mais d'abord c'est le point complet sur l'actualité avec vous Mathieu Devese, rebonsoir Mathieu.
23:44 Rebonsoir Thomas, bonsoir à tous.
23:46 Les messages de soutien se multiplient après ce terrible séisme au Maroc.
23:50 Le pape François a exprimé sa profonde solidarité avec, je cite,
23:54 "ceux qui sont frappés dans leur chair et leur cœur par cette tragédie".
23:58 Le bilan ne cesse de s'alourdir, plus de 1000 personnes sont mortes dans ce séisme de magnitude 7,
24:03 dont l'épicentre a été enregistré au sud-ouest de Marrakech.
24:06 Et sachez que la tour Eiffel sera éteinte ce soir à 23h en hommage aux victimes.
24:11 En Grèce, les inondations meurtrières frappent toujours le pays,
24:14 les pompiers, épaulés par l'armée, continuent de porter secours
24:18 aux centaines, oui centaines d'habitants de villages bloqués en Tessalie.
24:22 Ces intempéries ont fait jusqu'à présent 10 morts et plus de 2850 personnes ont été secourues.
24:28 Enfin, la vague de chaleur qui frappe la France est un épisode de canicule inédit.
24:32 14 départements du centre Val-de-Loire et d'Île-de-France restent placés en vigilance orange par Météo France.
24:38 Il s'agit de la première vigilance orange canicule déployée durant un mois de septembre,
24:43 et la mise en place de ce dispositif en 2004.
24:46 - Merci beaucoup Mathieu, et à tout à l'heure pour un nouveau point sur l'actualité.
24:50 Je le disais Mathieu, votre invité ce soir c'est Olivier Dard, historien.
24:54 Pourquoi ce choix ce soir d'inviter Olivier Dard ?
24:56 - Alors il y a un terme qui revient toujours dans l'actualité de manière répétitive, obsessionnelle,
25:01 c'est "extrême droite", "extrême droite", "extrême droite", "extrême droite",
25:04 et on vient à qualifier un peu tout et n'importe quoi.
25:06 Vous savez, rappelez-vous, le barbecue était d'extrême droite, le bacon était d'extrême droite,
25:09 le fromage était d'extrême droite, le général de Gaulle l'a déjà été,
25:13 ça a été le caljaxe Chirac, Marine Le Pen.
25:15 C'est un concept dont on abuse, et Olivier Dard est un historien tout à fait remarquable sur ces questions,
25:19 et le point de vue historique peut nous permettre quelques fois d'y comprendre un peu mieux.
25:23 Olivier Dard, bonsoir.
25:24 - Bonsoir.
25:25 - Alors je commence par une question qui n'a pas d'actualité, mais simplement à l'oreille.
25:28 Lorsque vous entendez, vous regardez les actualités et tout ça,
25:31 et vous entendez le terme "extrême droite" qui est lancé,
25:34 à quoi fait-il référence sur vous ? Qui comprenez-vous ?
25:36 - Si vous voulez, le terme, il est de toute façon chargé émotionnellement,
25:43 il est chargé polémiquement.
25:46 En règle générale, si vous voulez, l'extrême droite, le terme d'ailleurs d'extrémisme,
25:52 vise à disqualifier un adversaire, je dirais, quel qu'il soit,
25:55 et de ce point de vue, il y a l'extrême droite, mais il y a aussi ce qu'on peut appeler l'extrême gauche,
26:00 qui est aussi une nébuleuse.
26:02 Cela étant, le terme est aujourd'hui tellement employé qu'il est difficile d'aller quelquefois contre lui,
26:08 mais pour ma part, ce que j'essaye de faire, en particulier dans mes enseignements ou dans mes travaux,
26:14 c'est de ne pas forcément l'employer, et d'ailleurs assez rarement,
26:20 pour essayer bien davantage, dans l'histoire française en particulier, de le remettre à sa place.
26:27 C'est-à-dire que ce terme d'extrême droite, si on l'observe, aujourd'hui,
26:32 on constate qu'en règle générale, quand on va parler de l'histoire de l'extrême droite,
26:36 on va au fond parler de l'histoire, au XXe siècle, d'une mouvance, d'une famille de pensée,
26:43 ou d'une mouvance politique qui irait, pour faire simple, de l'action française,
26:48 de Charles Maurras jusqu'au Rassemblement national.
26:51 Cela étant, si l'extrême droite est associée au XXe siècle, dans les discours classiques, communs,
26:58 ce que l'on entend, ça ne veut pas dire qu'elle n'existe pas précédemment.
27:02 Et ce que je voudrais souligner, c'est qu'autant on peut discuter de la pertinence de l'emploi du terme,
27:08 avec la nécessité de le préciser pour le XXe siècle,
27:12 autant, si on regarde le XIXe siècle, il est beaucoup plus intéressant, beaucoup plus opératoire,
27:18 et de ce point de vue, vous parliez de l'histoire, des historiens,
27:22 un de mes collègues, je le cite, qui s'appelle Olivier Thor,
27:25 montre très bien que l'extrême droite existe, par exemple, à l'époque de la Restauration,
27:30 donc après 1830, c'est tout l'héritage du légitimisme qui s'oppose à la monarchie de Juillet,
27:37 aux orléanistes, et qui, évidemment, veut, tout en étant minoritaire,
27:42 et de plus en plus, d'ailleurs, marginalisé, revenir à une société d'ancien régime.
27:50 Donc il y a une extrême droite historique, c'est ce qu'on a pu appeler le légitimisme,
27:55 puisqu'on reprend la célèbre typologie des droites de René Rémond,
27:59 entre les légitimistes, les bonapartistes et les orléanistes,
28:03 simplement, ce légitimisme, il est déjà en difficulté, à partir des années 1830,
28:09 et au début de la Troisième République, lorsque le comte de Chambord, le prétendant,
28:14 finalement, va refuser, pour toute une série de raisons, et en particulier à cause du droit pro-blanc,
28:19 d'accepter le principe d'une Restauration qui ne serait pas une Restauration à l'intégrale de ce qu'il attendait,
28:26 et bien ce légitimisme disparaît très largement, et cette extrême droite historique disparaît,
28:32 et je dirais que c'est presque là la fin de l'histoire, sauf qu'avec le boulangisme,
28:37 la naissance des ligues, on va assister à autre chose.
28:40 - Et nous reviendrons au XIXe siècle dans un instant, mais j'aimerais revenir sur un terme que vous avez utilisé,
28:44 la formule est un terme qu'on utilise pour disqualifier, alors moi il y a un paradoxe qui m'intéresse toujours en la matière,
28:49 c'est que c'est un terme qui n'est jamais revendiqué, mais qui est toujours utilisé pour décrire,
28:54 bon, en fait, il est utilisé avec une certaine insistance pour décrire partis, courants, mouvements,
28:59 mais il n'est jamais revendiqué. Est-ce qu'il n'y a pas un problème à utiliser ainsi un tel concept,
29:04 qui est censé décrire une famille politique, mais qui est contesté par tous ceux à qui on la colle ?
29:08 - Oui, c'est vrai. C'est vrai qu'ils ne l'ont jamais revendiqué.
29:13 D'ailleurs, pour un certain nombre d'entre eux, ça peut se comprendre, on parlait il y a un instant du boulangisme,
29:21 est-ce que le boulangisme peut même être qualifié de mouvement de droite ?
29:25 On peut tout à fait en discuter, et à partir de là d'ailleurs, ce qui est intéressant,
29:30 c'est que cet extrême droite, ce terme d'extrême droite n'est pas revendiqué.
29:34 On la colle d'ailleurs souvent à un autre, à un terme qu'on n'a pas encore cité depuis le début de notre échange,
29:40 qui est le terme de populisme. Souvent, on va parler d'une extrême droite populiste.
29:45 Le terme de populiste a pu être revendiqué, notamment à un moment par Marine Le Pen,
29:49 mais le terme d'extrême droite, jamais. Alors je dirais que c'est presque, quelque part,
29:54 historiquement intéressant, parce que souvent, un certain nombre de termes qui ont été,
29:58 qui ont pu être lancés contre des adversaires, ont pu être repris par ces derniers et réutilisés par eux-mêmes.
30:04 Un des exemples les plus célèbres, c'est Maurice Barrette attaquant les intellectuels au moment de l'affaire Dreyfus,
30:10 et les intellectuels mis en cause réagissant et reprenant le terme à leur compte.
30:14 Alors vous mentionnez, c'est une chose assez intéressante, vous nous dites la première signification de l'extrême droite historique,
30:18 c'est la nostalgie de la société d'ancien régime, donc hiérarchisée, une société qui n'est pas fondée sur la mystique du peuple.
30:24 Vous évoquez Boulanger, on peut dire national-populisme, mystique du peuple, nationalisme,
30:30 j'utilise le terme de manière non péjorative, mais on ne parle déjà plus de la même chose.
30:35 C'est-à-dire, d'un côté, il y a la volonté de revenir avant 89, l'autre, c'est de refonder la politique sur le mode plébiscitaire.
30:40 Est-ce que l'idée d'inscrire une continuité à travers tout ça, ça ne fonce pas la lecture de l'histoire ?
30:45 C'est tout le problème. C'est tout le problème, et sans vouloir tenir un discours qui serait trop universitaire,
30:51 mais c'est tout le problème, si vous voulez, de la très célèbre typologie de René Raymond,
30:56 entre les bonapartistes, les légitimistes et les orléanistes.
31:00 René Raymond souvent considérait que le boulangisme était une forme d'héritage du bonapartisme.
31:05 Le problème, c'est que ça ne suffit pas, puisque le boulangisme a pu d'ailleurs être soutenu par certains éléments monarchistes,
31:12 et puis surtout, c'est que ce boulangisme, il marque l'avènement des masses dans le jeu politique.
31:19 Et effectivement, le rapport au populisme est ici, à mon avis, particulièrement intéressant.
31:25 Et un de mes collègues, Bertrand Jolie, qui vient de consacrer une somme au boulangisme,
31:30 il voit effectivement un mouvement de type populiste. Et là, ça me paraît beaucoup plus intéressant,
31:34 car n'oublions pas qu'un certain nombre de boulangistes, et d'ailleurs les fondateurs du mouvement,
31:38 quel est leur objectif ? Ce n'est pas du tout de rétablir la monarchie,
31:42 et même, il n'y a plus de chambord, mais c'est une monarchie de type orléaniste.
31:47 Leur objectif, c'est de refonder et de régénérer une république qui est jugée pour eux défaillante.
31:54 C'est la république parlementaire, c'est la république de Jules Ferry, et ils souhaitent régénérer cette république,
32:01 en faire une république beaucoup plus césarienne, et mettre en avant effectivement un certain discours nationaliste,
32:07 à travers le primat de la revanche sur l'Allemagne, après la défaite de 1870.
32:14 Et donc, on est effectivement, entre les légitimistes d'un côté et le peuple boulangiste parisien de l'autre,
32:20 ou les élites boulangistes, on est dans des milieux et dans des logiques tout à fait différentes.
32:24 Alors, Arthur de Matrigan, et ensuite nous passerons au XXe siècle.
32:28 Justement, à cette époque, alors si on reprend toujours, parce que c'est toujours facile,
32:33 orléaniste, légitimiste, bonapartiste, vous avez dit que l'extrême droite, c'était légitimiste,
32:36 mais elle n'a pas duré très longtemps. Est-ce qu'il y avait une différence de degré, ou une différence de nature ?
32:41 Soyons clairs, c'est une différence de nature.
32:44 Alors, là aussi, c'est compliqué, parce que toute l'histoire des droites,
32:50 et d'ailleurs, ce qui est intéressant, c'est le pluriel.
32:53 Au départ, Raymond lui parlait de la droite en France,
32:55 au-dessus qu'il a parlé des droites, et il existe effectivement des droites, au moins trois,
32:59 voire davantage, un de mes collègues, Gérard Hichard, lui, en est monté jusqu'à dix.
33:02 Bon, qu'importe, mais effectivement, il y a trois, au moins au sein de ces trois droites,
33:07 on est dans des natures différentes.
33:09 Alors, ça ne veut pas dire qu'il n'y ait pas des formes d'intersection.
33:12 Par exemple, chez les orléanistes, vous pouvez avoir, et vous avez vu d'ailleurs très longtemps,
33:16 des tenants de la monarchie constitutionnelle,
33:18 mais ils vont finalement très bien s'accommoder de la République parlementaire.
33:23 Et ce qui caractérise justement la naissance du nationalisme,
33:28 la naissance de cette droite nationale ou nationaliste,
33:33 c'est le fait qu'elle est opposée, à partir des années 1880, à la République.
33:38 Ou plus exactement, elle va être fondamentalement opposée à la République parlementaire,
33:44 à ce régime de la Troisième République tel qu'il s'est construit,
33:48 à travers les lois constitutionnelles de 1875,
33:52 l'avènement du parlementarisme avec la crise bien célèbre du 16 mai 1877,
33:58 où finalement toute perspective de restauration monarchique est à ce moment-là, évidemment, clairement évacuée,
34:03 mais où aussi on affirme le primat du Parlement dans les institutions,
34:06 et ensuite, face au boulangisme, c'est la République parlementaire qui l'emporte.
34:10 Et là, au sein même du nationalisme, de cette droite nationaliste,
34:14 n'oublions pas qu'il y a un conflit entre deux logiques là aussi.
34:17 Une logique à la Barès, qui est finalement un héritier, un grand admirateur de Napoléon,
34:24 et là il y a une dimension césarienne très importante,
34:26 et Barès, lui, finalement, est boulangiste, il a été député boulangiste.
34:32 C'est un homme, l'écrivain Barès, qui rêve d'un homme providentiel qui pourrait être un chef, etc.
34:39 D'où, évidemment, la affiliation Bonapartiste.
34:41 Si on songe à celui qui fut son ami, mais qui politiquement est quand même très différent de lui sur ce plan-là,
34:46 tout en étant nationaliste Charles Maurras, on est dans une toute autre logique,
34:50 parce que là on a un mélange d'héritage légitimiste, d'un côté,
34:54 et, pour le coup, aussi de mouvements protestataires des années 1880,
35:01 à l'heure évidemment où les masses jouent un rôle infiniment plus important qu'elles ne le jouaient à la chute de l'ancien régime.
35:07 Alors basculons au 20e siècle, et je dirais dans la deuxième moitié du 20e siècle, un moment très particulier.
35:12 1958, le général de Gaulle revient au pouvoir.
35:15 Et dans la rue, il y a la gauche, et la gauche, qu'est-ce qu'elle dit?
35:18 Le fascisme ne passera pas.
35:20 Qu'est-ce qui s'est passé entre-temps? C'est que le concept d'extrême droite s'est redéfini,
35:24 et il sert globalement à désigner, vous me corrigerez si je ne me trompe pas,
35:27 globalement, il désigne soit les restants de l'ancien monde, et surtout les vaincus de 1945.
35:32 Donc comment, par exemple, dans le cas de Gaulle en 1958,
35:35 l'utilisation du concept de fascisme peut-elle en venir être utilisée par une partie de la gauche
35:40 pour désigner un homme qui, à ce qu'on en sait, n'avait pas témoigné d'une grande complaisance à l'endroit du fascisme?
35:44 Alors, trois choses, trois compléments par rapport à ce que vous dites.
35:47 La question du fascisme et de la mise en cause du fascisme, ça précède de très loin 1958,
35:55 c'est finalement tout l'entre-deux-guerres.
35:58 Les droites nationales ou nationalistes ligueuses sont régulièrement qualifiées de fascistes.
36:04 Donc, de ce point de vue, on parle beaucoup moins d'extrême droite que du fascisme,
36:07 alors avec un fascisme qui, là, peut être effectivement très extensif en fonction des contextes et des mouvements.
36:13 Deuxième élément, la mise en cause du général de Gaulle comme fasciste, elle n'attend pas 1958.
36:19 Lorsque le général de Gaulle crée le rassemblement du peuple français en 1947, il est,
36:25 alors qu'effectivement, vous le rappeliez, si quelqu'un s'est quand même opposé au Reich, etc.,
36:30 bon, et au fascisme, c'est quand même bien lui, mais justement, comme il remet en cause la logique républicaine,
36:37 alors on n'est plus sous la Troisième République, mais on est sous la Quatrième,
36:40 mais de ce point de vue, il y a une filiation, évidemment, entre ces régimes,
36:43 et donc, en particulier, quant au parlementarisme, il veut un régime fort avec un État fort,
36:49 et cette tradition républicaine s'y oppose, il est, à ce moment-là, qualifié de fasciste.
36:53 Alors, ça pose d'ailleurs des problèmes, et en 1958, alors là, ça joue d'autant plus
36:58 qu'on est dans un contexte où le régime est en train de s'effondrer,
37:01 et où, en plus, il y a l'armée qui n'est pas loin, au milieu des problèmes du 13 mai 1958,
37:07 et effectivement, le général de Gaulle se voit mis en cause, se voit mis en cause,
37:11 mais, vous le savez, et nos téléspectateurs le savent, il retourne à sa façon l'accusation,
37:17 avec notamment l'ironie qu'on lui connaît sur le, comment dire, ses 77 ans,
37:24 et le fait qu'il n'envisagerait pas une carrière de dictateur.
37:28 Alors, je nous conduirai ensuite, évidemment, vers les années présentes,
37:31 mais une dernière étape intermédiaire, Fascho-Chirac.
37:33 Vous me direz que c'est un détail dans l'histoire,
37:35 mais je trouve que c'est assez intéressant pour présenter l'homme qui était l'héritier du gaullisme,
37:38 qui dirigeait le RPR à l'époque, parce qu'on lui reconnaissait une forme de menton patriarcal,
37:43 et parce qu'il avait une forme de dégaine très masculine, et bien, finalement, c'était Fascho-Chirac.
37:47 Est-ce qu'à partir du moment où ce terme est utilisé à la fin des années 70,
37:50 il perd toute signification, on pourrait dire, il sert à décrier plutôt qu'à décrire,
37:55 il n'a plus aucun contenu idéologiquement identifié?
37:58 Dans le cas de Chirac, effectivement, c'est extrêmement intéressant
38:01 de voir les différentes images qui ont été celles de Jacques Chirac.
38:06 C'est d'autant plus intéressant, d'ailleurs, que si on regarde de près l'histoire du RPR
38:11 et de son grand rival, qui était l'UDF,
38:15 si, entre guillemets, des gens d'extrême droite avaient pu participer à la vie politique dans les années 70...
38:22 C'est un mensage à l'UDF pour le RPR.
38:24 Il l'avait quand même fait en 1974, en soutenant la candidature de Valéry Giscard d'Estaing,
38:28 d'ailleurs, plutôt que celle de Jean-Marie Le Pen à l'époque.
38:31 Donc, effectivement, il y a ici, dans le contexte de l'après 68,
38:36 dans la personnalité de Chirac, dans ce qu'est le RPR,
38:40 dans son souci, effectivement, dans le souci du RPR de cette époque,
38:44 de mettre en avant la figure d'un chef, il y a effectivement cette histoire, ce rejet.
38:50 Et j'ajouterais, et vous m'y faites penser,
38:52 que ce qui est très intéressant dans le discours du rejet de l'extrême droite ou du fascisme,
38:58 y compris appliqué à De Gaulle ou à Chirac,
39:01 c'est qu'il y a bien souvent le rejet de l'homme fort.
39:05 Et de ce point de vue, la question républicaine est fondamentale.
39:10 Il y a un héritage historique dont on n'a pas parlé, mais qui est très important
39:15 et dont l'empreinte a été très durable, c'est l'empreinte du Second Empire.
39:19 Le césarisme, Louis-Napoléon Bonaparte, Napoléon III, détesté par le monde républicain,
39:25 même si le personnage de Napoléon III a pu être réévalué récemment par les historiographies,
39:29 notamment par Eric Onsow, mais de ce point de vue,
39:32 l'image d'un danger césariste, d'un danger de coup d'État, c'est une image qui traîne,
39:37 et jusqu'au général De Gaulle, et bien sûr, Chirac, de ce point de vue,
39:41 comme héritier, se retrouve mis en cause.
39:43 - Sur les temps présents, Arsaud Le Matrigan.
39:45 - Justement, si on parle d'aujourd'hui, en regardant ce que vous avez décrit tout à l'heure
39:50 en expliquant qu'il y avait une différence de nature,
39:53 aujourd'hui on n'a pas l'impression qu'il y ait une différence de nature
39:56 entre, disons, les républicains, une partie du RN, une partie de reconquête.
40:01 Je veux dire, il semblerait tous appartenir, que ce soit plus une différence de degré,
40:06 et que chacun des partis soit plus axé sur un point plutôt que sur un autre,
40:10 mais qu'au final, ils appartiennent tous au même champ.
40:12 - Alors, c'est effectivement intéressant à observer.
40:16 Il y a les dimensions programmatiques, bien sûr,
40:18 avec la volonté, malgré tout, des appareils de se distinguer les uns des autres,
40:24 mais il y a aussi l'attitude des électeurs.
40:26 Et effectivement, on voit bien, dans un certain nombre de territoires,
40:30 et notamment dans le sud de la France, qu'il y a tout un électorat fongible
40:35 qui peut passer d'un candidat à un autre,
40:38 et on voit d'ailleurs, de façon assez intéressante,
40:40 comment des individus ont pu être élus sous différentes étiquettes.
40:44 Alors, simplement, il y a un élément qui me paraît très important, peut-être,
40:48 à mettre en avant ici, c'est, pour le coup, l'effondrement des partis de gouvernement.
40:55 Et le fait que, et c'est le drame sans doute de LR,
40:59 quand on voit LR avec une candidate qui est à moins de 5% à l'élection présidentielle,
41:05 c'est un séisme, il y a le Parti Socialiste d'un côté, il y a LR de l'autre.
41:09 Je dirais que quand il y avait deux grands partis,
41:11 parce qu'on parle aujourd'hui de l'extrémisme, y compris d'ailleurs de l'autre côté,
41:14 parce que c'est intéressant aussi de songer à la France insoumise, etc.
41:17 N'oublions pas qu'il n'y a plus de grands partis de gouvernement
41:20 qui sont en mesure d'absorber un certain nombre de marges
41:24 et de proposer aussi des débouchés à des individus qui veulent faire de la politique.
41:29 Donc on est dans une situation, de ce point de vue, inédite,
41:32 mais j'ajouterais que ce qui est peut-être le plus inédit,
41:35 et là nos téléspectateurs ne s'en rendent peut-être pas compte,
41:38 c'est que si on regarde cette histoire dans la durée,
41:41 c'est-à-dire si on l'apprend du boulangisme, si vous voulez,
41:44 Troisième République jusqu'à aujourd'hui,
41:47 c'est quand même la première fois, déjà d'ailleurs avec Jean-Marie Le Pen,
41:50 c'est la première fois qu'une organisation, en l'occurrence le Front National,
41:55 depuis le Rassemblement National, marquée ou considérée comme d'extrême droite,
42:00 réussit, sur le plan électoral, à s'implanter durablement,
42:05 à obtenir des scores qui n'ont jamais été obtenus par le passé.
42:10 C'est quand même tout à fait stupéfiant.
42:12 Ça c'est quand même une véritable nouveauté,
42:15 avec en même temps, troisième élément, l'absence derrière elle,
42:20 derrière cette force politique, d'intellectuels de renom ou de journalistes de renom,
42:25 comme ça avait été le cas pendant toute la Troisième République.
42:28 On parlait de l'Action française, de Barès, de Maurras, etc.
42:31 Vous aviez des gens qui défendaient un certain nombre d'idées,
42:35 mais il n'y avait pas forcément de débouchés politiques et partisans.
42:38 Aujourd'hui, il y a incontestablement un débouché politique-partisan électoral,
42:42 mais il y a une déficience de l'autre côté.
42:45 Il nous reste moins de deux minutes.
42:47 Question toute simple sur l'usage actuel du concept d'extrême droite.
42:51 Est-ce qu'il décrit encore quelque chose ou,
42:54 évidemment c'est une hypothèse que je vous soumets, vous me dites ce que vous en pensez,
42:58 il sert généralement à nommer ce que la gauche déteste fondamentalement.
43:02 C'est-à-dire à partir du moment où la gauche est contestée non plus seulement dans ses moyens,
43:05 mais dans ses objectifs, elle en vient presque inévitablement à extrême-droitiser son adversaire.
43:09 Oui, mais je ne suis pas sûr que ce soit d'ailleurs uniquement la gauche, de ce point de vue.
43:13 Je pense que l'étiquette est commode, mais l'étiquette est commode comme est commode l'étiquette de populiste.
43:20 Et de ce point de vue, je dirais que c'est un peu une forme sans doute de faiblesse.
43:24 Et c'est ce qui a d'ailleurs peut-être aussi permis au Front national,
43:28 puis au Rassemblement national de progresser.
43:31 C'est-à-dire que pendant très longtemps finalement, ils ont été ostracisés.
43:34 Jean-Marie Le Pen a beaucoup joué et de quelle façon, y compris par la provocation, etc.
43:39 sur cet ostracisme, sans que des propositions qu'il pouvait effectuer puissent être prises au sérieux.
43:46 Et de ce point de vue-là, le refus de les prendre au sérieux et de se contenter de l'anathème,
43:52 à mon avis, sur le plan politique, n'est pas forcément ce qu'il y a de plus profitable à terme pour ceux qui veulent les combattre.
43:58 Il nous reste 30 secondes. Alors ce concept aujourd'hui, c'est un repoussoir toujours aussi efficace qu'auparavant ?
44:03 Je ne pense pas. Je ne pense pas moins qu'avant. Les temps ont changé.
44:08 L'antifascisme, effectivement, parce que là aussi, il y a toute une histoire.
44:13 L'antifascisme a été sans doute plus mobilisateur qu'il ne l'est.
44:18 Et de ce point de vue, au Rassemblement national, Marine Le Pen n'est clairement pas son père
44:23 et n'éveille pas le même rejet que pouvait inspirer Jean-Marie Le Pen,
44:30 qui lui, vient d'une histoire qui est très directement, on pourrait en parler plus longuement,
44:35 qui est véritablement l'histoire des droites nationales et nationalistes.
44:40 Jean-Marie Le Pen, de ses débuts jusqu'à la fin, est un véritable vecteur.
44:45 C'est une figure absolument essentielle de cette histoire.
44:49 Merci beaucoup Olivier Dard d'avoir été avec nous. C'était absolument passionnant votre entretien.
44:53 Merci beaucoup à Arthur de Vatrigan. Merci à vous Mathieu de Boconnex.
44:56 Ça a été un vrai plaisir pour moi de partager cette émission avec vous.
44:59 Je vous donne rendez-vous dans quelques instants pour l'heure des pro 2.
45:02 Le week-end, on reviendra notamment sur les polémiques autour de la coupe du monde de rugby.
45:06 La France a gagné, oui, mais les Grincheux sont de sortie. A tout de suite.
45:10 [Musique]