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00:00Europe 1 soir, week-end. 19h, 21h, Pascal Delatorre Dupin.
00:05Adrien Matour, directeur adjoint de la rédaction de Marianne, bonsoir M. le directeur.
00:09Bonsoir Pascal, bonsoir à tous.
00:11Vous savez, j'adore le taquiner parce qu'il l'a upgradé.
00:14Félicitations.
00:15On se sait 8 années.
00:16C'est M. le directeur, donc je le taquine un peu, on l'appelle M. le directeur.
00:19J'aime beaucoup Adrien.
00:20Arnaud Bédé-Détibourg, Adrien.
00:21Adrien est derrière la vitre.
00:23Politologue, rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire est avec nous.
00:26Merci beaucoup.
00:28C'est quand même l'info politique de la soirée, le tweet de Nicolas Sarkozy,
00:32qui a réagi pour la première fois à son bracelet électronique.
00:36Très long tweet, très long texte de Nicolas Sarkozy qui explique
00:41qu'il va former un recours devant la Cour européenne des droits de l'homme.
00:44Il va déposer ce recours avant la fin du mois.
00:47Il a dit qu'il a volontairement renoncé à des aménagements que la loi lui offrait.
00:54Bon, il prend le bracelet électronique comme tout le monde.
00:56Il a décidé de mettre entre parenthèses les activités publiques d'ancien président
00:59et de renoncer à toute expression médiatique à l'exception de ce message.
01:02Et c'est pour ça que je voulais qu'on le commente ce soir.
01:05Il estime et il explique par ailleurs qu'il a un énorme sentiment d'injustice,
01:10que je ressens me conférer une énergie décuplée.
01:12Elle ne cessera que lorsque la vérité aura été faite.
01:15D'ici là, je me battrai sans relâche, sans baisser la tête contre le mensonge,
01:18la calomnie et la manipulation sous toutes ses formes.
01:20Et c'est signé Nicolas Sarkozy.
01:22Est-ce que vous avez lu ce tweet de l'ancien chef de l'État ?
01:25C'est vrai qu'on a vu des images avec Nicolas Sarkozy avec un bracelet électronique.
01:30C'est une première dans l'histoire de la France.
01:33Je ne sais pas si un président dans une démocratie a déjà été condamné à de la prison
01:36ou à un bracelet électronique.
01:38Arnaud Benedetti ?
01:39Dans une démocratie, je ne pense pas.
01:41Alors, il y a eu des cas de chefs du gouvernement en Italie,
01:44notamment, qui ont été condamnés lors de l'opération Mains propres.
01:49Mais je ne suis même pas sûr d'ailleurs qu'ils aient fait de la prison.
01:52En l'occurrence, je me souviens que le premier ministre Benito Craxi, à l'époque,
01:55avait été condamné pour des histoires de financement de partis politiques.
01:58Clairement, il y a plusieurs choses.
02:00D'abord, on voit bien que ce que veut montrer finalement Nicolas Sarkozy,
02:03c'est qu'il est injusticiable comme un autre,
02:05qu'il assume la peine, qu'il ne demande pas justement des arrangements de peine.
02:11Et en fait, il va jusqu'au bout.
02:14C'est presque christique, d'une certaine manière,
02:17de la sanction qui lui était infligée
02:20pour mieux rebondir vraisemblablement
02:23vis-à-vis de la procédure qu'il a lancée devant la Cour européenne des droits de l'homme,
02:27dont il espère qu'elle va laver son honneur.
02:34Moi, personnellement, je trouve qu'il y a une volonté d'humilier l'ancien président de la République.
02:38C'est ce que disait Luc Ferry tout à l'heure sur ce plateau.
02:40Et que cette décision de justice pose, sur le fond, quand même un problème.
02:48Après, Nicolas Sarkozy a une longue bataille judiciaire.
02:54Parce qu'il faut rappeler qu'actuellement, il y a un autre procès en cours le concernant.
03:01Mais il est clair que le fait qu'il ait ce bracelet électronique,
03:08a un effet malgré tout sur l'opinion publique.
03:13Alors l'effet c'est quoi ?
03:14C'est qu'aujourd'hui en France, un ancien président de la République est injusticiable comme un autre.
03:20Et il peut être condamné comme les autres.
03:22C'est cette image-là qu'il faut aussi retenir.
03:24Après, il y a encore une fois cette volonté d'humilier qui, moi, me pose problème.
03:28Adrien Matou, c'est ce que disait Luc Ferry.
03:30Quelle image de la France à l'étranger avec un président et un bracelet électronique ?
03:34Pour ça, je ne suis pas forcément d'accord.
03:37On peut se poser la question de la volonté d'humilier des juges.
03:40C'est possible. Je ne connais pas le dossier par cœur.
03:44C'est compliqué.
03:45Après, le fait qu'un président puisse être jugé comme les autres.
03:49Et d'ailleurs, Nicolas Sarkozy joue le jeu, entre guillemets,
03:51parce qu'il renonce à des recours éventuels.
03:54Il a déposé un recours principal à la CEDH.
03:58Mais il accepte, entre guillemets, son sort pour le moment.
04:01Moi, je ne suis pas choqué.
04:02Justement, je pense que les Français ont beaucoup souffert du fait que, pendant très longtemps,
04:06on a eu l'impression qu'il y avait une impunité des politiques.
04:10Peut-être qu'il y a un retour de balancier et que, par effet inverse,
04:14les juges veulent montrer qu'il n'y a pas d'impunité et qu'ils vont plus loin.
04:18Oui, mais il y a une histoire entre Nicolas Sarkozy et les juges.
04:20Je comprends Arnaud Benedetti, Luc Férini, c'est la même chose.
04:23Il y a quand même une grosse contention entre les juges et Nicolas Sarkozy.
04:26Je m'intéresse juste sur cette manie qu'on a de hurler au laxisme des juges
04:32quand il s'agit de la délinquance ordinaire,
04:34et de considérer qu'ils sont extrêmement sévères contre les politiques.
04:38Mais c'est vrai ce que dit Adrien Matouja.
04:40Je suis d'accord avec vous, l'image que ça renvoie, c'est quand même un peu...
04:44Non, mais c'est aussi une image médiatique.
04:46C'est aussi les mêmes qui protestent contre le laxisme des juges
04:50qui s'indignent de leur excessive sévérité.
04:54Encore une fois, je ne connais pas le dossier dans les moindres détails.
04:57Il y a un autre procès, comme l'a dit Arnaud, l'affaire Kadhafi,
05:02qu'on suit de très près à Marianne qui est en cours,
05:04ou d'ailleurs Nicolas Sarkozy dans sa défense, certes passionné, est un peu en difficulté.
05:09Ça fait 20 ans qu'on entend parler des affaires de Nicolas Sarkozy,
05:13et finalement ça arrive très tard, ces condamnations,
05:16parce qu'on a l'impression que ces affaires-là sont dans le débat public depuis des années.
05:19Alors évidemment, il y a ce soupçon de partialité des juges
05:23qui leur colle la peau, et leur colle la peau parce que de fait,
05:26on a l'impression que la justice varie en fonction de la personnalité de la personne qui est accusée,
05:31et ça effectivement c'est un problème.
05:33Il n'y a pas de preuves en fait dans le dossier, si je me souviens bien.
05:35Il n'y a pas de preuves.
05:37Je ne pense pas que les juges et les condamnés sont preuves, quand même.
05:41C'est un dossier qui est très compliqué en l'occurrence,
05:43et dont la sanction est quand même manifestement tout à fait contestable,
05:47et d'ailleurs elle est déjà contestée par celui qui est aujourd'hui sanctionné,
05:51c'est-à-dire Nicolas Sarkozy et ses avocats,
05:53et c'est la raison pour laquelle ils saisissent la Cour européenne des droits de l'homme.
05:56Et il est possible d'ailleurs que dans deux ans, trois ans,
05:58la Cour européenne des droits de l'homme donne raison à Nicolas Sarkozy.
06:03Donc ça c'est une réalité.
06:04Ensuite oui, je rejoins ce que dit Adrien,
06:06c'est-à-dire que le problème c'est qu'en France quand même,
06:09peut-être que les politiques en effet sont très contestées,
06:12que les élites sont très contestées,
06:14mais la justice est mise en question aussi par la société française.
06:17C'est-à-dire qu'aujourd'hui il y a une défiance très forte vis-à-vis de l'autorité judiciaire
06:24en raison de sa politisation, qu'on le veuille ou non,
06:27il y a aujourd'hui une justice qui est politisée.
06:30Je rappelle quand même que le syndicat de la magistrature
06:32a pris des positions politiques durant les dernières élections législatives,
06:37qu'il représente à peu près 35 ou 40% du corps électoral de la magistrature.
06:43Donc il y a quand même un problème qui se pose aussi de ce côté-là,
06:45et qu'on ne peut pas mettre sous la table.
06:47Mais après, en effet, que pendant des décennies et des décennies,
06:52des dirigeants politiques aient échappé, en effet, à la justice,
06:57il y a un retour de Balancier.
06:59Mais le retour de Balancier il a commencé il y a longtemps.
07:01Il a commencé dès la fin des années 80 et des années 90,
07:03notamment dans les histoires de financement de partis politiques.
07:06Souvenons-nous que Henri Emmanueli, premier secrétaire du Parti Socialiste,
07:11qui avait été président de l'Assemblée Nationale,
07:13avait été lui aussi condamné à une peine, alors à l'époque, d'inéligibilité,
07:17à la JUP, vous l'avez rappelé, et d'autres encore.
07:21Donc c'est une réalité.
07:23Alors après, il y a quand même un autre problème,
07:25qui ne correspond pas d'ailleurs au problème de Nicolas Sarkozy.
07:29C'est quand la justice, finalement, a un impact sur le cours de la démocratie.
07:34C'est ce qui s'est passé avec l'affaire François Fillon,
07:36et c'est ce qui pourrait se passer le 31 mars prochain avec Marine Le Pen.
07:43Donc là, il y a un vrai sujet, quand même, aujourd'hui,
07:46qui me semble poser une question démocratique.
07:49Les politiques ne doivent pas échapper à leurs responsabilités,
07:51parce qu'in fine, tout cela peut demander, en effet,
07:54un certain nombre d'aménagements législatifs.
07:56Mais aux Etats-Unis, l'affaire Stormy Daniels a été mise de côté
07:59avec Donald Trump, depuis qu'il a été élu président.
08:01C'est-à-dire qu'il s'est endarré de tout.
08:03Après, il avait été mur de cause, il me semble.
08:06La volonté de certains juges de le rendre inéligible avait échoué.
08:10En tout cas, sur la question que pose Arnaud,
08:13ce qui est important, c'est de considérer qu'il y a les peines qui sont prévues pour les délits,
08:18après, l'influence des décisions de justice sur la démocratie,
08:21à mon avis, ne doit intervenir qu'en des cas d'extrême nécessité.
08:24Il faut se demander si tel ou tel délit commis par un responsable politique,
08:29en l'occurrence, là, on parle beaucoup de Marine Le Pen
08:31et des emplois présumés fictifs au Parlement européen,
08:34est-ce que ça doit justifier une incapacité de se présenter à toute élection ?
08:40Je ne suis pas sûr.
08:42Ça peut justifier une peine.
08:44Une peine d'inéligibilité, c'est autre chose.
08:46Une peine d'inéligibilité, c'est autre chose.
08:49Là, on verra effectivement...
08:51En plus, il y a la question de l'exécution provisoire de Marine Le Pen,
08:54c'est-à-dire que la peine serait exécutée même si elle fait appel,
08:57l'appel ne serait pas suspensif.
08:59Ça, c'est une autre question qui va se poser, qui va être extrêmement importante.
09:01Donc, ce serait appliqué immédiatement ?
09:03C'est toute la question.
09:05C'est ce qu'a demandé le parquet.
09:07Le parquet a demandé l'exécution immédiate de la peine.
09:10Ça veut dire que ça serait éliminatoire tout de suite.
09:13Y compris en cas d'appel.
09:15Je pense que là, on serait véritablement confronté à un énorme problème politique
09:19et à un énorme problème démocratique.
09:21Comment se fait-il que celle qui, malgré tout,
09:25a été deux fois finaliste de l'élection présidentielle,
09:28qui est à la tête du premier groupe parlementaire aujourd'hui,
09:31puisse être condamnée avec une peine qui lui soit appliquée immédiatement ?
09:35Alors, c'est la loi.
09:37C'est la loi. Elle a été votée par les parlementaires.
09:39Je le rappelle.
09:41Enfin, ça pose question.
09:42Après, il y a d'autres questions sur le dossier de Marine Le Pen.
09:44On ne va pas rentrer dedans.
09:45Mais sur le rôle d'un collaborateur politique aussi,
09:48on peut se poser des questions là-dessus aussi.
09:50Finalement, un assistant parlementaire est un collaborateur politique.
09:54Est-ce que le parlementaire ne peut pas utiliser,
09:57comme il l'entend dans les limites du contrat,
10:00cet assistant parlementaire ?
10:03C'est un vrai sujet aussi.
10:04Marine Le Pen, on va en parler dans un instant.
10:06Mais sur l'angle politique, si vous le voulez bien,
10:08Marine Le Pen est en Espagne
10:11pour une réunion des personnalités de l'ultra-droite européenne.
10:17Elle a fait des propositions.
10:18Elle a reparlé du droit du sol.
10:21Mais d'abord, il est 20h44 sur Europe 1.