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Mercredi 12 avril 2023, SMART BOURSE reçoit Nicolas Leprince (Gérant multi Asset & overlay, Edmond de Rothschild AM)

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00:00 [Musique]
00:10 Pour entamer cette émission, commençons justement avec le marché obligataire
00:15 avant les réunions de Banque Centrale et c'est Nicolas Leprince qui est avec nous en plateau pour en parler.
00:19 Gérant multi-assets et Overlay chez Edmond de Rothschild Assets Management.
00:22 Bonjour et bienvenue Nicolas.
00:23 Bonjour Grégoire.
00:24 Avant de parler du mois de mai et des prochaines décisions des Banques Centrales,
00:27 il faut revenir quand même sur le mois de mars qui est encore récent dans les esprits
00:31 et qui a profondément modifié la psychologie des marchés des investisseurs Nicolas.
00:36 Oui, très clairement depuis le début de l'année on était toujours la poursuite de la thème sur l'inflation ou la désinflation.
00:43 On voyait des chiffres d'inflation qui surprenaient un petit peu à la hausse
00:47 et là la psychologie a changé et les marchés se tournent beaucoup plus vers le côté systémique du secteur bancaire américain, peut-être européen.
00:56 On a vu la croissance, l'impact que ça va avoir sur la croissance.
01:01 On a vu que la Fed l'a largement pris en compte puisqu'au final au lieu de monter ses taux de 50 BP
01:06 comme ce qui était un peu promis par Jeremy Powell, elle n'a fait que 25 BP.
01:11 On voit des membres de la Fed, Goolsbee encore hier, nous dire que c'est quelque chose à prendre largement en compte,
01:17 que dans les indicateurs de marché cette contraction du crédit,
01:22 ce qui se passe au niveau du système bancaire américain c'est certainement équivalent à 25 à 50 BP de hausse de taux.
01:28 Donc là où on voulait peut-être atteindre 5,75 aux Etats-Unis, on n'a certainement plus besoin
01:32 et donc les marchés refocusent sur la croissance, sur les risques systémiques.
01:38 Ça a eu un impact fort sur la corrélation, désolé d'être un tout petit peu technique,
01:43 mais ça donne certainement du vent arrière aux marchés obligataires.
01:49 Puisqu'on a vu que là où tout au long de 2022 on avait une corrélation qui était ce qu'on appelle positive,
01:54 c'est-à-dire que quand les actions baissaient, le prix des obligations baissait également.
01:58 Ça a été complètement l'opposé au mois de mars et on est re-rentré dans un régime de corrélation négative
02:03 avec des marchés obligataires qui nous protègent globalement dans tout ça.
02:07 Et ça c'est une clé quand même pour la stabilité des investissements dans une gestion diversifiée par exemple ?
02:13 Exactement, quand on prend nous notre point de vue sur les obligations,
02:17 depuis le début de l'année on a été soit neutre soit positif,
02:20 et ce changement de corrélation c'est quelque chose qui est logique.
02:24 C'est-à-dire que quand on a un scénario de désinflation comme c'était le nôtre,
02:27 même s'il est peut-être un peu moins prononcé que ce qu'on attendait,
02:30 très clairement dans un schéma de désinflation on retrouve des corrélations qui sont bonnes
02:34 avec des banques centrales qui sont certainement un peu moins agressives.
02:37 Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'inflation.
02:39 Non.
02:40 C'est plus le sujet numéro un.
02:43 Mais l'inflation n'est pas revenue à 2% pour autant.
02:45 Non, exactement.
02:47 Les chiffres d'inflation, celui qu'on aura cet après-midi,
02:50 sont toujours des chiffres qui sont importants pour les marchés financiers.
02:52 On va beaucoup les regarder, on va beaucoup les commenter.
02:54 Mais on n'est pas certain que ce soit le principal chiffre.
02:56 Ce qu'il faut voir c'est que pour une banque centrale,
02:58 il y a quand même beaucoup plus d'inflation que ce qu'elle pensait.
03:01 Ce mois-ci, c'est le premier mois que l'inflation cœur aux États-Unis
03:05 sera supérieure à l'inflation totale, c'est-à-dire en dehors des éléments volatiles.
03:09 Quand on prend le pricing de marché sur l'inflation aux États-Unis,
03:14 quand on prend le glissement annuel qui est attendu en juin 2023,
03:17 ce glissement annuel de juin 2023, en début d'année,
03:20 était attendu un peu au-dessus de 2%.
03:22 Aujourd'hui, il est attendu à plus de 3%.
03:24 Donc, ça veut dire bien qu'on a quand même beaucoup plus d'inflation qu'attendu.
03:28 Pourquoi ? Parce que le marché de l'immobilier
03:31 contribue toujours très positivement à la croissance de l'inflation.
03:34 Le consommateur est résilient, les salaires continuent d'augmenter.
03:40 On verra, là, sur les derniers chiffres d'emploi,
03:44 on a eu ce qu'on appelle les "Average Early Earnings",
03:46 c'est-à-dire les salaires horaires, qui ont plutôt eu tendance à baisser.
03:50 Mais il y a d'autres indicateurs qui pointent toujours sur des salaires
03:52 qui sont assez dynamiques aux États-Unis et en zone horaire également.
03:56 Tout ça, ça ne veut pas dire qu'il n'y a plus d'inflation,
03:58 ça veut juste dire que les banquiers centraux ont changé un petit peu leur fusil d'épaule
04:02 et l'inflation n'est certainement plus le cœur du problème aujourd'hui.
04:05 La fonction de réaction des banques centrales change, évolue,
04:08 s'adapte à un environnement où le risque financier, voire systémique,
04:12 est plus important qu'il ne l'était il y a quelques mois.
04:16 Qu'est-ce que ça implique en matière de décision et en termes de stratégie
04:20 pour la politique monétaire future ?
04:22 Partant toujours de l'idée que l'inflation n'est pas revenue à 2%
04:25 et que le problème de l'inflation reste quand même là, sous nos yeux aujourd'hui.
04:28 Ça veut dire qu'elles auront du mal à couper les taux, très clairement.
04:31 Le marché, on va dire, est logique, c'est-à-dire que le marché anticipe
04:35 que les taux vont baisser d'ici à la fin de l'année aux États-Unis,
04:38 ce qui est relativement logique dans une phase de stress.
04:41 Mais les banques centrales nous disent qu'elles ne vont pas vouloir le faire.
04:45 Donc on en revient sur le momentum de dégradation, soit de la croissance,
04:49 soit d'un événement plus spécifique sur le secteur bancaire.
04:52 On voit bien que le marché s'attend encore à d'autres événements.
04:55 On verra les résultats en effet des forces républicaines vendredi,
04:58 mais ça sera je pense très difficile de les lire.
05:01 Mais c'est vrai que l'impact de la croissance est assez diversifié en ce moment.
05:06 On voit bien qu'aux États-Unis, on prend les ISM qui ont été publiés la semaine dernière,
05:11 donc des indicateurs d'activité avancée, ce sont des indicateurs qui ont pas mal baissé.
05:15 Et notamment dans ces composantes, les composantes de nouvelles commandes ont beaucoup baissé.
05:20 Nouvelles commandes soit manufacturières, soit dans les services.
05:22 Donc ça c'est quelque chose qui est quand même pris assez négativement
05:25 ou de façon assez prudente par les marchés financiers.
05:27 Si on regarde le reste du monde, si on prend des indicateurs d'activité globaux,
05:31 on n'est pas du tout sur un ralentissement très marqué.
05:34 On prend ce qu'on appelle les globales PMI.
05:36 En fait on est quelque chose qui est en rebond,
05:39 qui montre qu'on est pratiquement au potentiel de croissance globalement dans le monde.
05:44 Et donc est-ce qu'on va avoir une dichotomie avec les US qui ralentissent plus fort que le reste du monde ?
05:48 On a vu les PMI chinois notamment qui étaient plutôt bons.
05:51 Chez les DRAM, on a plutôt l'impression qu'on va pas avoir de découpling
05:55 et que les leaders c'est toujours les US.
05:58 Si les US calent, certainement le monde calera également.
06:02 Ce qui va se passer aux Etats-Unis dans les prochains mois va se retrouver,
06:06 alors avec plus ou moins de décalage,
06:09 mais se retrouvera chez nous en Europe en l'occurrence, si on parle de la zone euro.
06:13 De ce côté-là, les indicateurs qu'on va beaucoup regarder,
06:16 ça va être vraiment le comportement du consommateur US.
06:18 Donc si on regarde cette semaine, oui le chiffre d'inflation est important,
06:21 mais le chiffre de vente au détail qu'on aura vendredi aux Etats-Unis,
06:24 est aussi extrêmement important pour nous.
06:27 Quand on prend la confiance du consommateur aux US,
06:29 on a eu des enquêtes qui ont été faites après la faillite de SVB,
06:33 la banque américaine qui a fait faillite,
06:36 la confiance du consommateur américain n'était pas si mauvaise que ça.
06:40 Donc on est vraiment dans des eaux un peu troubles,
06:44 et on est toujours très centré sur les US et la lecture qu'on va avoir sur les Etats-Unis.
06:49 Comment réfléchit à la vitesse et l'ampleur à laquelle le credit crunch peut s'intensifier,
06:59 partant notamment des événements bancaires du mois de mars,
07:02 sachant, et beaucoup l'ont noté, que déjà les mois précédents,
07:06 les conditions d'octroi de crédit bancaire commençaient à se resserrer,
07:11 et en Europe, et aux Etats-Unis.
07:13 Exactement, on avait déjà des croissances de masse monétaire,
07:16 aussi bien aux Etats-Unis qu'en zone euro, qui étaient négatives,
07:19 on voyait bien qu'il y avait un ralentissement,
07:21 on a plutôt l'impression que mars est une accélération de ce phénomène,
07:25 avec une prise en compte peut-être un peu plus forte,
07:28 soit par les marchés financiers, on verra les provisionnements au sein des grandes banques,
07:33 savoir si ça augmente énormément, ce qui va être un signe d'anticipation de resserrement,
07:37 encore des conditions de crédit globalement,
07:39 mais on part déjà de conditions qui se dégradent depuis 6 à 12 mois,
07:42 de façon assez généralisée.
07:44 L'impact sur la croissance sera forcément important,
07:48 mais si on regarde le multiplicateur monétaire,
07:51 est-ce que la croissance de la masse monétaire a un impact très fort ?
07:55 On voit bien que les multiplicateurs sont relativement faibles en ce moment.
07:58 Est-ce que ça aura un impact très fort sur la croissance ? Non.
08:00 Donc c'est pour nous vraiment le consommateur américain qui fera la croissance encore.
08:04 Qu'est-ce qu'on peut dire peut-être des marchés de crédit,
08:07 notamment de ce point de vue-là, Nicolas ?
08:10 On va parler des marchés actions dans un instant,
08:12 avec une volatilité, un vix qui montre quand même une détente réelle,
08:17 un apaisement réel sur les marchés actions.
08:21 On a vu beaucoup de volatilité sur les marchés obligataires, de dettes souveraines.
08:25 Qu'en est-il notamment aussi des marchés de dettes d'entreprises ?
08:29 Est-ce qu'il y a un début de stress ou des signaux faibles d'un stress potentiel,
08:34 de ce point de vue-là, Nicolas ?
08:36 Les marchés sont très partagés sur cette question,
08:38 puisque ça va vraiment dépendre du scénario de croissance.
08:40 Ce qu'on voit, c'est que le marché de crédit ne montre pas de signaux de stress très importants.
08:45 Forcément, il y a eu un stress assez important sur le secteur bancaire,
08:48 avec ce qui s'est passé aux États-Unis, ce qui s'est passé sur Crédit Suisse,
08:51 il y a eu un impact assez fort.
08:53 Mais quand on prend les marchés de crédit globaux,
08:56 qu'ils soient Investment Granted, qu'ils soient High Yield, qu'ils soient Corporate,
08:59 on n'a pas de signaux extrêmement forts qui nous incitent à être extrêmement négatifs sur ces classes d'actifs-là.
09:04 Il faut avoir en tête que forcément, si on rentre dans une récession,
09:07 les spreads de crédit ont tendance à monter, donc c'est plutôt négatif sur cette classe d'actifs.
09:11 Mais on part déjà sur des niveaux qui sont déjà très importants.
09:14 Donc non, il n'y a pas de stress particulier.
09:17 On sera attentifs, bien sûr, s'il y a des événements de crédit particuliers.
09:20 Mais pour le moment, on va dire la robustesse de la croissance,
09:23 on va certainement vers un chemin de décélération,
09:25 mais la robustesse de la croissance fait que les entreprises ont pu se refinancer
09:29 de façon très importante en 2021, en 2022, en 2020 également.
09:33 Et il n'y a pas de stress très important pour le moment sur les marchés de crédit.
09:36 Qu'est-ce que ça implique en matière de stratégie d'investissement
09:39 dans l'univers obligataire aujourd'hui, Nicolas ?
09:42 Est-ce que c'est le moment d'aller reprendre de la duration ?
09:45 Je sais que beaucoup d'investisseurs étaient un peu partagés,
09:47 voire frileux pour certains sur cette question de la duration.
09:50 Est-ce que le mois de mars et les événements du mois de mars changent la donne de ce point de vue-là ?
09:53 C'est ce que j'ai dit sur la corrélation.
09:55 Forcément, l'obligataire a beaucoup plus de place dans un portefeuille diversifié.
09:59 Localement, il nous semble que l'effet de stress du mois de mars
10:03 a peut-être plongé les taux sur des niveaux qui sont peut-être un petit peu trop bas.
10:07 Donc, globalement, chez Edram, on va rester plutôt neutre sur les obligations d'un point de vue global.
10:11 Et on va toujours chercher à avoir beaucoup de carré dans nos portefeuilles.
10:14 Ça va être des parties courbes de courbe de taux sur du crédit.
10:17 Ça va être des instruments monétaires dans les portefeuilles
10:20 avec plutôt l'optique de renforcer la duration sur des remontées de taux
10:26 qui seront pour nous relativement limitées.
10:28 Ça y est, il y a une logique « by the dip » dans le marché obligataire.
10:31 Chaque fois qu'on verra le marché obligataire corriger un peu trop fortement sur la partie longue,
10:36 ça veut dire des rendements qui remontent, ce seront des points d'entrée à certains niveaux.
10:41 On peut se dire que les taux vont déjà un petit peu baisser, ça c'est sûr.
10:45 Mais quand on regarde le positionnement des acteurs de marché, on voit qu'ils sont globalement neutres.
10:50 Ils sont venant très short sur les années 2021-2022.
10:55 Ils sont revenus globalement neutres avec cet événement.
10:58 Ce qui fait qu'il y a encore de la place pour avoir plus d'attrait pour le fixed income dans les portefeuilles.
11:03 Merci beaucoup Nicolas.
11:04 Nicolas Leprince, gérant multi-asset et overlay chez Edmond Drotty, d'Asset Management,
11:08 qui était l'invité de Smart Bourse à la mi-journée,
11:10 a un peu moins de deux heures maintenant de la publication du rapport mensuel sur l'inflation aux Etats-Unis pour le mois de mars,
11:16 qu'on débriefera évidemment dans l'émission ce soir à partir de 17h.
11:19 17 heures.

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