Xerfi Canal a reçu Thomas Gauthier, Doyen associé à l’anthropocène, professeur à emlyon business school, Professeur, Doyen associé, Titulaire de la chaire Carbone 4 « Stratégie en Anthropocène », pour parler du management et de l'anthropocène.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Bonjour Thomas Gauthier. Bonjour Jean-Philippe. Thomas, vous êtes doyen associé à l'Anthropocène
00:14à EMION Business School où vous êtes professeur et vous êtes titulaire de la
00:18chaire Carbon4 Stratégie en Anthropocène. Anthropocène, c'est le gros mot qui fait
00:25peur à beaucoup. A EMION, on s'est saisi du sujet, on en a fait un marqueur stratégique très fort.
00:31Voilà, ça se traduit par cette idée, cette idée que finalement il faut tout simplement réinventer
00:37les bases même de la pédagogie. Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu'est la vision que
00:42vous développez, que vous portez ? Je vais essayer de le faire simplement et succinctement. Déjà
00:46l'Anthropocène, c'est effectivement l'âge des humains. Ça nous indique que l'on est entré dans
00:52une époque où l'espèce humaine est devenue une force géologique d'importance qui quelque part agit
00:59sur son propre avenir, l'avenir de l'espèce humaine. Faire atterrir l'Anthropocène dans
01:04une école de management, en pratique, ça veut dire amener des étudiantes et des étudiants à
01:09comprendre qu'à côté des lois économiques qui leur sont enseignées, il existe des lois physiques et que
01:16ces lois physiques ne peuvent plus être tenues à distance. La physique s'invite à la table des décideurs,
01:21soit on lui ouvre la porte, soit elle fracassera la fenêtre et elle trouvera de toute façon sa
01:26place à la même table des décideurs. Finalement, l'hypothèse de base, si je résume, c'est que
01:34l'Anthropocène, c'est la marque de l'empreinte humaine, des activités humaines sur la planète,
01:38sur le climat en particulier. On se dit qu'il y a une petite tension quand même avec les écoles de
01:44management qui sont largement vues encore comme étant là pour être au service des entreprises et
01:50construire des manières de faire du profit. Donc j'imagine que ce n'est pas un discours qui est si
01:54simple à faire entrer dans la salle de cours. Ce n'est pas un discours simple à faire entrer
01:58dans la salle de cours comme vous venez de le dire. Il y a clairement un phénomène de salle,
02:03deux ambiances qui peut quelque part marquer les étudiantes et les étudiants entre certains
02:06cours structurés autour de l'Anthropocène et d'autres cours. Néanmoins, c'est sûrement le rôle
02:12d'une école que d'amener nos étudiantes et nos étudiants à développer cet esprit critique et à embrasser
02:17plus largement différents régimes de construction de connaissances. À côté des sciences de gestion
02:21stricto sensu, les sciences physiques, les sciences du système Terre ont leur place dans une école de
02:27management puisque les étudiantes et les étudiants ne sont plus juste destinés à rejoindre le monde
02:32des organisations, mais de plus en plus on attend d'elles et d'eux qu'ils organisent le monde. Et pour
02:36organiser le monde, il faut en comprendre aussi les mécanismes organisateurs. Alors, dernière question,
02:42les limites des approches traditionnelles, précisément qui justifient de repenser un peu
02:48cette pédagogie. C'est quoi ces limites ? Les limites vraisemblablement sont liées à des
02:54facteurs historiques. On pense évidemment au fameux article de Milton Friedman dans le New York Times
02:591970 où il est question d'une responsabilité sociale de l'entreprise qui se limiterait à faire des profits.
03:06Les limites des enseignements actuels sont liées au fait que la physique, les limites du système
03:12Terre sont quelque part inférieures en ordre de priorité aux sciences économiques et à la lecture
03:19économique du monde. Donc pour aller au-delà des enseignements actuels en école de management,
03:23il faut faire de ces écoles des lieux de rencontre, des lieux de dialogue inédits entre les sciences du
03:28système Terre et les sciences de gestion. Il faut réinventer les bases, c'est ça le parti, il faut repenser
03:34les bases, il faut les réinventer, donc il faut se saisir à plein du sujet. C'est un sujet au long
03:41cours dont on va débattre aussi parce que le contexte n'est pas forcément très favorable à la prise en
03:47compte de l'anthropocène aujourd'hui. On pense à l'élection de Donald Trump, on pense aux prises
03:51d'opposition d'Elon Musk, donc évidemment sujet majeur et source aussi de petites tensions en matière
03:58de vision du monde. On va dire ça comme ça. Oui, on peut le dire ainsi, on peut certainement dire on aura
04:04l'occasion d'en reparler, que cette élection et ces dynamiques actuelles nous racontent en fait des
04:10projets, des projets civilisationnels qui ne sont pas compatibles quelque part les uns avec les autres.
04:17Merci Thomas Gauthier. Merci Jean-Philippe Denis.
04:20Sous-titrage Société Radio-Canada