Après la défaite du IIIe Reich, de nombreux nazis ont cherché à fuir la justice.
La plupart se sont réfugiés en Amérique du Sud, plus précisément en Argentine.
On va donc se demander pourquoi l'Argentine a-t-elle été la principale terre d’accueil pour ces nazis en cavale.
La plupart se sont réfugiés en Amérique du Sud, plus précisément en Argentine.
On va donc se demander pourquoi l'Argentine a-t-elle été la principale terre d’accueil pour ces nazis en cavale.
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00:00 Mai 1945, Berlin.
00:05 Le 3ème Reich s'effondre et l'Europe est libérée du jeu nazi.
00:14 Alors que le drapeau rouge flotte sur Berlin, la traque des dignitaires du régime hitlérien débute.
00:19 Nombreux sont ceux qui sont arrêtés, jugés et condamnés,
00:23 tandis que d'autres sont exfiltrés vers les Etats-Unis ou l'URSS afin d'exploiter leur connaissance.
00:28 Cependant, tous n'ont pas été capturés.
00:31 En réalité, après la guerre, d'innombrables nazis se sont volatilisés.
00:35 Des milliers ont réussi à se cacher puis à fuir l'Europe.
00:38 Leur destination principale, l'Argentine.
00:42 Là-bas, bon nombre d'entre eux couleront des jours heureux
00:45 et ils mourront sans jamais avoir été rattrapés par leur sombre passé.
00:49 Mais alors, pourquoi l'Argentine est-elle devenue la principale terre d'accueil pour ces fugitifs ?
00:53 Pourquoi les nazis ont-ils choisi ce pays en particulier ?
00:56 Et qu'est-ce qui a motivé les autorités argentines à en accueillir autant ?
01:00 Car on en compte quand même des dizaines de milliers.
01:02 Et parmi eux, les pires criminels de guerre.
01:05 Mais avant d'aller plus loin, vous l'avez peut-être remarqué,
01:08 derrière moi, il y a une sorte de cadre qui est là depuis à peu près deux ans.
01:11 Mais en fait, c'est un poster métallique de la marque Displate.
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02:06 Encore merci à Displate pour son soutien.
02:08 Bonne vidéo.
02:09 Tout d'abord, un peu de contexte.
02:19 Lorsque de nombreux nazis en fuite choisissent l'Argentine pour se planquer,
02:22 ce n'est pas un hasard.
02:24 L'Argentine et l'Allemagne sont en fait deux pays déjà très liés avant l'arrivée des nazis.
02:29 Retour en arrière.
02:31 Depuis le 19ème siècle, l'Argentine et l'Allemagne entretiennent des liens étroits.
02:35 L'Amérique du Sud est depuis longtemps fantasmée par les Allemands.
02:38 Cet endroit est riche en ressources et dispose d'un climat agréable.
02:41 Alors, ils se mettent à croire que c'est une terre de tous les possibles,
02:44 une sorte de refuge idéal.
02:46 Dès les années 1880, certains intellectuels allemands envisagent même de conquérir le sud du Brésil,
02:51 l'Argentine, le Chili, l'Uruguay et le Paraguay,
02:54 pour en faire une sorte d'Amérique allemande.
02:57 Rien que ça.
02:58 Si l'Allemagne n'a jamais conquis l'Amérique du Sud,
03:01 ça n'a pas empêché une partie de sa population de s'y installer.
03:04 Depuis la fin du 19ème siècle, il existe déjà en Argentine une importante diaspora européenne.
03:09 Des Espagnols, des Italiens et surtout des Allemands
03:13 qui s'y sont installés en grand nombre après la première guerre mondiale.
03:16 Cette diaspora allemande, c'est autant de groupes susceptibles d'accueillir des nazis en fuite,
03:20 ou du moins de servir d'alibi pour justifier la présence dans le pays de personnes parlant allemand.
03:25 Mai 1945, la seconde guerre mondiale s'achève en Europe.
03:32 Berlin, transformée en champ de ruine, est prise par les soviétiques.
03:36 Hitler s'est suicidé dans son bunker avec sa femme et sa chienne,
03:39 et de nombreux dignitaires du 3ème Reich comme Hermann Göring ont été arrêtés.
03:43 Pour autant, dans le chaos qui règne alors en Europe,
03:46 certains nazis, dont certains parmi les pires criminels du régime,
03:49 ont réussi à passer au travers des différents points de contrôle et à semer les armées alliées.
03:53 Ces nazis, désormais en cavale, vont chercher coûte que coûte à quitter l'Europe qu'ils ont ravagée pendant 6 ans.
03:59 Dès l'été 1945, des réseaux d'exfiltration se mettent en place pour évacuer de hauts responsables allemands,
04:05 civils ou militaires aussi bien issus de l'armée régulière que de l'ASS.
04:09 Parmi ces réseaux, le plus connu certainement, Odessa.
04:13 Grâce au réseau du Vatican, animé par l'évêque Aloïs Udall, et à de faux passeports de la Croix-Rouge,
04:18 les fugitifs nazis passent à travers la Suisse jusqu'à Gênes en Italie,
04:22 où ils embarquent sur des paquebots en partance pour l'Amérique du Sud.
04:25 Certains allemands ne font que transiter par Buenos Aires,
04:28 comme par exemple Klaus Barbie, le boucher de Lyon.
04:31 Ces nazis migrent ensuite vers le Brésil ou le Paraguay, plus isolés à cette époque.
04:36 Mais la majorité des nazis en fuite vont chercher à rester en Argentine,
04:40 qui devient vite le point de chute principal des immigrés du Troisième Reich.
04:43 Le pays est à cette époque présidé par un certain Juan Perón,
04:47 un ancien militaire ayant participé à la dictature mise en place dans le pays après la révolution de 1943.
04:53 Élu président de l'Argentine de manière démocratique en 1946,
04:56 l'idéologie de Perón est un mélange assez étrange, à la fois populiste, nationaliste,
05:01 mais aussi socialiste et assez anticlérical.
05:04 Une idéologie donc assez compatible avec celle de certains allemands.
05:08 Enfin bref, parmi toutes les décisions discutables prises par El Presidente,
05:13 on peut citer l'accueil massif d'anciens nazis.
05:16 Pour expliquer ce choix, les historiens et les politologues soulignent les points communs
05:20 entre les régimes fascistes et les régimes d'Amérique du Sud.
05:22 Mais si ce n'était que ça, ça serait trop simple.
05:25 Dans cette région, on retrouve effectivement des régimes autoritaires,
05:28 teintés d'anticommunisme, voire d'antisémitisme.
05:31 Mais des régimes comme ça à cette époque, il y en a aussi ailleurs, notamment au Moyen-Orient.
05:35 L'Égypte et la Syrie seront d'ailleurs également des terres d'accueil pour nazis en cavale.
05:39 Mais alors pourquoi est-ce que l'Argentine se distingue des autres pays
05:42 en devenant le principal endroit où se réfugient les nazis ?
05:45 Et bien, c'est là que le régime de Perón entre en jeu.
05:54 En s'installant en Argentine, sous le régime de Perón,
05:57 les émigrés nazis se savent en sécurité,
05:59 si bien qu'ils peuvent vivre tranquillement tout en conservant leur vraie identité.
06:02 Voire même, pour se passer par l'Espagne de Franco,
06:05 ils sont directement naturalisés à leur arrivée.
06:08 C'est notamment le cas du médecin nazi Joseph Mengele, médecin Auschwitz,
06:12 qui s'est livré à d'abominables expériences, principalement sur les enfants déportés.
06:16 Après avoir échappé de justesse à l'armée américaine,
06:20 puisse être caché pendant 4 ans en se faisant passer pour un paysan,
06:23 Mengele profite des réseaux d'exfiltration d'anciens nazis
06:26 et arrive en Argentine sous le nom d'Helmut Gregor en juillet 1949.
06:30 Quelques années après, il récupère son acte de naissance à l'ambassade d'Allemagne de l'Ouest.
06:35 Puis, il réussit à obtenir un titre de séjour à son vrai nom,
06:38 malgré le fait que celui-ci apparaisse sur la liste des nazis recherchés.
06:42 Car s'ils ont beau être recherchés, dans les faits, ces nazis en cavale,
06:46 on ne les cherche pas vraiment.
06:48 Les alliés, et notamment les Etats-Unis,
06:50 sont rapidement au courant de la présence de nazis en Argentine.
06:53 Mais ils décident de laisser faire.
06:55 Avec la fin de la guerre, ils ont assez de soucis à gérer.
06:57 L'Europe est à reconstruire, les empires coloniaux sont à récupérer,
07:01 il faut gérer l'occupation du Japon,
07:03 et surtout les tensions avec l'URSS.
07:05 Et oui, la guerre froide a déjà débuté.
07:08 Donc, mieux vaut satisfaire les Etats sud-américains en les laissant récupérer quelques nazis.
07:12 Ça ne coûte rien sur le moment, et ça fait surtout un truc en moins à gérer.
07:16 Bon, même si je suis d'accord, moralement, c'est pas terrible.
07:19 En Argentine, les allemands sont installés en communautés dans plusieurs régions.
07:23 Lorsqu'arrivent les émigrés du 3ème Reich, ils rejoignent des groupes existants,
07:27 soit ils forment des hameaux ou des nouveaux quartiers germanophones.
07:30 À la fois intégrés à la société argentine,
07:32 mais permettant aux anciens nazis et à leurs familles de maintenir une vie sociale entre exilés.
07:36 On l'a vu, la plupart reprennent leur nom de naissance,
07:39 et vivent sereinement, sans se cacher.
07:41 La plupart mourront d'ailleurs sans avoir été jugés.
07:44 Certains feront même des allers-retours en Europe
07:47 pour aider certains nazis à rejoindre l'Argentine sans être inquiétés.
07:50 On peut presque dire qu'ils vivent la belle vie.
07:52 À partir de 1947, cet afflux d'émigrés allemands est si intense
07:56 que Perron confie à Santiago Peralta, son ministre de l'immigration et des douanes,
08:00 la gestion d'une commission spéciale chargée de superviser la traversée,
08:04 la naturalisation et l'installation des nouveaux citoyens argentins d'origine allemande.
08:09 Peralta est assisté par le colonel Enrique González,
08:13 un ami personnel du président Perron,
08:15 et surtout, un ancien soutien nazi dans le gouvernement dictatorial qui a précédé Perron.
08:20 Malheureusement, on n'a pas beaucoup de détails sur cette commission Peralta,
08:24 étant donné que la majorité des archives ont été détruites lors de la chute de Perron en 1955.
08:30 On sait juste que la commission comprenait des membres comme Carlos Fuhler,
08:34 un ambassadeur germano-argentin,
08:36 qui depuis Gênes, en Italie,
08:38 était chargé d'identifier les nazis qui doivent se rendre en Argentine.
08:42 Mais on trouve aussi plusieurs anciens cadres allemands,
08:45 comme l'espion Herbert Elfrich,
08:47 et aussi beaucoup de collaborationnistes venus de Belgique,
08:50 de Tchécoslovaquie, de Yougoslavie, d'Italie,
08:52 et même de France,
08:54 puisque Peralta côtoie quotidiennement un certain Jean-Jacques-Marie de Mathieu,
08:58 un universitaire français nationaliste qui s'était engagé dans la division SS Charlemagne.
09:03 Maintenant, je pense que vous commencez à prendre conscience
09:06 de l'ampleur du réseau qui s'est tissé entre Berlin et Buenos Aires.
09:09 Dans cette tâche, les Argentins sont aidés par Rodolfo Freude,
09:12 le chef des services secrets argentins qui est aussi d'origine allemande.
09:16 Si on peut aujourd'hui avoir autant de connaissances sur ce réseau,
09:19 malgré la disparition des archives,
09:21 c'est avant tout grâce à des journalistes d'investigation,
09:23 qui ont été les premiers à établir des premières listes d'émigrés nazis réfugiés en Argentine.
09:27 Puis avec le temps, ce sont les historiens qui ont pris le relais.
09:31 Ce qui ressort de tout ça, c'est que l'Argentine a essentiellement accueilli des SS,
09:35 qu'ils soient allemands ou issus de brigades étrangères.
09:37 Buenos Aires a ainsi vu transiter, même s'ils ne sont pas tous restés,
09:41 le boucher de Lyon Klaus Barbie,
09:43 Gerhard Bonneux, responsable de l'extermination des handicapés physiques et mentaux,
09:47 le bourreau de Schwyz Joseph Mengele,
09:49 ou encore le père de la solution finale, Adolf Eichmann.
09:53 Plusieurs d'entre eux vont directement travailler pour le gouvernement argentin,
09:56 que ce soit dans les forces armées ou le renseignement,
09:59 mais aussi dans les secteurs scientifiques et industriels.
10:02 Certains vont même prendre part au programme nucléaire argentin,
10:05 qui heureusement n'a pas abouti à une bombe nucléaire fonctionnelle.
10:08 En bref, en 1947, ce sont près de 90 000 anciens nazis qui sont installés en Argentine,
10:14 protégés par le gouvernement de Juan Perón.
10:16 On peut donc naturellement se demander,
10:18 pourquoi Perón a-t-il autant tenu à accueillir les nazis ?
10:21 On l'a vu, il existe déjà en Argentine depuis de nombreuses années
10:30 une importante communauté d'expatriés allemands.
10:32 Pour le cas du président Perón, dès les années 30,
10:35 il entretient des liens avec le régime nazi.
10:37 Pour lui, recevoir des allemands est donc naturel, mais aussi utile.
10:41 Car en les accueillant, il en profite pour récupérer le savoir-faire des hauts dignitaires nazis,
10:45 qui peuvent ensuite l'aider à administrer et moderniser son pays,
10:49 et ça sans poser de problème d'intégration.
10:51 En retour, ces nombreux dignitaires sont placés dans l'armée,
10:54 dans l'administration ou dans les grandes entreprises du pays,
10:56 ce qui permet à Perón de s'assurer de leur fidélité
10:59 et aussi de détourner un peu d'argent au passage.
11:01 Si les régimes sud-américains et celui de Perón en particulier
11:04 ont voulu dès 1945 attirer chez eux des criminels de guerre,
11:07 c'est à cause de leur admiration pour l'expartise allemande.
11:10 A travers ces nazis, ils voyaient tout simplement des ingénieurs,
11:13 des scientifiques, des officiers et des administrateurs ultra-compétents,
11:17 susceptibles d'apporter beaucoup à leur pays d'accueil.
11:20 Juan Perón a lui-même été formé à l'école supérieure de guerre de Buenos Aires,
11:24 une école fondée sur le modèle allemand.
11:27 Les grandes entreprises allemandes, comme le métallurgiste Krupp
11:29 ou le spécialiste des télécommunications Siemens,
11:32 ont également été source d'inspiration dans les domaines industriels et scientifiques argentins.
11:36 Et donc, en voyant les américains et les soviétiques se partager
11:39 les ingénieurs et les scientifiques allemands,
11:41 les pays d'Amérique du Sud se sont dit "pourquoi pas nous ?"
11:44 Et ça, le président Perón l'a totalement assumé.
11:46 Alors qu'il est en exil en Espagne, en septembre 1970,
11:50 il admet dans une interview qu'il a sciemment participé au réseau d'exfiltration nazi.
11:54 "Bien avant que se termine la guerre, nous avions préparé l'après-guerre.
11:58 L'Allemagne était vaincue, nous le savions.
12:01 Il fallait tirer profit de l'énorme effort technologique qui s'était accompli dans ce pays.
12:05 La seule chose que l'on pouvait utiliser, c'était les hommes.
12:08 Ces Allemands utiles nous ont aidés à mettre sur pied de nouvelles usines
12:12 et à améliorer celles que nous avions déjà.
12:14 Et en échange, nous les avons aidés, eux."
12:17 A demi-mot, l'ancien président reconnaît clairement ses ambitions en accueillant les nazis.
12:21 En s'assurant qu'ils deviennent redevables à l'État argentin,
12:24 il espérait faire de son pays le fleuron intellectuel industriel des militaires d'Amérique du Sud
12:29 et peut-être même concurrencer les États-Unis.
12:31 Ça en tout cas, c'est l'explication que donne Perron à la fin de sa vie.
12:35 S'il a sans doute lui-même cru à cet argument,
12:37 ça ne peut pas être la seule explication pour l'accueil des nazis en Argentine.
12:41 Avec une immigration aussi massive d'Allemands vers l'Argentine,
12:45 on ne peut pas dire qu'ils étaient forcément choisis pour leurs compétences.
12:48 On ne peut même pas parler d'immigration sélective.
12:50 En fait, n'importe qui pouvait venir.
12:53 On peut comprendre l'accueil de certains profils,
12:55 comme celui de Hans Ulrich Rüdel, un héros de la Luftwaffe,
12:59 ou bien Kurt Tank, un ingénieur aéronautique à l'origine du biplan Fokker Wulf 44J,
13:04 qui eux, pouvaient devenir instructeur militaire ou ingénieur aéronautique pour le compte de l'Argentine.
13:09 En revanche, d'autres profils, notamment les nombreux criminels de guerre dont on a parlé tout à l'heure,
13:13 eux, eh bien, ils posent question.
13:15 L'argument de Perron ne tient donc pas la route,
13:18 car visiblement, l'Argentine ne s'est pas contentée d'accueillir de brillants scientifiques.
13:22 Elle a aussi accueilli les pires criminels du régime nazi.
13:25 Et de toute évidence, le pouvoir argentin ne semble pas vraiment avoir de problème avec l'idéologie nationale-socialiste.
13:31 Et ça s'explique par le fait que l'idéologie du régime argentin, et celle des nazis, a là beaucoup de points communs.
13:37 Dans les années 40 et 50, les dictatures sont particulièrement à la mode en Amérique du Sud.
13:47 Et on peut leur trouver certains points communs avec le fascisme italien et le nazisme allemand.
13:52 L'Argentine, tout particulièrement, est fascinée par ce qu'il se passe en Italie avec l'arrivée au pouvoir de Mussolini,
13:58 qui prône une révolution nationaliste comme étant l'alternative à la révolution bolchévique.
14:02 Car la politique de Mussolini, avec certes un volet social, prône avant tout une économie et des valeurs conservatrices.
14:09 Quand le parti nazi est créé en Allemagne en 1920, ses membres vont rapidement essayer de trouver des soutiens dans d'autres pays.
14:14 Et sans surprise, vu à quel point l'Allemagne et l'Argentine sont déjà liées, les nazis y sont allés,
14:19 et ont trouvé des personnes sensibles à leur discours.
14:22 Une fois au pouvoir, les nazis mettent en place en Argentine ce que l'on pourrait appeler aujourd'hui du "soft power".
14:28 Avec des organismes culturels allemands qui proposent des cours d'allemand ouverts au grand public,
14:32 ou qui orientent la presse et le cinéma argentin en faveur du 3ème Reich.
14:36 Certaines idées fascistes s'immiscent même dans les politiques économiques, sociales et éducatives.
14:41 Des écoles allemandes sont créées pour les enfants germano-argentins,
14:44 qui sont donc baignés dans l'idéologie nazie dès les années 30.
14:48 L'influence du nazisme en Argentine provoque ainsi un changement assez brutal.
14:52 En 1900, le pays était considéré comme un foyer démocratique et social.
14:56 50 ans plus tard, le pays est devenu un bastion conservateur et nationaliste.
15:01 Le pays redéfinit ses valeurs, qui passent désormais par une mise en avant de son héritage européen, blanc et chrétien.
15:08 L'Argentine crée même un institut de surveillance ethnique,
15:11 pour s'assurer qu'aucune minorité ne vienne menacer le pouvoir en place.
15:15 Un outil principalement dirigé contre les juifs.
15:18 Car si le régime considère compatibles les émigrés allemands ou italiens, les juifs eux sont mal vus.
15:24 Un antisémitisme qui se développe, alors que pourtant l'Argentine a longtemps été une terre d'accueil pour les juifs,
15:29 fuyant les persécutions en Europe.
15:32 Au cours des années 30, le pays accueille même de nombreux allemands de confession juive,
15:36 fuyant justement les lois raciales du 3ème Reich.
15:39 Mais l'influence des nazis est devenue au fil du temps trop importante.
15:42 On retrouve même des caricatures anti-juives dans des revues comme la Clarinada.
15:46 Symbole de ce rapprochement, en 1938, pour fêter l'Anschluss, l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne,
15:52 les dignitaires argentins et allemands organisent un grand rassemblement dans le stade de Buenos Aires.
15:57 En présence de la communauté allemande d'Argentine, mais aussi de nombreux argentins favorables au régime hitlérien.
16:03 Un événement qui illustre bien à quel point les deux pays étaient déjà proches avant l'exil des nazis.
16:07 Et ce qui explique donc bien aussi pourquoi nos charmants fugitifs ont choisi d'abord d'aller se réfugier à Buenos Aires.
16:13 Et autre chose, le fait que l'Argentine est accueillie à bras ouverts des nazis non-allemands,
16:17 comme par exemple venus de Yougoslavie, montre bien que c'est pas vraiment leur origine qui intéressait le gouvernement peroniste,
16:24 mais bien leur idéologie nazie.
16:26 Les nazis ont donc été se réfugier en Argentine principalement car ce pays était déjà très proche avec l'Allemagne.
16:31 Qu'une communauté allemande importante y vivaient depuis longtemps,
16:34 et parce que la dictature puis le régime de Perón ne voyait aucun problème à sympathiser avec le nazisme,
16:39 voire même à s'en inspirer.
16:41 Mais ce n'est pas tout.
16:43 Il y a aussi une autre chose qui liait l'Argentine, et donc le président Perón, aux nazis.
16:48 Une chose un peu plus difficile à assumer au cours d'une interview.
16:51 L'argent.
16:59 Pendant la seconde guerre mondiale, alors que certains pays d'Amérique du Sud comme le Brésil déclarent la guerre à l'Allemagne,
17:04 et envoient des troupes combattre en Europe au sein de l'armée américaine, notamment sur le front italien,
17:08 l'Argentine, elle, reste neutre et conserve une bonne relation avec l'Allemagne jusqu'à la fin du conflit.
17:14 Depuis les années 30, l'Argentine envoie à Berlin des délégués qui nouent avec les nazis de nombreuses relations,
17:19 sur le plan diplomatique, personnel et évidemment économique.
17:23 Plusieurs dizaines de responsables nazis, parmi lesquels le ministre des affaires étrangères Von Ribbentrop,
17:28 ont fait d'importants dépôts dans des banques de Buenos Aires.
17:31 En 1946, un rapport du département d'état des Etats-Unis affirme également que plusieurs dignitaires nazis,
17:37 dont Hermann Göring et Josef Goebbels, ont utilisé des valises diplomatiques suisses pour faire passer en Argentine
17:43 plus de 20 millions de dollars d'argent volé aux juifs allemands et polonais.
17:48 Sans que l'on puisse en être sûr, les historiens n'ayant jamais été capables de lever totalement le mystère,
17:53 on suppose également qu'une partie des réserves d'or allemande disparues après la guerre,
17:57 auraient pu parvenir en Argentine dès l'été 1945, transportées par deux sous-marins de la Kriegsmarine,
18:03 la marine de guerre allemande.
18:05 On sait aussi qu'entre 1939 et 1949, la Banque Nationale Suisse et une douzaine d'entreprises helvétiques,
18:12 ont détenu des comptes exclusivement en dépôt d'or auprès de la Banque Centrale d'Argentine.
18:16 Cela n'était jamais arrivé avant et ne s'est jamais reproduit depuis.
18:21 Hmm, mystérieux hein ?
18:23 Bon pas vraiment, on estime en fait, sans tomber dans les théories du complot,
18:26 qu'il est probable qu'une certaine quantité d'or allemand ait transité entre la Suisse et l'Argentine à un moment ou à un autre.
18:32 Un fait que ne contestent pas les renseignements américains de la CIA,
18:35 et qui est même jugé plutôt plausible par le centre Simon Wiesenthal,
18:39 une ONG qui enquête depuis 1977 sur le destin des criminels de guerre nazis.
18:44 Enfin, pour revenir au président Perron, il a notamment bénéficié du soutien du millionnaire Ludwig Froede,
18:49 le père de Rodolphe qu'on a évoqué juste avant, et qui sert d'entremetteur entre Argentins et Allemands.
18:54 Il est même soupçonné par certains historiens d'avoir travaillé comme informateur pour le compte des renseignements nazis.
18:59 Mais ce qui nous intéresse le plus, c'est que c'est lui qui va financer la campagne présidentielle de Perron en 1946.
19:06 Enfin, Eva Perron, l'épouse du président, entretient elle aussi des liens étranges avec le régime nazi.
19:12 En 1947, elle fait un voyage à travers l'Europe.
19:15 Elle s'arrête longuement en Suisse, où elle rencontre de nombreux banquiers et financiers.
19:20 On sait aussi qu'elle détient, jusqu'à sa mort d'un cancer en 1952, plusieurs comptes numérotés dans différentes banques suisses,
19:26 ce qui peut attester de relations financières entre les nazis et les perronistes.
19:30 Mais voilà, en 1955, Juan Perron est renversé après un coup d'État.
19:35 Après la chute du régime de Perron, l'Argentine devient moins sûre pour les anciens nazis.
19:40 Si beaucoup vont se fondre dans les sociétés sud-américaines, comme Joseph Mengele, qui finira sa vie paisiblement au Brésil en 1979,
19:47 d'autres criminels vont quant à eux être capturés et traînés devant la justice en Allemagne, en France et en Israël.
19:53 Le plus connu étant le cas d'Adolf Eichmann, logisticien de la Solution Finale,
19:58 qui est capturé le 11 mai 1960 devant son domicile le Buenos Aires par un commando du Mossad,
20:04 les services secrets israéliens, qui l'extradent immédiatement en Israël.
20:09 S'en suit un long procès de 8 mois, très médiatisé, qui déclare Eichmann coupable et le condamne à la peine de mort.
20:16 Il est finalement pendu le 31 mai 1962.
20:20 En France, on a aussi eu l'affaire Klaus Barbie, mais c'est un peu différent car quand il a été démasqué, il était réfugié en Bolivie.
20:28 Aujourd'hui, pratiquement tous les nazis qui ont fui en Amérique du Sud sont morts et enterrés.
20:35 Pourtant, leur héritage demeure bien présent en Argentine et dans toute l'Amérique du Sud.
20:39 Nombreux sont ceux qui se réclament encore du perronisme,
20:42 oubliant la contribution du président Perron à l'accueil des membres du 3ème Reich.
20:47 Même si c'est évidemment plus complexe, cet exil n'est pas le seul fait du président Perron.
20:52 En fuyant vers l'Argentine, les nazis ne se sont pas contentés de rejoindre un régime ami.
20:56 Comme on l'a vu, les raisons qui les ont poussés à choisir ce pays plutôt qu'un autre sont nombreuses.
21:02 Les liens anciens entre l'Empire allemand et l'Argentine,
21:05 les relations personnelles déjà existantes entre Allemands et Argentins,
21:08 la neutralité du pays pendant la guerre qui a permis d'exfiltrer des fortunes depuis la Suisse,
21:12 et surtout l'opportunisme de Perron qui voyait, au travers de ces criminels en cavale,
21:17 un superbe réservoir de techniciens, de scientifiques, d'ingénieurs et d'officiers militaires qui pourraient servir son pays en plein développement.
21:25 Ce sont donc tous ces éléments, avec certains plus importants que d'autres,
21:29 même si au final ils se sont retrouvés tous imbriqués entre eux,
21:32 qui expliquent pourquoi l'Argentine perroniste a été la porte d'entrée de pratiquement toute l'immigration nazie en Amérique du Sud.
21:39 Merci d'avoir regardé cette vidéo, j'espère qu'elle vous a plu.
21:46 Bon, j'ai compté, je dois dire à peu près 60 fois le mot "nazi" dans la vidéo,
21:51 donc autant vous dire que si elle est monétisée, ça tient un peu du miracle.
21:56 En tout cas, merci encore une fois beaucoup à Guilhem de la chaîne d'Histoire en Histoire pour la préparation du script,
22:01 merci aussi à Benjamin de la chaîne Entrée en Liste d'avoir bien voulu incarner Juan Perron,
22:05 il fait un boulot monstre sur sa chaîne, je vous mets le lien en description.
22:08 Encore merci à Displate d'avoir accompagné cette vidéo,
22:11 si ça vous intéresse, vous avez un lien en description,
22:13 pour un ou deux Displate achetés c'est -22% de réduction,
22:17 et pour trois ou plus, c'est -33%, l'offre est valable pendant 30 jours.
22:22 Et quant à vous, comme d'habitude, pensez au like, au commentaire, à partager, ça soutient beaucoup la chaîne,
22:28 allez me suivre sur Instagram et Twitter aussi, je vous y attends,
22:32 et c'est tout, ah, y'a TikTok aussi.
22:34 Et du coup, normalement, bonne fête aussi, je crois, là je tourne fin novembre,
22:38 mais normalement la vidéo sort un peu avant Noël, il me semble,
22:40 même si les dates de sortie ça va être un peu compliqué,
22:42 parce que le 25 et le 1er janvier, ça tourne un dimanche,
22:45 y'a les matchs de la Coupe du Monde aussi qui tombent le dimanche des fois,
22:48 bref, ça va être un peu le bordel, mais normalement, bonne fête.
22:51 [musique]