La politique sans l’aimer... Patrick Cohen rend hommage à l’écrivain et journaliste Olivier Todd, disparu ce week-end à 95 ans.
L'édito Politique dans le 7/9 par Patrick Cohen (7h43 - 30 Décembre 2024)
Retrouvez toutes les chroniques de Patrick Cohen sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-edito-politique
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00:00La politique, sans l'aimer, dans votre édito Patrick Cohen, hommage à l'écrivain et journaliste Olivier Todd, disparu ce week-end à 95 ans.
00:08D'Olivier Todd nous restent ses biographies de Camus, Brel, Malraux, son récit magistral de la chute de Saigon en avril 75,
00:15la première interview télévisée de Jean-Paul Sartre en 69, des reportages de guerre et des portails en cascade pour le Nouvel Observateur et l'Express.
00:22Olivier Todd disait qu'il préférait les gens aux idées et l'investigation à l'anglo-saxonne au journalisme de cour.
00:28Pourquoi saluer ici sa mémoire et son travail ? C'est simple, à ceux qui nous ont précédés, qui ont ouvert la voie, qui nous ont éclairés,
00:35qui l'ont fait scrupuleusement et passionnément, nous sommes redevables.
00:38Nous avons une dette à l'égard de ceux que nous avons admirés pour que l'oubli ne les recouvre pas.
00:43D'autant que Olivier Todd a eu aussi le courage de rompre, liser à ce sujet le papier que son ami Bernard Guetta lui consacre dans Le Monde.
00:50En 70, Todd démissionne de la télévision après la censure d'un sujet lié à la guerre d'Algérie.
00:56En 73, après 8 ans de reportages au Vietnam et de sympathie pour le Vietcong communiste, il admet « je me suis trompé ».
01:03Il a aussi, Olivier Todd, traité de politique française.
01:06Ce qu'il n'aimait pas beaucoup, les politiques ne l'impressionnaient guère.
01:08Il n'aurait pas, disait-il, échangé une heure avec Graham Greene contre une journée entière avec Gérald Ford,
01:14le président américain de l'époque, prédécesseur de Jimmy Carter.
01:17Il passa pourtant des mois avec Valéry Giscard d'Estaing pour les besoins d'une copieuse biographie près de 500 pages.
01:23La marrelle de Giscard, parue en 77 chez Robert Laffont, 3 ans après l'accession à l'Élysée du plus jeune président,
01:30que la France ait connue, du moins à ce moment-là.
01:33Olivier Todd dira plus tard qu'il regrettait profondément d'avoir fait ce livre,
01:37non pas parce que celui-ci est mauvais, au contraire, mais parce qu'il s'était, avec Giscard, épouvantablement ennuyé.
01:43C'est quelque chose, tout de même, de s'intéresser aux gens, de s'adonner à l'art du portrait
01:48et d'échouer ainsi à saisir son personnage, de le percer au jour, au-delà des masques et des artifices.
01:53Ce qui, paradoxe, rend cette marrelle passionnante.
01:57Todd décrit son objet charmant, charmeur, à l'aide des mots sur lesquels il ne bute jamais,
02:02il flirte avec les hommes comme d'autres fassent aux femmes.
02:06Il y a aussi ce propos rapporté 15 jours après son arrivée au Palais, sidérant de désinvolture et d'aveuglement.
02:12Au fond, là, je dis Giscard, ce n'est pas si difficile de gouverner la France.
02:15Todd rapporte la réaction d'un de ses très proches collaborateurs,
02:18« Je ne savais pas si j'avais envie de le gifler ou de l'embrasser ».
02:22Vous ne penseriez pas à un jeune Président d'aujourd'hui, par hasard ?
02:25Un jeune Président qui voulait lui aussi dépasser les clivages,
02:28comme Giscard qui rêvait de rassembler deux Français sur trois ? Ce n'est pas impossible.
02:33Un extrait encore du livre de Todd, pour le bonheur de sa formule à propos du Centre,
02:37puisque Giscard accompagne Edgar Ford à Matignon en 1955.
02:41Edgar est au zénith d'un horizon assez bas.
02:44Vrai centriste, sa circonférence est partout et son centre nulle part.
02:48Là encore, toute référence, etc. etc.