À 7h50, Pamela Anderson est l'invitée de Sonia Devillers. L'actrice américaine est à l'affiche de "The Last Showgirl" de Gia Coppola, en salle mercredi 12 mars. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-jeudi-06-mars-2025-2157964
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00:00Bonjour Pamela Anderson. Pour devenir une meneuse de revue avec plumes et paillettes,
00:05vous vous êtes plongée dans le quotidien des vraies danseuses de Las Vegas. Qu'est-ce
00:10que vous avez appris avec ces showgirls ?
00:13J'ai toujours été fascinée par ces femmes qui portent des paillettes du strass, elles
00:22ont aussi leur vie habituelle, elles vont au supermarché, elles ont des enfants, des
00:27horaires de travail et j'ai rencontré des danseuses les plus belles, je les ai invitées
00:35chez moi, j'étais invitée d'écouter leurs histoires pour endosser ce rôle, c'était
00:40fascinant, ça m'a aussi souvent pris le cœur, mais c'était vraiment passionnant
00:44d'entendre toutes leurs anecdotes et d'avoir un peu leur bénédiction pour faire ce film.
00:50D'ailleurs on a organisé une projection juste pour elles, elles auraient adoré.
00:55Ce film dit quelque chose d'assez cruel sur l'Amérique, quand on perd son job,
01:01il n'y a pas de protection sociale, on dort dans sa voiture. Est-ce que ça dit aussi
01:09à quel point les femmes sont vulnérables dans ce système-là, dans ce système social ?
01:15Jamie Lee Curtis traverse le casino, elle voit une femme qui danse sur un podium et
01:33elle regardait ce qui se passait, elle dit à la danseuse « wow, vous êtes très belle,
01:38est-ce que vous êtes serveuse, vous servez des cocktails ? » et elle a expliqué qu'elle
01:45était là pour divertir les gens, en même temps les faire boire et il n'y a pas de
01:50syndicat pour cette profession. C'est une profession non syndiquée, ces femmes n'ont
01:56pas de retraite, mais elles peuvent au moins se montrer en public, mais elles risquent tout
02:03pour cela. Ces danseuses de revue ne font pas ça vraiment pour l'argent, elles font
02:10ça parce qu'elles adorent le côté artistique de la chose et c'est triste, parce qu'on
02:18montre d'ailleurs dans le film qu'est-ce qu'on fait après, comment est-ce qu'on
02:22survit après.
02:23Et en fait c'est la réalité derrière la machine à vendre du rêve ?
02:27Exactement, il y a toujours un côté sombre derrière chaque rêve, mais on continue de
02:36s'accrocher à son rêve. C'était un personnage vraiment fascinant à étudier, la manière
02:46dont elle fait ses choix dans la vie, la fin de sa carrière, comment ça se passe et les
02:51femmes de son âge qui vivent la même chose mais réagissent différemment. C'était
02:59une expérience fantastique de plonger là-dedans, dans ce personnage avec toutes ses failles
03:04et pourtant elle continue de se battre, même dans les pires moments.
03:08C'est ça, parce que c'est l'histoire d'une femme qui a voulu danser toute sa vie
03:11sur scène et qui pour ça n'a pas pu élever sa fille. Et on lui reproche en réalité,
03:16elle-même elle se sent extrêmement coupable, sa fille lui reproche mais en réalité elle
03:20sent tout un regard social sur elle. Et il y a une très belle scène où elle dit peut-être
03:25que je me suis trompée, peut-être que j'ai fait des erreurs mais j'ai fait comme j'ai
03:28pu. Vous pensez vous aussi qu'il y a beaucoup de jugements sur le dos des femmes, beaucoup
03:35plus que sur le dos des hommes et sur le dos des mères ?
03:38Oui, surtout sur le dos des mères. Quelle que soit la carrière qu'endosse une femme,
03:47elle va toujours souvent se sentir coupable. Mais dans le showbiz, quand on est artiste,
03:55ce n'est pas très palpable, c'est difficile à expliquer à un enfant les choix qu'on
04:03peut faire. Et puis quand on fait face à ses enfants adultes, on leur demande pardon,
04:08au moins c'est bien d'arriver à en parler, du choix qu'on a fait. Et on comprend l'objectification,
04:14le rejet dont on a pu faire l'objet en brassant cette carrière. Et on n'est pas la seule
04:20à souffrir. Notre entourage souffre aussi, nos enfants souffrent. C'est ça dont parle
04:28le film. Et puis les mères sont censées être parfaites, or nous sommes des femmes
04:33imparfaites.
04:34Nous sommes toutes des femmes imparfaites. Mais ça veut dire que par exemple, vous aussi
04:39dans la vie, vous avez eu ces moments d'amour très fort et aussi de moments de vérité
04:45avec vos fils, à vous dans la vie ? C'est-à-dire des moments où il a fallu leur parler comme
04:49à des adultes pour qu'ils comprennent vos choix et vos erreurs ?
04:53Oui, non. On pense toujours qu'on va arriver à parler à vos enfants lorsqu'ils auront
05:09atteint une certaine maturité. Mais en fait, ils sont tous dès qu'ils sont petits.
05:14Et j'ai essayé de partager cela, de revenir sur les moments où ils ont vécu des périodes
05:20gênantes pour eux, parfois humiliantes. Et je voulais vraiment savoir ce qu'ils avaient
05:25ressenti. Et Carrie Fisher, Debbie Reynolds sont les mères de Hannah. Les personnages
05:38de la première scène qu'on a jouée ensemble avec ma fille.
05:43Et votre personnage dans le film se bagarre pour être vu comme une danseuse, pour être
05:49reconnu comme une artiste à part entière et pas seulement comme un corps. Et ça aussi,
05:55c'est très intéressant. En fait, c'est ce qu'on risque quand on expose son corps
05:59de manière sexualisée, c'est-à-dire que la femme se retrouve complètement niée,
06:04l'artiste se retrouve complètement effacé. Parce que c'est ce que vous avez vécu,
06:08aussi, d'une certaine manière.
06:10Oui, j'ai toujours eu l'impression d'avoir beaucoup plus à donner que cela. J'étais
06:22étouffée. Je voyais comment les gens me regardaient. J'étais un objet de pop culture,
06:28ce qui est un peu une chance. Mais j'ai dû lutter contre ça aussi pour redevenir humaine,
06:34pour jouer d'autres personnages. Voilà pourquoi ce film, c'était vraiment une bénédiction
06:40pour moi. Bon, je me serais arrangée pour que ma vie soit belle et j'étais contente
06:45de rester dans mon jardin à faire des cornichons, des confitures. Mais je ne m'attendais pas
06:50à ce que ce film tombe dessus. Je croyais que c'était la fin de ma carrière. Or,
06:54maintenant, je vois que c'est peut-être le début de ma carrière. Je vais continuer
06:58de faire des cornichons, des confitures, mais des films aussi.
07:01Vous étiez au Golden Globes et vous avez entendu le discours de Demi Moore quand elle
07:06a reçu le prix d'interprétation au Golden Globes, où elle était extrêmement bouleversante
07:13sur scène, où elle a dit quand j'étais jeune. Elle a 62 ans, Demi Moore. Elle fait
07:19ce métier depuis 40 ans et elle dit quand j'étais jeune, un producteur m'avait dit
07:23que j'étais une actrice popcorn, c'est-à-dire j'étais faite pour passer un bon moment populaire
07:29et divertissant, mais le grand cinéma, ça ne serait jamais pour moi. Et elle dit
07:33je l'ai crue. Je l'ai crue. C'était extrêmement fort ce moment, non ?
07:37Oui, Demi, ça fait très longtemps qu'elle tourne, qu'elle fait des films. Et je suis
07:49ravie qu'elle reçoive enfin ce qu'elle mérite. Ça fait très longtemps qu'elle
07:53travaille dans le cinéma. J'ai beaucoup d'admiration pour elle. Mais bon, on a tous
08:00des obstacles à surmonter. On emprunte des voies différentes, des routes différentes.
08:05Il faut croire en soi avant que les autres croient en vous. Et il faut accepter des rôles
08:13qui sont un vrai défi. Et ça fait peur, quelquefois. C'est plus confortable de rester
08:18dans son petit domaine. Mais avoir la chance de faire un rôle qui étonne les gens, c'est
08:26une grande chance. Surtout quand les gens aiment ça.
08:30Vous avez, Pamela Anderson, vous avez écrit vous-même votre autobiographie. Vous avez
08:34raconté cet itinéraire de petite Canadienne qui arrive en Californie et qui veut percer.
08:40Vous avez raconté les viols, les violences que vous avez subis, les agressions que vous
08:44avez subies, les mariages malheureux. Bref, vous avez dit qui vous étiez vraiment. Et
08:51ensuite, vous avez raconté que les gens vous arrêtaient dans la rue pour s'excuser,
08:57pour s'excuser de vous avoir mal jugé. Et je me suis dit, c'est absolument incroyable,
09:03ça n'arrive jamais. Oui, c'est drôle. Les gens me disent « je
09:12ne vous aimais pas avant, mais je vous aime maintenant ». Bon, il faut prendre ça comme
09:16un compliment, mais j'ai toujours cru en la valeur de la gentillesse. On se débatte
09:21tous avec la vie. La gentillesse, la bienveillance, c'est important. Et les malheurs que j'ai
09:28connus quand j'étais petite, j'ai mis tout ça dans le film et ça m'a un peu guérie,
09:32ça m'a fait du bien. J'ai parlé de ça, mais d'une manière détournée à travers
09:37mon personnage. Et je pense que ça fait du bien. Et j'ai mis tant de mon expérience
09:46de ma vie dans ce film que ça m'a fait énormément de bien. Le personnage que j'ai composé,
09:53ce n'est pas moi, mais j'ai poussé dans ma vie personnelle. Et tout passe dans les
09:58yeux. Tout ce à quoi j'ai survécu, je l'ai utilisé comme un engrais, comme une
10:05nourriture. J'ai décidé de peindre mon propre portrait, de planter mon jardin avec
10:12tout ce qui m'est arrivé. Je ne veux pas être définie par ce qui m'est arrivé,
10:16mais par ce que je fais. J'ai fait ce choix. Et je me suis dit que c'est pour ça que
10:22j'ai eu la vie que j'ai eue, parce que maintenant, je peux mettre tout ça dans
10:26le film. Ça a été une expérience fabuleuse dont mon âme avait besoin. Et j'ai envie
10:34de plus. J'espère que c'est juste le début.
10:36Oui, c'est votre premier rôle dramatique, mais vous en voulez d'autres.
10:39Oui. Oui. Oui. Et c'est ça qui est très beau et très paradoxal de vous voir dans
10:45ce film. Là, c'est l'histoire d'une femme à qui on dit à 57 ans qu'elle est trop
10:51vieille. Elle est finie pour la scène. Or, vous, justement, à cet âge-là, vous n'avez
10:56jamais été aussi belle, jamais été aussi bien dans votre corps, jamais eu autant de
11:00succès, jamais été aussi aimée. Vraiment, c'est ça qui est en train de se passer.
11:04Et c'est la différence, c'est que c'est un peu à l'intérieur et à l'extérieur.
11:08Je sens que ma carrière commence. Maintenant, j'ai l'impression que ma carrière commence
11:13maintenant, seulement, oui. Avant, c'était un peu de l'entraînement, en quelque sorte,
11:20et j'accumulais de l'expérience. Et je ne savais pas ce qui m'attendait, mais
11:29je n'ai jamais cessé de travailler ma voix, mon jeu, la danse, d'acquérir des compétences
11:37en me disant, quand je reviendrai, quand on me sollicitera, j'aurai ces armes-là.
11:43Bien sûr, j'en rêvais, mais je ne savais pas. Mais je voulais devenir quelqu'un de
11:46plus intéressant de toute façon. Et c'est merveilleux que ce film soit venu maintenant
11:50parce que j'étais prête. Vous, vous avez opéré votre mue, c'est-à-dire
11:54que vous avez repris votre histoire en main, vous avez décidé d'imposer votre propre
11:57récit, vous avez décidé de ne plus être l'objet, en réalité, de qui que ce soit,
12:03mais vraiment la femme que vous êtes. Mais après, il y a quelque chose qui change aussi
12:07en ce moment, c'est-à-dire qu'on voit bien qu'on regarde les pop stars, les icônes
12:12de la pop culture, puisque vous dites vous-même que vous avez été une icône de la pop culture.
12:16On regarde les femmes qui ont eu ce statut-là, on les regarde différemment aujourd'hui,
12:22on regarde Marilyn Monroe différemment, on regarde Britney Spears différemment,
12:28on regarde ces trajectoires extraordinaires et en même temps ces souffrances et ces douleurs
12:33immenses très différemment. On comprend mieux aujourd'hui comment le système les a broyées.
12:38Bien sûr, on peut toutes être victimes de ce genre de parcours,
12:55du show business, mais moi, j'ai choisi de reprendre ma vie en main.
13:04Et le fait, par exemple, de ne pas me maquiller, bon, c'est quelque chose de très simple,
13:11mais c'est comme ça que je veux me présenter aux yeux du monde. Et je suis ravie que ça ait
13:16parlé aux gens, parce que c'est très intime d'accepter d'être sans maquillage sur les tapis
13:23rouges, sur les couvertures de magazines ou dans ce monde, tout simplement. Je crois que j'ai un
13:28esprit rebelle. Le bonheur, c'est un choix, c'est une pratique aussi. C'est une joie. Et les
13:38personnages vulnérables, incompris, c'est ça que je veux explorer. Bien sûr, j'aurais pu jouer
13:46Shelley comme étant amère, etc. Moi, j'ai choisi l'opposé. Elle est vulnérable, fragile, mais elle
13:53est pleine de vie, de joie. Et c'est inspirant de ce fait. Et puis, il faut être imprévisible. On ne sait
14:02pas ce qui va se passer. Voilà pourquoi j'aime ma vie actuellement aussi.
14:05Merci Pamela Anderson, merci beaucoup. Je vous admire beaucoup et je pense que vous nous faites
14:11beaucoup de bien, mais vraiment beaucoup de bien à nous toutes et à nous tous.