• il y a 4 ans
[NOUVEAU] Explosion du nombre de tâches domestiques et parentales, fatigue, moins de temps pour soi… La naissance d'un enfant fait l’effet d’une tornade dans la maison semant le chaos et épuisant le couple et particulièrement les mères. Dans le quatrième épisode de Sage-Meuf, le podcast qui raconte la folle aventure de la naissance, Anna Roy, sage-femme depuis dix ans et chroniqueuse dans la Maison des maternelles sur France 4, vous parle de la déflagration que provoque l'arrivée d'un enfant dans la vie quotidienne. Elle donne la parole à l'une de ses patientes, Samantha et à Coline Charpentier, à l'origine du compte instagram "T'as pensé à", sur la charge mentale.

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Transcription
00:00 Bonjour, avant de retrouver votre podcast, je voulais vous parler d'un autre podcast européen.
00:04 Il s'appelle "Sage Meuf".
00:06 Il parle de la maternité avec des témoignages de jeunes parents et tous les conseils pour gérer au mieux l'arrivée d'un bébé.
00:12 En plus, à chaque écoute de "Sage Meuf", Carrefour s'engage à verser un don pour soutenir le Collège National des Sages-Femmes de France.
00:19 Avec les marques Carrefour Baby et Tex Baby, Carrefour accompagne les bébés au quotidien.
00:24 Des produits alimentaires et d'hygiène, du textile, de l'équipement, avec Carrefour, on a tous droit au meilleur.
00:30 Et surtout les bébés. Allez maintenant, place à votre podcast.
00:34 Prenons l'exemple d'un ménage moyen.
00:38 Jeune couple, deux enfants, quatre personnes, très peu de vaisselle à faire.
00:42 Une femme qui a l'habitude, même si elle est aidée par son mari, le temps de laver, tremper dans l'eau, laver, essuyer, ça va très très vite.
00:48 Ils congagent vraiment du temps avec une machine.
00:51 C'est la dernière fois que je vois Lisa et Damien avant l'accouchement.
00:55 Je photographie mentalement les futurs parents et leur appartement.
00:58 Et j'essaye de fixer avec mon objectif intérieur une multitude de détails.
01:02 Cette opération-là, je la réitère au cours de la première visite après l'accouchement.
01:07 C'est un peu mon truc à moi que je fais systématiquement.
01:10 Et ce jour-là, voilà à quoi l'image ressemble.
01:13 Lisa et Damien ont fière allure.
01:15 Lisa porte une robe élégante, courte, taille empire, avec des jolies bottes à talons hauts en ubuc.
01:21 Damien, lui, arbore un costume impeccable et il a choisi une cravate en soie assortie à la couleur de ses chaussettes.
01:27 Il y a aussi André, le chat de la maison, qui fait sa toilette sur son fauteuil de prédilection.
01:32 André, il a même un plaid écossais qui lui est dédié.
01:35 Sur la table basse, en vert, il y a des journaux et des magazines sagement empilés.
01:39 Le parquet est luisant et les tapis sont éclatants de propre côté.
01:42 Le plan de travail de la cuisine est dégagé et rien ne traîne dans l'évier.
01:46 Et les valises pour la maternité sont prêtes et bien rangées, juste à côté du porte-manteau.
01:50 Lisa et Damien affichent fièrement leur proximité.
01:52 Il y a des bras affectueux et des attentions de tous les côtés.
01:55 Cinq semaines plus tard, nous y sommes.
02:03 Je vais enfin avoir la joie de retrouver Lisa et Damien et de rencontrer leur bébé.
02:07 L'heure de la première visite du postpartum est arrivée.
02:11 Tout juste une semaine après l'accouchement.
02:13 Immédiatement, l'objectif de mon appareil photo intérieur se met en marche.
02:17 Fonction rafale.
02:18 Damien est en jogging. Il a un épi et des cernes violées.
02:23 Il y a un sac Deliveroo à moitié éventré en plein milieu de l'entrée.
02:27 Le chat André est replié en haut de l'armoire du vestibule.
02:30 Et Damien me dit "on ne comprend pas, il a l'air vraiment contrarié".
02:34 Lisa est en liquette, les cheveux détachés.
02:40 Il y a un tas de papiers indifférenciés en bataille sur la table basse.
02:43 Carnet de santé, déclaration de naissance, facture, prospectus publicitaire.
02:46 Damien entrecoute chacune de ses phrases de baillement irrépressible.
02:50 Lisa vacille sur ses jambes.
02:53 Sur la table de la cuisine, il y a un régiment de bananes brunies
02:56 et les assiettes du déjeuner ne sont ni terminées ni débarrassées.
02:59 La télévision est allumée avec un replay sur l'emmaillotage des bébés.
03:02 Damien commente "ça a l'air pas mal non ça pour le faire dormir en journée".
03:07 Sur le sol, il y a une énorme tâche d'un liquide indifférencié.
03:11 Damien s'étire péniblement, les mains accrochées à l'encadrement de la porte de la cuisine.
03:15 "Mon dieu, mais j'ai l'impression d'avoir travaillé toute la nuit, je suis perclue de douleur".
03:20 Lisa s'englotte en me racontant que c'était super,
03:22 oui mais qu'en même temps elle n'imaginait jamais être aussi fatiguée un jour.
03:26 Au milieu du chaos, il y a un petit poupon au tréfun et aux cheveux hirsutes
03:32 qui dort paisiblement dans son couffin enosié.
03:35 Mais Damien tient à me le préciser, il me jure que ce n'est pas souvent comme ça et que c'est exceptionnel.
03:40 On aurait dit qu'une horde sauvage avait traversé la maison.
03:43 Que s'était-il passé ? Un tremblement de terre ? Un tsunami ? Une tornade ?
03:46 Non, non, rien de ce genre.
03:48 Il y avait juste Enzo, leur fils, leur tout petit enfant de 3,290 kg qui avait surgi dans leur vie.
03:54 Voilà tout, c'était désormais acté, ils avaient définitivement perdu le contrôle de leur vie.
04:02 C'est choquant parce que d'abord une femme enceinte, ça n'a jamais un physique très joli
04:07 et ce n'est pas la peine de la révéler au public, je trouve.
04:11 On est bien content de les avoir et puis s'il fallait en avoir un autre, je l'accepterais pareil.
04:17 La France est championne d'Europe en matière de natalité avec pratiquement deux enfants en moyenne.
04:21 Dans la salle d'attente, les jeunes papas s'interrogent.
04:24 La présence d'une personne qui peut apporter de l'amour en quelque sorte,
04:29 comme on peut le faire la sage-femme.
04:31 C'est nous qui tenons les maternités, il ne faut pas perdre sa vie.
04:34 C'est vraiment la sage-femme qui tient la maternité.
04:36 La maternité est toujours une source de stress pour les femmes.
04:39 On va toutes être dépressives.
04:41 Je vais vous ouvrir les portes de ma maison, de mon hosteau
04:44 et des appart' des couples que j'accompagne en ville
04:46 pour vous raconter mon histoire, leurs histoires, sans phare et sans tabou.
04:50 Je vais témoigner de l'expérience humaine la plus folle de l'existence, la naissance.
04:54 Pour moi, sans aucun doute, la plus grande des déflagrations.
04:57 Et dans cet épisode, je vais vous parler de la déflagration dans la vie quotidienne,
05:01 du nombre de tâches à exécuter et de choses à penser qui explosent avec la venue d'un enfant.
05:06 Vous dire que nous galérons toutes et tous, ou presque.
05:09 Vous dire que c'est super chouette, mais pas que.
05:11 Je vous donnerai des conseils juste pour vous dire que tout ira bien.
05:14 Mais que pour ça, quand même, il faudra avoir entendu parler de deux ou trois petites choses.
05:18 Ce podcast est fait pour vous servir et vous divertir.
05:20 Et si j'y arrive, alors j'aurai tout gagné.
05:22 Je m'appelle Anna Roy et je suis sage-meuf, comme j'aime tant le dire.
05:26 Alors bienvenue dans Sage-meuf.
05:28 Épisode 4, la déflagration dans la vie quotidienne.
05:31 Jamais, mais alors jamais, je n'aurais imaginé que cela puisse être aussi décoiffant d'avoir un enfant.
05:46 Pourtant, on m'avait largement mis la puce à l'oreille, il y avait des indices édifiants.
05:51 J'avais remarqué, lorsque j'animais des ateliers de préparation à l'accouchement à l'hôpital,
05:56 que les parents qui avaient déjà un ou plusieurs enfants,
06:00 avaient l'air épuisés, plus vieux,
06:04 et surtout, ils avaient un discours qui revenait comme une ritournelle sans cesse.
06:08 Non mais l'accouchement, c'est rien. Ce qui est dur, c'est les enfants en bas âge.
06:12 Ça c'est hard.
06:14 Il y avait aussi les soirées, où j'observais mes congénères
06:17 et je constatais que les trentenaires se divisaient en deux camps.
06:20 Ceux qui avaient des enfants étaient fatigués,
06:23 ils avaient des sujets de conversation ennuyeux, ils partaient tôt,
06:27 disons-le, ils étaient rabat-joie.
06:29 Et puis il y avait ceux qui n'avaient pas d'enfants, qui avaient pourtant le même âge,
06:32 et qui étaient aussi en forme que ceux qui en avaient 20,
06:35 qui étaient drôles et qui finissaient les nuits comme les autres, à 5h du matin.
06:39 Sans parler des visites à domicile, comme chez Lisa et Damien,
06:44 où je voyais un décalage inouï entre le avant et le après.
06:48 Et je voyais aussi que le fossé se creusait de plus en plus
06:51 à chaque fois qu'un enfant apparaissait.
06:53 Le constat semblait sans appel.
06:55 Avoir un enfant en bas âge était le gage d'une vie éreintante.
06:59 Seulement voilà, moi, anarroi, sage-femme hyperactive qui fait 10 milliards de trucs,
07:04 qui bosse 60 heures par semaine,
07:06 et qui en plus arrive à faire la fête comme une damnée,
07:09 j'en étais persuadée que pour moi ce serait un peu de la rigolade.
07:13 Que tout ce qui semblait dur allait glisser sur moi comme l'eau sur les plumes d'un canard.
07:18 Et qu'on se le dise, je suis sûre que vous êtes hyper nombreuses à vous être dit
07:24 "Ouais, ils galèrent mais bon, c'est parce qu'ils sont pas très bien organisés,
07:27 ils savent pas faire, moi, ce sera complètement différent".
07:30 Et puis un jour, tout a changé.
07:32 J'ai eu des enfants.
07:34 Dans cet épisode, j'ai envie de vous mettre au parfum
07:41 comme j'aurais aimé qu'on le fasse pour moi.
07:43 Allez, on rentre dans le vif du sujet.
07:45 On va parler de trois choses.
07:46 1) L'explosion des choses à faire.
07:48 2) L'explosion des choses à penser.
07:50 Et 3) Comment on a envie de vivre ces premières années après la naissance d'un enfant.
07:53 Commençons par aborder la question des choses à faire.
07:56 Et il va falloir commencer par des chiffres.
07:59 Il y a trois chercheuses qui se sont penchées sérieusement sur la question en 2015
08:03 pour une revue de l'INSEE.
08:04 Clara Champagne, Ariane Payet et Anne Solaz ont fourni un gros travail,
08:09 vraiment passionnant, qui s'appelle
08:11 "Le temps domestique et parental des hommes et des femmes,
08:13 quel facteur d'évolution en 25 ans ?"
08:15 Et voilà ce qu'elles disent.
08:17 Deux précisions avant de commencer.
08:19 Un, les chiffres datent de 2010.
08:21 Et je vais quand même arrondir à quelques minutes près.
08:23 Première situation, lorsque l'on n'a pas d'enfant.
08:26 Le temps domestique est de 2 heures par jour pour les hommes
08:29 et de 3 heures pour les femmes.
08:31 Une heure donc de plus pour les femmes.
08:33 La situation va se gâter lorsque l'on a un enfant de moins de 3 ans.
08:37 Il faut ajouter à ce temps domestique que l'on vient de voir,
08:40 ce qu'on appelle le temps parental,
08:42 qui est de 1h20 pour les hommes et de 3 heures et des petites brouettes pour les femmes.
08:46 Soit 1h45 de plus pour les femmes.
08:49 Au total, la venue d'un enfant ajoute donc 261 minutes de travail supplémentaire à un couple par jour.
08:58 Imaginez-vous ! 4h20 de travail.
09:02 Or il y a un truc, c'est que les journées, elles ne s'allongent pas.
09:06 La première, ce sera la tendance à l'encastrement des appareils.
09:10 La deuxième tendance sera un automatisme beaucoup plus poussé.
09:13 Je crois que la moindre consommation d'énergie au niveau des appareils ménagers
09:17 appartient plus à l'appareil lui-même qu'à la ménagère ou à la maîtresse de maison.
09:21 Alors il y a 3 constats immédiats qui me viennent en tête.
09:24 1. Le temps des choses à faire est doublé, ou presque.
09:27 2. Les chiffres ne tiennent pas compte du temps à penser,
09:30 qui est pourtant du travail, nous le verrons après.
09:32 3. La différence, elle est notable entre les hommes et les femmes.
09:35 Pour vous rendre plus concret le tableau de toutes ces nouvelles choses à faire,
09:38 j'ai demandé à Samantha, une de mes patientes, de me raconter une journée standard,
09:43 en listant tout ce qu'elle avait fait pour ses enfants.
09:45 Juste pour vous situer, c'est une jeune femme parisienne, native de Chicago,
09:49 elle est dynamique, plutôt enjouée, et elle a eu 3 garçons avec son mari,
09:53 l'aînée n'a que 6 ans, et elle continue de travailler.
09:56 Le matin, c'est mon mari qui les habille et qui leur donne le petit-déj,
10:01 car je pars très tôt au travail.
10:02 Dans la matinée, j'ai écrit un mail pour l'école, j'ai payé la facture du judo,
10:07 j'ai fait la prochaine commande ou shop, j'ai appelé le pédiatre pour prendre rendez-vous
10:11 pour le plus petit qui avait de la fièvre.
10:13 Tout ça, en travaillant.
10:14 A la pause déjeuner, j'ai appelé l'assistante maternelle pour savoir comment mon petit allait.
10:19 Ensuite, j'ai listé les enfants à inviter pour l'anniversaire du second,
10:22 et j'ai commencé à appeler.
10:24 A 15h, je suis partie du travail et je suis allée récupérer le plus petit,
10:27 que j'ai emmené chez le pédiatre, et on est allé à la pharmacie.
10:30 Puis nous sommes allés récupérer les deux autres à la sortie de l'école,
10:33 puis nous sommes restés au jardin.
10:35 Après, on est rentrés à la maison.
10:37 J'ai préparé leur dîner, puis je les ai lavés, tous les trois.
10:40 J'ai donné le médicament, etc. etc.
10:42 Jusqu'à ce qu'ils se couchent à 20h, et mon mari est arrivé à 21h.
10:46 Avec mon mari, il a fallu ranger, nettoyer et préparer notre repas.
10:50 Heureusement qu'on n'est pas maniaques.
10:52 Lorsque je me suis couché, c'était la première fois de la journée que j'étais tranquille.
10:56 Seulement voilà, en ce moment, je m'endors immédiatement,
10:58 sans avoir même le temps d'éteindre la lumière.
11:01 C'est comme ça tous les jours de ma vie, depuis la naissance d'Arthur.
11:04 Comment vit-elle cela ? Mal ?
11:08 On verra que c'est pas si simple. Je vous laisse un peu de suspense.
11:11 En écoutant le témoignage de Samantha, vous avez sans doute remarqué
11:14 qu'elle listait les choses qu'elle avait à faire,
11:17 ce que l'on appelle donc les tâches domestiques et parentales.
11:20 Comme le rangement, aller chercher un enfant à l'école,
11:22 préparer un repas, donner un bain, etc.
11:25 Mais, et le mais est très important,
11:28 elle listait aussi les choses à penser,
11:31 comme penser à donner le médicament,
11:33 penser à appeler pour avoir des nouvelles, etc.
11:36 Or, si elle pense à nous les dire,
11:39 et je crois qu'elle a profondément raison,
11:41 c'est que c'est un travail à part entière.
11:44 Et c'est ce que l'on appelle la très fameuse charge mentale.
11:48 Pour vous parler de ça, je suis avec Colline Charpentier.
11:51 Je ne sais pas si vous la connaissez.
11:52 Elle a une page Instagram qui s'appelle "Ta Pensee A"
11:55 sur la charge mentale.
11:57 Elle y collige des témoignages que les femmes lui envoient.
11:59 Et vu le très grand nombre de personnes abonnées,
12:02 on est quand même à plus de 100 000,
12:04 on peut en déduire que beaucoup de femmes se reconnaissent dans ces histoires.
12:07 Colline est professeure d'histoire au collège,
12:09 elle a un compagnon depuis 10 ans,
12:10 un enfant de presque 3 ans et deux chats.
12:12 Et elle explique hyper bien ce qu'est la charge mentale.
12:15 La charge mentale, il faut à chaque fois la distinguer des tâches domestiques.
12:20 En fait, les tâches domestiques, c'est faire.
12:22 Les tâches mentales, c'est penser.
12:24 Exemple, je passe l'aspirateur, une tâche domestique.
12:27 Je prévois de passer l'aspirateur le vendredi après-midi à 14h,
12:30 parce que l'enfant est chez la nounou.
12:31 Charge mentale.
12:32 Alors, la personne qui porte la charge mentale,
12:34 elle fait aussi les tâches domestiques.
12:36 C'est-à-dire, elle pense et elle fait la plupart du temps.
12:38 Sauf quand vous faites votre liste de courses
12:42 et que vous envoyez quelqu'un faire les courses avec cette fameuse liste
12:45 et qu'il vous appelle toutes les deux minutes
12:46 pour être bien sûr que c'est le bon produit.
12:48 Ça, en revanche, c'est de la charge mentale.
12:51 Et celui qui fait, c'est une autre personne.
12:53 Donc, il fait les tâches domestiques.
12:55 Ce concept de charge mentale, il n'est pas d'hier.
12:57 Vous l'avez peut-être découvert en 2017
12:59 grâce à la BD d'Emma qui l'a largement démocratisé.
13:02 Mais en fait, c'est le résultat de tout un tas de travaux
13:05 et d'un faisceau de multiples recherches
13:07 et d'engagement politique et militant.
13:09 C'est l'héritage de féministes qui, depuis les années 70,
13:12 s'intéressent de près au travail domestique.
13:14 C'est l'héritage aussi de psychiatres comme Christophe Dejour,
13:17 qui a très bien montré que les dégâts du travail
13:20 ne se limitaient pas aux "simples" dégâts physiques,
13:23 mais qui pouvaient engendrer aussi des dégâts psychiques
13:26 parfois lourds, tels que le suicide, la dépression
13:29 ou des troubles anxieux.
13:30 Et puis, il y a une sociologue, Monique Ecco,
13:32 qui fait un peu la synthèse en décrivant la mutation
13:35 de la charge physique à la charge mentale
13:37 dans le monde du travail, y compris dans le travail domestique.
13:40 Et puis, le concept est tombé dans l'oubli
13:43 jusqu'à cette fameuse BD en 2017.
13:46 Fin de la parenthèse.
13:47 Il y a déjà eu des tas de grèves de femmes,
13:50 mais d'une manière isolée et clandestine.
13:52 Et qu'on voudrait que les femmes se mettent ensemble
13:55 et se mettent à faire la grève au grand jour
13:57 de plus en plus et d'une manière illimitée.
13:59 C'est-à-dire une grève qui serait aussi bien
14:01 sur son lieu de travail qu'ailleurs.
14:02 En comptant deux heures d'utilisation,
14:06 enfin deux heures de vaisselle par jour,
14:08 une bonne, on la paye à la moyenne de 500 francs de l'heure,
14:11 ça vous fait 8 francs par jour.
14:13 A l'année, ça vous fait 365 000 francs
14:16 de temps passé à faire la vaisselle.
14:18 J'ai voulu savoir comment Colline était devenue une pro de la question.
14:22 Moi, j'ai pété un câble parce que je devais gérer
14:26 les émotions de mes élèves d'une reprise de cours
14:29 extrêmement difficile, puisque j'ai repris au mois de janvier.
14:32 Et gérer en même temps les besoins physiologiques
14:36 et émotionnels de mon enfant.
14:37 Et en même temps, faire en sorte que mon compagnon
14:41 prenne sa place de compagnon
14:43 et donc trouver un équilibre de famille.
14:45 Et c'est vraiment la reprise du travail, moi,
14:48 qui m'a fait éclater en plein vol.
14:52 J'ai trouvé ça extrêmement violent.
14:54 À tel point que j'en étais à penser d'arrêter mon métier.
14:57 C'est quand même fou, non ?
14:58 Ce à quoi peut pousser cette accumulation de tâches,
15:01 des choses à penser, des émotions à gérer.
15:03 Dieu merci, Colline n'a pas arrêté son métier
15:06 et heureusement, car elle aime vraiment sa profession.
15:08 Mais qu'en est-il de la charge mentale ?
15:10 Combien de temps cela représente-t-il sur une journée ?
15:13 Je pose la question à Colline.
15:15 Prévoir sur une journée,
15:17 on est autour d'une heure et demie, deux heures,
15:19 en termes de mental.
15:21 Puis moi, c'est ce que je dis souvent,
15:23 essayer de voir les conversations des femmes.
15:25 Moi, quand on me dit "le mental, elle n'existe pas",
15:27 je veux dire, à la machine à café, de quoi elle parle ?
15:29 Elle parle des vacances,
15:31 pour savoir où est-ce qu'elles vont placer leur enfant.
15:33 En fait, elles ne sont pas en train de faire.
15:34 Mais elles sont en train d'essayer de savoir
15:36 quelle stratégie adopter pour que Belle Maman
15:38 puisse prendre l'enfant une semaine
15:40 et que ça ne crée pas de conflits.
15:42 Prenez l'exemple des supermarchés.
15:46 Écoutez ce que disent les femmes au téléphone.
15:48 Elles parlent en effet de leur enfant,
15:50 elles parlent de "ah mince, j'ai encore oublié le paquet de couches",
15:52 elles parlent de ce qui va se passer ce week-end,
15:57 "ah mince, qu'est-ce que je vais faire de lui ?"
15:59 Elles parlent aussi,
16:01 en fait, elles parlent en permanence de ça.
16:04 Donc ça montre bien que c'est présent.
16:07 Il y a une des charges mentales qui me fait rire,
16:09 parce que la jeune femme qui me l'a envoyée
16:12 était très drôle et que j'avais le droit de rire avec elle.
16:16 Pour moi, la charge mentale,
16:18 c'est quand je suis dans mon bain,
16:19 en train de me détendre,
16:20 et que d'un seul coup, je me réveille,
16:22 je me relève, je prends mon portable
16:24 et je commande un drive.
16:26 Je commande mes courses en ligne.
16:27 C'est-à-dire, qui dans un bain se dit
16:30 "tiens, en fait, je vais commander toutes mes courses".
16:32 Non, mais c'est quand même un truc de fou.
16:35 En additionnant les 170 minutes de tâches domestiques,
16:38 les 183 minutes de temps parental,
16:41 et les deux heures de charge mentale,
16:43 cela nous fait, pour nous les femmes,
16:45 8 heures par jour en tout.
16:48 Et vous savez quoi ?
16:49 En fait, c'est la première fois
16:51 que je prends le temps de faire ces calculs.
16:53 Ce que j'aime avec les chiffres,
16:54 c'est que c'est net et que ça ne ment pas.
16:57 J'aurais vraiment aimé qu'on me dise ça.
17:00 Pour mon exercice de sage-femme d'abord,
17:02 ça aurait tout changé.
17:03 Ça m'aurait permis d'accompagner les femmes et les hommes
17:05 avec cette donnée inédite.
17:07 De les prévenir pendant la grossesse.
17:09 Et puis, pour ma vie de femme à moi,
17:11 alors je vous le dis tout de suite,
17:12 ça ne m'aurait absolument pas découragée d'avoir des enfants,
17:14 mais disons que je me serais sentie certainement moins seule
17:17 et moins incapable,
17:19 et j'aurais pu à la fois anticiper
17:21 et prendre les devants plus vite.
17:23 Vous avez les verres fragiles à 50 degrés
17:26 et les casseroles très attachées à 65 degrés.
17:28 Parce que les casseroles, vous les avez aussi ?
17:30 Oui, bien sûr.
17:31 C'est génial, ça.
17:32 Est-ce qu'il y a un problème spécial
17:33 en ce qui concerne la disposition des pièces à l'intérieur de la machine ?
17:35 Absolument pas.
17:36 C'est votre dame qui s'habitue à sa machine.
17:39 Bien sûr.
17:40 Justement une question, monsieur.
17:41 Vous êtes au salon des emménagers avec votre femme.
17:43 Oui.
17:44 Mais alors, c'est vous, le mari, qui demandez des explications.
17:47 Oui, parce que précisément,
17:48 c'est pratiquement moi qui fais toujours la vaisselle.
17:50 Nous travaillons tous les deux,
17:51 et bien il faut se répartir des tâches.
17:53 Nous voilà donc dans de beaux draps,
17:57 avec nos 8 heures supplémentaires par jour de travail.
18:00 Alors, qu'est-ce qu'on fait ?
18:02 D'abord, première chose, il faut en parler.
18:05 Faire en sorte que tout le monde soit bien au courant
18:08 de cette histoire de 8 heures par jour tout cumulée.
18:11 Dites-le autour de vous,
18:12 à toutes les jeunes mamans que vous croisez,
18:14 à tous les hommes aussi, pour qu'ils se rendent compte.
18:16 C'est pour ça que le travail de Colline est si important.
18:19 Parce qu'il y a beaucoup de femmes
18:20 qui se sentent noyées, complètement sous l'eau,
18:23 pour qui c'est une souffrance inouïe.
18:25 Elles ont l'impression qu'elles sont les seules
18:27 à ne pas arriver à tout faire.
18:28 Ils sont les seuls à ne pas arriver à tout faire.
18:30 Ils sont les seuls à ne pas arriver à tout faire.
18:32 Et là, quand elles sont au courant de ça,
18:34 elles se disent "ah, c'est complètement différent,
18:37 je ne suis pas une merde alors,
18:38 c'est juste que c'est dur pour tout le monde".
18:41 Alors, la question de la solitude,
18:43 en fait, on n'est absolument pas seules à vivre ça.
18:46 D'ailleurs, c'est pour ça que j'ai créé le compte Instagram,
18:48 puisque le but du compte Instagram,
18:49 c'était de montrer que sur des situations banales,
18:51 on était tous et toutes concernés.
18:56 Mais c'est normal, on a envie de se valoriser.
18:58 Le mythe de celle qui réussit tout,
19:00 qui fait tout, qui n'a jamais de moments...
19:03 de mauvais moments.
19:06 Ça va aussi avec la question des réseaux sociaux,
19:10 ça va aussi avec une démonstration aussi
19:12 à ses propres parents,
19:13 genre "j'y arrive, je sais tout faire".
19:15 Je pense qu'il y a un moment,
19:17 il faut aussi briser la glace,
19:19 c'est-à-dire simplement dire "c'est difficile".
19:22 Et quand on a une personne en face qui nous dit
19:24 "c'est difficile",
19:25 il faut accepter que ça soit difficile pour elle
19:27 et ne pas lui dire "c'est bon, c'est une période",
19:30 mais lui dire "ok, en quoi c'est difficile ?
19:32 Qu'est-ce que toi, tu trouves difficile ?"
19:33 Et je pense que ça, ça va permettre de briser les choses.
19:37 Moi, ce qui m'avait impressionnée,
19:39 c'est que Emma a propulsé la notion de charge mentale en 2017,
19:44 avec la BD "Fallait demander".
19:46 On ne t'avait qu'à demander.
19:48 Et puis après, on me fait "ouais, trop, c'est trop ça".
19:51 Et puis après, plus rien.
19:52 C'est-à-dire "ah bah oui, mais pas moi".
19:54 "Pas mon couple".
19:55 "Bah si, en fait, ton couple, n'importe quel couple, etc."
19:59 Et moi, j'avais créé le compte Instagram
20:02 parce qu'au parc avec mon fils,
20:05 toutes les femmes du quartier, au parc,
20:09 parlaient de charge mentale.
20:10 Absolument toutes.
20:11 Et dans les supermarchés, devant les écoles.
20:13 Et je me suis dit "mais c'est pas possible".
20:15 Mais comment, alors qu'on sait maintenant à peu près
20:17 ce que c'est la charge mentale,
20:19 comment on peut encore se laisser avoir ?
20:21 C'était la vraie question.
20:23 Donc je pense qu'il faut commencer à briser la glace.
20:28 Ne pas hésiter à en parler aussi
20:31 avec des professionnels de santé.
20:33 Je pense que des bons psychologues, ça existe.
20:37 Moi, ça m'a aidée d'aller voir un psychologue,
20:40 de lui parler de mes angoisses de mère,
20:42 de mes angoisses en me disant "c'est pas normal que je ressente ça".
20:45 Bah en fait, si, c'est tout à fait normal.
20:47 Et ça, ça aide trop.
20:50 Ça aide trop et je pense que c'est une bonne chose.
20:53 Premier conseil donc, ne pas hésiter à en parler.
20:56 Car c'est tout à fait normal de ne pas y arriver et d'angoisser.
21:01 Est-ce que j'ai d'autres conseils ?
21:03 D'abord, ne comptez pas sur moi pour les "y'a qu'à faut que"
21:07 qui débordent des livres de développement personnel.
21:09 Ne comptez pas non plus sur moi pour vous dire
21:11 "écoute, prends une femme de ménage 8h par semaine
21:14 et puis une nounou 35 ou 40h ou 50h par semaine".
21:18 Car d'abord, l'immense majorité d'entre nous, nous n'en avons pas les moyens.
21:22 Ensuite, il faudrait que pour ces femmes,
21:24 ce soit un travail valorisé et valorisant.
21:27 Et enfin, il faudrait être sûr que ce soit souhaitable pour les enfants.
21:30 Pour la méthode miracle, c'est donc complètement raté.
21:33 Alors qu'est-ce qu'on fait ?
21:35 Colline a de belles pistes pour partager les tâches et la charge mentale.
21:38 Elle nous propose deux étapes
21:40 qui peuvent se faire simultanément ou en décalé.
21:42 La première étape, la voici.
21:44 C'est la sphère personnelle.
21:47 La première chose, c'est d'essayer de réfléchir à soi-même.
21:50 Quels sont les rôles de mère qu'on a eu dans notre enfance ?
21:53 Quels sont les rôles de mère qu'on a vu dans les médias ?
21:57 Qu'est-ce qui est vraiment nous ?
21:59 Autour de moi, j'ai des mères qui font tout.
22:02 Pour des questions aussi, simplement qu'il n'y a plus d'hommes.
22:06 Donc forcément, elles font tout.
22:08 Et j'ai toujours eu en tête la nana
22:11 qui a une vie professionnelle hyper dense,
22:14 mais qui est là à la maison, qui est toujours là pour son fils.
22:17 En fait, humainement, je n'y arrive pas.
22:19 C'est-à-dire que temporellement, ce n'est pas possible.
22:22 Après, je suis fatiguée, je suis exécrable avec mon fils.
22:26 Donc, ce n'est pas possible.
22:28 Il y a aussi une remise en question à avoir sur soi-même.
22:31 Est-ce qu'il y a des choses que je peux ne pas faire ?
22:34 Oui, la réponse est oui.
22:36 C'est-à-dire surtout quand il commence à grandir.
22:38 Ne pas lui donner un repas quand il a moins de 3 ans,
22:41 non, ce n'est pas possible.
22:43 Mais, par exemple, devoir repasser absolument toute la garde-robe
22:47 alors qu'il va se traîner dans la boue tous les jours,
22:50 ce n'est pas obligatoire.
22:52 Faire en sorte de se retirer des choses.
22:55 Donc, ce que vous pouvez faire,
22:57 c'est commencer par lister les tâches qui vous incombent et les trier.
23:01 Éliminez les tâches qui ne sont pas aussi essentielles que vous le croyez.
23:05 Ensuite, il y a l'étape interpersonnelle,
23:07 c'est-à-dire l'étape avec la personne avec laquelle vous vivez
23:11 et puis aussi avec vos enfants quand ils grandissent.
23:13 Je suis sûre que vous allez vous reconnaître
23:15 dans les histoires de Noël et de sac de piscine.
23:18 La question du partenaire en face,
23:20 ils ou elles ont tendance,
23:22 mais elle est moins présente,
23:24 mais ils ont tendance à dire "ce n'est pas vrai".
23:28 C'est-à-dire "ce n'est pas si important que ça",
23:31 "ce n'est pas si compliqué d'organiser".
23:34 Ça, c'est gênant,
23:36 parce que quand on a quelqu'un en souffrance en face,
23:38 on lui dit "c'est bon, tu déconnes".
23:41 Non, ce n'est pas possible, on ne fait pas ça.
23:43 On dit "ok, est-ce que tu peux essayer de m'expliquer dans ton quotidien
23:46 qu'est-ce qui te pèse ?"
23:48 Et ne pas le faire au moment de la pleine crise.
23:50 C'est comme au moment de Noël, on est en surchauffe,
23:52 on est tout en train d'organiser,
23:53 ce n'est pas le 23 au soir qu'on pose la question
23:55 "comment je peux faire pour que ça aille mieux ?"
23:58 Non, c'était le 1er décembre qu'il fallait poser la question,
24:01 le 26 décembre si vous voulez, mais pas le 23.
24:04 Ce sont des moments assez importants.
24:07 La personne doit aussi se remettre en cause
24:09 et elle doit aussi elle-même lister ce qu'elle fait.
24:12 Elle liste ce qu'elle fait pour le foyer.
24:14 Si c'est le bricolage,
24:16 parce que c'est souvent ce que j'entends,
24:17 où tout le monde fait le bricolage de la voiture,
24:21 allons-y, listons, combien de fois par année ?
24:24 Combien de fois dans la semaine tu bricoles ?
24:26 Tu es fan de bricolage, est-ce que tu bricoles pour toute la famille
24:29 ou est-ce que tu bricoles pour toi-même ?
24:31 Est-ce que ça fait partie des activités propres
24:34 ou est-ce que c'est vraiment pour tout le monde ?
24:35 Est-ce que tu prends les enfants quand tu bricoles ?
24:37 C'est des vraies questions en fait.
24:39 Une fois qu'on a fait ça, moi je l'appelle ça le plan de bataille,
24:42 c'est-à-dire qu'on a mis les égos de côté.
24:44 Ok, je t'ai mal aimée, tu as été malheureuse,
24:47 donc j'ai mal aimé,
24:49 je n'ai pas envie de te dire que je t'ai mal aimée, mais c'est le cas.
24:51 Donc comment on fait aujourd'hui pour refaire un dialogue ?
24:54 Là, Colline suggère plusieurs méthodes coopératives.
24:58 Il n'y en a pas une qui soit meilleure que les autres.
25:01 Ce choix, c'est le vôtre,
25:02 il dépend de comment vous êtes, de votre couple et de vos valeurs.
25:06 Il y a des gens qui vont tout lister et se répartir à 55 ans,
25:11 en disant même si tu as le plus d'heures de travail,
25:13 tu dois quand même faire ta part parce que tu habites ici
25:16 et que tu es là tous les week-ends et que tu es là toutes les vacances.
25:19 Donc tu fais ta part.
25:21 Moi, ce que j'avais proposé, c'est par exemple les réunions du dimanche choix
25:27 qui permettent, on prend une heure avec tous les enfants
25:31 à partir de 3-4 ans, clairement,
25:34 où on dit la semaine prochaine, il va se passer telle chose, telle chose, telle chose.
25:37 Le président de séance, ce n'est pas toujours la même.
25:39 Ce n'est pas celle qui parle de la charge mentale.
25:40 Ça peut être un enfant.
25:41 Un enfant de 8 ans est capable d'être président de séance.
25:44 De dire, il va se passer telle chose, telle chose, telle chose.
25:47 Maman, papa, j'ai piscine mercredi.
25:49 Qu'est-ce que tu dois faire, mon chéri ?
25:51 Je dois préparer mon sac mardi soir.
25:53 D'accord.
25:54 Donc si jamais tu oublies ton maillot de bain,
25:56 ce n'est pas papa, maman qui sont responsables, c'est toi.
25:58 Ok.
25:59 Dire aussi aux enfants, leur apprendre les choses.
26:02 Leur dire, la semaine dernière, c'était difficile pour moi
26:05 parce que ça a été difficile au travail.
26:06 Je suis désolée, j'avais beaucoup d'émotions négatives.
26:08 Ça permet aussi aux petits garçons et aux petites filles
26:11 de nommer les émotions.
26:12 Et de dire, quand on est un adulte, parfois c'est difficile.
26:15 Bah ouais, en fait, on n'est pas dans le monde des licornes et des paillettes.
26:18 Donc ça, ça permet vraiment aussi d'avancer.
26:20 Là, les personnes qui ont testé ça, par exemple,
26:24 elles tirent au soir aussi les tâches que personne ne veut faire.
26:27 Nettoyer les toilettes, nettoyer le frigo.
26:30 Je trouve ça intéressant.
26:32 Vraiment.
26:34 Le conseil de famille permet de résoudre bien des choses.
26:38 Chez nous, on se réunit en amoureux
26:40 parce que nos enfants sont encore trop petits pour y participer.
26:43 On commence par un espèce de check sur la semaine qui vient de s'écouler.
26:46 On fait le point sur ce qui allait et ce qui n'allait pas.
26:49 Et puis, on fait ensuite un espèce de plan d'attaque
26:52 sur la semaine qui va venir, sur qui va faire quoi, quand et comment.
26:56 Alors, ça a l'air chiant comme ça, mais rassurez-vous,
26:59 on passe très vite en mode romantique avec un bon verre de vin, un bon repas.
27:03 En fait, ce sont de très bons moments.
27:05 Ça, c'est pour le quotidien.
27:07 Mais il y a un point clé que m'explique Coline.
27:09 L'importance d'être interchangeable.
27:11 Nous, ce qu'on avait remarqué avec mon compagnon,
27:13 c'est que même si on partageait de 50/50,
27:16 ce qui était agréable, c'est de savoir que le jour où j'étais malade,
27:19 il était capable de le faire.
27:21 C'est-à-dire qu'on était complètement complémentaires.
27:23 C'est-à-dire, certes, lui préfère.
27:26 Moi, je n'aime pas faire les courses, donc il fait les courses.
27:29 Mais le jour où il est malade...
27:32 - Il faut savoir que vous êtes interchangeable.
27:34 - Oui, je peux faire les courses.
27:36 La seule chose qu'il ne sait pas faire, c'est la paye de la nounou.
27:38 Et encore, là, il s'y est mis le mois dernier,
27:40 en disant "explique-moi comment on fait pour payer notre nounou, etc."
27:44 "Ben voilà, on a un fichier Excel, machin, etc."
27:46 Maintenant, il sait faire.
27:47 C'est-à-dire que le jour où j'ai une grosse flemme et que je suis fatiguée,
27:50 et que c'est difficile, il est capable de le faire.
27:52 Et ça, ça retire des choses.
27:53 Parce que c'est ça le problème de la charge mentale.
27:55 Beaucoup de femmes sont persuadées qu'elles sont les seules à pouvoir faire les choses.
27:59 - Et puis, disons-le, il y a des femmes à qui ça va très bien d'être en charge de tout.
28:03 C'est le moment d'ailleurs de revenir sur Samantha.
28:05 Je ne sais pas si vous vous souvenez de sa liste interminable de choses à faire.
28:08 Voyons ce qu'elle en pense.
28:10 - Vous pensez que ma vie est l'enfer ?
28:13 En fait, je suis très heureuse comme ça dans cette vie.
28:15 Je préfère nettement être avec mes enfants
28:17 qu'à la place de mon mari qui travaille dans un bureau
28:19 à faire un travail sans importance.
28:21 Je n'ai jamais été aussi heureuse que depuis qu'ils sont nés.
28:23 Ce qui est dommage, c'est que personne ne comprenne
28:25 que c'est un très beau métier de s'occuper de ses enfants.
28:28 D'ailleurs, vous savez quoi ?
28:30 Mon mari est jaloux.
28:31 Il a dit que c'était lui qui prendrait le congé parental de 6 mois pour le 4ème bébé.
28:35 Mais je ne lui laisserai jamais.
28:37 À moins que ce soit lui qui se mette à être enceinte et à accoucher.
28:40 Cela veut dire que tout ce qu'elle accomplit pour ses enfants
28:43 est valorisé dans son couple et dans sa famille.
28:46 Cette reconnaissance est importante.
28:48 Et en plus, elle s'ajoute à celle de son travail
28:51 qui est aussi une grande source de reconnaissance.
28:53 On sent aussi que ça lui donne du pouvoir à Samantha.
28:56 Elle est le manager du foyer et de la famille en quelque sorte.
28:59 Et pour elle, ça se passe très bien. Et tant mieux !
29:03 Mais ce que je peux vous dire, c'est que Samantha, c'est une femme hyperactive
29:07 et qu'elle a de l'énergie à revendre.
29:09 Certainement plus que vous et que moi.
29:11 Donc, je vous le répète, si vous n'êtes pas comme elle, ce n'est pas grave.
29:15 Peut-être que vous avez envie de bosser 80 heures par semaine.
29:18 Et c'est très bien.
29:19 Peut-être que vous avez envie de bosser 20 heures.
29:21 Et c'est très bien aussi.
29:22 Peut-être que vous n'avez pas envie de bosser.
29:24 Peut-être que, en fait, trouvez votre voie et faites ce que vous avez envie.
29:27 Je trouve que ce serait une très bonne chose
29:31 parce que vous avez une quantité de femmes qui travaillent toute la journée
29:34 parce qu'elles ne trouvent pas justement des emplois à mi-temps.
29:36 Mais qui seraient très contentes d'être une demi-journée chez elles
29:39 pour tenir leur intérieur.
29:43 L'aspirateur a la capacité de nettoyer seul votre appartement pendant votre absence.
29:47 Il est posé sur un socle rechargeable.
29:49 Dès que vous l'enlevez du socle et que vous le posez par terre,
29:52 il se met en route seul, sans aucune intervention.
29:54 Et le soir quand vous rentrerez, votre ménage sera fait.
29:57 J'ai voulu savoir ce que Colline pensait de cette question du pouvoir.
30:01 Pas pour sa menta, mais pour toutes les femmes,
30:03 pour qui manager la famille serait finalement un choix par défaut.
30:06 Il y a certaines personnes qui ont leur seule valorisation,
30:09 c'est de savoir gérer leur maison.
30:12 Vous ne pouvez pas dire à quelqu'un
30:14 "Non mais c'est bon, lâche prise, on s'en fout qu'il y ait de la poussière"
30:17 s'il n'a plus rien à côté.
30:19 Si au travail, ça se passe mal,
30:21 qu'elle a un travail qui n'est pas valorisant
30:24 ou qui est considéré comme un travail
30:26 très bas au niveau symbolique
30:31 et qu'elle a juste sa maison, cette personne-là,
30:34 elle va tout mettre dedans.
30:36 Parce qu'elle n'a plus de temps pour aller faire du sport,
30:38 si ça se peut, elle est très bonne en crochet,
30:40 elle est très bonne en couture, elle est très bonne en sport,
30:42 mais elle ne fait plus rien.
30:44 Donc, on ne peut pas dire aux gens
30:46 "Ce que tu arrives le mieux, arrête, lâche prise".
30:49 Non, ce n'est pas possible.
30:51 Il faut réaménager les temps
30:53 pour permettre à cette personne de découvrir
30:55 qu'elle a d'autres choses dans la vie que sa maison.
30:57 En fait, c'est un peu comme pour l'accouchement.
30:59 Ce qui est important, c'est d'être libre de choisir
31:02 ce qui est le mieux pour nous.
31:04 De comprendre pourquoi certaines choses sont douloureuses
31:06 et d'agir en conséquence, notamment sur les questions matérielles.
31:09 Et justement, pour finir, je voudrais m'attarder
31:11 sur ces conditions matérielles.
31:13 Il y a des solutions politiques, et je vais les lister,
31:15 en tout cas celles qui me semblent essentielles
31:17 pour améliorer grandement votre vie quotidienne.
31:19 Il faut allonger le congé maternité.
31:21 Pas un peu, beaucoup.
31:23 Il faut rémunérer et ouvrir les droits à la retraite
31:26 pour que l'un des parents qui diminue son temps de travail
31:28 ou qui cesse de travailler.
31:30 Il faut généraliser les travailleuses familiales.
31:33 Il faut évidemment allonger le congé paternité.
31:36 Il faut former les professionnels de santé
31:38 sur ces problématiques,
31:40 sur cette question du temps parental,
31:42 du temps à penser et sur son partage.
31:44 Il faut évidemment qu'il y ait une égalité salariale
31:47 entre les hommes et les femmes,
31:49 pour que le fait de choisir de s'occuper d'un de ses enfants
31:51 ne soit pas un choix par défaut.
31:53 Mais bon, tout ça, ce sera pour la prochaine étape,
31:55 quand je serai ministre.
31:56 Alors j'espère vraiment qu'avec ce podcast,
31:58 vous serez armés pour ne pas vous laisser gâcher
32:00 ces instants bénis et les vivre au plus près
32:02 de ce que vous sentez.
32:04 Parce que c'est vraiment, vraiment le kif cette période,
32:06 à condition de ne pas la subir.
32:08 Je vous embrasse tous et je vous souhaite plein de courage.
32:11 Je ne travaille pas, mais évidemment, je travaillerais bien,
32:14 mais pas toute la journée.
32:15 Vous travailleriez volontiers à mi-temps ?
32:17 Oui, oui, à mi-temps, d'accord, mais ce serait peut-être difficile
32:20 parce que je n'ai pas de spécialité.
32:21 Enfin, un emploi qui serait facile à tenir,
32:23 par exemple, me rapporterait quoi ?
32:25 Exactement, peut-être 25, 30 000 francs au maximum par mois.
32:28 J'aurais des frais de transport,
32:30 j'aurais peut-être davantage de frais de toilette.
32:33 Je ne pense pas que ce soit tellement, tellement rentable.
32:35 [Musique]
32:39 Ce podcast a été écrit par moi, Anna Roy,
32:41 et si mon nom vous dit quelque chose,
32:43 c'est peut-être que vous m'avez déjà vue
32:45 ou que vous me voyez en ce moment même
32:46 dans la maison des maternelles sur France 4
32:48 où je suis chroniqueuse.
32:49 Une émission que je vous recommande, évidemment.
32:52 "Sage Meuf" est un podcast Europe 1 Studio
32:54 produit par Adèle Ponticelli.
32:56 Il est réalisé par Charlène Neux-Youx.
32:58 Merci à Samantha pour son témoignage
33:01 et à Marion Dubreuil qui en a fait la lecture.
33:03 Merci à Coline pour son partage d'expérience si riche
33:06 et à tous mes patients, petits et grandes,
33:08 sans qui rien n'aurait été possible.
33:10 N'hésitez pas à commenter, à partager,
33:12 à questionner ou que sais-je encore
33:14 sur mon Instagram @annarois75.
33:16 Et si ce podcast vous a plu,
33:18 n'oubliez surtout pas de vous abonner
33:19 sur vos plateformes d'écoute préférées
33:21 et nous mettre plein d'étoiles.
33:23 [Musique]

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