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Dominique de Villepin était l'invité du 8h30 franceinfo le lundi 20 janvier 2025

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00:00Bonjour Dominique de Villepin, trois premiers otages libérés hier par le Hamas, trois femmes israéliennes,
00:07libération possible grâce à l'accord de trêve conclu avec le gouvernement israélien,
00:11qui lui-même a relâché de son côté 90 premiers prisonniers palestiniens.
00:16Cette trêve, c'est le début de la fin de la guerre ?
00:19Il faut le souhaiter, c'est évidemment beaucoup d'émotions de ce jour tant attendu,
00:25et des émotions mêlées, à la fois de la joie de voir ces jeunes femmes enfin libres,
00:31mais aussi l'inquiétude pour ceux qui ne sont pas sortis, peut-être pour ceux qui sont déjà morts.
00:38Donc c'est tout cela qui se mêle et avec un terrible sentiment de gâchis devant tout ce temps perdu,
00:46les choses qui auraient pu sans doute être réglées bien plus tôt,
00:50et puis tout ce qui est devant, toutes ces vies à reconstruire,
00:55tous ces efforts qui seront à faire pour essayer de transformer un cessez-le-feu en une véritable paix.
01:02Vous parlez du temps perdu, le premier ministre du Qatar a dit que cet accord de trêve
01:06est en réalité sur la table depuis décembre 2023, soit depuis 13 mois.
01:11Qu'est-ce qui a coincé selon vous ? Qu'est-ce qui a changé la donne aujourd'hui ?
01:15Il est trop tôt pour rentrer dans le jeu des responsabilités et l'histoire fera son travail.
01:20Aujourd'hui, nous sommes dans l'émotion du moment et je crois que rien ne sert de vouloir aujourd'hui démêler le vrai du faux.
01:29Ce qui est vrai, c'est que ce cessez-le-feu aurait sans doute pu être conclu plus tôt.
01:35Mais aujourd'hui, partageons le bonheur de ces familles et en même temps,
01:41la douleur de ceux qui sont toujours dans l'attente et dans l'incertitude.
01:45On est frappé par les images de la libération et notamment en ce moment,
01:50cette démonstration de force en quelque sorte du Hamas avec des miliciens lourdement armés,
01:55du matériel qui semble en très bon état avec le sentiment que le Hamas est toujours là, très implanté à Gaza.
02:02Est-ce que ce sont des images de propagande ou est-ce que c'est le signe,
02:05comme le disait récemment le secrétaire d'État Antony Blinken, le secrétaire d'État américain,
02:09que le Hamas a continué de recruter massivement du fait de la guerre ?
02:13C'est le signe de ce que nous avons toujours su, c'est qu'on ne peut pas éradiquer un mouvement de ce type
02:20qui commet des actes terroristes, on ne peut pas l'éradiquer par la seule force.
02:25Et c'est tout le défi qui est aujourd'hui devant nous, transformé en politique, en action politique,
02:32en perspective politique et c'est un exercice autrement difficile.
02:37Donc tout est à faire dans ce domaine et ce qu'il faut souhaiter c'est que non seulement les partis israéls,
02:44les palestiniens, mais toute la communauté régionale et toute la communauté internationale
02:48pourra faire preuve d'audace, d'imagination pour rétablir en quelque sorte l'ordre des choses
02:56et offrir à chacun une perspective et un espoir.
02:59L'année dernière en juin, Emmanuel Macron a affirmé que ce n'était pas le moment de la reconnaissance
03:03d'un État palestinien. En septembre, à l'ONU, il s'est engagé pour que, je cite,
03:07tout soit fait afin que les palestiniens disposent enfin d'un État.
03:11Ça y est, c'est le moment pour vous, il faut un État palestinien, il faut le reconnaître, la France doit le reconnaître.
03:16Je l'ai toujours dit, l'usage de la force ne peut être que temporaire et ne peut qu'accompagner une stratégie politique.
03:26Donc de ce point de vue-là, toutes les leçons que l'on peut tirer depuis des décennies,
03:30toutes les leçons sont les mêmes. Donc je regrette que la France, je regrette que l'Europe
03:36ne s'ouvre pas à cette réalité politique qui est que le point de départ d'une nouvelle relation
03:44entre Israël et ses voisins, Israël et les Palestiniens, ne puisse pas se construire
03:50à partir de cette exigence de justice. Justice qui doit être rendue aux Palestiniens
03:55qui depuis 1947-1948 sont sans État. Donc ce point de départ me paraît être toujours vrai aujourd'hui
04:04et je pense que la reconnaissance de l'État palestinien, c'est le point de départ,
04:09non seulement d'un nouvel ordre régional mais d'un nouvel ordre international.
04:13Vous savez, dans les derniers mois, la fracture entre les pays occidentaux,
04:20les pays du Sud global et les pays du Grand Est n'a cessé de s'accroître à cause du deux poids, deux mesures.
04:26Nous avons perdu énormément de crédibilité et nous avons vu les ravages produits
04:32par l'absence d'ordre et de gouvernance internationale.
04:35Si nous voulons reconstruire, il faut le faire à partir de principes communs
04:39que nous respectons les uns et les autres. Donc le droit international, l'exigence de justice
04:46doivent être les points de départ et ce réalisme qui conduit à penser que c'est par la politique.
04:53Et la politique, c'est beaucoup plus difficile que l'usage de la force et l'usage des armes
04:59qui conduit à l'escalade, qui conduit à l'impasse, qui conduit à plus de guerres.
05:04Je crois qu'il faut sortir de ces surenchères.
05:07Dernière question qui va d'ailleurs nous amener au sujet suivant.
05:09Cette trêve à Gaza pour vous, c'est une première victoire de Donald Trump,
05:14le président qui sera investi tout à l'heure.
05:16Son arrivée a changé la donne et on voit bien que les choses se sont alignées
05:23dans cette région très largement sur cette arrivée.
05:27Donc il y a eu une pression qui s'est exercée et qui conduit aujourd'hui à se cesser le feu.
05:34Il faut souhaiter que ce ne soit pas seulement l'effort d'un jour, l'effort d'un moment
05:39et que Donald Trump ait la vision de la stabilité de cette région,
05:44d'une région qui retrouve un nouvel équilibre.
05:47Et il faudra donc plus qu'un cesser le feu pour permettre à cette région
05:51de retrouver la paix et la stabilité.

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