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Les semi-conducteurs, un enjeu majeur

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00:22 Très chers téléspectateurs, amis fidèles des rendez-vous économiques d'Als 24 News,
00:26 Bonsoir et bienvenue au Pro de l'Éco pour un numéro spécial ce soir, car il mêlera à la fois le monde de l'économie à celui de la géopolitique.
00:34 Nous allons tout simplement évoquer la guerre des semi-conducteurs, une guerre souterraine impitoyable que se mènent les grands de la technologie de ce monde,
00:43 notamment vis-à-vis de la Chine qui subit de plein fouet les restrictions américaines, mais plus récemment européennes,
00:50 contre l'importation ou même l'exportation de certains produits relatifs à la technologie des semi-conducteurs,
00:56 de toutes petites puces qui agitent l'échiquier mondial de l'industrie et de l'économie.
01:02 Et à chaque semaine, et comme chaque semaine, les Pro de l'Éco s'emparent du dossier.
01:07 ...
01:13 Alors pour aborder ce thème ce soir, j'ai le plaisir d'accueillir sur le plateau des Pro de l'Éco, monsieur Mehdi Aoumar Ouaïesh.
01:22 Donc vous êtes président de la commission Économie numérique au Conseil National Consultatif pour le Développement des PME au sein de la CNC des PME.
01:32 Bonsoir monsieur. Merci d'être avec nous.
01:35 Merci pour votre invitation.
01:36 Alors depuis Marseille, notre expert maison Nazim Sidi nous rejoindra également.
01:41 Vous êtes enseignant agrégé d'économie à l'université Ex-Marseille. Merci Nazim d'être avec nous. Bonsoir.
01:48 Merci à vous. Bonsoir et toujours un plaisir d'être parmi vous.
01:52 Et depuis la capitale chinoise Pékin, nous avons le plaisir d'avoir avec nous également Li Yuan.
01:59 Vous êtes consultant sur les affaires internationales et directeur général de Viaduc Chine.
02:04 Bonsoir, monsieur. Merci d'être avec nous, même si c'est à une heure aussi tardive, je l'imagine, en Chine.
02:12 Bonjour, cher ami.
02:14 Voilà. Donc avant de commencer le débat, je vous propose, mesdames et messieurs, d'abord de plonger dans la nature de cette guerre des semi-conducteurs à travers ce sujet signé de la main de la rédaction des Pro de l'Éco.
02:28 Ah, les semi-conducteurs. Comment de minuscules puces peuvent-elles avoir autant de pouvoir ? Un pouvoir duquel peut dépendre la souveraineté technologique des États.
02:39 On dit d'eux qu'ils sont indispensables à l'industrie, dites de pointe. Vous comprendrez alors qu'elles puissent autant phagocyter des industries mondiales comme ce fut le cas en 2022.
02:48 Le marché des semi-conducteurs est en fait un marché de niche, car ses principaux fabricants peuvent se compter sur les doigts d'une seule main.
02:55 TSMC, Samsung, UMC, GlobalFoundries et SMIC détiennent une part de marché mondial d'environ 90% selon Trendforce.
03:04 L'américain GlobalFoundries est donc le seul fabricant non basé en Asie à figurer parmi les cinq premiers du secteur.
03:11 Cette configuration amène aujourd'hui les pays leaders en matière d'industrie technologique à se disputer le leadership de ces puces, à commencer par les États-Unis et la Chine qui sont à couteau tiré.
03:22 À la recherche d'une position plus hégémonique sur le marché, Washington attire vers elle fin 2022 le géant TSMC pour un investissement global à autour de 40 milliards de dollars dans une deuxième usine dans l'état de l'Arizona.
03:35 Problème ? TSMC est un leader taïwanais et les manœuvres américaines sont perçues par Pékin comme une énième provocation sur le terrain géopolitique mais également économique.
03:45 La guerre des semi-conducteurs contre la Chine est déclarée.
03:48 Les actions des États-Unis porteront non seulement atteinte aux droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises, mais nuiront également aux intérêts de nombreux pays et régions
03:59 entraveront les échanges scientifiques et technologiques mondiaux et la coopération économique et commerciale et finiront par se retourner contre eux-mêmes.
04:07 Et comme souvent lorsqu'il s'agit de commerce international, si Washington bouge, Bruxelles lui emboîte le pas.
04:16 En début de semaine, l'Union européenne annonce qu'elle va approfondir sa coopération avec le Japon sur les semi-conducteurs.
04:22 Là aussi, choix stratégiques ou pied de nez fait à Pékin, la question mérite d'être posée.
04:28 Nous avons une stratégie en Chine que nous ne voulons pas découpler et nous l'avons dit très clairement.
04:35 Nous voulons juste réduire les risques si nous voyons qu'il y a trop de risques, trop de dépendance avec une seule source.
04:41 Nous voulons réduire ce risque et il couvre de nombreux aspects comme les matières premières critiques, certains minéraux mais aussi dans les semi-conducteurs.
04:50 Donc oui, nous considérons tout cela dans notre stratégie de sécurité économique que nous avons annoncée il y a deux semaines.
04:57 Et si ce n'était que ça ? En mars dernier, les Pays-Bas s'alignent sur les restrictions américaines en la matière et décident à leur tour de restreindre l'exportation de technologies de puces vers la Chine.
05:10 Les restrictions seront étendues aux machines de lithographie DUV du géant européen, ASML, utilisées dans la fabrication de puces semi-avancées.
05:19 Une mesure publiée fin juin au journal officiel.
05:22 Cette semaine, Pékin a réagi en critiquant la décision néerlandaise et riposte en annonçant qu'à partir du 3 juillet,
05:28 les entreprises américaines n'auront plus le droit d'importer certains matériaux indispensables pour la production de semi-conducteurs.
05:35 Trêve de suspense, on va commencer de suite le débat avec vous, monsieur Omar Wahyesh.
05:42 Alors comment peut-on décrire d'un point de vue industriel, peut-être économique également, les semi-conducteurs et pourquoi ont-ils une telle importance, ces toutes petites puces ?
05:53 Effectivement, pourquoi c'est si important ? Je voudrais dire que dans une économie moderne, dans un pays moderne ou dans une armée moderne, tout est semi-conducteur.
06:04 Ces technologies sont d'autant plus importantes qu'elles ne sont pas visibles.
06:10 On consomme tous du semi-conducteur, quasiment sans savoir.
06:14 Cette caméra, c'est du semi-conducteur.
06:16 Ce micro, quand on va mal, on va chez le médecin, c'est des appareils, c'est des semi-conducteurs.
06:23 On a pris tout à l'heure un café au distributeur, c'était des semi-conducteurs.
06:28 Donc aujourd'hui, une économie moderne ne peut pas se passer de ce type de matériaux.
06:37 Après, ce qu'il faut aussi distinguer par rapport à cette industrie, c'est la différente chaîne de valeur de cette industrie.
06:49 On l'a vu sur le documentaire, très bien fait d'ailleurs.
06:55 Aujourd'hui, pour bien estimer le rôle de chacun, il faut bien comprendre cette chaîne de valeur.
07:01 Dans les semi-conducteurs, vous avez en amont ce qu'on appelle la R&D.
07:06 La recherche et développement.
07:07 La recherche et développement, c'est-à-dire la conception.
07:10 Effectivement, 90% des semi-conducteurs sont produits en Asie du Sud-Est, mais ils sont tous quasiment conçus aux États-Unis.
07:19 Sur ce terrain-là, les USA sont hégémoniques.
07:23 Ce qui fait qu'il y a une interdépendance.
07:27 Après, quand vous voulez produire des semi-conducteurs, aussi ça a été cité, vous avez des machines qui permettent d'imprimer ces semi-conducteurs.
07:39 Et sur ce domaine-là, c'est plutôt les Pays-Bas qui sont les leaders mondiaux.
07:44 Et après, encore une fois, si on veut aller dans le détail des semi-conducteurs, les gros pays, c'est surtout la Corée du Sud, Taïwan, la Chine, les États-Unis.
07:57 Et pour ce qui est des semi-conducteurs de dernière technologie, à ce moment-là, Taïwan, c'est 90% de la production mondiale.
08:08 Et quand vous avez comme ça des pôles qui concentrent autant de valeur, vous avez des dangers.
08:14 Aujourd'hui, la crise du COVID a démontré beaucoup de choses, a démontré la dépendance du monde à une certaine zone.
08:23 La crise du COVID où tout le monde a été un peu dans l'obligation d'aller vers des solutions virtuelles, etc.
08:31 Qui dit solutions virtuelles, dit serveurs puissants qui sont aussi à base de semi-conducteurs.
08:38 Très bien, merci M. Omar Wahyaj pour cette entrée en matière.
08:43 Nesim Sini, alors là on se souvient, cela ne date pas d'une dizaine d'années, mais de quelques années environ,
08:51 de cette crise justement qui a frappé le secteur de l'industrie mondiale.
08:55 Une crise due à la pénurie tout simplement de semi-conducteurs.
08:59 Une pénurie qui s'est produite un peu du jour au lendemain, vouons-le, et qui a mis en émoi, on peut le dire,
09:07 tous les industriels du monde.
09:09 Pratiquement 169 industries se sont retrouvées dos au mur.
09:15 Comment expliquer cette importance que revêtent ces toutes petites puces ?
09:21 Ecoutez, cela a été dit sur le plateau, vous savez aujourd'hui, tous les produits que nous consommons,
09:27 les produits électroniques, les smartphones, les jeux vidéo, même les véhicules que nous conduisons,
09:33 le secteur automobile, consomment des semi-conducteurs qui sont l'élément central pour faire fonctionner
09:39 tout produit électronique ou à base d'électronique.
09:42 Effectivement, vous avez raison, la pandémie a mis en exergue et a démontré l'extrême vulnérabilité
09:48 de certains secteurs industriels et de certains pays qui se sont avérés du coup extrêmement dépendants
09:54 aux productions de semi-conducteurs asiatiques.
09:57 Je voudrais juste vous donner quelques chiffres pour vous montrer l'importance de ce secteur
10:01 qui est névralgique pour l'économie mondiale.
10:03 Aujourd'hui, les semi-conducteurs représentent, représentés en 2022, près de 550 milliards de dollars
10:09 de chiffre d'affaires.
10:11 Donc vous imaginez l'importance que revêt cette petite puce qui effectivement est invisible à l'œil nu
10:17 et pour le consommateur.
10:19 Et surtout, c'est un marché qui est concentré entre, on va dire, 4 ou 5 acteurs mondiaux.
10:24 Vous les avez cités, TSMC, TimeTool Electronics, Global Foundry aux Etats-Unis, SMIC aussi en Chine.
10:35 Le géant néerlandais, à mon sens, mérite d'être cité, c'est ASML.
10:41 ASML, exactement. ASML est prédépendant des métaux critiques, qui sont les matières premières
10:48 dont on a besoin pour fabriquer les semi-conducteurs.
10:51 Tout à fait.
10:52 Et en fait, si vous voulez, le Covid a été un peu le vecteur qui a démontré la compétition mondiale
10:58 qui se joue entre les pays, surtout dans un secteur qui nécessite des investissements massifs.
11:04 Aujourd'hui, si vous voulez avoir une usine de fabrication de semi-conducteurs,
11:07 c'est un investissement compris entre 5 et 10 milliards de dollars.
11:10 Et surtout, si vous voulez être compétitif, il faut tout de suite, dans ce type d'industrie, passer à l'échelle.
11:16 C'est pour ça que ce n'est pas une industrie qui est donnée, qui est possible pour tous les pays.
11:20 D'abord, il faut avoir effectivement de la R&D, il faut avoir des compétences extrêmement pointues.
11:25 Il faut avoir également aussi un savoir-faire en matière de main-d'œuvre et également des assiettes foncières
11:31 abondantes avec une possibilité d'avoir un accès à des inputs des matières premières à proximité.
11:37 Mais aujourd'hui, effectivement, on assiste à une forme de polarisation du monde,
11:42 surtout dans le domaine du semi-conducteur, entre les États-Unis, où j'allais même englober l'Europe,
11:47 avec la Chine et les pays d'Asie du Sud-Est.
11:50 C'est qu'aujourd'hui, il y a une véritable guerre commerciale qui est livrée entre ces deux blocs de pays
11:55 pour avoir l'ascendant dans le semi-conducteur qui, disons-le clairement,
11:59 c'est aujourd'hui l'hydrocarbure du XXIe siècle et surtout, surtout avec l'intelligence artificielle.
12:05 Vous savez qu'aujourd'hui, l'intelligence artificielle est devenue une technologie qui s'est généralisée,
12:10 qui est en train de se standardiser. Je prends l'exemple d'NVIDIA, le constructeur de cartes de mer américains,
12:16 qui aujourd'hui a passé une très grosse commande auprès de la plupart des fabricants asiatiques
12:22 parce qu'il est en train de travailler sur l'intelligence artificielle.
12:25 Et aujourd'hui, les Américains, en même temps que les Européens, tentent de relocaliser des pans
12:29 de semi-conducteurs sur leur territoire national.
12:34 Et vous allez voir que ces prochains mois, voire même ces prochaines années,
12:37 on va assister à une véritable guerre économique sur fond, évidemment, de tensions politiques et diplomatiques.
12:44 Justement, Nazim Sini, vous venez de le dire et on l'a précisé lors de l'introduction de cette émission,
12:51 que ce sujet mêle à la fois l'économie et la géopolitique.
12:55 Justement, Li Yuan, j'aimerais ne pas prendre de gants pour aborder le prochain thème.
13:01 La Chine fait aujourd'hui l'objet d'une guerre technologique, dont le dossier des semi-conducteurs.
13:07 La Chine est aujourd'hui une des rares puissances qui soutiennent le libéralisme dans l'économie.
13:17 Alors que c'était le cas pour la plupart des pays occidentaux qui soutenaient justement ce libéralisme, ce globalisme.
13:27 Mais aujourd'hui, ce sont des puissances occidentales qui refusent le libéralisme
13:32 parce qu'elles le sentent, je dirais, désavantageuse dans la compétition mondiale.
13:40 Alors la Chine, grâce à son travail, grâce à ses sueurs, avec ses bras dans la patte, avec ses mains dans la patte,
13:52 on a pu faire des avancées technologiques dans le 5G, dans la voiture électrique, entre autres,
14:01 qui fait peur aux pays occidentaux.
14:09 Donc les Américains mènent une guerre technologique contre la Chine, notamment dans le semi-conducteur,
14:18 qui interdit l'exportation des machines et des pièces, semi-conducteurs, les puisses, les processeurs, vers la Chine.
14:30 D'un côté, ils pensent freiner le développement de la Chine,
14:37 de l'autre côté, ça nuit aux entreprises occidentales qui profitent jusqu'à présent du développement du marché chinois,
14:46 qui est le plus grand marché de semi-conducteurs.
14:49 Donc aujourd'hui, les Américains interditent ces propres entreprises, et aussi celles de ses alliés, à vendre aux Chinois.
14:55 Donc du coup, ça fait une chute de revenus pour ces entreprises-là.
14:59 Donc cette guerre-là, elle est non-sens.
15:03 En plus, ça va aider la Chine, qui pense au départ que c'est profitable d'acheter ailleurs, au lieu de faire soi-même.
15:12 Ça va prendre du temps, ça va dépenser de l'argent.
15:14 Maintenant, comme on n'a pas le choix, on est obligé de faire la recherche et le développement dans ces secteurs.
15:19 Du coup, je vous dis que dans quelques années, petit à petit, la Chine va devenir leader dans ce segment-là, dans ce marché-là,
15:27 parce qu'il y a de la capacité de recherche, il y a la capacité de développement, aussi le marché, donc aussi la chance financière.
15:36 Très bien, M. Li Wan, pardon, donc Médéo Mar.
15:42 Oui, alors, vous le précisez, tout est semi-conducteur actuellement.
15:49 Un téléphone portable, par exemple, contient environ 160 puces différentes, alors que des voitures électriques hybrides en contiennent jusqu'à 3500.
15:57 Peut-on affirmer aujourd'hui, tout simplement, qu'il s'agit de l'arme technologique la plus puissante au monde ?
16:03 Effectivement, effectivement. Encore une fois, quand je revenais sur la partie chaîne de valeur,
16:12 ce qui est plus important, c'est d'abord les brevets pour ces semi-conducteurs.
16:19 Encore une fois, on l'a précisé, si 90% de la production est concentrée à l'est, 50% de la valeur est concentrée à l'ouest.
16:32 C'est les États-Unis, etc., et particulièrement les Pays-Bas, pour ce qui est aussi de l'industrie en amont, pour l'impression.
16:42 C'est une amont, donc l'amont de l'amont de la chaîne de valeur.
16:44 Exactement. Aujourd'hui, effectivement, c'est une arme.
16:49 Je pense que pour l'administration Biden, ils ont vu en gros de grands dangers arriver.
16:59 On va dire que quand on est habitué à être le premier, être le seul, voir un peu que la Chine vient nous souffler dans le cou,
17:07 peut-être que c'est quelque chose qui fait peur et on essaie de freiner.
17:13 Aussi, la grande dépendance des États-Unis par rapport particulièrement à Taïwan,
17:18 qui est aussi revendiquée par la Chine, fait qu'on veut tout faire pour diminuer en quelque sorte l'indépendance de la Chine par rapport à cette technologie.
17:35 Et concrètement, mécaniquement, comme l'a précisé M. Wang, ça va induire une réaction de la Chine,
17:44 qui pour elle aussi cherche à être indépendante sur cet aspect-là.
17:51 Effectivement, c'est une guerre peut-être qu'elle est souterraine, mais elle est réelle.
18:01 Très bien. Nazim Sini, justement, parlons un peu du continent européen qui se retrouve peut-être malgré lui au milieu de cette bataille
18:09 où se mènent les deux pôles méga-industriels que sont la Chine et les États-Unis.
18:15 Alors, cette Europe, elle est au cœur, justement, elle est tiraillée entre un monopole chinois qu'elle subit malgré elle,
18:22 et une pression américaine qui devient peut-être un peu insupportable pour les entreprises européennes.
18:28 Et l'industrie et les entreprises dans tout cela, voilà ce que j'ai envie de vous demander.
18:34 Écoutez, les entreprises sont tout simplement victimes. Le continent européen est tiraillé,
18:38 est pris en étau entre le marteau et l'enclume, j'ai envie de vous dire tout simplement.
18:42 Et vous savez, quelque part, l'Europe nourrit de profonds regrets. Pourquoi ?
18:46 Parce que ces 30 dernières années, de par les politiques publiques qui ont été votées à l'époque,
18:51 ont été mises en place, on a quelque part soutenu la désindustrialisation de l'Europe.
18:55 Et aujourd'hui, 30 années plus tard, on est en 2023, la plupart des pays européens
19:02 tentent de relocaliser leurs industries, surtout dans des industries à très forte valeur ajoutée.
19:07 Et pourquoi, à votre avis, la plupart des...
19:10 Sur lesquelles ils accusent un certain retard, avouons-le, par rapport à la chaîne...
19:13 Clairement, d'abord, tout à l'heure, vous avez complètement raison, c'est-à-dire,
19:17 c'est pour abonder dans votre sens, dans le sens où aujourd'hui, effectivement,
19:21 à l'accusation d'un retard, cela a un impact sur sa compétitivité,
19:24 parce qu'il faut savoir que malgré tout, l'Europe a des pôles d'excellence,
19:28 je pense notamment au secteur automobile, le secteur de l'aéronautique,
19:32 le secteur mécanique également, et même le secteur électronique.
19:36 Vous avez des géants allemands et même français...
19:39 Les coûts de production ne sont pas les mêmes, Nazim Sidi, vous le savez.
19:42 Oui, tout à fait, mais j'allais vous dire, quelque part, et je rejoins ce qu'a dit mon ami Mahdi,
19:47 c'est qu'ils consentent quand même un quart ou un tiers de la valeur.
19:50 Vous avez quand même des entreprises qui sont parmi les leaders mondiaux en matière d'innovation,
19:55 et aujourd'hui, en fait, ce qui se passe, c'est que cette innovation sans production de semi-conducteurs
20:00 n'a en fait aucun impact, ça n'a pas de sens.
20:03 Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, les Européens doivent mettre en place un plan de riposte
20:09 et surtout un plan commercial extrêmement ambitieux.
20:12 Et moi, souvent, je leur dis, quand j'échange avec certains industriels ou même des politiciens européens,
20:18 je leur dis, au lieu de partir sur un plan complètement farfelu de transition énergétique,
20:23 concentrez vos efforts notamment pour localiser, relocaliser de l'industrie de semi-conducteurs,
20:29 de l'industrie où il y a de la valeur ajoutée, et évitez cette saignée que vous subissez maintenant depuis 30 ans.
20:35 Et vous voyez le résultat ? C'est qu'aujourd'hui, vous avez des Américains qui sont censés être des alliés,
20:40 des partenaires fiables aux Européens, tourner le dos à l'Europe, clairement, pour défendre leurs intérêts,
20:46 et vous avez de l'autre côté des Chinois qui, eux, dans un esprit de compétition
20:50 et presque, j'allais dire, de challenge commercial, qui aujourd'hui s'en donnent à cœur joie
20:55 et bloquent certains échanges avec l'Europe.
20:58 Donc, il y a clairement un enjeu crucial pour la survie industrielle européenne,
21:03 et c'est pour ça, je pense que les Européens doivent absolument se réveiller et mettre en place des choses.
21:08 Très bien. Lee Ou Wan peut-être un commentaire sur la situation,
21:13 la position un peu délicate de l'Europe dans ce dossier ?
21:19 On est plutôt relativement tolérants vis-à-vis des propagandes américaines.
21:25 Mais comme ils commencent à être vraiment de plus en plus méchants, du coup, la Chine aujourd'hui prend une attitude…
21:34 Alors, vous répondez sur les États-Unis. Très bien.
21:38 Je dirais, allez-retour, vous me lancez des flèches, je vais vous lancer un retour.
21:43 La Chine aujourd'hui représente non seulement un pays économique, mais aussi une puissance géopolitique incontournable,
21:52 notamment avec des organisations comme BREAK, comme la Commission de Shanghai.
21:59 Donc, la Chine arrive à fédérer les pays en voie de l'aument,
22:04 qui pensent que l'ordre mondial aujourd'hui, qui est monopolisé par les pays occidentaux,
22:09 devrait en tout cas transformer en un monde multipolaire.
22:16 Tout le monde devrait avoir un mot à dire.
22:19 Quand les pays occidentaux aiment bien parler de la démocratie, déjà au niveau mondial,
22:25 si on arrive à créer une démocratie, que les pays, quelle que soit sa taille, quelle que soit son influence,
22:29 quelle que soit son économie, on arrive à faire une compétence mondiale plus démocratique,
22:35 que tout le monde puisse profiter de l'économie mondiale, et pas seulement quelques pays, une poignée de pays développés.
22:42 Je pense qu'aujourd'hui, la Chine a ce rôle et cette responsabilité de mener,
22:49 en tout cas de faire progresser ce changement progressivement.
22:55 D'ailleurs, ce n'est pas seulement contre les pays occidentaux, contrairement à ce qu'ils pensent.
23:02 Effectivement, ils vont perdre leur monopole, mais ce n'est pas contre l'intérêt,
23:06 parce que dans un monde en développement durable, dans un processus vertueux,
23:13 les occidentaux vont aussi profiter.
23:16 Parce que l'Afrique est pauvre, un continent africain pauvre, un continent sud-américain pauvre,
23:23 n'est pas profitable économiquement.
23:26 Si on arrive à faire développer des coins dans le monde où il y a encore des choses à faire,
23:32 ça va profiter aussi aux entreprises occidentales.
23:35 Donc c'est ça aussi le développement durable, économiquement et politiquement.
23:41 Très bien, très bien, merci M. Li Yuan.
23:45 Madéo Marwaïa, je me retourne vers vous une nouvelle fois.
23:49 On l'a dit avant que l'affaire de TSMC peut-être a exacerbé un peu les tensions entre la Chine et les États-Unis,
23:58 qui au risque d'engendrer un conflit qui peut littéralement dégénérer avec Pékin,
24:04 jouent, avons l'oeil à un jeu plutôt malsain, mais c'est le propre de la guerre économique, vous me direz.
24:11 Alors, pour attirer sur son sol les leaders mondiaux de la fabrication des semi-conducteurs,
24:16 lorsqu'on est concurrent des États-Unis, comment on perçoit une telle vainoeuvre ?
24:21 C'est clair, ils ont une position, on va dire, dominante sur l'amant.
24:27 Ils veulent en profiter sur l'industrie en aval pour engrapater le maximum sur le sol américain.
24:40 Peut-être que le premier déclencheur a été la crise du Covid par rapport aux difficultés.
24:47 Et la deuxième, c'est peut-être le risque, on va dire, d'être privé des semi-conducteurs taïwanais
24:56 dans le cas d'un conflit entre la Chine et Taïwan.
25:00 Mais ce qu'il faut savoir aussi, c'est qu'il y a aussi d'autres pays qui sont en train de se positionner.
25:07 Vous avez l'Inde, la Malaisie et l'Indonésie qui se disent qu'on est prêt à reprendre une partie de la production sur notre sol.
25:17 On a des coûts de production plus intéressants.
25:20 Des outsiders, appelons-les comme ça, si vous êtes d'accord.
25:23 Exactement. Et dans la Chine, on a parlé des innovateurs, des producteurs, etc.
25:30 Mais il y a aussi ceux qui financent.
25:32 Aujourd'hui, vous avez aussi les pays du Golfe qui se positionnent sur certaines usines en Inde,
25:38 comme on l'a dit, en Malaisie, en Indonésie.
25:41 Donc, c'est une certaine redistribution des cartes.
25:44 Par contre, une guerre, ça a un coût.
25:47 Il faut dire que cette guerre-là, on en paye tous le coût, comme l'a précisé.
25:52 À un moment où c'était plus ouvert, on achetait tous les composants là où ils étaient les moins chers.
25:59 On va avoir des marchés un peu morcelés avec des coûts de semi-conducteurs plus importants.
26:06 Et si les semi-conducteurs sont plus chers, tout est plus cher automatiquement.
26:11 Très bien. Nazim Sini, je vous retourne un peu la même question.
26:15 Les leaders mondiaux de la fabrication et la production de semi-conducteurs qui migrent vers les États-Unis,
26:23 qu'est-ce que ça vous inspire ? Le cas échéant, bien entendu.
26:27 Oui, tout à fait. Clairement, ça démontre, si vous voulez, la tension croissante qui existe entre les pays tels que les États-Unis et la Chine.
26:38 Je vous ai dit, toujours sur fond, de tensions politiques et diplomatiques.
26:41 Et encore une fois, je rejoins ce qui a été dit dans le sens où, au final, la victime, ça va être le consommateur, les consommateurs que nous sommes.
26:49 Et j'allais aussi vous rajouter une petite information récemment éparue dans la presse.
26:54 Parce que vous savez, il y a les guerres que se livrent les pays, mais il y a aussi les guerres que se livrent les fabricants entre eux.
27:00 Et actuellement, TSMC et Samsung Electronics se livrent une véritable bataille d'innovation pour aller sur du semi-conducteur de 2 nanomètres.
27:11 C'est-à-dire plus petit encore que ce qui est fabriqué actuellement, avec des semi-conducteurs plus performants, moins énergivores, etc.
27:19 Toujours dans un souci de miniaturisation croissante. Et là, les États-Unis veulent absolument se positionner.
27:25 Parce que, je vous ai dit, effectivement, l'époque moderne que nous vivons, nous utilisons pratiquement 90% de nos produits à base de semi-conducteurs.
27:33 Aujourd'hui, l'homme moderne, dans une civilisation moderne, utilise des produits électroniques à base de semi-conducteurs.
27:40 Aujourd'hui, si vous voulez arrêter véritablement l'économie d'un pays, au lieu de bloquer le pétrole ou le gaz, vous pouvez bloquer les semi-conducteurs.
27:48 Et les États-Unis l'ont compris déjà depuis plusieurs années.
27:51 La seule chose, c'est que les différentes administrations qui s'étaient succédées à l'époque n'avaient pas anticipé les tensions croissantes avec la Chine, et notamment par rapport à Taïwan.
28:01 Et aujourd'hui, ce phénomène-là, j'allais dire presque de dumping et de protectionnisme exacerbé, il a pris forme avec l'administration Trump.
28:10 Il est suivi par l'administration Biden. Et puis, il y a même un phénomène comme ça croissant au sein même de la communauté d'affaires américaine,
28:18 puisque leur plus grosse frayeur ou leur plus grosse phobie, c'est d'avoir une suspension de leur livraison ou un arrêt de leur production, de leurs produits finis.
28:29 Donc, c'est pour ça qu'aujourd'hui, il est primordial pour les Américains de relocaliser sur leur sol toute la chaîne de fabrication en avant,
28:36 pour avoir toute la maîtrise du process de fabrication jusqu'à la distribution.
28:41 Très bien, très bien. J'aimerais maintenant avoir l'avis de la partie plutôt chinoise dans ce dossier,
28:48 puisque la Chine est directement concernée par ce qui arrive au leader mondial de Taïwan, donc TSMC.
28:57 Li Wan, quel est votre sentiment par rapport à tout cela ?
29:01 L'économie a sa propre logique, a sa propre règle. Quand la politique veut intervenir sur l'économie, on échoue dans la plupart des cas.
29:12 Pour vous, c'est un dossier politique.
29:14 Quand les entreprises font le choix de l'implantation, ils vont choisir la proximité du marché, le coût bas de la production,
29:25 la concentration de savoir-faire et aussi la chaîne d'approvisionnement et aussi la chaîne de distribution.
29:32 Donc l'ensemble des éléments rentrent dans le calcul d'une entreprise pour prendre décision de son implantation.
29:38 Aujourd'hui, le gouvernement américain dit « moi, je décide que vous, vous venez chez moi » de façon forcée.
29:45 Ça ne va pas marcher. Les leaders de cette entreprise, de TSMC, pensent que c'est un échec,
29:52 ils pensent qu'ils vont rater le deal.
29:56 En fait, les Américains demandent à cette entreprise de donner tous les données de l'entreprise financière technologique à l'État américain.
30:04 C'est du vol, c'est du pur vol de demander à une entreprise technologique de donner tout le secret de fabrication
30:11 et tout le secret financier commerciaux à un gouvernement quelconque.
30:17 Donc c'est ça ce qui est en train d'être soumis par l'entreprise de TSMC.
30:26 Très bien, Li Yuan.
30:29 Je pense que, ou est-ce que vous pensez directement que Li Yuan a raison
30:35 lorsqu'il parle justement de cette question de propriété intellectuelle, de souveraineté intellectuelle,
30:41 peut-être lorsqu'une entreprise stratégique comme un producteur de semi-conducteurs
30:48 fait le choix d'aller s'installer aux États-Unis alors qu'il dépend d'une certaine manière,
30:53 directement ou indirectement, d'un concurrent direct qui est la Chine ?
30:58 C'est clair, c'est clair. C'est un rapport de force et chacun essaie de mettre tout son poids.
31:06 Et ce qui est fair play n'a finalement pas vraiment d'importance.
31:12 C'est qui arrive et chacun monte ses muscles et fait valoir un peu ses arguments.
31:22 Effectivement, la notion d'économie, on va dire, faire, etc., n'a aucune place dans cette guerre
31:34 et n'a aucune place dans les agissements dont on est en train de parler.
31:39 Très bien, merci Omaroua.
31:41 Yash Nazim Sini, il y a aussi le dossier de l'industrie des voitures électriques
31:46 qui est aussi au cœur de cette bataille.
31:48 Alors, est-ce que vous pensez justement, pour revenir au dossier européen,
31:53 que l'Europe et à sa tête Bruxelles tentent d'avancer rapidement
31:57 pour démocratiser ce marché à grande échelle dans plusieurs pays, peut-être locomotives,
32:03 comme la France ou encore l'Allemagne.
32:06 Est-ce que l'Europe craint pour la compétitivité de ces entreprises
32:09 face aux assauts chinois sur le marché européen ?
32:13 Oui, totalement.
32:14 Surtout que vous savez que l'Europe aujourd'hui a un calendrier qui est fixé,
32:17 celui de l'interdiction de la motorisation thermique à l'horizon de 2035,
32:21 donc c'est-à-dire demain, ce qu'on voit à l'échelle industrielle.
32:24 Et effectivement, l'Europe a une crainte très forte de ne pas pouvoir tenir ce calendrier,
32:30 surtout dans une industrie automobile qui est un peu moribonde, vous le savez.
32:34 Aujourd'hui, les chiffres le montrent, depuis ces cinq ou six dernières années,
32:38 bien avant même le Covid, l'industrie automobile était en souffrance.
32:43 Et aujourd'hui, cette volonté de basculer, de faire pivoter toute une industrie
32:47 vers le moteur électrique implique également des questionnements sur le semi-conducteur.
32:54 Et effectivement, l'Europe exprime de véritables craintes sur les assauts chinois,
32:59 sachant que vous avez pas mal de constructeurs en Chine
33:02 qui sont très performants en matière de véhicules électriques.
33:05 D'ailleurs, il y a un véhicule électrique qui a été nommé récemment en Asie
33:10 comme étant l'un des véhicules les plus performants en matière d'autonomie,
33:14 en matière également de performance, et ça, ça inquiète véritablement l'Europe.
33:18 Parce qu'aujourd'hui, elle se dit clairement,
33:20 si sur un de mes secteurs névralgiques, je suis attaqué par une puissance telle que la Chine,
33:25 que me reste-t-il ?
33:26 C'est clairement la question qui est en train d'être posée
33:30 au sein même des institutions européennes, parlements et commissions également.
33:34 Donc c'est pour ça que l'Europe tente par tous les moyens,
33:37 d'abord des moyens réglementaires à travers des directives,
33:40 pour limiter, voire même interdire l'entrée de la Chine sur le sol européen.
33:45 Mais j'allais vous dire, aujourd'hui c'est un jeu de dupe,
33:48 parce qu'effectivement la Chine, au même titre que l'Europe, sont interdépendants.
33:53 Je tiens à rappeler, et ça a été dit, que les machines qui permettent
33:57 d'imprimer les semi-conducteurs sont fabriquées par les Pays-Bas,
34:01 mais aussi par des industriels suisses et également allemands.
34:05 Et les semi-conducteurs fabriqués en Asie sont nécessaires
34:08 pour faire fonctionner les véhicules électriques en Europe.
34:12 Donc il y a une interdépendance entre les deux blocs,
34:16 mais aujourd'hui, effectivement, je vous ai dit, encore une fois, je le répète,
34:19 la principale victime c'est le consommateur et le consommateur européen.
34:23 Donc il est fondamental pour les Européens, si Aminima n'a pas d'accord avec une Chinoise,
34:27 c'est de recréer une industrie du semi-conducteur sur le sol européen,
34:32 puisqu'ils ont le savoir-faire.
34:34 Maintenant c'est qu'une question de compétitivité, surtout de co-horaire, j'allais vous dire.
34:38 Très bien, merci Nazim Sini. Ce sera donc le mot de la fin des pros de l'écho.
34:44 Mahdi Aoumar, je rappelle que vous êtes président de la commission Économie Numérique
34:49 au Conseil National Consultatif pour le Développement des PME, donc CNC des PME.
34:55 Merci d'avoir été avec nous ce soir.
34:57 Nazim Sini, vous êtes enseignant agrégé d'économie à l'Université Ex-Marseille.
35:02 Vous étiez en direct avec nous également depuis la Cité Fosséenne.
35:05 Remercions également comme il se doit M. Li Yuan.
35:09 Vous êtes consultant sur les affaires internationales et directeur général de Viaduc Chine.
35:13 Vous étiez en direct avec nous également depuis la capitale chinoise.
35:18 Il ne me reste qu'à vous remercier, vous, chers téléspectateurs,
35:22 et de vous donner rendez-vous pour la semaine prochaine.
35:25 D'ici là, restez fidèles à Al Jant'4 News.
35:27 [Musique]

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