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##SOYEZ_LIBRES-2025-02-17##

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00:00— Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin.
00:04— Explosion de l'adhésion fake news. Elisabeth Lévy, bonjour. — Bonjour, Jean-Jacques. Et merci. C'est vous qui m'avez signalé cette étude.
00:11— Elle est incroyable. — Merci beaucoup. — Incroyable. 34 000 personnes interrogées. C'est pas rien. Vaste étude. Alors...
00:18— Alors on découvre quand même... Je commence par une petite bonne nouvelle, parce que c'est une étude sur les connaissances scientifiques
00:25des Européens en général. Alors je découvre par exemple que 83% des Européens savent que l'oxygène que nous respirons
00:33vient des plantes. Vous le saviez, Éric, je suppose. Donc ça veut dire qu'il reste... — Oui. Éric Revelle, vous savez ?
00:37— La photosynthèse. — Voilà. Merci. — Bravo. — Ça veut dire qu'il reste quand même un grand, un large public qui est au fait
00:44des vérités scientifiques. Mais même dans cela, eh bien il y en a de plus en plus nombreux qui croient absolument n'importe quoi.
00:51Ça a pris en gros les gens qui croient au bobard... Ça a pris 7 à 8 points depuis 2021. Ça va quand même vite.
00:59Un tiers des sondés, par exemple, croient qu'il existe un traitement pour le cancer qu'on nous cache pour des raisons mercantiles.
01:06Autant un tiers à peu près pense que le gouvernement fabrique des virus en laboratoire pour contrôler notre liberté.
01:12Alors ça, par exemple, la France est dans la moyenne. C'est 31% des Français, 52% des Espagnols, 62% des Portugais
01:20et seulement, seulement 17% des Allemands. Alors ces gens qui croient tout cela, eh bien ils se prennent pour des esprits forts.
01:28On ne leur paie pas. C'est ce que Pierre-André Taguiaf appelle le « dubitationnisme ». On doute de tout ce qui est présenté
01:35comme vrai par des autorités intellectuelles ou scientifiques. Alors peut-être que nous vivons, Jean-Jacques,
01:41et c'est pour ça que vous avez eu raison d'attirer mon attention là-dessus, peut-être que nous vivons le début de la fin du monde des Lumières,
01:47un monde où la raison avait prémoté sur la croyance. Alors attention, d'abord, ça n'a pas commencé avec les Lumières.
01:54La raison existait avant et deuxièmement, ça n'empêchait pas, évidemment, au début du XXe siècle, par exemple,
02:01mais il y en a eu beaucoup d'autres, le succès considérable des protocoles des sages de Sion, mais dans les démocraties
02:07où le débat est ouvert, eh bien les vérités, me semble-t-il, finissaient quand même, à la fin, par gagner.
02:13Or, sans vérité partagée, il n'y a pas de manque commun. J'ai rencontré, ça c'est tout à fait réel, des gens convaincus, mais mordicus,
02:21qu'il y a une secte pédo-sataniste à l'Élysée, sur le modèle Agnon aux États-Unis, et ce ne sont pas des marginaux illuminés,
02:29ce sont des gens très intégrés socialement.
02:31— Alors pourquoi cette augmentation du doute, de la contestation de toute vérité scientifique, et que faire ?
02:39— Que faire, je ne sais pas si on pourra répondre, mais alors d'abord, la première raison un peu évidente, c'est la technologie.
02:45Il y a la viralité numérique qui fait qu'un mensonge répété des millions de fois devient instantanément une vérité.
02:51Évidemment, ça n'existait pas avant Internet. Et en plus, les algorithmes favorisent l'entre-soi, donc on frotte moins sa cervelle
02:59contre celle d'autrui pour reprendre la recommandation de Montaigne, qui disait qu'il fallait faire cela.
03:05C'est ce que nous faisons ici très souvent. Alors en plus, il faut dire que le complotisme épouse admirablement l'esprit victimaire de l'époque,
03:14parce qu'il y a un grand méchant qui est coupable de nos malheurs, nous sommes victimes, nous ne sommes responsables de rien.
03:20Et puis, je dirais plus profondément, c'est peut-être la logique ultime de la démocratie, de ce que Tocqueville appelait l'égalité des conditions.
03:29Aujourd'hui, alors évidemment, ça a mis longtemps, mais nous en sommes un peu à l'abolition de toute hiérarchie.
03:35Si chacun m'en vaut un autre, ce n'est quand même pas un prix Nobel qui va me dire ce qui est vrai sur la science.
03:42Et puis, il y a cette détestation des élites en bloc, tout se vaut, et je suis aussi fort que n'importe qui.
03:49Et en plus, les institutions, et particulièrement l'école, ont vraiment accompagné, forcé cette demande d'horizontalité.
03:57Et c'est comme ça qu'on a perdu, en quelque sorte, tout ce qui pouvait nous immuniser contre les mensonges et les forgeries.
04:04On a abandonné les humanités qui apprenaient l'esprit critique, on a vu disparaître l'amour de la connaissance, ce qu'on appelle la libido, si on dit.
04:12On voit l'effacement de l'améritocratie, la destitution des maîtres et des savants.
04:17Vous savez, Régis Debray, à cette expression, il dit « on a remplacé la transmission qui est verticale, le maître à l'élève, à la communication qui est horizontale ».
04:26Alors l'ironie, donc, de ce qui nous arrive, c'est que cette démocratie, que j'appellerais intégrale ou intégriste, faute de mieux, pourrait bien finalement tuer la démocratie.
04:36Je voulais vous rappeler que, pour Orwell, la liberté essentielle fondamentale, c'est d'abord la liberté de dire que deux et deux font quatre.
04:43« Si on a cela, tout le reste vient », dit-il. Eh bien, désormais, dire que deux et deux font cinq, c'est un droit de l'homme également,
04:51ce qui signifie que la vérité est le mensonge cheval, et donc, c'est un sale temps pour la raison et pour la démocratie.
04:57— Alors, sale temps pour la raison et la démocratie, Elisabeth Lévy. Je vous rappelle que le vice-président... Tout est connexe, dans ce que nous évoquons ce matin.
05:08— C'est fait exprès. — Le vice-président Vance américain, qui veut la liberté d'expression à total, mais je suis sur le principe généraliste d'accord avec ce qu'il dit.
05:20Mais ça passe par une libéralisation des plateformes qui sont justement le vecteur de ce que vous décrivez. Nous sommes quand même face à une contradiction magistrale, non émentale.
05:31— Eh bien si la régulation telle que nous essayons de l'inventer en Europe permettait, si vous voulez, de sélectionner les vérités et d'écarter les mensonges,
05:42je veux dire, je trouverais ça formidable. Or, la réalité, c'est que la régulation, y compris par la loi, n'a rien réglé. On ne protège pas la vérité par la loi.
05:53La loi Guesso... — Donc on ne fait rien. Donc on ne fait rien. — La loi Guesso... Pardon, j'ai fini. — Laissez-les finir.
05:58— Je vous réponds. La loi Guesso n'a absolument pas empêché le négationnisme. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire.
06:06Mais honnêtement, ce que je vois aujourd'hui, c'est que ce qu'on appelle régulation, ça n'empêche pas. Les mensonges, ça fait de la censure.
06:15Ça finit par interdire un certain type d'idées. — Elisabeth, l'état de droit, c'est indispensable. On est bien d'accord. Vous défendez l'état de droit.
06:22— Oui, mais pas n'importe lequel. — C'est quoi, l'état de droit ? — Alors j'ai à vous dire. L'état de droit, au départ, est conçu non pas pour ce qui se passe en ce moment.
06:30L'état de droit, au départ, c'est faire en sorte que l'exécutif, les pouvoirs, soient soumis à leur propre loi. C'est ça, l'état de droit. C'est de dire...
06:39C'est donc qu'il n'y a pas d'arbitraire. Aujourd'hui, l'état de droit, c'est la protection jusqu'à l'infini des droits individuels et notamment ceux des délinquants,
06:48parce que dans l'affaire Sarkozy-Bismuth, par exemple, les droits des avocats de la défense sont totalement bafoués. Mais les droits des OQTF dans notre pays
06:56sont scrupuleusement respectés. — Non mais Elisabeth, Elisabeth, les leçons que donne M. Vance sont des leçons difficiles à entendre pour les Européens
07:04et pour nous, Français, pour une raison simple. C'est qu'aux États-Unis, aujourd'hui, il y a une tentative de coup d'État qui est niée, une contestation
07:13d'une défaite électorale qui n'a jamais été acceptée, une grâce accordée aux assaillants du Capitole, une censure contre des journalistes
07:19qui n'ont pas le droit d'entrer à la Maison-Blanche, une censure des mots même utilisés par les scientifiques aux États-Unis. Donc M. Vance a sa conception
07:30de la liberté d'expression. Mais nous, nous avons la nôtre. Et moi, je n'accepte pas les leçons de moi-même. Les Américains. — Mais moi, je n'ai pas la vôtre.
07:37— Je vous le dis tout de suite. — Je suis navrée. Je n'ai pas la vôtre. Qu'est-ce qui s'est passé ? Marc Zuckerberg a raconté il n'y a pas longtemps
07:43que l'administration Biden l'obligeait... Non, non. — Très bien. Mais les Américains font ce qu'ils veulent avec leur liberté d'expression.
07:49— Vous ne pouvez pas parler de l'Amérique et dire... Maintenant, sur notre conception, honnêtement, c'est un problème... Mais je voudrais quand même...
07:55J'arrête après. C'est un problème vraiment délicat. Et je ne dis pas... Je ne crois pas à la liberté absolue. Les sociétés se définissent aussi...
08:03— Quelle solution proposez-vous, Élisabeth Lévy, pour réguler ces plateformes qui racontent n'importe quoi ?
08:09— Il y a une solution simple. Je crois que le problème, c'est la perte d'esprit critique. Ce qui veut dire... C'est ce que je vous ai expliqué,
08:17que la véritable solution, c'est de reconstruire une école digne de ce nom. D'accord ? En attendant, il y a évidemment un certain nombre...
08:26Si vous voulez, par exemple, on peut punir la calomnie, on peut punir l'injure, on peut punir tout cela. Je ne crois pas qu'on puisse punir le mensonge.
08:33Vous allez punir les gens qui pensent que la Terre est plate ? — Dites-moi. Mais j'ai une question, simplement.
08:38Et puis je vais donner la parole à notre ami. La loi encadre aujourd'hui. Est-ce que tout est permis... Heureusement que la loi encadre.
08:47Est-ce que tout est permis... Non mais je vous pose une question, pas à vous particulièrement, générale.
08:52Est-ce que tout est permis au nom de la liberté d'expression ? — Alors je viens de vous dire que non.
08:55Je viens de vous dire... Mais il y a des interdits. Par exemple, je ne suis pas sûre... Aujourd'hui, on voudrait mettre dans la loi
09:02le fait qu'on n'a pas le droit de contester l'origine purement humaine du réchauffement climatique. Or, là-dessus, je suis navrée.
09:11Il n'y a pas un consensus scientifique absolu. Si vous mettez cela dans la loi comme on veut le faire, je pense que la liberté d'expression,
09:20aujourd'hui, que les inconvénients en réalité de la liberté qui existent sont beaucoup plus graves que ceux de la censure.
09:27Maintenant, je n'ai pas de... — Éric, on va le redonner, Éric. — J'aimerais développer un point que j'espère original.
09:34Je pense que le nombre de fake news, ce qu'on appelle les fake news aujourd'hui, qui étaient des mensonges historiques ou...
09:41En fait, il est proportionnel à l'accélération du développement de la science. C'est-à-dire... — En tout cas, ça augmente.
09:47— Mais oui, mais oui. Mais je pense qu'avec le développement de l'intelligence artificielle, en fait, on perd tous nos repères d'êtres humains.
09:54Et ce développement exponentiel de la science au sens large fait que les gens perdant pied, en fait, s'accrochent davantage à des fausses informations
10:04et à des fake news. Je pense qu'on peut le vérifier historiquement. La deuxième chose – Jean-François a raison –, c'est que où je suis assez mal à l'aise,
10:11c'est qu'entre le contrôle qui casse la liberté d'expression des plateformes et le non-contrôle de ces plateformes qui laissent dire parfois
10:21et souvent n'importe quoi, en fait, on est dans une espèce d'espace vide qu'il faudra vite combler quand même, Elisabeth,
10:29parce que sinon, en fait, la vérité chutera. Et puis dernière chose sur les Américains. Ne vous trompez pas. C'est mon point de vue.
10:37Ne vous trompez pas. Tout ça, c'est quand même du business. — Mais évidemment. — C'est du business. — Ça, je suis d'accord.
10:42Je ne pense qu'à ça. — Non mais attendez. Trump, c'est à la fois un chef d'État qui est en train de redessiner les relations internationales
10:49qu'on soit pour ou qu'on soit contre. Mais c'est un type qui fait du deal en permanence, qui négocie en permanence. Musk aussi. Musk aussi.
10:56— C'est pour ça. Il est fort en business. — Non mais attendez. Le face-à-face, je vais être un peu terrible, entre la Russie et les États-Unis,
11:04sur la question de la paix en Ukraine, c'est quoi aussi ? C'est qui va reconstruire l'Ukraine ?
11:09— Quelles entreprises vont reconstruire l'Ukraine ? Ça a toujours été du business. — Attendez. Quand vous mettez de côté l'Europe...
11:19Bien sûr, vous les empêchez de négocier la paix en Ukraine. Et c'est terrible pour l'Europe de Mme von der Leyen.
11:26C'est aussi le résultat de sa politique. Mais c'est aussi les entreprises américaines qui vont reconstruire l'Ukraine.
11:31Souvenez-vous ce qui s'est passé en Irak. La reconstruction de l'Irak, elle a été faite par des entreprises américaines.
11:36Le groupe Halliburton, qui était proche des bouches, c'est aussi du business. C'est terrible pour l'Europe.
11:42— La reconstruction de l'Europe en 1945... — Bien, 8h20... Attendez, attendez. Il faut que j'observe un peu une pause, là.
11:46— Mais on se retrouve. On se retrouve 8h20 au 2e.

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