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Il y a un peu plus de deux ans, le 16 septembre 2022, Mahsa Amini, jeune étudiante kurde mourrait sous les coups de la police iranienne pour quelques mèches de cheveux s’échappant de son voile. C’est l’injustice de trop pour la population iranienne, qui commence à se soulever aux cris "Femme, Vie, Liberté". La répression est féroce, la révolution tant attendue n’a pas eu lieu, mais le feu couve sous la cendre. Ce documentaire exceptionnel propose une plongée dans les coulisses de ce soulèvement inédit en Iran.
Quelques semaines après la mort en Iran de la jeune étudiante kurde Mahsa Amini sous les coups de la police, le réalisateur iranien Shooresh Afkari nous contacte. Il veut "lutter à sa manière, en faisant ce qu’il sait faire : filmer et donner à voir l’histoire qui s’écrit sous ses yeux". Il nous envoie donc les images qu’il a tournées dans ce pays, où les caméras ne sont pas les bienvenues, et nous avons ensuite monté le film en France. Ce documentaire est le journal intime de ce tournage réalisé clandestinement.À lire aussiIran : deux ans après la mort de Mahsa Amini, une "révolution culturelle" est en marcheRaconté à la première personne dans les pas du réalisateur iranien, ce film montre une galerie de personnages hauts en couleurs, représentatifs de cette population iranienne à bout de forces et de patience, mais déterminée à se battre pour plus de liberté : un couple d'adolescents qui rêvent de vivre leur amour au grand jour, un chauffeur de taxi, farouche opposant, et sa mère qui tente coûte que coûte de le protéger, une peintre qui e... Lire la suite sur notre site web.
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Transcription
00:30Je vous propose de m'appeler Shouresh.
00:37En persan, ce prénom signifie « rébellion ».
00:44J'ai 37 ans et j'ai vécu toute ma vie dans l'une des grandes villes d'Iran.
00:50Pour ma sécurité et celle de ma famille, je ne peux pas être plus précis.
00:58Si jamais ma véritable identité vient à être découverte,
01:02je risque une condamnation à mort.
01:07En septembre 2022, le meurtre d'une jeune fille a bouleversé le pays.
01:16Gina Marsa Amini, une étudiante kurde de 22 ans,
01:21a été arrêtée le 13 septembre pour quelques mèches de cheveux s'échappant de son voile.
01:29Morte trois jours plus tard, sans doute des suites de coups reçus de la part des forces de l'ordre.
01:38Une injustice de plus, l'injustice de trop.
01:46Les femmes d'abord, rejoignent ensuite par les jeunes hommes,
01:52puis toute la population sont descendues dans les rues malgré le danger.
02:02Le mouvement Femmes, Vies, Libertés est né.
02:08J'ai décidé de participer à ma manière en faisant ce que je fais le mieux.
02:16Prendre ma caméra et filmer.
02:24Pour raconter notre colère et suivre les destins de courageux protestataires.
02:31Une étudiante.
02:35Un chauffeur de taxi.
02:39Une peintre.
02:42Un médecin.
02:45Et une mère de famille.
02:52Salut Virginie, je ne sais pas si tu te souviens de moi,
02:56je t'ai croisée au festival du film de...
02:59C'est notre amie commune qui m'a conseillé de te contacter.
03:03Je veux faire un documentaire sur la révolte qui a lieu en ce moment en Iran.
03:07C'est impossible pour moi de tout faire tout seul d'ici.
03:11J'aimerais avoir un co-réalisateur sur ce projet et j'ai pensé à toi.
03:16Je t'enverrai les images et tu pourrais faire le montage en Europe.
03:27Salut Shouresh, ravi de savoir que tu vas bien.
03:30Evidemment je suis partante, mais tu es bien conscient des risques que ça représente pour toi et éventuellement ta famille ?
03:38Je sais tout ça, mais je n'ai pas le choix.
03:41Il faut qu'on témoigne, il faut que le monde sache.
03:46Le chemin a été long.
03:49Il a fallu prendre beaucoup de précautions.
03:52Filmer le plus discrètement possible, souvent avec un simple téléphone portable.
03:58Utiliser des messageries cryptées.
04:01Changer régulièrement de compte et de numéro.
04:05Convenir de mot de passe pour déjouer la surveillance des services de sécurité.
04:11Mais finalement mes images et nos histoires sont arrivées jusqu'à vous.
04:53La première fois que j'ai vu Mitra, elle a surgi d'une ruelle en courant.
05:01Telle une apparition au milieu des gaz lacrymogènes.
05:07Elle fuyait la police après avoir perdu un ami.
05:11Elle a été arrêtée par la police.
05:14Telle une apparition au milieu des gaz lacrymogènes.
05:20Elle fuyait la police après avoir participé à une manifestation.
05:25Par réflexe, je lui ai ouvert la portière de ma voiture.
05:29Elle a sauté dedans sans hésiter.
05:45Derrière son apparence de frêle jeune fille, je comprends rapidement que j'ai à côté de moi
05:50l'une des plus déterminées du mouvement.
05:53Toujours prête à battre les rappels des troupes.
06:00Salut à tous.
06:02Mais qu'est-ce que vous faites ?
06:04Pourquoi vous ne venez pas ?
06:07Demain, ils ont prévu d'exécuter deux d'entre nous.
06:10C'est aujourd'hui le moment de sortir.
06:13Je vous en supplie, venez s'il vous plaît.
06:31Je m'appelle Mitra, j'ai 18 ans.
06:34Je suis étudiante en premier semestre de comptabilité.
06:37Je suis née et j'ai grandi dans une famille religieuse.
06:42Je suis prisonnière de ma maison et je sors très rarement.
06:46Je me lève le matin sans objectif, sans savoir quoi faire.
06:52Nous, les femmes iraniennes, n'avons pas de véritable avenir.
06:57Ici, une femme vaut la moitié d'un homme.
07:00Elle est considérée comme une marchandise.
07:04Mais si nous luttons aujourd'hui, c'est que nous sommes remplis d'espoir.
07:08De belles choses nous attendent bientôt.
07:17Quelques jours après notre rencontre, Mitra me laisse un message.
07:21Elle a quelqu'un à me présenter.
07:24Il s'appelle Arash. Il a 19 ans.
07:27Cela fait un peu plus d'un an qu'ils se fréquentent.
07:30Brisant ainsi l'un des grands tabous de la République islamique d'Iran.
07:36La première fois que j'ai vu Arash,
07:39j'étais de sortie avec une de mes camarades.
07:42En réalité, ce jour-là, je n'avais pas remarqué Arash.
07:49Je venais à peine de sortir et ma mère n'arrêtait pas de m'appeler.
07:54Et puis, mon ami m'a dit que ce gars
07:57dont je ne me souvenais pas
08:00avait dit qu'il m'aimait bien et qu'il voulait mon numéro.
08:05Et nous avons commencé à nous parler et appris à nous connaître.
08:09Mais en Iran, il est très difficile d'avoir une relation,
08:12surtout à 18 et 19 ans.
08:15Mais nous n'avons aucune liberté, nous ne pouvons rien faire.
08:18Si nous allons au parc, nous serons repérés par la police.
08:21Dans les rues, tout le monde nous surveille.
08:24Et nous ne pouvons même pas faire l'amour.
08:30Par exemple, une fois, Mitra est venue chez nous.
08:38Nous ne faisions rien de spécial.
08:41Nous étions vraiment assis à distance
08:44et nous faisions des recherches sur Internet.
08:47Et ma mère est arrivée.
08:52On ne faisait rien de mal.
08:55Mais parce qu'une fille était avec moi, dans notre maison,
08:58c'était une catastrophe pour notre réputation.
09:03Ma mère est entrée dans une rage folle.
09:06Elle s'est précipitée vers nous et nous a giflés tous les deux.
09:09Nous avons commencé à parler,
09:12nous avons commencé à parler,
09:15elle s'est précipitée vers nous et nous a giflés tous les deux.
09:25À quoi tu penses ?
09:28À la liberté.
09:31Allez, imaginons que nous soyons libres.
09:45Si on était libres, on ferait ce qui nous plaît.
09:49On pourrait se tenir la main dans la rue.
09:54Et surtout, je voudrais absolument t'embrasser, en pleine rue.
09:58Hormis ces deux jeunes amoureux, pleins de rêve et d'espoir,
10:01Jopin a trouvé d'autres témoignages.
10:04Mes compatriotes ont trop peur pour s'exposer.
10:11Allô, ça va ?
10:14Oui, ça va.
10:17J'espère que tu vas bien.
10:20Oui, ça va.
10:23J'espère que tu vas bien.
10:27Allô ? Salut, comment ça va ?
10:30Alors, où es-tu ? Tu devais venir.
10:33Honnêtement, j'y ai beaucoup réfléchi et je ne peux pas.
10:38Et je te conseille d'abandonner ce projet.
10:46Je commence à douter de pouvoir mener à bien ce documentaire,
10:49lorsque je rencontre KV.
10:53Ce jour-là, je prends un taxi
10:56pour me rendre à l'autre bout de la ville.
10:59En engageant la conversation, je réalise vite
11:02que le chauffeur fait partie des révolutionnaires les plus virulents.
11:06Malgré les risques, il accepte immédiatement
11:09de participer à notre projet.
11:16Dans cinq minutes,
11:19je vais te montrer où vivent les membres du gouvernement et les mollas.
11:27Regarde, ça, ça appartient à nos dirigeants.
11:30Regarde un peu l'espace qu'ils ont
11:33dans le meilleur endroit de la ville.
11:36Tout ça leur appartient.
11:39J'ai peur de filmer.
11:42Ils ont des caméras.
11:45Laisse-moi faire un tour.
11:49Regarde ce bâtiment.
11:52Il appartient à l'imam des prières du vendredi.
11:55Un vrai château.
11:5850 familles pourraient vivre dans un immeuble de cette taille.
12:02Je me demande bien
12:05où ils trouvent tout cet argent.
12:08Ah, l'enfoiré.
12:11Regarde, il a un autocollant de l'ancien chef des gardiens de la Révolution.
12:14Je suis bien content que les Américains les réduisent en bouillies.
12:17Et j'aimerais bien avoir un cocktail Molotov en ce moment.
12:22Vraiment dommage que je ne puisse pas faire grand-chose.
12:38Je m'appelle Kaveh.
12:41J'ai 28 ans.
12:44Quand j'étais plus jeune, mon père était accro à la drogue.
12:47Un jour, il a quitté la maison et n'est jamais revenu.
12:54Moi, j'adorais étudier.
12:57Alors j'ai décidé de faire la plonge dans un restaurant
13:00pour pouvoir me payer l'université en parallèle.
13:03Mais j'ai dû arrêter.
13:10Je n'ai aucun avenir ici.
13:14Quand je vois que les enfants des riches politiciens ou des molas
13:17mènent la belle vie,
13:20qu'ils vivent tous en Europe ou aux Etats-Unis
13:23ou alors ici, dans les quartiers très riches.
13:26Et nous alors ? On travaille jour et nuit pour ne rien gagner.
13:29Quand tu vois notre situation,
13:32pourquoi ne pas manifester dans les rues ?
13:35Mais tout le monde me dit, tu vas te faire tuer.
13:38Et alors ? À quoi bon vivre dans ces conditions ?
13:45En traversant le pays à la recherche de nouveaux témoignages,
13:48je m'interroge.
13:51Comment le peuple iranien a-t-il pu supporter cela si longtemps ?
13:58Comment avons-nous pu survivre dans ce pays où tout est interdit ?
14:09Chanter et danser en public pour les femmes,
14:13se tenir la main, rire dans la rue,
14:16être heureux ?
14:24Comment l'Iran a-t-il pu former autant d'intellectuels et d'artistes
14:27avec cette chape de plomb de la censure ?
14:30Je décide de creuser cette question.
14:36Par l'entremise d'un ami,
14:39j'ai rencontré une jeune peintre.
14:45Je m'appelle Golbahar, j'ai 24 ans.
14:54Je viens d'une famille plutôt aisée.
15:02Mon père n'a jamais été trop strict.
15:05J'ai toujours pu vivre comme je le souhaitais.
15:10Ma mère a toujours tout fait
15:13pour ne pas porter le hijab obligatoire.
15:16Elle a d'ailleurs souvent eu des problèmes
15:19avec l'effort du régime à cause de ça.
15:34Je me souviens d'un épisode marquant pour moi.
15:37J'ai envoyé une de mes œuvres à une exposition.
15:43Elle avait été acceptée.
15:46C'était un portrait d'une femme avec les cheveux visibles.
15:49Et finalement, la responsable de l'exposition
15:52a couvert les cheveux avec du papier pour les cacher.
15:56Ça a été extrêmement violent pour moi.
16:04Après la mort de Massa Amini,
16:07avec plusieurs de mes amis,
16:13ensemble, on a trouvé la force
16:16de faire des films sur le sujet.
16:19C'est la seule chose que je sais faire.
16:22Alors par mon travail,
16:25j'exprime ma rage et ma protestation.
16:50Après chaque journée de tournage,
16:53je m'empresse d'envoyer les images à Virginie
16:56qui montera le documentaire à Paris
16:59et de les supprimer de mon disque dur.
17:02Si jamais je me fais arrêter,
17:05il ne faut surtout pas qu'elles soient en ma possession.
17:08Ni pour moi, ni pour les personnes que j'ai filmées.
17:11C'est ce que j'ai fait.
17:14C'est ce que j'ai fait.
17:17Mais le réseau Internet est extrêmement lent en Iran.
17:20Le régime le ralentit volontairement
17:23pour que les opposants aient du mal à communiquer entre eux
17:26et à organiser leurs actions.
17:29Et pour avoir accès à tous les sites
17:32et éviter de me faire repérer par les forces de sécurité,
17:35je dois passer par un VPN,
17:38un logiciel qui me géolocalise à l'étranger.
17:41Parfois, il me faut plus de 24 heures
17:44pour envoyer quelques minutes de vidéo.
17:54Cela fait maintenant quelques semaines
17:57que je n'ai plus de nouvelles de Mitra.
18:00J'ai essayé de la joindre, tenté de me renseigner
18:03pour savoir s'il lui était arrivé quelque chose,
18:06mais je n'ai trouvé aucun indice.
18:09Quand je reçois enfin un signe de sa part...
18:13Loki a entendu la sonnerie.
18:19Pour échapper à la surveillance oppressante
18:22de sa famille très religieuse,
18:25elle leur a fait croire qu'elle partait étudier à Téhéran
18:28à plusieurs centaines de kilomètres de là
18:31et qu'elle logerait dans un internat
18:34de jeunes filles très strictes.
18:37Alors qu'en réalité, Elle continue son combat
18:40avec son petit ami Arash.
18:42Ma famille m'a emmenée à la gare et m'a fait monter dans le bus.
18:46On avait prévu un plan avec Arash.
18:48Il a pris un taxi et a suivi le bus.
18:51...
19:03...
19:14Dès qu'on est sortis de la ville,
19:16j'ai demandé au chauffeur d'arrêter le bus pour que je puisse descendre.
19:21...
19:23Arash était là avec le taxi.
19:25...
19:36On ne savait pas où aller.
19:38...
19:45Un garçon et une fille qui se promènent la nuit,
19:49ça pouvait attirer l'attention de la police.
19:52On risquait d'être arrêtés.
19:55Finalement,
19:56on s'est cachés sous un pont pour que personne ne nous voie.
20:00...
20:06Et le lendemain,
20:07je suis partie à la recherche d'un lieu où dormir.
20:10...
20:13...
20:19Et puis, j'ai trouvé un petit boulot.
20:21...
20:27En partant ce soir,
20:29couvre-toi le visage pour ne pas être reconnu.
20:32...
20:34N'oublie pas qu'ils sont sans pitié.
20:36Ils frappent tout le monde.
20:37Sois prudente. Je reste à mes côtés et il ne se passera rien.
20:41...
20:44Si on m'arrête, je dis que je ne te connais pas.
20:48On dit qu'on va faire des courses, qu'on ne fait que passer.
20:52...
20:55Mais bon, ce sont des connards, des menteurs et des barbares.
20:59Ils te reprocheront toujours quelque chose,
21:01même si tu n'as rien fait de mal.
21:03...
21:05Arash, tu n'aurais pas dû les laver avec ça.
21:09Pourquoi ? Ça marche bien.
21:11Ça va rayer le fond.
21:12...
21:14D'accord.
21:16...
21:18Les gars, ce soir, à 23h, on se retrouve à la station 7.
21:22Assurez-vous de porter gants, masques, chapeaux,
21:25lunettes de soleil, vêtements confortables et chaussures adaptées.
21:28Vous avez l'habitude.
21:30On se retrouve tous et ensuite, on se répartira deux par deux.
21:34Et on fait ce qu'on a prévu.
21:36Au revoir.
21:37...
21:39Cris de joie
21:41...
21:43Depuis le début du soulèvement,
21:45j'entends parler de ces médecins qui soignent clandestinement
21:49les nombreux manifestants blessés.
21:51Impossible pour ces derniers de se rendre dans les hôpitaux
21:54sous peine d'être dénoncés au régime.
21:56...
22:02Alors, le Dr Soprani et ses collègues
22:05ont décidé de s'engager à leur manière
22:07en mettant leurs compétences au service de la cause.
22:11Il m'a fallu de longues semaines de discussion
22:13pour gagner sa confiance et le convaincre
22:16de me laisser l'accompagner dans ses tournées.
22:18...
22:24...
22:27...
22:29...
22:33...
22:39Prends une profonde respiration.
22:41...
22:45Ton rythme cardiaque est bon.
22:47Je vais t'examiner les yeux maintenant.
22:49...
22:57Là, ça ne va pas, ton œil s'est infecté.
22:59Je dois demander conseil à un spécialiste.
23:02Je te donnerai son numéro
23:03pour que tu puisses t'adresser directement à lui.
23:06Je t'en prie.
23:07...
23:14Je suis médecin depuis dix ans.
23:16Mon père était colonel
23:18dans la garde impériale du Shah d'Iran.
23:21Il n'a pas quitté l'Iran après la révolution islamique,
23:24donc il a été arrêté.
23:25...
23:30J'ai toujours été opposé
23:33au régime de la République islamique,
23:35mais je n'ai jamais participé à aucune des manifestations.
23:39Honnêtement, j'avais peur.
23:42...
23:44Mais quand la nouvelle de la mort de la jeune fille s'est répandue,
23:47la mort de Masa Amini,
23:49j'ai pu constater le nombre élevé de blessés et de morts,
23:53parce que j'étais en première ligne en tant que soignant.
23:56...
23:58Je me souviens d'une petite fille
23:59qui avait reçu un coup de bâton si fort sur la tête
24:02que son œil était sorti de son orbite.
24:05À ce moment-là, j'ai décidé de réagir
24:08et de faire tout ce que je pouvais pour aider les blessés.
24:11...
24:19Vos cicatrices vont mieux ?
24:22Je vais retirer le pansement pour regarder.
24:24Il y a eu des saignements.
24:26Je vais changer le pansement.
24:28J'ai beaucoup de maux de tête et de vertige.
24:31Ne vous inquiétez pas.
24:33Laissez-moi vérifier votre pression artérielle.
24:35...
24:43Vos vertiges sont dus à une baisse de tension.
24:46Je vais vous poser une perfusion et vous vous sentirez mieux.
24:49...
24:55Depuis 1979
24:57et l'avènement de la République islamique en Iran,
25:00à plusieurs reprises,
25:01le peuple a tenté de faire tomber le régime.
25:04...
25:07Mais pour la première fois, en ce début février 2023,
25:11j'ai l'impression que nous en sommes proches.
25:14...
25:16Dans la rue, on assiste à des scènes
25:18que je n'aurais jamais cru voir un jour.
25:20Des jeunes Iraniens n'hésitant pas
25:22à humilier publiquement dirigeants et religieux.
25:25...
25:33Mais nos élans d'euphorie sont régulièrement douchés
25:36par la réalité quotidienne.
25:39Alors que j'ai rendez-vous avec Kaveh,
25:41le chauffeur de taxi militant,
25:43pour la suite de notre tournage,
25:45je tombe sur sa mère inconsolable,
25:48au milieu de leur appartement dévasté.
25:50...
25:54Il était 8h ou 9h du matin.
25:58J'ai entendu du monde frapper à la porte.
26:00Je suis allée ouvrir.
26:02Plusieurs personnes sont entrées, le visage couvert.
26:05Je ne les connaissais pas du tout.
26:07Je ne savais pas qui ils étaient ni d'où ils venaient.
26:10Ils sont entrés dans la chambre.
26:13Kaveh dormait. Il rentrait du travail.
26:16Ils l'ont attrapé, ils l'ont emmené.
26:19À mon avis, c'était les services de renseignement,
26:21des gardiens de la Révolution.
26:25J'avais entendu dire qu'ils faisaient éruption,
26:27qu'ils emmenaient les jeunes.
26:29Je n'ai aucune idée de quel crime on l'accuse.
26:33Je n'ai aucune nouvelle de lui.
26:37Ils ne l'ayant rien pris ?
26:39Il n'y avait rien de suspect ?
26:42Ils ont pris le disque dur de son ordinateur,
26:44mais n'ont rien trouvé d'autre.
26:55Mitra, elle, a jusqu'à l'heure réussi à échapper à la police.
27:01Ses parents la croient toujours dans un internat
27:03géré par le régime à plusieurs centaines de kilomètres au-delà.
27:07Mais ne relâche pas la pression pour autant.
27:22Oui, maman, salut.
27:25Je t'ai dit que j'avais cours aujourd'hui,
27:27ça fait dix fois que tu m'appelles.
27:29Je suis en classe, je ne peux pas répondre au téléphone.
27:34Tu me saoules, j'en peux plus.
27:41Je t'ai dit que j'étais en cours toute la journée.
27:44Oui, j'ai des cours tous les jours.
27:48OK, je t'enverrai mon emploi du temps.
27:51Je te l'ai proposé, mais tu n'en as pas voulu.
27:55Tu n'as qu'à appeler l'université.
28:00Mais oui, bien sûr que je mets mon voile pour aller à l'université.
28:07OK, maman, ça suffit.
28:10J'en ai assez.
28:12Après quelques mois de flottement face au mouvement Femmes, Vies, Libertés,
28:16le régime est repassé à l'offensive.
28:19Le Guide suprême nous abreuve de discours de propagande
28:22sur les médias d'État.
28:23Pour les femmes,
28:25il faut porter des vêtements
28:29qui ne sont pas de la forme de deux mains et de deux doigts.
28:33C'est la même chose pour les hommes.
28:35Il faut porter des vêtements qui ne sont pas de la forme de deux mains et de deux doigts.
28:38Il faut porter des vêtements qui ne sont pas de la forme de deux mains et de deux doigts.
28:43C'est une chose qui ne se déroule pas.
28:48Les hommes sont musulmans,
28:50ils sont chrétiens, les femmes sont chrétiennes.
28:55Ils doivent consulter la loi de la ville.
29:01Dans la rue, une répression encore plus sévère s'organise.
29:08Un peu partout, des caméras de surveillance intelligente sont censées repérer et identifier
29:20les femmes ne portant pas le voile.
29:24Et les arrestations arbitraires pour étouffer toute résistance se multiplient.
29:31Personne n'est à l'abri.
29:32Virginie, c'est moi.
30:00J'ai été arrêté, mais j'ai réussi à m'échapper.
30:03J'ai dû me cacher quelques jours.
30:05J'espère que tu n'as pas essayé de me joindre, ils ont pris mon téléphone et ma
30:11caméra.
30:12Si jamais ils se rendent compte que je communique avec une occidentale...
30:15Tellement contente d'avoir de tes nouvelles, je n'en pouvais plus d'attendre.
30:22Comme promis, je ne t'ai envoyé aucun message, ne t'inquiète pas.
30:25En lisant les journaux étrangers sur Internet, je prends la mesure du nombre de victimes
30:35de notre mouvement.
30:36Près de 600 morts dans les manifestations, dont plusieurs dizaines d'enfants.
30:42Plus de 20 000 personnes auraient été arrêtées.
30:50Une dizaine a déjà été exécutée.
30:55D'autres attendent dans le couloir de la mort.
31:15Sans compter ceux qui, comme KV, le chauffeur de taxi, manquent toujours à l'appel.
31:22Qu'ils aillent tous au diable.
31:27Chaque jour, sa mère fait le tour des commissariats et des prisons pour tenter de retrouver sa
31:34trace.
31:35Ils me forcent à porter le tchador, ce maudit hijab obligatoire.
31:38Je suis obligée de porter ça pour m'adresser aux autorités.
31:43J'espère qu'ils iront tous en enfer.
31:47Je n'ai qu'un seul fils, je donnerai ma vie pour lui.
32:05Je ne peux pas rester assise et attendre.
32:07Et s'ils ne me donnent que son cadavre, comme tant d'autres ?
32:11Comment ça va ? Tout va bien ? Je suis arrivée, je suis juste à côté du tribunal en ce
32:23moment.
32:24Et personne ne me donne vraiment de réponse.
32:28Ils ne te répondront pas.
32:31Quand je leur dis son nom, ils me disent qu'il n'est pas là.
32:38Qu'est-ce que je dois faire ?
32:40Ils vont tuer mon fils.
32:42Non, ça n'arrivera pas, ne pleure pas.
32:45On va trouver une solution.
32:47S'il te plaît, fais quelque chose, je t'en supplie.
32:52Je vais d'abord voir si je peux le trouver, au moins pour savoir s'il est vivant ou non.
32:57Ils m'ont dit que je devais chercher dans les prisons, une par une.
33:00Mais lesquelles ?
33:10L'OTAN passe, cela fait maintenant plus de huit mois que le soulèvement a commencé.
33:31Nous espérions la chute rapide du régime, mais nous comprenons désormais qu'il faudra
33:38tenir sur la durée.
33:40Alors même que le quotidien est chaque jour plus insupportable en Iran.
33:50Entre les sanctions économiques internationales et nos dirigeants corrompus qui s'accaparent
33:56des quelques richesses qu'il nous reste, la population s'enfonce dans la pauvreté.
34:09Sommes membres de la misère, ces affiches qui fleurissent dans les grandes villes iraniennes
34:33proposant des organes contre monnaie sonnante et trémuchante.
34:36Avec la répression et la surveillance toujours plus grande, les manifestations se font plus
34:56rares.
34:57Mais une nouvelle forme de résistance se met en place, peut-être moins spectaculaire,
35:05mais tout aussi courageuse et déterminée.
35:28La jeune peintre Golbahor délaisse régulièrement ses pinceaux pour tenter d'entretenir la
35:34flamme de l'espérance.
35:35Si j'écris ce petit message, c'est parce qu'en ce moment, les Iraniens portent un fardeau
35:44de tristesse et de colère, trop lourd pour leurs épaules.
35:51Avec ça, je veux rappeler que nous devons garder espoir.
36:00Parfois, le quotidien est tellement dur, mais le fait de se souvenir que nous sommes nombreux,
36:10que nous sommes là les uns pour les autres, ça apaise nos souffrances et les rend supportables.
36:23Une initiative qui peut paraître anodine vu d'Occident, mais qui pourrait lui coûter
36:28au minimum de longues années de prison.
36:35Après plusieurs semaines de recherches vaines, la mère de Kaveh, le chauffeur de taxi,
36:41se raccroche désormais à tous les petits signes d'espoir.
36:47Là, je vais dans un marché.
36:49Il s'appelle le marché du diable.
36:53On m'a dit que je pouvais y trouver des pigeons blancs.
36:56C'est ce que je cherche maintenant, un pigeon blanc.
37:02Je le relâcherai, dans l'espoir que mon fils soit libéré aussi.
37:15Donne-lui de l'argent.
37:17Combien ça fait ?
37:2140 Tomans.
37:26C'est bon.
37:32Merci.
37:35Merci.
37:37Nous avons beaucoup d'espoir, et je suis certaine que notre révolution finira par l'emporter.
37:45Quant à Mitra et Arash, ils défilent au courant de la situation.
37:50C'est la première fois qu'ils s'entendent.
37:53C'est la première fois qu'ils s'entendent.
37:56C'est la première fois qu'ils s'entendent.
37:59C'est la première fois qu'ils s'entendent.
38:02Quant à Mitra et Arash, ils défilent au pouvoir en vivant leur histoire d'amour au grand jour.
38:13À la télé, les religieux disent que si nous subissons une grande sécheresse,
38:18c'est parce qu'on ne respecte pas l'obligation de porter le hijab que cela met Dieu en colère.
38:24Mais depuis que les femmes enlèvent leur voile,
38:26il pleut bien plus souvent.
38:33Cette année, il a vraiment beaucoup plu ici,
38:36à tel point qu'il y a maintenant une rivière qui traverse notre ville.
38:40Arash et moi avons décidé de nous y promener.
38:44J'avais dit à Arash que je voulais y aller sans voile.
38:48C'est vraiment des super moments.
38:51Mais en même temps, j'ai toujours peur qu'il se passe quelque chose.
38:56À tout instant, la police peut m'arrêter parce que je ne porte pas le voile.
39:02Ou bien un gardien de la Révolution peut m'abattre, de loin.
39:06Mais enlever mon voile et marcher tête nue me permet de me sentir libre.
39:15Surtout aux côtés de mon petit ami.
39:20Et c'est aussi parce que j'ai l'impression qu'il m'aime.
39:25Il m'aime beaucoup.
39:27Il m'aime beaucoup.
39:29Il m'aime beaucoup.
39:31Il m'aime beaucoup.
39:33Et c'est aussi pour manifester publiquement mon opposition au régime.
39:52Je suis allée au tribunal ce matin.
39:54Ils m'ont dit que la lettre pour la libération de Kaveh avait été délivrée.
39:58Mais ils ne me l'ont pas donnée.
39:59Depuis, j'attends ici.
40:01Mais il n'est toujours pas sorti.
40:03Je suis tellement inquiète.
40:15Oh, le voilà !
40:18Il est là.
40:24C'est lui.
40:29C'est lui.
40:37Bonjour, mon fils.
40:57Bonjour, maman.
40:59Qu'est-ce que tu vas tuer, mon chéri ? Mon bébé ?
41:01Ils vont nous tomber dessus si on reste ici.
41:23Tu m'avais promis de faire attention.
41:26J'ai fait attention, maman.
41:27J'y suis pour rien.
41:29Tu n'as pas idée de ce que j'ai vécu pendant tout ce temps.
41:34C'est ma voiture.
41:36Je savais que tu serais content de l'avoir.
41:38Alors je suis venue avec.
41:47Je suis tellement anxieuse.
41:49C'est mieux si c'est toi qui conduis.
41:51J'ai été placé à l'isolement pendant 40 jours.
41:54Je ne savais pas où j'étais.
41:58Je ne pouvais pas savoir si on était le jour ou la nuit,
42:01ni quelle heure il était.
42:03Il n'y avait personne.
42:06Et puis quelqu'un est venu me parler.
42:08Je ne savais pas si je pouvais le croire.
42:10Il a dit qu'il était juge
42:12et que j'avais été condamné à 20 ans de prison.
42:15Qu'est-ce qu'il a dit ?
42:17Il a dit qu'il était juge.
42:18Et qu'il était condamné à 20 ans de prison.
42:20Quelle horreur.
42:22Dieu merci, tu es libre, Kv.
42:24Dieu merci.
42:27Sois plus prudent à partir de maintenant.
42:29S'il te plaît, nous sommes sous surveillance.
42:31Je t'en supplie, j'en peux plus.
42:34Il faudra bien qu'ils finissent par dégager un jour.
42:37Tu te feras tuer.
42:39Au moindre faux pas, ils ne te louperont pas.
42:43Tu dois faire attention.
42:45Si quelque chose se passe,
42:47je manifesterai à nouveau
42:49jusqu'à ce que ces salauds soient partis.
42:51Fais attention.
42:53Tu n'auras pas toujours la chance de t'en sortir vivant.
42:54Je t'en supplie.
43:24Je suis allé à une arrestation.
43:26Mais je sens que l'étau se resserre.
43:29La police me convoque régulièrement au commissariat,
43:32interroge mes proches sur mes allées et venues et mon travail.
43:36Il est temps pour moi de partir.
43:47Une dernière fois, je m'imprègne de ces paysages,
43:50de ces odeurs qui ont bercé toute ma vie.
43:55Je ne sais pas ce qui m'attend de l'autre côté de la frontière.
43:59Mais une chose est certaine.
44:01Dès la chute de la République islamique,
44:04je serai de retour dans mon pays.
44:24Je ne sais pas ce qui m'attend de l'autre côté de la frontière.
44:27Mais une chose est certaine.
44:29Dès la chute de la République islamique,
44:32je serai de retour dans mon pays.
44:35Je ne sais pas ce qui m'attend de l'autre côté de la frontière.
44:38Mais une chose est certaine.
44:40Dès la chute de la République islamique,
44:43je serai de retour dans mon pays.
44:46Je ne sais pas ce qui m'attend de l'autre côté de la frontière.
44:49Je ne sais pas ce qui m'attend de l'autre côté de la frontière.
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