Imaginez que vous ayez l’occasion de converser avec un nettoyeur de scène de crime et que vous puissiez lui poser toutes vos questions sans tabou ni limite.
Trois personnes sont venues échanger à l’aveugle avec Julien Martel. Séparés par un rideau, ils s’entendent mais ne se voient pas.
Merci à Julien Martel pour sa confiance et pour son partage d'expérience !
Retrouvez le groupe N.A.D sur instagram : https://www.instagram.com/groupe_nad/
Merci à nos invités : Aurélien (@aurelienbruel), Adrien (@adrien_jre) et Méline (@melinerobert)
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Youtube : https://www.youtube.com/@originesmedia
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AmusantTranscription
00:00 À force de nettoyer des scènes de crime, tu dois savoir commettre le crime parfait ?
00:03 Est-ce qu'il y a déjà eu des réseaux illégaux qui vous ont appelés pour nettoyer des scènes de crime ?
00:07 Pour vous, quelle est la scène la plus étrange que vous avez eu à nettoyer ?
00:11 Est-ce qu'il t'est déjà arrivé de travailler sur des affaires fortement médiatisées ?
00:14 Est-ce qu'à force de voir des scènes de crime, tu as perdu fond en l'humanité ?
00:17 En quoi consiste votre métier ?
00:19 Mon métier consiste à nettoyer tous les lieux où il y a eu un décès.
00:23 Donc on a trois types de décès.
00:27 On a les homicides, les suicides et les découvertes tardives.
00:31 Sur un homicide, on va nettoyer toutes les traces de sang.
00:34 Les découvertes tardives, on va enlever tout ce qui est fluide biologique humain
00:38 dû à la décomposition, les suicides et les attentats aussi quand il y en a, malheureusement.
00:44 Quelles sont les scènes sur lesquelles tu interviens le plus souvent ?
00:46 Les scènes où on intervient le plus souvent, c'est les découvertes tardives.
00:51 Ce sont les fin des décès qui sont restées au minimum cinq jours dans les lieux,
00:58 au maximum comme on a pu avoir deux ans dans les lieux.
01:00 Il y a des logements qui sont tellement bien conçus que c'est complètement hermétique,
01:04 que ce soit au niveau olfactif ou au niveau auditif.
01:08 Donc en fait, on ne sent rien, on n'entend rien, on ne voit rien.
01:11 Et nous, ça nous est arrivé d'intervenir chez un jeune qui est décédé,
01:15 qui ne parlait plus à sa famille.
01:17 Il est resté deux ans dans les lieux.
01:19 Alors on se dirait, tiens, mais deux ans, il n'y a plus rien, voilà, c'est sec, enfin boum.
01:24 Et bien, figurez-vous qu'au bout de deux ans,
01:27 quand on a soulevé la couverture et ainsi de suite,
01:30 c'était encore très, très humide.
01:33 Et c'est un appartement où on a dû tout refaire dans l'appartement, tout démonter.
01:37 Puis il y avait l'odeur, on a les flux biologiques qui ont eu le temps de s'infiltrer dans les sols,
01:43 sous les cloisons, et on a dû découper ces cloisons, enlever les sols
01:48 et faire d'autres choses encore dans le logement pour pouvoir le rendre vraiment sain.
01:53 - Quand il y a un homicide, vous intervenez à quel moment ?
01:56 - Eh bien, on intervient, nous, lors de la levée de l'obstacle judiciaire,
02:00 c'est-à-dire les scellés qu'on appose sur l'entrée du logement, tout simplement.
02:04 Donc, il y a deux types d'intervention.
02:06 Soit on est mandaté par la famille ou soit on est réquisitionné par les parquets.
02:10 Donc, la réquisition, elle se fait de plus en plus maintenant,
02:13 mais c'est vraiment dans un cadre vraiment spécifique.
02:16 Ce n'est pas pour toutes les familles, malheureusement.
02:19 - Et généralement, ça prend combien de temps de nettoyer une scène ?
02:23 - Tout va dépendre des dégâts que l'on a suite au décès.
02:27 Alors, ça peut être une journée ou une demi-journée, suivant ce que l'on a,
02:31 et puis ça peut aller jusqu'à 10, 15 jours, suivant les dégâts,
02:33 si on va devoir démonter certains éléments, si on a du fluide qui est rentré en profondeur.
02:38 Puis après, il y a le cheminement du fluide que l'on va suivre,
02:40 parce qu'entre le point là où il y a eu le décès, ce qu'on appelle le point zéro,
02:45 où vous avez eu le décès,
02:47 vous pouvez avoir des fluides qui peuvent être à l'autre bout de la pièce,
02:49 mais seulement ils se sont infiltrés sous les sols, sous les cloisons,
02:53 et au fur et à mesure, vous démontez, puis vous suivez le cheminement de ce fluide, tout simplement.
02:58 Mais après, en fait, il y a des nuances quand même.
03:00 Entre quelqu'un qui se suit dans sa salle de bain, dans sa baignoire,
03:04 qui s'est tailladé les veines et qu'on retrouve le soir ou le lendemain,
03:07 et quelqu'un, mettons, qui s'est mis à coup de fusil de chasse,
03:10 forcément, ça ne sera pas la même chose.
03:13 Comment on en vient à devenir nettoyeur de scènes de crime ?
03:16 C'est quoi ton parcours ?
03:17 Alors, je suis un ancien militaire de carrière.
03:18 Ensuite, j'ai enchaîné pas mal de petits boulots.
03:21 Et après, j'ai atterri dans le funéraire par hasard.
03:23 Le fait d'être en contact avec ces familles, ça me plaisait,
03:26 de pouvoir les conseiller, les soutenir.
03:29 Et là, je me suis dit, au vu de ce que certaines familles ont pu nous rapporter
03:33 au sein du Pompe Funerne,
03:34 je m'étais dit, tiens, il y a quelque chose à faire.
03:37 Il faut vraiment apporter une qualité d'intervention à toutes ces familles,
03:40 parce que ce n'est pas un simple nettoyage avec une serpillière, un aspirateur,
03:45 enfin voilà, j'en passe.
03:46 Déjà que les obsèques, ça a un coût,
03:48 et que forcément, ces interventions-là, elles ont aussi un coût.
03:50 Le but, c'est que l'opération se fasse en une seule fois,
03:53 pour qu'après, elles puissent en fait tourner la page.
03:55 Alors, quand je dis tourner la page, je mets des guillemets,
03:57 c'est dans le sens qu'elles puissent recommencer leur vie.
04:01 Parce que quand il y a un décès,
04:02 que ce soit donc une découverte tardive, un homicide ou un suicide,
04:06 le temps devient figé.
04:07 Et tant que le logement où il y a les traces du décès n'est pas fait,
04:10 ces familles-là, elles ne peuvent pas se reconstruire,
04:12 reprendre en fait le cours de leur vie.
04:14 On apprend à vivre avec l'absence d'une personne.
04:17 Du coup, est-ce que c'est toi qui vas t'occuper
04:20 de tout ce qui est suicide voyageur pour les trains, etc ?
04:23 Franchement, elle est super cette question.
04:25 Alors, il y a quelque chose que je ne comprends pas.
04:26 On a été contacté, mais je pense que je ne suis pas la seule société,
04:29 on n'est pas la seule société à avoir été contacté, par la SNCF,
04:31 en disant, voilà, écoutez, on a besoin de sociétés
04:34 qui pourraient intervenir dans leur suite au suicide avec les trains,
04:37 parce que nos chauffeurs sont marqués,
04:38 et puis ce n'est pas à nous de faire le nettoyage, ceci, cela.
04:41 OK, très bien, pas de problème.
04:43 On n'a jamais eu d'appel.
04:45 Donc, je ne comprends pas.
04:46 C'est très, très rare en fait.
04:49 Voilà, on a eu des appels pour des trams, des choses comme ça,
04:52 mais on n'a pas eu d'appel pour nettoyer des locaux.
04:56 Donc après, je veux bien, je veux bien comprendre tout,
04:59 mais à un moment donné, quand on vous appelle pour vous dire ça,
05:02 et puis qu'on ne vous appelle jamais, alors que...
05:04 On sait très bien qu'il y a souvent,
05:07 même très souvent des suicides sur les voies ferrées.
05:09 Il y a un truc qui n'est pas cohérent dans le discours.
05:12 Donc, je ne sais pas, peut-être que mes confrères, eux, le font.
05:15 J'espère, au moins que quelqu'un le fait,
05:17 parce que sinon, peut-être qu'un jour,
05:21 on se réveillera un peu plus, je ne sais pas.
05:23 Mais en tout cas, j'espère vraiment du fond du cœur
05:25 qu'il y a quand même des sociétés qui sont appelées pour le faire.
05:28 Est-ce que, après je sais que ce n'est pas forcément facile,
05:30 mais est-ce que tu te souviens des premières scènes que tu as nettoyées,
05:33 et l'impact un petit peu que ça a eu pour toi,
05:35 et comment ensuite tu as décidé d'évoluer ?
05:36 Donc, il y a une scène, c'était une femme qui est décédée,
05:40 mais elle s'est suicidée.
05:41 Pour être totalement transparent, elle s'est tranchée la gorge.
05:43 Son mari, le soir, revient chez lui à la maison,
05:46 et il retrouve sa femme allongée dans la salle de bain avec la gorge tranchée.
05:50 Je vous laisse imaginer la scène qu'il a pu voir.
05:54 Donc, nous, on est appelés, on arrive, on regarde ce qui se passe.
05:58 Là, malheureusement, le mari, il ne voulait pas sortir de la maison.
06:03 Donc, à partir de ce moment-là, ça a été très compliqué pour nous,
06:06 parce qu'on a dû nettoyer toutes ces traces de sang avec les cris.
06:10 Et ça, c'est très, très, très, très difficile.
06:12 Encore aujourd'hui, j'en suis marqué.
06:14 Voilà, on a beau dire "ouais, tiens, c'est un nettoyeur,
06:17 lui, il peut, il n'y a rien qui le marque",
06:20 mais il y a des situations qui vous marquent au fer rouge jusqu'à la fin de vos jours,
06:24 quoi qu'il arrive.
06:25 Et cette intervention a été très dure psychologiquement,
06:28 puisque j'étais avec ma femme aussi sur cette intervention-là.
06:31 Et même ma femme, pendant l'intervention, elle-même pleurait.
06:34 Parce que quand vous vivez ça, en fait, vous travaillez dans un stress.
06:39 Mais comme vous êtes sur une intervention, entre guillemets,
06:42 votre cerveau, il est programmé pour nettoyer, quoi,
06:45 essayer de faire abstraction de ce qui se passe autour.
06:48 Mais la machine humaine est tellement bien faite
06:51 que même si vous êtes concentré sur ce que vous faites,
06:54 tout ce que vous allez entendre ou vous faites abstraction pendant l'intervention,
06:57 ça vous revient après comme un boomerang.
06:59 Donc même des années après.
07:00 Donc un nettoyeur, c'est pas un robot.
07:02 Un nettoyeur, c'est un être humain.
07:04 Je suis un être humain, mais c'est un métier, il faut le savoir,
07:07 c'est un métier où vous allez absorber
07:10 toutes les émotions des familles que vous allez vous occuper.
07:13 Donc ça, c'est une, pour répondre à la question,
07:16 c'est vraiment une des interventions qui m'a marqué.
07:18 J'en ai une deuxième qui nous a aussi marqué,
07:20 mais pour ma part, différemment.
07:23 On est intervenu sur un double omicride, sur l'équisation d'un parquet.
07:27 Alors je peux pas donner l'histoire exacte,
07:30 mais c'est le mari qui a tué sa femme et sa fille.
07:36 On avait pas trop de détails, nous, au départ,
07:38 et puis en discutant avec les personnes en charge de l'enquête,
07:43 on a compris un petit peu.
07:44 Et puis des fois, on fait des petites recherches aussi
07:46 pour comprendre ce qui s'est passé au niveau des médias.
07:49 Parce que souvent, les homicides que l'on effectue chez Nouveau Groupe NAD,
07:52 c'est des homicides qui ont été médiatisés.
07:54 Jusque là, tout va bien,
07:56 mais quand on est rentré dans la maison,
07:59 on ne savait pas l'âge de l'enfant.
08:01 Et quand on est rentré dans cette maison-là,
08:03 je suis tombé tout de suite nez à nez avec la photo de cet enfant
08:07 et avec la petite chaussure qui restait dans les lieux,
08:10 dans cette mare de sang.
08:12 J'ai dû retourner la photo pour que je puisse travailler,
08:15 puisque je suis papa.
08:18 En fait, cette petite fille ressemble à ma fille.
08:21 Donc c'est très, très difficile.
08:22 Vous voyez, je suis encore marqué aujourd'hui aussi,
08:24 mais différemment.
08:26 - Du coup, quand vous arrivez sur une scène de crime,
08:28 est-ce qu'à force, au fil des années,
08:30 vous arrivez à identifier à peu près
08:32 quel crime a pu être commis ?
08:34 - Alors depuis toutes ces années, en fait,
08:37 on arrive, à certaines fois, pas tout le temps,
08:39 mais on peut arriver à identifier la scène de crime avec ses projections,
08:44 si c'était plus ou moins violent,
08:46 si on n'est plus sûr, en fait,
08:49 quelqu'un qui aurait été agressé à l'arme blanche, tranchante.
08:52 Ça, on peut déterminer grâce, en fait, aux micro-coutelettes,
08:54 tout simplement, qui peuvent être projetées
08:57 sur les différentes surfaces.
08:59 Il y a quelque chose d'intéressant, c'est oui,
09:01 des fois, on...
09:03 Sur des suicides, admettons,
09:05 des fois, la gendarmerie ou la police ont besoin de retrouver l'ogive.
09:10 - La balle. - Le projectile, en fait, de l'arme à feu.
09:12 Mais malheureusement, ils n'arrivent pas à mettre la main dessus.
09:14 Nous, on arrive, on fait notre travail,
09:17 mais comme du coup, on est vraiment dans le domaine de "on élimine tout",
09:22 donc on a forcément plus de temps que l'enquêteur,
09:24 qui est peut-être sur place à ce moment-là.
09:26 Et il nous arrive, du coup, de retrouver les ogives,
09:29 et puis ces ogives-là, donc c'est les projectiles d'arme à feu,
09:31 on les remet à l'enquêteur, qui était responsable de l'enquête.
09:37 Voilà, tout simplement, ça nous arrive.
09:39 - Où vont les déchets des nettoyages ?
09:41 - Je les brûle dans mon jardin.
09:44 Non, les déchets souillés, souillés,
09:47 suivent la filière des dasseries.
09:49 Voilà, c'est les déchets hospitaliers,
09:51 que le TANATO d'ailleurs utilise aussi,
09:53 ils mettent ça dedans, c'est des fûts,
09:54 ou des fois vous avez des cartons avec des sacs en plastique, tout ça.
09:57 Et ça va directement en incinération, avec revalorisation énergétique.
10:03 Puisque le but aussi, chez nous,
10:06 vous pouvez pas vous approcher de vous, je ne sais pas,
10:07 mais chez nous, on a deux choses,
10:09 c'est de limiter l'impact sur l'être humain et l'environnement.
10:12 Donc dans toute action que vous allez faire,
10:14 il faut essayer de limiter ses impacts.
10:16 Donc ça passe par des produits,
10:17 donc on va utiliser des produits qui n'ont pas de COV,
10:20 donc c'est les composés organiques volatiles,
10:21 parce qu'on n'est pas là pour empoisonner les gens.
10:23 - Est-ce qu'il y a déjà eu des réseaux illégaux,
10:25 ou des personnes qui cachaient leur identité,
10:27 qui vous ont appelé pour nettoyer des scènes de crime ?
10:30 - Ah ouais, alors ça je m'en souviens.
10:33 Alors ça faisait pas longtemps en fait,
10:35 quand nous étions ouverts,
10:36 et justement j'avais une journaliste avec moi,
10:38 c'est ça le pire.
10:38 Et j'ai le téléphone donc, qui sonne, je décroche,
10:42 puisque ma priorité, même si je suis en interview,
10:44 et j'ai le téléphone qui sonne, je vais décrocher.
10:46 Pas par manque de respect,
10:47 mais c'est parce que à l'autre bout de la ligne,
10:49 j'ai une famille qui a besoin d'aide.
10:52 Bon, je décroche, et le premier truc qu'on me dit,
10:55 alors mot pour mot, écoutez, j'ai fait une connerie,
10:57 j'ai besoin que vous venez nettoyer,
10:58 votre prix sera le mien.
11:00 Ce qui était bien, c'est que j'avais mis l'aux-parleurs,
11:02 puisque la journaliste, ça tombait bien,
11:04 je voulais qu'elle voie un petit peu la discussion qu'on pouvait avoir,
11:06 l'échange qu'on pouvait avoir avec une famille.
11:07 Donc elle, elle était aussi estomaquée,
11:09 puisqu'elle entend ça,
11:10 donc je lui explique gentiment à ce monsieur,
11:12 je lui dis, c'est super sympa d'avoir pensé à moi,
11:14 mais je pense qu'il va falloir qu'il aille avec ses problèmes,
11:15 d'abord avec la police,
11:16 et ensuite, il fait appel à nous.
11:17 Donc il raccroche,
11:18 et puis peu de temps après, il me rappelle de nouveau.
11:21 Elle me dit, oui, bon du coup, c'est bon,
11:22 on a un peu nettoyé,
11:23 mais vous ne pourriez pas passer pour quand même bien nettoyer ?
11:27 J'explique que non, ça ne va pas être possible,
11:28 et qu'il faut vraiment qu'il appelle la police,
11:30 parce que c'est soit un canular,
11:31 ou soit c'est vraiment réel,
11:32 il s'est passé quelque chose,
11:33 et voilà, il faut qu'il appelle la police.
11:35 Moi, je n'avais pas de numéro,
11:36 puisqu'il m'a appelé en inconnu,
11:37 donc c'était compliqué pour moi de rappeler la police
11:40 en expliquant l'appel que j'ai eu.
11:42 Si je n'ai pas de numéro de téléphone à donner,
11:44 pas de nom, je n'ai rien du tout, vous voyez ?
11:45 Moi, je suis un nettoyeur de l'autre côté de la barrière.
11:48 Je fais les choses dans un cadre légal.
11:50 Il ne faut pas faire n'importe quoi avec ce métier-là,
11:52 parce qu'effectivement, quand on passe sur une scène,
11:55 on va tout enlever, tout.
11:57 Est-ce qu'il y a une odeur sur les scènes ?
11:59 Et si oui, comment vous faites pour la supporter ?
12:01 Alors sur les découvertes tardives,
12:02 oui forcément, on a une odeur,
12:03 puisqu'on a eu de la putréfaction.
12:05 Vous allez avoir des gens qui vont réussir à supporter l'odeur,
12:07 d'autres pas.
12:08 Je pense que ça dépend des personnes.
12:10 Moi, je la supporte.
12:12 Des fois, quand c'est très fort,
12:14 alors on va utiliser d'autres systèmes respiratoires,
12:17 comme des masques à assistance ventilée.
12:19 Donc c'est une cagoule que l'on va mettre
12:21 avec un moteur derrière et une cartouche
12:22 qui va permettre d'envoyer toujours de l'air en permanence.
12:25 C'est sûr que c'est une odeur qui est marquante
12:27 pour ceux qui n'ont pas l'habitude.
12:28 C'est une odeur de danger à l'origine de la putréfaction.
12:32 Donc on va plutôt avoir tendance à éviter cette odeur,
12:35 à ne pas rentrer dans le lieu, à reculer.
12:37 Pour vous, quelle est la scène la plus étrange
12:40 que vous avez eue à nettoyer ?
12:42 Donc un jour, on intervient sur un décès,
12:45 une découverte tardive.
12:46 Une personne qui est restée, une dame qui est restée
12:48 une semaine dans le logement.
12:50 Et c'est une dame qui était malade.
12:53 Elle avait une infection, tout ça.
12:55 Elle s'est cognée, elle a fait une chute, elle est décédée,
12:57 ce qui arrive dans pas mal de cas.
12:59 Pendant la décontamination,
13:00 quand on a enlevé les revêtements de sol,
13:03 on s'est rendu compte que dans ce logement,
13:05 il y avait déjà eu un autre décès.
13:07 On a eu cette tâche qui ne devrait pas être là normalement,
13:09 parce qu'elle ne correspond pas à ce décès-là.
13:11 Voilà les petites choses étranges qu'on peut trouver.
13:14 Je suppose qu'à force de nettoyer des scènes de crime,
13:17 tu dois savoir commettre le crime parfait ?
13:19 En plus, je le connais, mais je sais le nettoyer.
13:23 Il n'y a pas de crime parfait.
13:24 Parce qu'aujourd'hui, dans beaucoup de pays,
13:27 on a des enquêteurs qui sont spécialement dans ce qu'on appelle
13:29 les "cold case", où justement,
13:31 ils sont là pour retrouver les auteurs de crimes autres,
13:34 mais qui a 15-20 ans.
13:35 La preuve, on retrouve des auteurs de crimes au bout de 20-30 ans.
13:39 Donc, il n'y a pas de crime parfait.
13:42 Quand on fait un crime, on commet toujours des erreurs,
13:44 même si on pense qu'on n'a pas fait d'erreur.
13:46 Ça peut être très simple.
13:47 Vous pouvez très bien vous couper sans vous en apercevoir.
13:51 Vous pouvez très bien laisser un poil, un cheveu, un postillon,
13:54 des choses comme ça.
13:56 Mais c'est vrai que si je devrais commettre un crime,
13:58 je saurais comment nettoyer. Voilà.
14:00 Est-ce que vous avez du mal à parler de votre métier
14:03 quand on vous demande ce que vous faites ?
14:04 Non, du tout.
14:05 Pourquoi aurais-je honte de mon métier ?
14:07 Moi, je n'ai pas du tout honte et je ne suis pas gêné de parler de mon métier.
14:10 Bien au contraire.
14:11 Je suis quelqu'un qui est très ouvert.
14:12 Et je suis là pour justement faire prendre conscience aux gens
14:15 que ce métier existe et qu'on ne peut pas s'improviser nettoyeur.
14:19 Et qu'à un moment donné, quand on vit un drame,
14:21 quel que soit le décès,
14:23 quand il y a des traces du haut décès,
14:25 il faut prendre une société spécialisée
14:29 pour qu'elle puisse traiter cette problématique.
14:31 Et du coup, comme tu disais auparavant, tu as des enfants ?
14:33 Oui, c'est ça. Oui, j'ai deux enfants.
14:36 Est-ce que tu as ouvert le dialogue avec eux par rapport à ce que tu faisais ?
14:38 Si oui, tu l'as fait de quelle manière ?
14:39 Ah oui, parce que c'est important de parler de ça.
14:41 On est dans un pays qui est incroyable.
14:43 On est en 2023, mais qu'est-ce qu'on régresse ?
14:46 Il y a encore dans les années 30-40,
14:48 on faisait des photos avec nos défunts quand même.
14:50 Il faut quand même le savoir.
14:51 Avant que Kodak lance les premiers appareils photo
14:53 où les gens pouvaient les acheter.
14:54 Aujourd'hui, on ne peut plus parler de la mort.
14:56 C'est quelque chose qui effraye, qui fait peur.
14:57 Mais la mort, en quoi elle fait peur ?
14:58 Je suis désolé, il y a un début, il y a une fin.
15:00 Et puis moi, je pense que c'est important de préparer les enfants
15:03 à la vie tout court, mais à leur dire
15:05 qu'à un moment donné, il y a la mort.
15:07 Un jour, je vais mourir.
15:08 Donc, c'est important d'en parler,
15:09 prévoir des choses aussi pour nos enfants.
15:11 Parce que des fois, moi, je vois des choses,
15:14 quand on intervient, il n'y a pas grand-chose de préparé.
15:16 Donc, c'est les enfants qui doivent se débrouiller
15:18 ou les autres membres de la famille qui doivent se débrouiller pour tout.
15:21 Ils vont se débrouiller pour les obsèques.
15:22 Toutes les choses vraiment qui tournent autour du décès,
15:25 ils vont devoir se débrouiller tout seuls.
15:27 Non, moi, je suis désolé, il faut en parler à leurs enfants.
15:29 Moi, j'en parle à mes enfants.
15:30 Je dis, voilà, je leur explique la mort, ce que c'est.
15:32 Enfin bon, voilà.
15:33 Et puis, je parle surtout de mon métier.
15:35 Alors, j'en connais encore qui vont dire
15:36 "Ah, mais lui, il parle de son métier à un enfant de 10 ans."
15:41 Je m'en fiche.
15:41 Moi, mes enfants, ils m'ont déjà demandé de voir des photos.
15:43 Alors, je leur ai montré certains types de photos,
15:46 parce qu'il y a des scènes qui sont quand même très hardcore.
15:48 Bon, voilà, il faut le dire.
15:49 Et voilà, ils sont préparés.
15:50 Ils voient en fait aussi les drames qu'il peut y avoir dans la vie
15:54 et que la vie, c'est quelque chose de précieux.
15:56 Parce que le jour où vous mourrez, c'est fini.
15:58 Moi, je vois des familles qui me disent des fois
15:59 "Ah, si on avait su, on aurait parlé."
16:02 Mais ouais, mais c'est pas maintenant qu'il faut parler.
16:05 C'est bien avant qu'il faut régler les problèmes.
16:07 Je pense qu'il faut un petit peu relativiser
16:09 et puis plus, je pense, être proche les uns des autres.
16:12 Pourquoi est-ce que tu as besoin de prendre des photos des scènes ?
16:15 Alors ça, c'est pour nous...
16:17 Quand on arrive sur une scène, on fait un fichage de scène.
16:20 Ça va nous permettre, si jamais il y aurait un litige quelconque,
16:24 il n'y en a jamais eu, donc ça va,
16:25 mais il y aurait un litige quelconque,
16:26 de pouvoir emmener les preuves de notre travail.
16:29 Donc on fait un fichage de scène avant, pendant, après.
16:31 Ça permet vraiment de montrer toutes les étapes.
16:33 Et si la famille décide de nous demander des clichés photos,
16:35 qu'on puisse lui fournir les clichés photos, tout ça.
16:38 Beaucoup de gens l'oublient,
16:39 mais quand vous êtes un chef d'entreprise et que vous faites de la désinfection,
16:43 vous êtes responsable à vie de votre intervention.
16:46 Malgré des choses qu'on peut voir dans des conditions générales,
16:50 ou si au bout de 48 heures, la famille n'a pas émis d'objection à l'intervention,
16:54 qu'ils peuvent plus se retourner, ceci, cela...
16:56 Enfin, j'en vois des verts et des pas mûrs.
16:57 Il faut savoir que vous êtes responsable à vie.
16:59 Donc si une famille, un jour, décide de se retourner contre untel ou untel ou untel,
17:03 elle pourra le faire sans aucun problème.
17:05 Donc nous, comme je l'ai dit, on est là pour être très transparents.
17:08 Donc on fait ces photos.
17:09 On va parler un peu showbiz.
17:11 Est-ce que tu es déjà arrivé de travailler sur des affaires fortement médiatisées ?
17:14 Oui.
17:15 J'imagine que tu ne vas pas forcément...
17:17 OK.
17:18 Alors il y en a une, je vais pouvoir raconter.
17:21 Donc c'était un roman sur Isère.
17:24 Donc c'était un attentat.
17:24 Voilà, c'était une personne qui est...
17:26 Qui a enlevé la vie à des gens à coups de sabre,
17:30 dans une boucherie, bureau de tabac, dans la rue,
17:33 des gens qui étaient au haut de chaussée,
17:35 devant leur fenêtre en fait, et puis ils se sont pris un coup de sabre.
17:37 Donc là, c'est une ambiance un peu spéciale quand même.
17:40 C'est un peu... Voilà.
17:42 C'est un peu spécial.
17:43 Est-ce que c'est quand même un métier qui rapporte ?
17:45 Est-ce qu'on pourrait avoir une franchette de prix ?
17:47 Alors déjà, ce métier ne me rapporte pas à moi, financièrement.
17:49 Il rapporte à l'entreprise.
17:51 On reste une entreprise.
17:52 Une entreprise doit vivre.
17:53 Et moi, je vais vous poser la question dans le sens,
17:55 est-ce que vous, vous travaillerez gratuitement ?
17:57 Non.
17:58 Bien.
17:58 Donc une entreprise ne peut pas travailler gratuitement.
18:00 Et puis en France, on n'a pas le droit de travailler gratuitement
18:02 ou de travailler à perte.
18:03 Ça n'existe pas.
18:04 Mais par contre, on peut travailler intelligemment sans abuser sur les tarifications.
18:09 Il y a un juste milieu à avoir.
18:10 Donc ça peut aller très bien de 5-600 euros à 20-25 000 euros.
18:14 Mais quand vous faites le calcul, quand vous faites de la rénovation intérieure,
18:18 on est à combien en moyenne ?
18:19 On est entre 1 000 et 1 500 euros du mètre carré.
18:22 Donc nos tarifs ne sont pas déconnants par rapport à ce qu'il y a à faire dans les logements.
18:26 Et je le répète, si on a une intervention, admettons, à 16 000 euros,
18:31 pour ceux qui vont mettre en commentaire,
18:32 eh bien dis donc, ça gagne bien, moi aussi je veux faire ça.
18:35 Ce n'est pas moi, le PDG du groupe NAD, qui a ces 16 000 euros.
18:39 Ça ne m'appartient pas.
18:40 Ça appartient à l'entreprise.
18:42 Donc voilà.
18:43 Après, que je gagne bien ma vie personnellement,
18:47 voilà, c'est ma vie, c'est comme ça.
18:49 Je donne ma vie aux familles et à mon entreprise.
18:52 Il faut bien comprendre un truc, c'est que quand vous faites ce métier-là,
18:55 c'est un métier qui est prenant, qui vous prend tout le temps.
18:58 Et je le fais volontiers, il n'y a pas de souci.
19:00 J'ai ma femme qui comprend tout ça, puisqu'elle travaille aussi dans l'entreprise.
19:03 Mais je donne tout.
19:04 Je sacrifie beaucoup de choses.
19:05 Est-ce que vous êtes prêts à sacrifier votre vie pour ces familles-là ?
19:09 Répondez à cette question et après, vous pourrez peut-être faire ce métier
19:12 convenablement et surtout correctement.
19:14 Mais c'est une vie de sacrifice.
19:16 Comment vous fixez vos prix ?
19:18 Du coup, sur quoi vous basez le mètre carré ?
19:19 Alors, non, parce que moi, je ne suis pas des femmes de ménage.
19:22 Donc on ne fonctionne pas au mètre carré.
19:23 Ça va être le temps passé dans les lieux, les consommables, tout ça,
19:26 le déplacement, l'immobilisation du véhicule technique,
19:29 parce qu'un véhicule technique d'intervention,
19:31 dedans, vous avez à peu près plus de 25 000 euros de matériel.
19:33 La consommation de vos fudasseries.
19:36 Donc les fudasseries, c'est une filière à l'origine
19:39 qui est pour les déchets hospitaliers, qui sont souillées.
19:42 Donc forcément, votre intervention, si vous passez,
19:44 je dis une bêtise moi, trois heures, un fût,
19:47 voilà, c'est sûr qu'elle sera moins coûteuse que si vous passez,
19:50 je dis une bêtise, 42 heures, 150 fûts,
19:54 le nombre de piques que vous avez besoin dans la semaine.
19:57 C'est par rapport aux dégâts que le décès a occasionné.
20:01 Et il faut bien comprendre, il y a ce que vous voyez tout de suite.
20:05 Et puis après, il y a les impondérables, ce que vous ne voyez pas.
20:07 Donc voyez, une intervention, c'est quand même très complexe.
20:10 Ce n'est pas un simple coup de serpillère
20:12 et puis je mets un one shot de destructeur d'odeur.
20:14 Là, ça sent bon la banane, la fraise ou la vanille ou la menthe,
20:16 ce que vous voulez. Ce n'est pas ça.
20:17 Vous ne faites pas vos prix comme ça à la volée.
20:20 Mais vous le faites toujours par rapport aux dégâts
20:22 et au temps que vous allez passer dans les lieux.
20:25 - Parlons un peu de spiritualité.
20:26 Toi, c'est quoi actuellement ta vision de la mort ?
20:29 C'est une fatalité ? C'est une fin ? C'est une continuité ?
20:32 Et est-ce qu'elle a évolué avec ton métier ?
20:33 - Alors non, parce que j'avais déjà une vision de la mort avant moi.
20:36 En fait, pourquoi on se dit forcément, quand on décède, tout s'arrête ?
20:40 Eh bien non, tout ne s'arrête pas.
20:41 Moi, je suis persuadé qu'il y a quelque chose après.
20:43 Pourquoi je dis ça ?
20:44 Alors, on peut très bien me prendre pour un fou, ce n'est pas grave.
20:46 Moi, ça ne me dérange pas.
20:47 C'est des choses que je vis avec,
20:49 que ce soit avec ma femme qui est encore sur le terrain ou d'autres techniciens.
20:52 On vit des choses parfois un petit peu bizarres sur nos interventions.
20:56 Alors, j'ai quelques anecdotes.
20:58 Un jour, on était en intervention dans un appartement.
21:00 J'étais avec un de mes partenaires, donc c'était dans le salon.
21:03 Et tout d'un coup, ils ont vu, en fait, devant eux,
21:05 un bouchon de vin partir de la cuisine, attirer dans le salon.
21:09 Voilà, ça, c'est une anecdote.
21:10 Après, on n'y croit pas, chacun fait comme il veut.
21:12 Ou on était sur une autre intervention.
21:14 J'étais donc à l'étage.
21:16 On a enlevé les sols de l'étage.
21:18 Donc, il n'y avait plus que les solives qui traversaient le bâtiment.
21:21 Et j'étais donc sur une solive.
21:24 Et à ce moment-là, moi, du coin de l'œil,
21:26 en fait, je vois ma combinaison qui est tirée comme ça.
21:29 La personne qui était en fosse de bois, elle a exactement vu la même chose
21:32 parce que, d'un coup, elle, je l'ai vue complètement blanc, livide.
21:34 Voilà.
21:35 Et en fait, quand elle m'a tiré,
21:37 j'avais le pied, en fait, sur un morceau de solive,
21:41 mais qui était...
21:43 Je ne l'avais pas vu, mais qui était, en fait, pourri.
21:45 Et quand j'ai enlevé, en fait, mon pied avec le mouvement,
21:48 c'est là où j'ai eu le morceau, en fait, de solive qui est tombé, tout simplement.
21:53 Voilà.
21:53 Alors, comme je le dis, on n'y croit, on n'y croit pas, chacun fait comme il veut.
21:57 Moi, je le vis.
21:57 Je ne le vis pas tous les jours, mais je le vis de temps à autre.
22:00 Et d'ailleurs, c'est pour ça que, quand je rentre dans un logement,
22:02 par respect, en fait, parce que je ne suis pas chez moi,
22:05 eh bien, je frappe à la porte.
22:06 Je préviens que je suis là.
22:07 Et c'est la moindre des choses.
22:09 Parce que...
22:09 Et j'ai remarqué souvent, quand on a affaire à ces phénomènes-là,
22:12 c'est souvent suite à des morts violentes subites.
22:15 Et c'est là où je me dis, peut-être que le défunt, tout simplement,
22:18 n'était pas au courant qu'il est décédé.
22:21 Parce que c'était subitement, c'est venu comme ça.
22:23 Qu'est-ce qui se passe dans le cas où il y aurait un décès
22:25 et une famille n'est pas apte à payer et qu'elle n'aurait pas les moyens ?
22:29 Alors, il y a trois types de familles, il faut le savoir.
22:31 Le premier type, c'est...
22:33 Malheureusement, c'est ça, c'est la réalité.
22:34 Vous avez des familles qui ont les moyens,
22:37 mais qui veulent quelque chose de très rapide, qui coûte presque rien.
22:39 Après, vous avez les familles qui ont peu de moyens,
22:42 mais qui veulent quelque chose de top.
22:44 Et où il y a une succession derrière,
22:46 donc ils vont pouvoir se retrouver financièrement, il n'y a pas de souci.
22:50 Et après, malheureusement, vous avez les familles qui voudraient quelque chose de bien,
22:53 mais il n'y a pas de succession et puis il n'y a pas d'argent.
22:56 Vous voyez, ça revient à ce que je disais,
22:58 c'était tout se résume quand même à l'argent, tout tourne autour de ça.
23:02 Donc après, on essaye de leur venir en aide,
23:04 parce qu'on ne peut pas laisser des familles comme ça.
23:07 Donc après, on trouve toujours un moyen de s'arranger pour leur venir en aide.
23:12 Et c'est pour ça que je dis toujours, ce métier-là,
23:15 je le répète et je le répéterai tout le temps,
23:17 c'est un métier qu'il faut faire par passion et non par raison.
23:21 - Est-ce qu'au fil des années, votre métier, vous a appris des choses sur vous-même ?
23:25 - Je suis quand même devenu un gars plus cool.
23:29 Il faut le dire, voilà.
23:31 Ça m'a appris en fait à être moi-même, tout simplement.
23:34 Parce qu'aujourd'hui, quand vous regardez, la plupart, vous discutez avec des gens,
23:40 des fois, vous vous rendez compte, c'est une pièce de théâtre, c'est joué.
23:43 Ça m'a juste appris à devenir moi-même et à être sincère, surtout avec moi-même.
23:47 Parce que ça, c'est le plus important, être sincère avec soi-même.
23:49 - Est-ce qu'à force de voir des scènes de crime, tu as perdu foi en l'humanité ?
23:52 - Du tout, du tout.
23:53 Si j'avais perdu foi en l'être humain, je ne ferais pas ce métier.
23:57 Je ferais autre chose, mais je ne ferais pas ce métier.
23:59 L'être humain est bon à l'origine.
24:00 Quand on est, on est innocent.
24:02 Et puis après, c'est la vie qui nous fait prendre des chemins différents.
24:05 Vous allez avoir des gens qui vont s'égarer et qui vont revenir,
24:10 je ne dirais pas dans le droit chemin, parce qu'on n'est pas des moutons non plus.
24:13 Puis après, vous avez des gens qui étaient dans une vie normale.
24:16 Après, vous allez me dire, qu'est-ce qu'une vie normale ?
24:17 Mais puis qu'ils vont déraper et voilà.
24:19 C'est le propre de l'être humain.
24:20 Maintenant, j'ai foi en l'être humain.
24:22 Et encore une fois, pour faire ce métier-là, il faut aimer l'humain.
24:26 Je me dis des fois sur certaines scènes, j'en ai eu une comme ça.
24:29 J'ai une anecdote où en fait, ce monsieur s'est suicidé.
24:34 Donc, a tué son chien.
24:36 Il s'est suicidé parce qu'il y avait une histoire d'argent.
24:39 Et il pensait que cet argent avait été volé ou pris par quelqu'un de la famille.
24:43 Et quand nous, on a travaillé, en fait, on a bougé le meuble de télé.
24:46 Et cette liasse de billets qui croyait qu'elle était partie,
24:48 se trouvait en fait sous le meuble de télé.
24:50 Donc, on se dit, là, c'est un véritable gâchis.
24:53 Mais l'être humain est une espèce formidable quand elle décide d'être raisonnable.
24:58 Voilà.
24:59 Alors, ça fait un petit moment là qu'on échange ensemble.
25:02 Et je voulais savoir, suite à cet échange, déjà,
25:06 si tu avais eu une vision du métier avant cet échange.
25:08 Et puis, si cette vision a changé.
25:10 Et surtout, comment tu m'imagines en tant que nettoyeur de scènes de crime.
25:16 D'extérieur, si on prend le métier de nettoyeur,
25:17 moi, je m'imaginais parler à quelqu'un de plutôt rigide.
25:21 Sentimentalement, on va dire un peu froid.
25:23 Physiquement, ou même dans l'attitude,
25:25 je vous imagine un problème assez grand et un peu costaud,
25:28 puisque vous avez dit que c'était un métier assez physique.
25:30 Ça m'a donné une image ultra sincère, ultra sentimentale et très touchante de ce métier.
25:36 Comment je t'imagine ? Je ne sais pas trop.
25:39 Je dirais la cinquantaine, ou peut-être un peu moins.
25:44 J'étais déjà tombé, il y a de ça, je ne sais pas, un petit moment,
25:47 sur une vidéo sur un nettoyeur de scènes de crime.
25:51 Je me souviens de quelqu'un qui avait un sourire très chaleureux,
25:55 des lunettes et qui était chaud.
25:59 Ça, ce n'est pas sympa.
25:59 Ce n'est pas une critique.
26:02 Je suis rasé, pas chaud.
26:03 Bonjour.
26:06 Bonjour, enchanté.
26:07 Alors ?
26:08 Je vous imagine avec des cheveux.
26:10 Oh, je n'imaginais pas du tout ça.
26:12 Cinquantaine ? Parce que là, je le prends mal.
26:13 Désolé.
26:15 Bonjour.
26:16 Bonjour, enchanté.
26:16 Enchanté.
26:17 C'est cette personne alors.
26:19 C'est bien moi.
26:20 Ça va sinon, non ?
26:21 Oui.
26:22 Ah, ok, d'accord.
26:23 Vous êtes très bien.
26:25 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
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