En organisant le rassemblement de dimanche, à la suite du jugement prononcé contre elle, le 31 mars, Marine Le Pen s’est vu reprocher de chercher à peser politiquement sur une décision de justice.
Retrouvez « En toute subjectivité » avec Dominique Reynié sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/dominique-reynie-en-toute-subjectivite
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00:00En toute subjectivité avec le directeur de la Fondation pour l'Innovation Politique,
00:05Dominique Régnier.
00:06Dominique, vous revenez sur le rassemblement du RN hier.
00:10Voilà, en organisant ce rassemblement, à la suite du jugement prononcé contre elle
00:15le 31 mars, Marine Le Pen s'est vue reprocher de chercher à peser par des moyens politiques
00:21sur une décision de justice.
00:22La stratégie choisie peut laisser perplexe, au moins parce que le FN d'hier et le RN
00:27d'aujourd'hui se sont continuement définis comme le parti de l'ordre de la probité.
00:32Ils n'ont eu de cesse de dénoncer le laxisme des magistrats et de réclamer des sanctions
00:37plus sévères.
00:38Aujourd'hui, alors que le RN et Marine Le Pen sont mis en cause dans une affaire de
00:42détournement de fonds publics au Parlement européen, ils protestent devant leurs électeurs
00:47contre la sévérité des sanctions reçues.
00:49Il est très probable que nombre d'entre eux, les électeurs, sont troublés, d'autant
00:54plus qu'au déboire judiciaire de Marine Le Pen s'ajoutent des soutiens internationaux
00:59embarrassants ou désastreux.
01:00Car en France, Orban, Salvini, Poutine, Vance et Trump sont les figures d'une politique
01:06dont rêvent peut-être une fraction des électeurs du RN, mais que la plupart redoutent assurément.
01:11En effet, l'électorat du RN n'a rien de révolutionnaire, il n'a pas non plus de
01:16penchant pour la dictature.
01:18En grandissant, cet électorat est devenu plus conservateur, populaire, provincial et
01:23paisible.
01:24Manifester n'est pas sa culture, d'où le risque qu'il y avait à organiser le
01:28rassemblement de dimanche, d'où le risque qu'il y avait à renouer avec un discours
01:32vindicatif à rebours du travail de normalisation, de modération et d'institutionnalisation
01:38opéré par Marine Le Pen depuis son arrivée à la présidence du parti en 2011.
01:42Vous pensez, Dominique, que le RN pourrait ne pas s'en relever ?
01:46On ne peut pas l'exclure, Nicolas, même si à ce jour l'avenir de Marine Le Pen paraît
01:50plus compromis que celui du RN, précisément parce que sa dernière grande décision a
01:56été d'organiser sa propre succession.
01:58En 2021, Jordan Bardella est devenu président du RN.
02:02Cette décision semblait habile, elle se retourne maintenant contre elle.
02:07C'est au moment où le procès menace tout l'édifice du RN que le parti ne dépend
02:11plus de Marine Le Pen seulement.
02:13Loin de l'avantager, le choix d'un successeur lui devient défavorable.
02:17Jordan Bardella, déjà très populaire, deux fois champion électoral en 2019 et en 2024
02:23lors des élections européennes, offre aux électeurs la perspective d'une relève,
02:28retirant à l'inéligibilité de Marine Le Pen la dimension dramatique qui aurait pu les mobiliser.
02:34C'est peut-être pourquoi dimanche, Jordan Bardella, dans son discours, a prononcé d'étranges
02:38paroles censées soutenir Marine Le Pen.
02:41Je cite « C'est elle qui a besoin de vous, c'est elle qui a besoin de nous, aidez-la ».
02:47On risque d'entendre dans ces mots une manière de mettre Marine Le Pen à l'écart.
02:50« C'est elle qui a besoin de vous, ce n'est pas moi.
02:53C'est elle qui a besoin de nous, ce n'est toujours pas moi.
02:56Et finalement, aidez-la et non pas aidons-la.
02:58Comme si le président du RN voulait que Marine Le Pen ne soit déjà plus tout à fait là.