Pour ce nouvel épisode de Chocs du monde, Edouard Chanot reçoit Laurent Ozon.
Il semble vexé d’avoir été oublié. Trois ans jour pour jour après le début du conflit ukrainien, Emmanuel Macron était à Washington le 24 février pour plaider la cause de l’Ukraine et de l’Union européenne. Pour s’insérer entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky. Mais le peut-il alors que Trump apparaît tout puissant ? Le dirigeant américain va-t-il imposer la paix, recomposer l’Europe ?
Il semble vexé d’avoir été oublié. Trois ans jour pour jour après le début du conflit ukrainien, Emmanuel Macron était à Washington le 24 février pour plaider la cause de l’Ukraine et de l’Union européenne. Pour s’insérer entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky. Mais le peut-il alors que Trump apparaît tout puissant ? Le dirigeant américain va-t-il imposer la paix, recomposer l’Europe ?
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00:00Bonsoir à tous et bienvenue dans Choc du Monde, le magazine des crises de la prospective
00:26internationale de TVL. Il était, semble-t-il, vexé d'avoir été oublié. Trois ans jour
00:31pour jour après le début du conflit ukrainien, Emmanuel Macron était à Washington, hier
00:36donc, pour plaider la cause de l'Ukraine et de l'Union Européenne et pour s'insérer,
00:41s'ingérer entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky. Alors Trump, malgré tout, est-il
00:46tout puissant ? Peut-il imposer la paix, recomposer l'Europe ? Pour répondre à cela, je reçois
00:51Laurent Ozon. Laurent Ozon, bonsoir. Bonsoir. Et merci d'avoir répondu présent à l'appel
00:56de Choc du Monde. Macron, Macron, Donald Trump. À la Maison-Blanche, Macron a demandé, je
01:01cite, une paix et pas une capitulation pour l'Ukraine. Se fait-il des illusions ? Peut-il
01:06encore obtenir quelque chose de Donald Trump, selon vous ?
01:11J'ai peur qu'on n'arrive pas à comprendre ce qui est en train de se passer en regardant
01:16les gesticulations d'Emmanuel Macron actuellement parce que je pense que l'objet de son voyage
01:22n'était en fait que d'essayer de ne pas perdre la face, pour utiliser un terme asiatique.
01:29Je pense que le but est fondamentalement pour Emmanuel Macron, qui est le représentant,
01:34on va dire, de l'État fédéral européen, et de ne pas perdre la face. Bon, voilà.
01:42Il y a clairement un travail de réorganisation, une nouvelle doctrine Trump qui est en train
01:48de voir le jour, politiquement, du point de vue de l'administration Trump. On commence
01:55à en discerner certains contours, mais je pense qu'il ne faut pas analyser ces phénomènes-là
02:01simplement avec les repères, les marqueurs du monde médiatique mainstream. On n'a pas
02:08affaire à la France, l'Europe, l'Ukraine, les États-Unis. Ça, ça n'existe pas. Je
02:14ne veux pas dire que la France n'existe pas. Je veux dire par là que les rapports de force
02:17qui sont en train d'être, qui se déploient, les contraintes, ne sont pas celles de rapports
02:23de force entre des pays. Il y a des forces, il y a des projets de société, il y a des
02:30géopolitiques, des puissances qui s'agitent et qu'on ne peut pas réduire et résoudre
02:38à simplement ce descriptif géographique et national que l'on utilise un peu trop
02:43souvent et un peu trop facilement. C'est pour ça que le mainstream semble perdu, selon
02:47vous, à l'heure actuelle. Avec cette nouvelle alliance, si on les comprend, si on les croit,
02:53ils voient une nouvelle alliance entre Moscou et Washington. Vous viendriez tempérer ça.
02:57Non, je ne vois pas d'alliance entre Moscou et Washington. Je vois simplement que ce qui
03:05compte fondamentalement, ce qui définit, ce que j'ai déjà expliqué il y a maintenant
03:09plusieurs années, donc il n'y a rien de nouveau sous le soleil, mais personne ne voulait
03:12l'entendre. On n'a pas affaire à un conflit entre les États-Unis au sens de puissance
03:20et de territoire, de peuple, etc. et la Russie ou la Chine. On a simplement d'abord une
03:27compétition et un conflit à l'intérieur d'un ensemble. Et cet ensemble, c'est l'ensemble
03:33qui s'est construit sous l'influence d'un État-monde. C'est-à-dire qu'à la fin de
03:39la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis sont passés d'un pays avec une administration
03:43et un État qui était assez faible. C'était la 19e puissance économique du monde, militaire
03:50du monde. C'était une puissance économique, certes, en pleine croissance, etc. Mais en 1945,
03:54à la fin de cette guerre et progressivement au fur et à mesure de la construction de la
03:58Guerre froide, les institutions américaines vont s'instituer comme un État-monde. C'est-à-dire
04:03vont se projeter dans un conflit mondial avec des proxys, etc. contre un autre État-monde qui est
04:10celui de l'Union soviétique. Dans cette opposition qui va naître, va se construire aux États-Unis
04:16petit à petit un État qui n'est plus l'expression politique du peuple américain, mais qui va
04:22progressivement essayer de se donner les moyens de continuer d'être un État profond au sens strict
04:26du terme. C'est-à-dire un État qui doit pouvoir se mettre en situation de poursuivre son œuvre,
04:33et donc se donner les moyens de son conflit et d'un conflit de long terme, avec une puissance qui
04:38elle a beaucoup plus de stabilité politique et institutionnelle, qui est l'Union soviétique,
04:41et qui eux, par contre, sont contraints par le calendrier électoral et les principes de
04:47la démocratie. Progressivement, et en particulier à partir de Carter, l'État américain va se
04:53constituer comme un État-monde, et donc un État qui échappe au contrôle du peuple américain.
04:59Si vous essayez de comprendre ce qui se passe aujourd'hui, c'est pour ça qu'on parle de
05:03« deep state », c'est-à-dire d'un État qui, par tous les moyens, et à partir de Carter,
05:08pourquoi ? Parce que Carter, c'est le dernier qui a essayé de... On connaît le « Halloween
05:12massacre », c'est-à-dire la destitution de la plupart des cadres de la CIA, etc. C'est Carter
05:16qui va en quelque sorte s'attaquer à ces institutions qui se sont un peu trop autonomisées,
05:22qui ont pris l'habitude de faire un peu n'importe quoi, et qui renvoient au peuple américain,
05:26à ce moment-là, une idée assez peu valorisante de ses propres principes. Les Américains essayent
05:32de se définir comme une puissance du bien, comme une puissance du commerce, comme une puissance de
05:37paix, etc., orientés vers le progrès, l'avenir, etc. Et leurs institutions, type la CIA, etc.,
05:44qui est impliquée dans des massacres, des coups d'État sanglant et la mise au pouvoir de dictatures
05:48militaires un peu partout dans le monde, va renvoyer en fait un reflet extrêmement désagréable au
05:55peuple américain. Carter va l'exploiter politiquement avec Goldwater, et ça va être un
06:00peu le début de la guerre. Et à ce moment-là, cet État profond, et je termine avec ça, cet État
06:04profond va comprendre en fait qu'il doit se mettre à l'abri, d'une certaine façon, des sautes
06:11d'humeur ou des aléas, je dirais, de la population américaine, qui est susceptible d'en ressortir
06:17au travers des urnes lors des élections, etc. C'est comme ça que se construit, dans les années 70,
06:23un État parallèle, qui est un État profond, qui va, je dirais, prendre le contrôle d'une certaine
06:28façon aussi des pays européens par le biais de l'Union européenne, et qui va progressivement
06:32s'instituer comme État occidental, État profond occidental. Et la guerre qui est menée à la
06:39Russie n'est pas une guerre qui est menée par la France ou qui est menée par les États-Unis. La
06:45guerre qui est menée à la Russie, c'est une guerre qui est menée par l'État profond occidental
06:49contre la Russie. Et la guerre que mène Trump, c'est une guerre pour faire à nouveau des États-Unis
06:56un pays et non plus un empire, et reprendre la main, c'est ce qu'il a promis à ses partisans,
07:02de reprendre la main sur leurs institutions, pour à nouveau faire que ces institutions soient,
07:08et lorsque ce n'est pas le cas, il va les fermer, c'est ce qu'il a fait avec l'UCED, notamment,
07:11et avec la NED, il va donc essayer de remettre, en quelque sorte, de faire obéir, de faire que
07:20les institutions politiques soient à nouveau à la main du peuple américain. Et voilà ce qui est
07:24en train de se passer. Donc on ne peut pas comprendre ce rapprochement, entre guillemets,
07:28entre l'impression qu'on en donne entre Poutine, etc., et si on ne comprend pas que Macron,
07:33Shultz et Starmer sont tous, tous les trois, des personnalités politiques du Deep State,
07:40mais côté européen, je dirais de l'État fédéral européen, qui est lui-même une production
07:46politique, comme l'OTAN, notamment, une production politique, une institution qui s'est autonomisée,
07:51et qui est le produit, je dirais, de cet État monde, qui est né aux États-Unis, et que Trump
07:57essaye de réduire. C'était un peu long, excusez-moi, mais je crois que c'est après-là votre raisonnement.
08:02Mais alors dans ce cas, comment comprendre les réactions, les dernières déclarations
08:04d'Emmanuel Macron ? Hier à Washington, il évoque une ouverture vis-à-vis de la Russie. C'est toujours
08:11une bonne chose d'avoir des communications avec le président Poutine, a donc dit Macron,
08:14si cela peut permettre d'arriver à un accord. Est-ce, encore une fois, de la gesticulation,
08:18ou y a-t-il un défaille dans cet état profond que vous évoquez ?
08:22Il y a quelques jours, Barreau, chargé des questions européennes et ministre des Affaires étrangères,
08:32disait que si Sergei Lavrov lui téléphonait, il ne prendrait pas l'appel. C'était il y a trois
08:38jours ou quatre jours. Je vous laisse mettre en perspective ce que vous venez de me dire là,
08:44avec ce que disait Barreau il y a quelques jours, Jean-Noël Barreau. Tout ça montre que c'est de
08:49l'amateurisme total. D'ailleurs, Jean-Noël Barreau n'a aucune formation diplomatique. C'est un gars
08:53qui n'a aucune compétence pour faire le métier qu'il fait. Je ne vous parle même pas de son
08:56bras droit second qui est Haddad, qui lui est un pur produit du Deep State. Il suffit de regarder
09:03les institutions américaines dans lesquelles il a travaillé. Là, on n'est pas du tout,
09:07dans les États-Unis, on est dans le Deep State. Ces gens-là sont des produits du Deep State,
09:11c'est-à-dire globalement de ces institutions dont je vous parlais, la rencontre de ces institutions
09:16avec ce qu'on appelle les banquiers militarisés, complexes militaires ou industriels, la finance
09:20internationale, etc. Aujourd'hui, ces gens-là sont en situation d'être débranchés. Petit à petit,
09:29Trump et Elon Musk sont en train de débrancher tout un tas de trucs. C'est pour ça que vous
09:35voyez les médias s'effondrer en Ukraine, c'est pour ça que vous voyez tout un tas d'associations
09:38pro-migration, etc. ou hawkiste en Méditerranée, en Amérique du Nord, etc. Qui ne bénéficient plus,
09:46en tout cas pour quelques semaines, de l'USAID. Non seulement de l'USAID, mais de la NED et d'un
09:50certain nombre d'autres administrations. Par exemple, les institutions européennes ont créé
09:55elles-mêmes des organismes de financement, par exemple de l'immigration subsaharienne au Maroc,
10:00en Tunisie, etc. Ce qu'a fait l'état fédéral américain, qui s'est autonomisé par le biais de
10:08ces institutions qui sont devenues mondiales, est en train d'être dupliqué en quelque sorte par
10:13l'Union Européenne. Pour nous, le sujet, c'est pour ça que Trump ne s'adresse pas à l'Union
10:19Européenne. Pourquoi il met l'Union Européenne sur la touche et s'adresse à des chefs d'État,
10:23donc à des pays, à des nations, ce n'est pas parce qu'il a un tropisme anti-européen par
10:28principe, c'est parce qu'il considère simplement qu'il sait que ces institutions, il est bien placé
10:33pour le savoir, et les américains aussi sont bien placés pour savoir que ces institutions ne sont pas
10:37l'expression de la volonté politique des peuples européens, mais sont des institutions d'occupation
10:44qui représentent fondamentalement les objectifs et les contraintes du Deep State. Il y a quelque
10:49chose qui est frappant, on comprend donc d'après votre analyse cette querelle ou ce conflit entre
10:54le Deep State et les nouveaux rebelles, mais le monde semble vraiment aller trop vite désormais
11:00pour Macron, Ursula von der Leyen, quand on voit évidemment ce que font Elon Musk et Donald Trump.
11:05Là, ce qui est assez frappant dans les négociations entre Washington et Kiev, c'est un simple exemple,
11:11les négociations concernant l'accord sur les minerais. On sent que Donald Trump veut obtenir
11:15quelque chose, vous êtes peut-être en désaccord. L'ami vice-ministre ukrainienne, Olga Stephanie
11:22indiquait le 24 février sur X qu'un accord est en passe d'être retrouvé avec Washington sur les
11:27minerais ukrainiens, mais on a l'impression qu'il y a un nouveau ton qui est donné par Washington.
11:30Je vous propose d'ailleurs de faire le tour de cette question des terres ukrainiennes et après
11:33je vous demanderai votre avis. Donald Trump veut les terres rares ukrainiennes. Sur Fox News, le
11:4010 février dernier, le dirigeant américain a déclaré vouloir récupérer l'argent versé à Kiev. 175
11:47milliards de dollars d'aides civiles et militaires à l'Ukraine ont en effet été approuvés par le
11:51congrès américain depuis trois ans. Or, Zelensky a lui-même évoqué en septembre dernier des
11:57gisements de terres et minéraux rares ukrainiens valant des milliards de dollars. Parmi eux, de
12:03l'herbium, du scandium et de l'ibertium, des matériaux indispensables aux nouvelles technologies,
12:09qu'elles soient scientifiques ou militaires. Selon les médias américains, la Maison-Blanche exigerait
12:1550 % des minéraux critiques du pays. Et pour les exploiter, Washington pourrait investir
12:21davantage dans le pays. Néanmoins, Zelensky n'a pour l'heure pas accepté de signer le projet
12:27d'accord qui lui a été présenté. Il exige que ce nouveau partenariat avec Washington contienne
12:32des garanties de sécurité pour l'Ukraine. Donc vous voyez là la carte des ressources
12:41minérales ukrainiennes, des terres rares aussi, plus discrètes donc, mais qui sont encore présentes
12:45sur les terres non occupées par la Russie. Zelensky, malgré la situation sur le front,
12:52malgré la puissance semble-t-il écrasante de Trump, peut-il encore négocier ? A-t-il quelque
12:56chose dans sa besace ? Trump a-t-il un intérêt encore avec l'Ukraine ? Zelensky, comme nous
13:02l'avons compris, a les ressources, mais il refuse le deal. S'il le refuse, Trump aura une
13:07justification pour le lâcher. Pensez-vous que Trump sera à ce point offensif à l'égard de Zelensky ?
13:12Je ne sais pas. Zelensky, paradoxalement, on est dans une situation où maintenant le simple fait
13:20de retarder, de bloquer en quelque sorte les initiatives de Trump, ou en tout cas de les
13:25discuter, donne du temps à la Russie pour conquérir des espaces supplémentaires. Et on ne peut pas
13:33ignorer la possibilité d'un effondrement du front en plusieurs endroits, et donc de la prise de
13:39territoire très rapide, et une accélération de la prise de territoire rapidement dans les jours
13:43ou les semaines qui viennent par l'armée russe, qui ne cherche pas à prendre le contrôle de
13:49l'Ukraine, mais cherche à reprendre le contrôle des oblastes et du Donbass en l'occurrence,
13:54en particulier. Une chose est sûre, c'est que tout le temps qu'essaie de gagner Zelensky, probablement
14:01pour sauver sa, je dirais sa peau, et peut-être la peau de ses réseaux, bien sûr, parce qu'on sait
14:08que pour l'instant c'est un président hors mandat, c'est-à-dire qu'il se maintient par le biais...
14:14C'est ce qui fait dire d'ailleurs aux Russes qu'un accord signé avec Zelensky n'aurait pas de valeur
14:18juridique, puisqu'en fait il pourrait être contesté ultérieurement juridiquement. Son mandat a pris
14:23fin en avril 2024. Voilà, son mandat a pris fin, donc les Russes disent, écoutez, dans ce contexte-là,
14:28aujourd'hui c'est le président de la Rada qui est décisionnaire en Ukraine, et pas Zelensky
14:34lui-même, et donc tout traité qui sera négocié avec lui sera de toute façon susceptible d'être
14:37contesté sur le plan juridique en Ukraine dans un an, deux ans, trois ans, cinq ans, et donc on
14:41repartira de zéro puisqu'il n'y a pas de légitimité. Bon. Trump a repris cet argument, il a qualifié
14:45Zelensky de dictateur sans élection, alors c'est un peu vache de la part de Trump ?
14:51C'est un peu vache, mais c'est vrai, enfin je veux dire, c'est pas un dictateur sans élection, il est
14:55dans un pays en guerre, donc évidemment organiser des élections dans un pays en guerre c'est
14:58évidemment pas très simple, mais il n'y a pas de doute sur le fait qu'effectivement il y a un
15:02problème de légitimité aujourd'hui, en tout cas sur le plan juridique de Zelensky. Le problème
15:08c'est qu'il est pris en tenaille entre un environnement immédiat de gens qui le contrôlent
15:12plus ou moins et qui le mettent sous pression, qui peuvent éventuellement exercer quelques
15:16pressions physiques ou financières sur lui. Il essaie de gagner du temps, mais ce temps
15:22qu'il essaie de gagner pour lui ou pour un certain nombre d'intérêts qu'on a du mal à
15:25discerner est un temps qui est précieux pour la Russie et qui est plutôt mauvais pour les
15:31Etats-Unis qui cherchent à obtenir une résolution assez rapide du truc, en tout cas pas pour Trump.
15:37Le tempo n'est pas le même. Le tempo n'est pas le même, les intérêts ne sont pas les
15:40mêmes et il y a en Ukraine des gens qui cherchent en fait à virer Zelensky le plus vite possible
15:46pour trouver une solution et bloquer la situation, figer la situation et se mettre en situation de
15:50négocier maintenant, sachant qu'ils estiment qu'à six mois ou un an la situation se sera
15:56encore détériorée et peut même rapidement basculer si rien n'est fait dans une semaine,
16:02deux semaines, on ne sait pas ce qui peut se passer. Mais mettez-vous la place d'un soldat
16:05ukrainien qui sait parfaitement que son pays va de toute façon céder une partie de ses territoires,
16:10risquer sa vie et aller mourir aujourd'hui pour défendre du temps gagné pour Zelensky d'entrer
16:19en négociation et d'accepter un cessez-le-feu, c'est quand même très difficile de le faire.
16:24Mourir pour son pays c'est toujours possible quand on vous persuade que vous allez mourir
16:27pour votre pays bien sûr, mais mourir simplement pour donner du temps à Zelensky de négocier,
16:31pourquoi ? Et pour obtenir quoi ? Je crois que c'est beaucoup plus compliqué. Donc l'effondrement
16:37est possible, donc mon avis c'est qu'il va y avoir effectivement, le temps joue évidemment
16:43très vite, je pense qu'il va y avoir de la part de l'Ukraine, il va y avoir un basculement rapide
16:47à mon avis dans les semaines qui viennent et on va voir Zelensky être sorti du jeu. Les seuls
16:53qui essayent de faire durer cela de façon... Quel est le scénario le plus probable sur cette
16:57sortie de Zelensky ? Est-ce qu'il y a un scénario à la Saddam Hussein aussi dramatique que celui de
17:01Saddam Hussein ? Non mais ça je ne sais pas, je ne sais pas parce que ça dépend quelle utilité il
17:06trouvera pour les acteurs qui sont en présence en fait. Donc je ne peux pas vous dire qu'il va
17:10terminer à scotcher un réverbère comme les... Comme le voudraient certains russes ? Oui,
17:15c'est plutôt une pratique ukrainienne ça, les gens qui se faisaient scotcher dans la rue et
17:19battre des réverbères, c'est ce qu'on a vu en Ukraine et pas en Russie. Et donc non, à la limite
17:29peu importe, ce qui est sûr c'est qu'il a conscience, il est intelligent, il est conseillé,
17:34il n'a pas été placé là par hasard non plus, il a été mis là par un oligarque milliardaire
17:38ukraino-israélien et par des intérêts extrêmement puissants et donc il y a des gens qui réfléchissent
17:48derrière lui. Et donc ces gens-là doivent avoir des trucs à négocier, ils doivent avoir des intérêts
17:53à négocier, des fonds à négocier, des saufs-conduits à négocier etc. Et donc tout ça à mon avis entre
17:59dans la balance. Je n'ai pas besoin de vous dire que la vie du troufion ukrainien face au
18:02troufion russe dans la boue ou dans la neige, ça ne leur passe à trois kilomètres au-dessus de la
18:06tête. Les jeunes hommes au combat évidemment, enfin dans les tranchées, dans le malheur des
18:11tranchées. Et l'Union Européenne dans tout ça parce que bon, avant-hier Kajakalas a annoncé
18:17donc le 16e paquet de sanctions contre la Russie. Je la cite, chaque paquet de sanctions prive le
18:22crémin de les fonds nécessaires pour mener cette guerre. Une déclaration qui semble totalement
18:25absurde. 73 pétroliers suspectés donc de contourner les sanctions européennes sont visés, les
18:30importations d'aluminium aussi, des manettes de jeux vidéo utilisées par les drones, les organes
18:34dits de propagande, enfin d'autres organes dits de propagande ont été visés. À quoi Kajakalas joue-t-elle ?
18:39Autre question, vous évoquez le deep state. Faut-il s'inquiéter ou se réjouir de l'influence des
18:45pays de l'Europe de l'Est qui continuent, qui veulent continuer les hostilités contre la Russie ?
18:50Alors là c'est pareil, les pays d'Europe de l'Est, c'est pareil, c'est un vrai problème de dire les
18:56choses comme ça. Il y a effectivement un tropisme antirusse parfaitement compréhensible du fait de
19:00l'histoire et du fait de l'histoire de l'Union Soviétique mais ça n'est qu'apparemment vrai. En
19:04tout cas c'est ce qu'on nous dit, on nous dit on peut quand même comprendre ces gens qui ont été
19:07envahis patin-couffin etc. Ok mais si vous essayez de voir ce qu'était l'Union Soviétique, il faut
19:12comprendre que l'Union Soviétique, la construction de l'état soviétique, c'est la construction d'un
19:16état de ses minorités. Les minorités, il y avait très peu de russes dans l'état soviétique, il y
19:22avait beaucoup de baltes, il y avait beaucoup d'ukrainiens, il y avait beaucoup de géorgiens,
19:28il y avait beaucoup de juifs etc. Donc l'état soviétique est un état des minorités d'une
19:33certaine façon, c'est le pouvoir des minorités contre la majorité russe. Et donc faire aujourd'hui
19:37de l'état soviétique un état russe pour expliquer un différent entre ces minorités,
19:43entre ces petits pays qui faisaient partie de l'Union Soviétique contre l'état russe, c'est
19:48quand même un petit peu fort de café. On se rappellera que Kayas en question est la fille
19:52d'un homme politique qui lui était un parfait soviétique. Regardez l'histoire du père de cette
19:59personne-là et vous comprendrez dans quel milieu politique elle est née. Il faut se rappeler que
20:04tout ce narratif sur la défiance entre l'état russe et ces petits pays menacés par la Russie
20:11ou par l'impérialisme russe, c'est aussi une grosse partie d'un toxe. L'état russe n'était
20:16pas l'état russe, il était l'état soviétique et cet état soviétique a été pendant de léongues
20:20années largement dominé par des minorités dans le bloc soviétique qui étaient notamment des
20:26minorités baltes et des minorités géorgiennes. Vous parlez de tous ces gens-là, de Khrouchev à
20:33Staline en passant par etc. C'est pour ça que la lecture purement nationale permettant d'expliquer
20:44cette tension et de la naturaliser en quelque sorte, de rendre compréhensible cette tension
20:52entre l'état balte et l'état russe, entre les petits états baltes ou certains états baltes et
20:56l'état russe, elle n'est qu'à moitié convaincante. A moitié dites-vous quand même ? Oui à moitié
21:03parce que quand quelque chose s'installe dans le temps et qu'il est répété par des médias,
21:10même si c'est faux au départ, même si ça s'appuie sur pas grand-chose, ça devient une réalité dans
21:15le contexte émotionnel qui est celui des tensions, de la guerre, etc. Rien n'est vrai par temps de
21:22guerre, tout est propagande d'une certaine façon. Donc il y a une réalité aujourd'hui, cette réalité
21:26c'est qu'il y a bien eu des tensions, il y a encore des tensions, mais les pays de l'Union
21:35Européenne, en premier lieu la France et l'Allemagne bien sûr, mais d'autres, ne peuvent pas se faire
21:40guider, ne peuvent pas se laisser entraîner par des petits acteurs de bord représentant une toute
21:48petite partie de la population européenne parce que ces gens-là ont des différends à régler avec,
21:52non pas l'État soviétique, mais avec l'État russe ou avec la Russie et on pourrait dire que
21:58d'une certaine façon il y a une fidélité là-dedans. Quand les élites baltes, en quelque
22:04sorte, ou juives ou géorgiennes, renversent le pouvoir des tsars et j'iréimpose ce gouvernement
22:13génocidaire qui va s'imposer en Union soviétique pendant plusieurs décennies, elles le font,
22:18elles mènent une guerre d'une certaine façon et c'est comme ça que les russes l'ont vécu aussi,
22:22elles mènent une guerre contre le peuple russe et on peut dire que d'un certain point de vue
22:25aujourd'hui, alors qu'elles sont autonomes, elles continuent à mener une guerre contre le
22:29peuple russe. C'est en tout cas comme ça que les russes peuvent aussi le percevoir. Ce que je
22:33veux dire c'est que je ne cherche pas à résoudre et à vous dire l'un a raison, l'un a tort, c'est
22:37que c'est toujours beaucoup plus compliqué d'expliquer les choses de façon en profondeur
22:42et en reprenant du contexte plutôt qu'essayer de se baser sur des surfaces planes avec des noms,
22:49des petits drapeaux parce que, je ne sais plus comment s'appelle ce jeu là, il y a un jeu avec
22:55un petit jeu de guerre vous savez où on lance des dés et puis on prend des risques. En fait on n'est
23:00pas dans une partie de risque, tout simplement. Il y a évidemment la nécessité de défendre
23:06ses intérêts et on ne peut pas reprocher un pays de défendre ses intérêts mais nos intérêts à nous,
23:10français ou allemands, les intérêts européens ne sont pas de se couper de la Russie mais au
23:16contraire de s'entendre et de travailler avec la Russie parce que c'est notre continuité
23:19territoriale, notre continuité civilisationnelle aussi. Nous avons aussi toutes les raisons de
23:24penser qu'il y a peut-être demain la possibilité grâce à une nouvelle doctrine Trump, on peut
23:30l'espérer notamment dans sa guerre contre le Deep State, de voir une couronne s'installer,
23:34une couronne de coopération entre les états de l'espace boréal, c'est à dire entre les états
23:41d'Amérique du Nord, d'Europe et la Russie et si vous regardez la terre, non pas depuis l'Afrique
23:48mais depuis le pôle Nord, vous verrez que ces états, autour de leur mer intérieure qui est le
23:55pôle Nord, ces états ont des choses à faire ensemble, ils ont des populations communes,
24:02ils ont des héritages communs aussi et peut-être que Trump dans sa volonté de trianguler, c'est à
24:08dire d'éloigner, de détacher la Russie de la Chine, ce qui est le résultat du processus initié
24:14par les néoconservateurs, peut-être qu'en faisant ça, Trump se dit aussi peut-être qu'une nouvelle
24:19forme de coopération peut naître avec la Russie et c'est en tout cas du point de vue de l'Europe
24:23certainement une perspective que nous ne devons pas voir d'un mauvais oeil. C'est amusant parce
24:27que la délégation russe à RIA de la semaine passée avait évoqué justement des accords
24:32potentiels entre les entreprises américaines et les entreprises russes en Arctique.
24:39On parle d'une ligne de chemin de fer qui partirait des Etats-Unis et qui traverserait
24:44l'ensemble de l'Eurasie. Oui le projet septentrion d'une certaine façon, c'est à dire pas l'unification
24:52mais la mise en place de coopérations approfondies entre les états de l'hémisphère boréal est une
24:57perspective géopolitique, un mythe géopolitique qui peut aussi peut-être permettre d'expliquer ou
25:04d'éclairer un certain nombre des options choisies par Trump. Au stade où on en est on ne peut pas
25:08encore l'assurer, en être sûr. Alors je voulais en tout cas vous interroger sur le partage du
25:13monde entre Trump, Poutine, Xi Jinping et que sais-je. Mais si je vous suis bien, on a dans
25:18les médias dominants actuels, on a ce sentiment là, qu'il y aura un partage entre ces nouveaux
25:25géants du monde. Mais si je vous écoute bien, non, il y aura potentiellement, en tout cas vous avez l'air
25:29de l'appeler de vos voeux, une alliance entre les uns et les autres. Ce qui peut me laisser penser
25:35que c'est possible, le plus réaliste c'est de considérer qu'il y a simplement une volonté
25:39triangulée, c'est à dire de détacher, d'inverser ce qu'a l'obsession néoconservatrice et l'obsession
25:44du 17 a produit. Elle a produit, elle a jeté la Russie dans les bras de la Chine et elle a créé
25:49en fait un pôle de puissance qui est absolument phénoménal entre la Chine et la Russie. La
25:55puissance diplomatique, l'influence de la Russie, des ressources russes, du territoire russe, des armes
26:02russes avec la puissance économique et puissance de recherche et technologique chinoise et la
26:06population. Tout cela crée une puissance phénoménale dont les Etats-Unis, en tout cas les
26:11élites occidentales, ne peuvent pas venir à bout ensemble. Si on ajoute en plus l'Inde et les autres
26:16membres des BRICS, malgré les malentendus entre l'Inde et la Chine. C'est un pivot différent mais oui.
26:21Et donc je pense qu'il y a très clairement chez une partie des gens qui ont soutenu Trump l'idée
26:26que l'adversaire principal était la Chine et qu'il fallait absolument rattraper ce coup-là et faire
26:31en tout cas neutraliser ou en tout cas fragiliser la coopération entre la Russie et la Chine. On peut
26:35en tout cas expliquer la politique menée actuellement comme cela, ça suffit bien. Le
26:39mythe septentrional c'est encore un projet, je dirais ça peut être, mais les mythes servent à ça,
26:44ils servent à mobiliser, ils servent à créer des dynamiques etc. et ils sont parfois utilisés
26:48uniquement pour ça. Ils ne se traduisent pas forcément dans le réel mais s'ils sont aussi
26:51utilisés pour ça, le mythe septentrional correspondrait de toute façade dans tous les
26:56cas de figure, on pourrait faire une émission là-dessus, au besoin de répondre à un certain
27:00nombre de basculements éco-démographiques, technologiques et quasi-anthropologiques des
27:07années qui viennent, des deux décennies qui viennent, et d'y répondre de façon totalement
27:11inédite. Donc oui, il y a un vrai sujet, la question c'est de savoir si ça fait partie du
27:15logiciel de Trump, j'ai quelques doutes. Chez Musk ou Peter Thiel par contre, qui sait.
27:20Le mythe septentrional, nous pourrions faire une émission là-dessus,
27:24mais écoutez, je prends la balle au bon, rendez-vous bientôt pour celle-ci. En tout
27:27cas Laurent Zon, merci beaucoup d'avoir répondu présent à l'appel de Chocs du Monde, merci à
27:31tous d'avoir suivi cet épisode, surtout, surtout. N'oubliez pas de le commenter et de le partager,
27:36merci et bonne soirée à tous.