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Transcription
00:00 Et pour en parler avec nous, j'ai le plaisir d'accueillir l'ambassadeur ici en France pour les droits des personnes LGBT+ Jean-Marc Berton.
00:07 Bonjour. - Bonjour.
00:08 - À l'occasion de cette journée mondiale contre l'homophobie, on va évoquer évidemment la situation ailleurs dans le monde.
00:13 Mais juste un mot tout de même sur la France. On constate effectivement une augmentation des cas d'actes d'agression envers les personnes homophobes et transphobes,
00:23 en majorité des diffamations ou des injures. Des cas qui, dans une majorité aujourd'hui, sont aussi, en tout cas dans la part de l'augmentation des crimes ou des délits,
00:32 davantage encore que des contraventions qui augmentent. C'est donc qu'il y a aujourd'hui une gravité plus forte des actes envers les personnes homophobes et transphobes,
00:39 et ce, malgré les campagnes d'information. - Oui, mais ça montre qu'il faut continuer, qu'on n'en a jamais fini avec la haine, avec la violence.
00:47 C'est absolument inadmissible, intolérable qu'un jour sur deux, il y ait une agression contre une personne LGBT, parce que c'est ça, la réalité.
00:57 Insupportable, intolérable que 50% des personnes LGBT disent avoir été victime au moins une fois dans leur vie d'un acte homophobe ou transphobe.
01:07 Donc il faut continuer les campagnes de sensibilisation, continuer à avoir...
01:10 - Comment expliquer tout de même la banalisation de ces agressions du moins verbales, alors même que les campagnes de sensibilisation se multiplient ?
01:20 - Je crois beaucoup qu'il y a un phénomène de réaction au progrès. Nous avons connu depuis plusieurs décennies un progrès considérable, inouï en réalité,
01:32 de la condition LGBT dans le monde et en France en particulier. Et chaque fois qu'il y a un progrès sociétal, il y a un backlash, un mouvement de réaction, un retour du bâton.
01:46 On l'a vu après le mariage pour tous en 2013. Cela a réveillé une certaine hostilité vis-à-vis de la diversité sexuelle et de genre.
01:59 - Pour autant, vous le dites, dans la loi, en tout cas la cause, en tout cas en faveur de la tolérance, elle progresse puisqu'il y a effectivement aujourd'hui en France le mariage pour tous.
02:08 D'autres pays vont totalement à rebours de ces avancées. C'est ce qu'on observe, par exemple, dans certains pays d'Afrique comme l'Ouganda,
02:14 où on voit même un projet de loi qui vise à criminaliser davantage encore l'homosexualité. C'est donc une menace grandissante aujourd'hui pour les personnes homosexuelles ailleurs dans le monde.
02:24 - En fait, quand on regarde la situation des droits des personnes LGBT dans le monde, il y a à la fois des motifs de satisfaction et des raisons de s'inquiéter.
02:37 Il y a des motifs de satisfaction parce que le grand mouvement de dépénalisation de l'homosexualité continue.
02:43 On était 30 pays seulement il y a 50 ans qui avaient dépénalisé. Aujourd'hui, plus de 130 pays ont décriminalisé l'homosexualité. C'est très important.
02:53 Et au cours des derniers mois, pas moins de cinq pays l'ont fait, dont Singapour ou la Barbade ou encore les îles Cook.
03:04 Et puis, de nombreux pays se sont dotés de mesures pour protéger les personnes LGBT contre les violences, contre les discriminations.
03:11 Il n'y a pas moins de 80 pays aujourd'hui qui ont ce type de mesures. Donc, on réprime non plus l'homosexualité, mais l'homophobie, la transphobie.
03:22 Donc, il y a des motifs de satisfaction. Mais en même temps, oui, vous avez raison. On a des raisons d'être inquiets, d'être préoccupés.
03:33 Il y a toujours 67 pays qui pénalisent l'homosexualité, qui envoient les personnes homosexuelles, les personnes trans en prison.
03:42 Ou la promotion, parce que ça aussi, c'est un phénomène qui progresse. J'évoquais l'Ouganda à l'instant, mais plus près de nous, en Hongrie, par exemple,
03:50 le terme même d'homosexualité est presque devenu un langage, un mot banni du langage courant.
03:56 On voit effectivement la Hongrie qui a adopté des lois pour punir ce qu'elle qualifiait de propagande homosexuelle dans l'espace public.
04:04 Oui, vous avez raison. Il y a cette soixantaine de pays qui continuent de pénaliser.
04:11 Et puis, il y a même, dans un certain nombre de régions, y compris en Europe, en Amérique du Nord, des phénomènes de recul,
04:21 une dégradation de la situation, avec des pays qui envisagent instaurer la peine de mort, des pays qui ne criminalisent pas, mais qui veulent criminaliser.
04:32 Et puis, ce que vous dites, des pays qui veulent interdire toute mention dans l'espace public de l'existence même des personnes homosexuelles ou des personnes trans.
04:48 C'est le cas de la loi, de la loi Angroise dont vous avez parlé, qui, en réalité, est une loi copié-collé d'une loi russe de 2013.
04:57 Il y a la mention dans l'espace public et puis il y a la mention dans les établissements scolaires, lorsque vous voyez qu'une personnalité comme le gouverneur de Floride,
05:04 Ron De Santis, avec des chances réelles de devenir le prochain président des États-Unis, s'en prend aujourd'hui à l'apprentissage dans les écoles,
05:11 et notamment la possibilité pour des enfants, parfois très jeunes, d'être informés sur les différences de genre et les différences en matière d'orientation sexuelle.
05:22 Est-ce que vous considérez qu'il y a là danger de voir des politiques vouloir prendre des positions ?
05:27 C'est évidemment inquiétant. La société américaine est une société très polarisée, avec un mouvement progressiste très fort d'un côté,
05:36 et puis un mouvement conservateur, réactionnaire, qui s'oppose à tous les progrès sociétaux.
05:44 Au niveau fédéral, aujourd'hui, on a des leaders progressistes, mais nous ne savons pas quel sera le visage de l'Amérique demain.
05:53 On doit pouvoir continuer à informer les enfants, même très jeunes, dans les écoles sur ces différences.
05:57 C'est important de sensibiliser les enfants au respect des différences, de lutter contre les discriminations.
06:04 Vous parliez de la Hongrie. Il faut parler de la Russie. On est très inquiet sur ce qui se passe en Russie.
06:14 Il y a la guerre, évidemment, qui est absolument horrible. Ça met ce sujet au second plan.
06:19 Mais la Russie a pris en novembre dernier une loi qui interdit d'évoquer dans l'espace public les écoles, la culture, la question LGBT,
06:30 sous peine d'amende qui peut valer jusqu'à 160 000 euros. Et les sanctions ont commencé à tomber.
06:35 Il y a des groupes, des milices qui se sont constituées sur tout le territoire de la fédération pour surveiller les communautés LGBT
06:43 et qui cherchent la confrontation. Et puis, il y a un narratif qui s'est développé autour des valeurs traditionnelles.
06:52 Le Kremlin considère que sa mission, c'est de défendre les valeurs traditionnelles et la menace.
06:56 Une des menaces contre les valeurs traditionnelles, c'est les personnes LGBT qui sont donc désignées comme des ennemis.
07:03 C'est très dangereux. On sait bien que la violence des propos, la violence des paroles, précède malheureusement souvent la violence des actes.
07:12 Merci beaucoup Jean-Marc Berthoud, ambassadeur ici en France pour les droits des personnes LGBT+.

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