Emmanuel Kessler, directeur des rédactions économiques chez Prisma Média, répond aux questions d'Alexandre Le Mer à l'occasion du vendredi thématique "Immobilier, du rêve au cauchemar".
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00:00 - Europe 1, il est 6h41, le vendredi thématique de la rédaction d'Europe 1, premier de cette saison, consacré aujourd'hui à
00:06 l'immobilier entre rêve et cauchemar pour les propriétaires Europe 1, partenaire du numéro spécial immobilier du magazine Capital,
00:13 disponible en kiosque. Votre invité, Alexandre, c'est Emmanuel Kessler, directeur des rédactions économiques de Prisma Média et donc du magazine Capital.
00:21 - Bonjour Emmanuel Kessler. - Bonjour.
00:23 - D'abord l'état du marché immobilier pour cette rentrée,
00:26 enfin la baisse, lit-on à la une de votre dossier, j'ai envie de dire enfin du positif quand on parle d'immobilier, ça veut dire que
00:32 le marché est en train de se retourner ou c'est trop tôt pour le dire ? - Non, c'est vraiment, on assiste cette année, je crois,
00:37 à un point de rupture, c'est le grand retournement du marché. Songez que depuis huit ans, les prix
00:43 augmentaient d'à peu près, ont augmenté de 30% et là pour la première fois on est à la baisse.
00:49 Sur 2023, nous c'est un numéro qui a mobilisé 15 journalistes, on a parcouru la France, il y a 7 éditions régionales,
00:56 on a interrogé 500 agences immobilières.
00:58 Tendance 2023, baisse en moyenne, c'est une moyenne d'environ 5% des prix et la tendance qui se dessine pour
01:07 2024, c'est des baisses de 5 à 10%, voire dans certaines villes,
01:11 jusqu'à 15 ou 17% comme à Bordeaux par exemple.
01:15 - C'est pas neutre du tout, alors vous l'avez dit, dossier très riche, effectivement très complet, vous avez compilé des milliers de données, première observation
01:21 naturellement, la baisse des prix de l'immobilier
01:25 n'est pas uniforme, Emmanuel Kessler, quelles sont les villes justement où les baisses sont les plus marquées ?
01:29 - Alors les baisses, elles vont être les plus marquées à Paris, Lyon, Nantes où on s'attend l'an prochain à des baisses jusqu'à 10%,
01:37 à Lille, à Bordeaux jusqu'à 15% l'année prochaine.
01:41 Mais il faut dire qu'à Bordeaux, dans les 20 dernières années, les prix avaient augmenté 300% si vous voulez.
01:47 - Oui donc on venait de très haut.
01:49 - C'est pas un krach immobilier,
01:51 on sort d'une période de hausse démentielle, alors regardez à Paris ça a été fou et donc simplement ça s'assagit et ça baisse
01:58 et ce qui est intéressant c'est que ça donne un peu plus de pouvoir aux acheteurs pour négocier des prix à la baisse.
02:04 Mais on va peut-être y venir, tout ça c'est la bonne nouvelle, la mauvaise nouvelle c'est que néanmoins le pouvoir
02:10 d'achat immobilier des français, il est loin d'être à la hausse parce que cette baisse ne suffit pas à compenser
02:17 la hausse des taux.
02:19 - Ce n'est qu'un début de rattrapage.
02:20 - Oui, c'est un début de rattrapage et il y a un phénomène qui est énorme,
02:24 qui d'ailleurs explique cette baisse, c'est qu'en fait
02:27 historiquement les taux d'intérêt pour emprunter, pour acheter son appartement, pour acheter une maison
02:33 n'ont jamais progressé aussi rapidement dans l'histoire que ce qu'on a vu. Il faut songer qu'en un an et demi
02:40 on est passé, si vous alliez voir votre banque pour emprunter,
02:43 sur 20 ans à peu près, des taux de l'ordre de 1%. L'argent était quasiment gratuit, c'était quasiment offert, vous aviez vraiment
02:50 intérêt à emprunter, à plus de 4% aujourd'hui. On va avoir là maintenant des dossiers à 5%.
02:55 Vous avez vu que la Banque de France vient de relever son taux d'usure à 5,5%.
02:59 Et donc la réalité c'est que malgré la baisse des prix, les français perdent du pouvoir d'achat immobilier.
03:06 - Bon et tout ça, ça ne va pas s'arrêter. Le parcours du combattant de ce point de vue sur les taux d'intérêt ne fait que commencer.
03:11 - Oui, vous avez raison, c'est un parcours du combattant. Je vais vous donner un exemple qui est simple. Pour 1000 euros,
03:17 vous pouviez emprunter il y a un an et demi sur 20 ans pour acheter un appartement qui en valait à peu près 220 000.
03:24 Aujourd'hui pour 1000 euros, si vous voulez rembourser 1000 euros par mois, voilà, je vous dis que ma mensualité
03:29 idéale c'est 1000 euros par mois, vous pouvez plus mobiliser 220 000 euros, c'est passé à
03:34 170 000. Donc ça devient de plus en plus difficile. Et ce qu'on note dans Capital, c'est que notamment pour ceux qu'on appelle les
03:41 primo-accédants, ceux qui veulent acheter leur résidence principale,
03:45 maison, appartement pour la première fois, c'est un vrai parcours du combattant. Il y a
03:50 40% des dossiers qui sont refusés par les banques. Ça devient vraiment très compliqué. - Vous avez cette double page très très concrète,
03:57 très bien faite dans votre numéro spécial de Capital, Emmanuel Kessler, "Décrocher la meilleure offre"
04:03 avec plusieurs profils de candidats à l'achat. On voit bien
04:06 selon les revenus les différentes capacités d'emprunt, on a une idée du taux d'emprunt, de la durée du prêt.
04:12 Vos conseils à Capital justement pour permettre de décrocher un prêt malgré toutes les difficultés actuelles.
04:17 - Alors d'abord le premier conseil, c'est comme je vous le disais, le pouvoir pendant longtemps il a été aux vendeurs qui imposaient leur prix,
04:24 maintenant les acheteurs peuvent négocier. Et là on a beaucoup de témoignages dans les agences
04:28 de biens qu'ils trouvent pas preneurs et
04:30 les agences nous disent "bah écoutez les vendeurs ils vont finir par être obligés de s'aligner, de baisser de 10-15%". Donc il faut
04:36 négocier, il faut pas être trop... voilà, il faut y aller, il faut faire des propositions.
04:39 - On a une bonne marge à la baisse possible.
04:41 - On a une bonne marge à la baisse possible d'au moins 10, parfois 15%
04:44 à Bordeaux qui avait monté de façon stratosphérique, je vous dis il y aura des baisses de 17%.
04:49 Ça c'est le premier conseil. Le deuxième c'est de faire jouer la concurrence entre les banques.
04:53 Et un troisième conseil c'est de faire jouer la concurrence sur l'assurance. Parce que vous savez qu'il y a une nouvelle
04:58 disposition qui permet de détacher l'assurance emprunteur de l'emprunt immobilier pur,
05:05 soit au moment où on conclut le prêt, soit même après. Et là on peut faire des économies très importantes sur la durée d'un prêt,
05:11 on peut faire jusqu'à
05:13 17 000 euros en moyenne, on a des exemples d'économies. Donc il faut vraiment faire jouer la concurrence,
05:19 regarder cette question de l'assurance.
05:21 Si vous concluez un prêt, que vous avez eu un taux d'assurance qui n'est pas terrible, vous pouvez maintenant changer d'assureur quand vous le voulez.
05:27 Donc ça c'est quand même, il faut vraiment
05:32 regarder l'ensemble des facteurs. Et il y a un métier qui redevient un peu à la mode, c'est celui de courtier.
05:37 Voilà parce que les courtiers, vous leur payez une commission, mais en fait ils regardent la totalité des offres et vous obtiennent la meilleure, et au final vous êtes gagnant.
05:45 - Les banques demandent un apport personnel de plus en plus élevé. Quand on a la chance d'en profiter, bien sûr on fait jouer la solidarité
05:51 familiale, l'intergénérationnelle, les dons ou les prêts familiaux. Mais là vous dites attention,
05:56 attention aux conditions.
05:59 - Bah il faut, évidemment, en ce qui concerne
06:02 les dons que vous pouvez avoir de vos familles, de vos parents, la législation est assez
06:08 stricte, donc il y a des limites qui sont données. Et il faut effectivement
06:14 faire
06:17 très attention
06:19 lorsqu'on mobilise son crédit à son taux d'endettement global. Parce que si on
06:26 dépasse les 30% d'endettement, la banque peut vous refuser le prêt. Donc c'est vrai qu'aujourd'hui, si vous voulez, la grande
06:33 difficulté, moi je le constate en lisant, c'est pour ceux qui achètent pour la première fois,
06:37 les banques qui demandaient en moyenne 10% d'apport personnel,
06:41 elles demandent maintenant en moyenne 20% d'apport, donc il faut avoir épargné. Elles aiment bien que vous ayez à côté
06:47 de votre salaire de l'épargne, donc ça devient quand même de plus en plus difficile. Et donc
06:53 c'est les personnes âgées qui ont déjà des résidences principales qu'ils peuvent acheter, revendre, qui sont favorisées,
07:00 mais pour ceux qui sont dans la vie active, qui ont des salaires un peu justes, c'est très difficile. La bonne nouvelle en revanche,
07:06 c'est comme je vous le disais, les prix baissent, qu'on peut négocier, et qu'il y a quand même des villes, il y a quand même des bons plans.
07:11 On les cite, par exemple à Grenoble.
07:14 En centre-ville, ça reste un peu cher, mais vous avez dans l'agglomération
07:18 des communes limitrophes qui sont sympas, des bons quartiers. Il faut vraiment regarder. Nous, on donne des cartes
07:23 vraiment très localisées, quartier par quartier. Vous avez toujours des bons plans à dénicher, il faut prendre le temps,
07:28 il faut aller dans les agences, il faut regarder.
07:30 Le marché immobilier en France n'est pas uniforme, c'est une multitude de marchés, et donc il faut être très offensif et
07:38 passer du temps pour trouver le bien de ses rêves. - En tout cas, voilà le message qu'on va retenir grâce à vous, Emmanuel Kessler,
07:43 et à ce numéro spécial de Capital. Le début du retournement du marché de l'immobilier, un début de rattrapage à la baisse,
07:47 la possibilité pour les acheteurs de négocier à la baisse jusqu'à 10 à 15 %.
07:52 Avec ce numéro spécial immobilier de Capital, donc tous les bons conseils, il est disponible dès maintenant.
07:57 C'est un dossier très complet en partenariat avec Europe 1. Merci Emmanuel Kessler, directeur des rédactions économiques de Prisma Média.