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00:00Et un bel andalou qui nous a rejoint dans ce studio, Olivier Benquemoun, ça va Olivier ?
00:05Ça va, je vous parlerai d'un réalisateur espagnol justement.
00:08Ben oui, Pedro Almodovar.
00:09Si señor.
00:10Tout à l'heure.
00:11Si señor.
00:12Je suis très heureux d'accueillir ce matin une scénariste, réalisatrice et surtout écrivaine.
00:18Bonjour Amanda Sters.
00:19Bonjour.
00:20Merci d'être avec nous ce matin pour nous présenter votre nouveau roman.
00:24J'ai cité certaines de vos nombreuses casquettes.
00:28Une qui j'imagine surpasse quand même toutes les autres, c'est celle de Maman.
00:32Et il se trouve qu'on a invité également l'un de vos enfants, Léon, Léon Esby, à
00:36venir chanter en live tout à l'heure.
00:38Et vous avez découvert ça en arrivant à Europa ?
00:40Vous ne vous avez pas prévenu ?
00:42Non, on n'était pas au même endroit ce matin.
00:44Je vis à l'hôtel quand je suis là et lui, il était chez son père.
00:47Donc je le vois arriver, je lui dis « Tiens, tu fais une émission de radio ce matin ? »
00:50Je ne savais pas.
00:51Il ne savait pas, il était un peu embêté, il ne savait pas.
00:53Et puis on est venu nous chercher pour aller au même endroit et j'ai compris.
00:57Et alors lequel de vous deux est le plus stressé ce matin ?
00:59Du coup, maintenant, moi qui ne suis jamais stressée sur une émission de radio, je le suis maintenant pour lui.
01:06Stressé de l'entendre chanter tout à l'heure ?
01:08Je sais qu'il chante très bien, mais c'est comme les spectacles de l'école, ça ne change pas.
01:13Bien sûr, j'imagine.
01:14Je sais ce que c'est, je vous rassure.
01:16Moi, je serai en larmes à votre place déjà.
01:18Avant cela, parlons de votre nouveau roman « Les gestes » que j'ai dévoré ce week-end
01:24et qui lui aussi s'intéresse à la famille.
01:26Mais alors pas à la vôtre en particulier, à Amanda Stears.
01:29Vous n'avez pas de lien direct avec la famille que vous décrivez dans ce roman, c'est totalement inventé ?
01:33Non, absolument pas, c'est totalement fictif, oui.
01:35Quelle imagination !
01:36Parce que pour ceux qui craignent les livres où il ne se passe pas grand-chose,
01:40alors là, soyez sans crainte, parce que vous avez réussi à condenser en moins de 300 pages
01:45l'histoire d'une famille sur plusieurs générations.
01:47Ça va de la Seconde Guerre mondiale jusqu'à aujourd'hui,
01:50d'Alexandrie à Paris, en passant par la Grèce, en passant par l'Italie.
01:53C'est assez ambitieux comme projet.
01:56Vous ne vouliez pas faire plusieurs tomes ?
01:58Non, je n'avais pas du tout pensé comme ça au départ,
02:01et puis c'est vrai que moi je n'aime pas les phrases inutiles, je n'aime pas quand il ne se passe rien,
02:05je n'aime pas les longues descriptions, donc c'est toujours très...
02:08Je pense que je viens d'une génération de zapping,
02:12je pense que pour garder les gens en éveil, il faut qu'il se passe toujours quelque chose,
02:17donc j'écris les livres que j'aime lire moi aussi, j'aime quand il se passe quelque chose.
02:22Est-ce que vous êtes partie d'un arbre généalogique pour écrire cette histoire ?
02:26Vous aviez toute votre trame dès le départ ?
02:28Non, pas du tout, mais je savais où je voulais emmener le lecteur,
02:31et c'est vraiment sur, puisque le livre s'appelle Les Gestes,
02:34et c'est vraiment sur ce geste de réconciliation qui va devoir traverser plusieurs générations
02:40que j'ai articulé le récit.
02:43Alors le narrateur de cette histoire, c'est Marc, qui s'adresse à son fils,
02:47il veut lui raconter d'où il vient, et donc il se plonge dans l'histoire de sa famille,
02:51notamment l'histoire de son père, un homme déraciné d'Egypte,
02:55et qui, comme vous l'écrivez, ne sera donc plus jamais chez lui nulle part,
02:59un homme en fait qui a beaucoup de mal à s'installer dans la vie,
03:03il est là tout le temps en train de passer, même d'une femme à une autre,
03:06d'une famille à une autre, d'un lieu à un autre.
03:09Lui-même ayant été abandonné, je pense qu'ensuite il a du mal à adopter quelqu'un,
03:16ça parle de ça, ça parle de transgénération, de ce qu'on nous laisse malgré nous,
03:22même quand les gens sont absents, et justement ça crée quelque chose sur un enfant,
03:27et comment on arrive ou pas à se détacher des traumas de l'enfance,
03:33donc ça j'en ai toujours parlé, ça a toujours été dans les thèmes qui me sont très chers,
03:39j'écris des personnages qui ont des défauts, mais qu'on aime parce qu'on comprend pourquoi
03:44ils ont ces défauts, pourquoi ils sont empêchés, pourquoi ils n'arrivent pas à accomplir leur destin.
03:49Et ce roman vous l'avez intitulé « Les gestes » Amanda Sters,
03:52parce que c'est aussi une réflexion sur les gestes qu'on transmet inconsciemment
03:56de génération en génération en fait.
03:58C'est venu de quelque chose de personnel, même si le livre n'est pas autobiographique,
04:03totalement fictif, un jour je marchais dans la rue,
04:06je me suis vu faire un geste de mon père que je ne savais même pas que je faisais,
04:10je me suis dit que c'est inscrit en moi, on reproduit des choses.
04:13C'est quoi ce geste ?
04:14C'est vraiment un tout petit truc qu'il fait avec sa main sur sa tête,
04:19j'ai eu l'impression de voir mon père, comme parfois on se croise dans le miroir
04:23et qu'on voit notre mère, notre grand-mère, et pareil quand on voit nos enfants,
04:29et je me suis dit quelle belle façon de raconter une famille,
04:32moi qui aime toujours raconter les silences, je me disais qu'il y avait quelque chose de fort,
04:36non seulement dans les gestes qu'on reproduit mais dans ce qu'on ne fait pas aussi,
04:39ce qu'on attend, les bras qu'on n'ouvre pas pour nous,
04:44les mains qui ne nous caressent pas les cheveux,
04:46tous ces gestes-là, ce qu'on fait, ce qu'on ne fait pas,
04:49sont les sortes de squelettes de la famille.
04:54Et il y a un geste qui revient tout au long de ce livre,
04:57c'est celui de la grand-mère égyptienne de Marc,
05:00elle s'appelle Florentine, et elle a un geste très particulier,
05:03comme un espèce de tic, en fait, elle se cache le visage.
05:06En fait, elle souffre d'une maladie qui fait qu'elle ne reconnaît pas les visages.
05:12La prosopagnosie.
05:15C'est assez drôle parce que votre prédécesseur, monsieur Vandel, que j'adore,
05:19souffre de cette maladie.
05:22Il ne reconnaissait pas bien les visages.
05:24Non, et parfois on devait penser qu'il était hyper antipathique
05:27parce que parfois une personne qu'il avait interviewée la veille,
05:30il pouvait ne pas lui dire bonjour dans un restaurant
05:33parce qu'en fait, il lui manque une capacité à reconnaître un visage,
05:39ce qui est fou d'ailleurs quand on y pense qu'on puisse reconnaître autant de visages.
05:43Et c'est des gens qui parfois ne reconnaissent même pas leur propre visage,
05:46ce qui est le cas de mon personnage dans le livre de Florentine.
05:50Et quand elle voit son enfant arriver en courant dans ses bras,
05:56une fois sur deux, elle a peur parce qu'elle ne sait pas qui est cet enfant
05:59qui court vers elle et elle met sa main devant son visage comme pour s'en protéger.
06:03Et donc cette espèce de premier rejet, de rejet originel,
06:09va ensuite marquer toute sa vie, son besoin de séduire les femmes,
06:13son besoin qu'on ne le rejette pas, qu'on lui ouvre les bras.
06:17Les gestes, c'est le nouveau roman d'Amanda Steyr.
06:20C'est disponible aux éditions Stock.
06:22On va en parler tout au long de cette émission.
06:24Et puis dans un instant, on va parler cinéma avec monsieur Ben Kemouna.
06:27Ben Kemouna, tout de suite sur Orphe.

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