Xerfi Canal a reçu Eric Le Deley, Directeur académique de l’ISTEC Business School, pour parler de l'innovation pédagogique par les échecs.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Bonjour Eric Ledelet.
00:14 Bonjour Philippe.
00:15 Eric Ledelet, vous êtes directeur académique de l'ISTEC Business School,
00:18 qui est membre du chapitre des grandes écoles.
00:20 Une grande originalité, Eric Ledelet, je vais vous faire une confidence,
00:25 je ne sais pas jouer aux échecs.
00:27 C'est dommage.
00:28 Donc j'ai été très très surpris d'apprendre que vous,
00:30 non seulement vous saviez jouer,
00:31 mais vous en aviez fait une innovation pédagogique.
00:34 Donc j'ai voulu vous recevoir pour en parler.
00:36 Alors concrètement, qu'est-ce que vous avez fait à l'ISTEC ?
00:40 Enfin vous avez fait l'ISTEC aux échecs, jouer aux échecs.
00:43 Exactement.
00:45 Il y a un professeur, et je lui rends hommage là maintenant,
00:48 il y a un professeur qui est venu me voir l'année dernière
00:50 en me proposant de faire jouer les étudiants aux échecs,
00:53 parce qu'il y a de nombreuses qualités qui sont rattachées à ce jeu-là.
00:56 Et donc on a fait deux choses.
00:58 D'abord, on a mis des échiquiers un peu partout dans l'école,
01:01 y compris un grand échiquier dans la salle des profs,
01:03 histoire que les profs puissent jouer avec les étudiants
01:04 et qu'ils ne soient pas ridicules.
01:05 Et puis surtout, on a mis des cours d'échecs obligatoires
01:08 dans le programme Grand École et dans le programme Bachelor,
01:10 parce que ça fait le lien avec les enseignements qu'ils reçoivent,
01:16 et puis surtout les grandes écoles sont grandes
01:19 parce qu'elles ont toujours donné plus que juste les disciplines de gestion,
01:23 et que les échecs font partie des codes, des sociocodes
01:26 que les étudiants doivent acquérir.
01:28 Parce que finalement, quand on fait une grande école,
01:30 ce n'est pas juste pour aller travailler en entreprise,
01:32 mais c'est pour devenir un adulte intègre, éclairé,
01:34 qui soit capable d'interagir dans la vie économique,
01:36 politique, sociale du pays.
01:38 Et donc c'est cette dimension-là qui nous intéresse,
01:41 et c'est pour ça qu'on a mis en place le jeu d'échecs.
01:44 C'est absolument...
01:45 Quand je suis allé discuter avec vous, ça m'a vraiment passionné.
01:48 Quelles sont les valeurs, finalement, pédagogiques
01:51 qu'on trouve dans les échecs,
01:52 que vous faites passer auprès de vos étudiants ?
01:55 Qu'est-ce que ça développe aussi comme qualité chez eux ?
01:58 Alors, ça développe plein de qualités, on les connaît tous.
02:00 D'abord, ça développe de la concentration accrue,
02:02 ce qui aide pour les cours.
02:03 Ça développe la rigueur, la mémoire.
02:05 Ça développe l'attention, ça développe la stratégie.
02:08 Ça développe l'anticipation, le sens de la compétition.
02:11 Et donc tout ça, c'est effectivement des qualités
02:14 dont les étudiants ont besoin d'abord pendant leurs études,
02:17 et puis ensuite qu'on retrouve, qu'on retrouve dans le ventre d'entreprise.
02:20 Et puis ça les aide aussi pour le passage vers l'entreprise.
02:23 On a une histoire amusante, il y a quelques semaines,
02:25 il y a un de nos étudiants qui cherchait un emploi,
02:27 et il arrive dans le bureau du recruteur,
02:28 il voit un échequier, il commence à discuter avec le recruteur,
02:31 qui lui propose de faire une partie.
02:32 Et donc, il a commencé son entretien en jouant aux échecs avec le recruteur,
02:36 et il a eu le poste.
02:38 C'est excellent.
02:39 Alors finalement, là, vous évoquez justement une prise de poste.
02:41 Quel lien avec la vie professionnelle ?
02:43 En quoi ça a une proximité entre les échecs,
02:45 le jeu d'échecs et la vie professionnelle ?
02:48 Oui, le lien, il est évident.
02:50 C'est que les échecs, c'est un jeu simple, avec des règles simples.
02:53 Alors, je vous encourage à les apprendre,
02:56 mais il y a des règles simples et les combinaisons sont infinies.
02:59 Un peu comme la vie professionnelle, et finalement, aux échecs,
03:01 et dans la vie professionnelle,
03:02 on retrouve les mêmes trois grands principes de la stratégie,
03:05 qu'on appelle aussi les principes de Foch,
03:07 qui sont d'abord la concentration des forces,
03:08 chercher à toujours agir là où on est le plus fort,
03:11 là où on a le plus d'atouts.
03:13 Deuxièmement, tout ce qui est économie de moyens,
03:15 comment je peux chercher à faire mieux avec moins,
03:17 comment je peux chercher l'efficience.
03:19 Et puis, surtout, la liberté d'action,
03:21 c'est-à-dire que notre liberté d'agir,
03:23 elle est toujours entravée par un certain nombre de contraintes.
03:24 Alors, aux échecs, c'est 64 cases.
03:26 Dans la vie professionnelle, c'est les contraintes légales,
03:29 les contraintes familiales, les contraintes financières
03:31 qu'il faut en permanence chercher à optimiser.
03:33 Et donc, le lien se fait assez naturellement.
03:35 C'est vraiment passionnant.
03:37 Finalement, accessoirement, l'échec, c'est une langue universelle.
03:41 L'échec, c'est une langue universelle,
03:42 puisqu'on le remarque avec nos étudiants internationaux
03:44 qui arrivent en France et qui ne parlent pas forcément
03:48 bien le français et qui peuvent jouer avec nos étudiants
03:51 parce que, comme les maths, c'est une langue universelle.
03:55 Et puis, autre lien qu'on peut faire,
03:57 c'est que, et on va peut-être parler un peu d'échec,
03:59 je vais peut-être vous donner envie de jouer.
04:03 En fait, aux échecs, il y a toujours un début de partie, une ouverture.
04:06 Il y a toujours un milieu de partie et une fin de partie.
04:08 Et quand on le rapproche d'une prise de poste,
04:10 d'une rentrée dans la vie professionnelle,
04:12 finalement, il y a toujours un début, une prise de poste.
04:14 C'est les règles aux échecs.
04:16 Quand on commence une partie, c'est d'abord de développer ses pièces,
04:19 de montrer ses atouts, d'occuper le centre
04:21 pour pouvoir contrôler son écosystème et son environnement
04:25 et puis surtout de roquer.
04:26 Alors, le rock, aux échecs, c'est un mouvement
04:28 où on a le droit de bouger deux pièces en même temps.
04:29 C'est le seul coup aux échecs qu'on a le droit de faire ça.
04:31 Et donc, pour mettre son roi à l'abri
04:33 et donc savoir ce qui est essentiel pour soi.
04:35 Et donc, le lien avec la vie professionnelle
04:37 se fait extrêmement bien, extrêmement facilement.
04:40 Bon, vous m'avez convaincu.
04:41 Donc, un, je vais apprendre les échecs
04:43 et deux, je vais venir vous défier sur un plateau à l'ISTEC.
04:47 Alors, n'hésitez pas, venez défier nos étudiants.
04:49 Surtout que là, ils se préparent d'arrache-pied
04:50 pour le tournoi de fin d'année avec les diplômés.
04:53 Comme ça, on crée aussi de l'intergénérationnel
04:55 puisqu'on va faire un grand tournoi au mois de juin
04:57 entre nos diplômés, nos alumnis et puis les étudiants de l'école.
05:01 Excellent.
05:02 En tout cas, une chose est certaine,
05:04 c'est que la vraie innovation pédagogique,
05:05 elle n'est pas forcément technologique.
05:07 C'est d'abord l'innovation de les idées.
05:09 Exactement.
05:10 Merci Eric Tedelet.
05:11 Merci Jean-Philippe.
05:13 [Musique]
05:18 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]