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00:00 L'invité éco, Isabelle Raymond.
00:03 Bonsoir à toutes et à tous.
00:05 Quel rentré dans les entreprises ?
00:07 On en parle ce soir avec un spécialiste des ressources humaines.
00:10 Benoît Asserre, bonsoir.
00:11 Bonsoir.
00:12 Vous êtes le numéro 2 de l'association nationale des DRH, l'ANDRH.
00:15 Vous avez été DRH de très grandes entreprises, Laura Merlin, la Massif, en France, L'Oréal en France aussi.
00:22 Aujourd'hui vous êtes au sein du Boston Consulting Group.
00:25 Vous l'avez constaté comme nous, l'inflation se maintient à un niveau élevé dans l'alimentaire à plus de 12,5% sur un an.
00:32 Faut-il augmenter les salaires pour tenir compte de cette hausse des prix qui s'installe ?
00:37 Alors, de toute façon les salaires vont être touchés parce que c'est une inflation un peu différente de celle qu'on a connue l'an dernier,
00:41 qui était une influence beaucoup fondée notamment sur l'énergie.
00:44 Là je dirais que c'est de l'inflation du quotidien.
00:46 Donc la pression sur les salaires, indépendamment des débats syndicaux habituels, va être relativement forte.
00:53 Même si, vous savez que sur 2022, les entreprises en moyenne ont augmenté les salaires de 4,5%, ce qui est inférieur à l'inflation.
01:00 Mais ce qui est quand même un taux très élevé par rapport aux années précédentes.
01:04 Donc il y a un effet de rattrapage.
01:06 Et on sait aussi que l'écart rémunération/inflation se couvre sur deux années.
01:11 Donc il est probable que cette année, les évolutions de rémunération devraient être à peu près dans les mêmes eaux de 4,5%.
01:19 Mais il ne faut pas perdre de vue que beaucoup d'entreprises, notamment des PME, sont en même temps en train de lancer le remboursement des PGE,
01:26 sont en même temps en train de rembourser ou de gérer leurs augmentations de prix, leurs augmentations de coût de production.
01:33 Donc c'est vrai que ça fait un calcul qui va être un tout petit peu plus complexe en 2023 qu'il ne l'a été en 2022.
01:40 Mais n'empêche que, comme le demande Marlise Léon qui est à la tête de l'ACFDT, il faudra, à votre avis, rouvrir des négociations au sein des entreprises ou au sein des branches.
01:51 Parce que ce n'est pas régulier, on n'est pas obligé de faire des négociations au sein des entreprises.
01:55 Non, vous êtes obligé de faire des négociations annuelles obligatoires qui portent sur la rémunération, mais vous n'êtes pas obligé de conclure.
02:01 Donc ça c'est une chose, vous pouvez déconclure à zéro si vous voulez.
02:04 En revanche, là ça me paraît peu probable, d'ailleurs cette année et l'an dernier, il y a des entreprises qui ont avancé leurs négociations.
02:12 Par exemple en septembre, octobre 2022, on va voir si elles reprennent le rythme de septembre, octobre 2022 ou si elles décalent à janvier ou février 2024.
02:20 Donc c'est vrai que de toute façon, on comprend la position de Marlise Léon, les négociations sur les salaires auront lieu,
02:25 sans perdre de vue qu'il y a un certain nombre de rémunérations, au-delà de la moyenne de 4,5 que j'ai donnée tout à l'heure,
02:30 qui ont augmenté dans les branches, notamment dans le taux de restauration, pour une raison simple, c'est qu'on ne trouve pas de candidats.
02:35 Et que par conséquent, les entreprises et les branches augmentent leur minima de manière à attirer des candidats.
02:41 Et là-dessus, il faudra continuer à augmenter les salaires dans ces branches où il y a toujours des difficultés de recrutement ?
02:47 Oui, dans les branches pour se mettre au marché, parce que sinon ils ne trouvent pas, donc il n'y a pas d'activité.
02:51 Bon, je pense que le mieux quand même, c'est quand les négociations ont lieu entreprise par entreprise,
02:56 parce qu'il y a une réalité d'entreprise à prendre en considération.
02:59 Et que ça se traduise par des augmentations de salaires, pas par des primes ou par d'autres augmentations de rémunérations,
03:06 parce qu'il y a beaucoup d'entreprises qui jouent là-dessus, en tout cas dans le discours.
03:08 Non, vous avez raison, c'est-à-dire que quand vous êtes une négociation, vous avez la rémunération dont tout le monde parle,
03:13 le fameux taux dont tout le monde parle, un coup c'est 3, un coup c'est 4, mais vous avez tout ce qu'il y a autour.
03:17 Alors, au taux, il y a la prime Macron, qui sera reconduite, probablement, en fait, son matin, elle est permanente.
03:22 Mais vous avez aussi des tas d'autres choses, par exemple l'augmentation de la prise en charge du forfait transport,
03:26 l'augmentation de ceci ou de cela, qui viennent compléter, ou des conditions de protection sociale.
03:30 Mais c'est vrai que le débat, tant pour les salariés que pour les employeurs, se concentre sur les salaires,
03:34 parce que c'est ça qui fait évoluer votre masse salariale.
03:37 Après, l'avantage de systèmes comme la prime Macron, c'est que c'est un one-shot, c'est en un coup.
03:42 Oui, mais ça c'est un avantage pour le chef d'entreprise, pas forcément pour le salarié.
03:45 Oui, alors pour le salarié, il touche tout de suite, mais c'est vrai que le chef d'entreprise, il ne voit pas sa masse salariale
03:50 augmenter comme ça éternellement. Dans des entreprises qui connaissent des difficultés de trésorerie,
03:55 c'est un truc qui peut jouer. Mais je pense quand même qu'on a bien vu que l'an dernier, malgré cela,
03:59 c'est bien le salaire de base qui avait été réévalué.
04:02 Alors, autre nouveauté, actualité en tout cas en cette rentrée, c'est la réforme des retraites qui entre en application
04:08 ce vendredi, le 1er septembre, avec un passage progressif de 62 à 64 ans.
04:13 Comment ça se passe concrètement dans les entreprises pour ces salariés qui vont devoir travailler quelques mois de plus ?
04:18 Est-ce qu'ils travaillent quelques mois de plus réellement, concrètement ?
04:21 Oui, concrètement, ils travailleraient quelques mois de plus, ça c'est certain. Il n'y a pas de débat sur le sujet.
04:26 Non, mais ça pourrait être pris en charge par l'entreprise, qui pourrait les envoyer en retraite et le prendre en charge.
04:31 Oui, mais vous savez peut-être qu'en juin-juillet, il y a une forme d'inquiétude autour de, est-ce que la Caisse nationale
04:35 d'assurance vieillesse sera prête pour déclencher toutes les opérations administratives de mise à la retraite ?
04:41 Oui, c'est le cas. D'ailleurs, mon homologue Jérôme Friteau l'avait confirmé et ça s'est très bien passé.
04:46 Donc ça, c'est plutôt une bonne nouvelle. Il y a la dimension administrative qui a inquiété un peu tout le monde quand même.
04:50 Elle est globalement réglée. Après, maintenant le sujet, c'est que nous avons des gens qui avaient prévu de partir.
04:56 Pas tellement ceux qui sont nés en 61, parce que là ça rajoute un mois ou deux mois, c'est pas très grave,
05:00 mais ceux qui se voient rajouter un an, un an et demi. Là, il y a trois types de problèmes.
05:04 Un, le premier problème, c'est quand les gens sont sur des métiers pénibles, ils vous disent "mais moi, je ne vais pas pouvoir faire un an et demi de plus".
05:09 Donc déjà, ils avaient du mal à aller jusqu'au bout, là ils vont avoir un peu plus de mal.
05:13 Et comment vous gérez ça ? Vous, comme DRH ?
05:15 Oui, d'abord il faut les réintégrer dans les process normaux de gestion de carrière.
05:19 En plus, vous avez peut-être vu que la réforme des retraites porte aussi une revalorisation du coût pour l'entreprise,
05:24 de ce qu'on appelle les ruptures conventionnelles individuelles pour les faire partir.
05:27 Je comprends, c'est une politique en faveur de l'emploi des seniors. Malheureusement, ça, c'est peut-être la touche.
05:31 Je ne suis pas sûr que c'était la meilleure des idées.
05:33 Et puis, le troisième sujet, c'est effectivement de repenser l'organisation en intégrant des gens qui finalement vont rester un an et demi de plus,
05:41 alors qu'on avait peut-être programmé qu'ils partiraient à telle ou telle date.
05:44 Est-ce que c'est fait, ça, concrètement, dans l'organisation des entreprises ?
05:46 Pas encore. Il faut les faire re-rentrer dans les process RH normaux.
05:50 Mais c'est vrai que ça peut concerner pas mal de monde.
05:53 Et puis, il y a la dernière catégorie qui sont les gens qui étaient en pré-retraite.
05:56 Et finalement, en fait, le durée de la pré-retraite, vous savez, ce qu'on appelle les congés de fin de carrière, enfin bon, se prolonge.
06:03 Et ça, c'est un coût pour les entreprises.
06:05 Parce que théoriquement, lorsque quelqu'un part en congé de fin de carrière, vous le rémunérez dans des conditions techniques,
06:10 c'est pas important de rentrer dedans, jusqu'à sa date de départ.
06:13 Sauf que sa date de départ, elle vient de se décaler.
06:15 D'un an, d'un an et demi. Et donc, qui fait le lien, c'est l'entreprise.
06:18 Et donc, ça les coûte plus cher. Voilà.
06:20 Ça, c'est ce qui se passe aujourd'hui. Mais, un bâtou, la loi est la loi. On a voté. C'est comme ça.
06:23 Et c'est comme ça. Et donc, cette rentrée dans les entreprises avec des augmentations de salaires qui se profilent.
06:29 Merci beaucoup. Benoît Serre, vice-président de l'INDH, invité Echo de France Info ce soir.