Cette semaine dans Parlement Hebdo, Alexandre Poussart et Kathia Gilder reçoivent Benjamin Lucas-Lundy, député Ecologiste et social des Yvelines et Olivier Paccaud, sénateur LR de l’Oise. Au menu : l’examen du projet de loi de finances pour 2025 au Parlement. L’examen du budget s’est terminé prématurément à l’Assemblée nationale le 12 novembre, car la première partie a été rejetée par les députés. En effet, le texte, largement remanié par la gauche n’a pas reçu l’assentiment du « socle commun » et des députés RN. C’est donc dans sa version initiale qu’il arrive sur le bureau du Sénat, le 25 novembre prochain. Le rejet du texte au Palais Bourbon est-il un revers pour la gauche ? Comment le Sénat va-t-il redessiner le projet de loi de finances, dans un contexte budgétaire très contraint ? Michel Barnier sera-t-il contraint, à la fin, de recourir au 49.3 pour faire adopter le texte ? Autant de questions qui se posent au cours de la séquence budgétaire actuelle et dont débattent nos invités. Année de Production :
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00:00– Sous-titres réalisés par la communauté d'Amara.org
00:09– Bonjour à tous, très heureux de vous retrouver
00:11pour ce nouveau numéro de Parlement hebdo,
00:13l'émission qui revient sur les temps forts de la semaine au Parlement.
00:16– Et comme chaque semaine, nous vous proposons un débat
00:17entre un député et un sénateur, et aujourd'hui sur ce plateau,
00:20nous accueillons Benjamin Lucas Lundi, bonjour.
00:23– Bonjour à vous.
00:23– Vous êtes député écologiste des Yvelines et face à vous, Olivier Paco.
00:27Bonjour, sénateur apparenté, les Républicains de l'Oise,
00:30le budget est à la une pour vous.
00:32– Eh oui, car pour la première fois dans l'histoire de la Ve République,
00:35l'Assemblée nationale a voté contre le budget,
00:37en tout cas le volet sur les recettes de l'État.
00:40Les députés du Bloc central et du Rassemblement national
00:42ont rejeté un texte profondément remanié par la gauche,
00:45un rejet qui a mis fin à l'examen budgétaire à l'Assemblée.
00:49La balle est désormais dans le camp des sénateurs
00:51qui vont examiner le budget initial proposé par le gouvernement de Michel Barnier.
00:55La majorité de droite du Sénat propose de faire 4 milliards d'euros
00:58d'économies supplémentaires et aussi de faire travailler les Français
01:01un jour de plus par an.
01:04– Mais d'abord, ce rejet historique du volet recettes
01:07du budget 2025 à l'Assemblée, Marco Pommier.
01:11« Pour 192 contre 362, l'Assemblée nationale n'a donc pas adopté. »
01:19– Mardi, 17h30, dans un hémicycle quasi plein,
01:23les députés rejettent le volet recettes du budget 2025.
01:27– L'ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.
01:30– Une première sous la Ve République,
01:33seule la gauche a voté ce budget qu'elle avait largement remanié.
01:36– L'Assemblée est devenue une sorte de théâtre d'ombre.
01:39Ceux qui ont participé à ces majorités et qui ont construit avec nous ce budget
01:44ont décidé de le rejeter aujourd'hui.
01:46Tout le travail fait patiemment, fait de négociations et de discussions
01:50depuis trois semaines est maintenant jeté à la poubelle.
01:53– Les quatre partis de la coalition soutenant le gouvernement
01:56ont voté contre un texte, selon eux, dénaturé.
02:00Le camp présidentiel dénonce un barbouillis fiscal.
02:03– 80% des hausses d'impôts qui étaient prévues aujourd'hui
02:07et soumises au vote nécessitaient de sortir de l'Union européenne,
02:10de violer les traités internationaux
02:12ou bien de mettre à bas notre ordre constitutionnel et juridique.
02:16– Opposition aussi du Rassemblement national
02:18qui renvoie dos à dos la gauche et le socle gouvernemental.
02:22– C'était initialement un budget de faillite LR Macron
02:26et c'est devenu un budget de faillite Macron-NFP.
02:30Bon, les sigles changent mais la catastrophe est la même
02:33pour les Françaises et les Français.
02:34– Le gouvernement prend acte du rejet
02:36mais le ministre des Comptes publics reste confiant.
02:39– J'ai confiance dans l'esprit de responsabilité collective du Parlement
02:43dans son ensemble pour trouver un budget à notre pays,
02:47un budget qui permette de redresser nos comptes publics
02:50mais un budget qui ne matraque pas nos concitoyens
02:51et nos entreprises par l'impôt.
02:53– Et maintenant le budget 2025 va être examiné au Sénat
02:57où Michel Barnier dispose d'une majorité.
03:00– Alors on va revenir sur le détail de ce vote
03:03mais Benjamin Lucalindi, première question puisque le Premier ministre
03:06a déclaré dans une interview au journal Ouest France
03:09qu'il utiliserait probablement le 49-3 au final
03:12puisqu'il n'y a pas de majorité qui se dessine, il n'a pas le choix.
03:16– Écoutez, c'est le constat d'un échec,
03:18une véritable chianlie au Parlement sur cette discussion budgétaire.
03:21C'est la première fois, vous l'avez rappelé,
03:23qu'un budget est rejeté en première lecture par l'Assemblée nationale
03:26et rejeté par les groupes gouvernementaux.
03:28C'est-à-dire qu'on est vraiment dans quelque chose d'inédit
03:31et d'assez catastrophique pour l'image de notre Parlement
03:34dans un moment où l'antiparlementarisme monte partout à travers le monde.
03:37Je crois que ce n'est pas rassurant
03:39et que M. Barnier avait dit vouloir aller dans la discussion
03:43et il semble maintenant y être fermé.
03:46Mais on verra, vous savez, le processus est encore long.
03:48Moi, j'ai confiance aussi dans la discussion qui va avoir lieu au Sénat.
03:51– Ça veut dire qu'il pourrait, au final, avoir un accord
03:54entre députés de gauche et sénateurs de droite pour un budget commun ?
03:57– Écoutez, nous nous avons démontré, on va y revenir je pense dans un instant,
04:00nous avons démontré dans la discussion budgétaire à l'Assemblée nationale
04:02qu'on pouvait avoir des majorités pour aller chercher des recettes nouvelles.
04:05On est privé de la discussion sur les dépenses
04:07parce que la règle constitutionnelle fait
04:09qu'on ne peut pas discuter des dépenses quand on a rejeté les recettes.
04:12Mais là aussi, nous serions capables de démontrer
04:13qu'il y a des majorités possibles pour nos services publics,
04:16pour préserver les 4000 postes dans l'éducation nationale
04:18qui sont indispensables pour les enfants des classes moyennes
04:20et des classes populaires notamment.
04:21– Mais 49.3, inévitable ? Olivier Pacot ?
04:24– Écoutez, Élisabeth Borne avait usé et abusé du 49.3.
04:29Michel Barnier a tenté de ne pas l'utiliser et il a fait son maximum.
04:34Vous avez pu débattre le plus longtemps possible.
04:37Je pense qu'on ne peut que s'en réjouir.
04:40Maintenant, même si c'est un peu de la politique fiction,
04:43il est évident qu'après le Sénat,
04:46je ne vois pas vraiment, compte tenu de la configuration actuelle
04:50de l'Assemblée nationale, j'ai apprécié que mon collègue député
04:54utilise cette expression gaulliste de chien en lit,
04:57je ne vois pas vraiment comment on peut faire autrement.
05:00Ce n'est pas une volonté de l'utiliser, c'est une nécessité fait loi.
05:04Voilà, le 49.3 sera donc très probablement utilisé,
05:07mais le Sénat aura bien travaillé avec le respect des oppositions,
05:13les socialistes défendront des amendements
05:16et je pense que sur certains points, on pourra se rejoindre.
05:19– Mais il y a 49.3 et 49.3, la question dans le 49.3,
05:22quand il intervient à la fin, ce qui est mieux d'ailleurs,
05:24effectivement, que ce qu'était la méthode de Madame Borne.
05:26Peut-être que là, on voit, si je peux décerner un bon point à M. Barnier,
05:29ça ne m'arrive pas souvent, qu'on voit que l'expérience politique,
05:31avoir une histoire, avoir une certaine culture parlementaire,
05:34ça compte et ça aide.
05:35Ça ne veut pas dire qu'à la fin, je m'y retrouve,
05:37mais ça veut dire qu'on voit là une différence
05:38qui est appréciable de mon point de vue.
05:41Mais la question, c'est, est-ce qu'on garde des choses à la fin ?
05:43Il y avait chez Madame Borne un mépris complet
05:44pour tout ce qui s'était passé au Parlement.
05:46Là, on jugera M. Barnier, s'il recourt au 49.3,
05:48ce que je ne souhaite pas, mais puisqu'on invite à entrer dans la fiction, j'y entre.
05:51Est-ce qu'à la fin, il est capable de garder les choses qui ont été votées,
05:54qui parfois ont été votées avec le Modem, par exemple,
05:56qui soutient sa majorité minoritaire, sur les superdividendes ?
06:00Est-ce qu'il va faire cet effort d'aller vers ce qui a été voté souverainement
06:05par l'Assemblée nationale, notamment pour augmenter les recettes,
06:07pour éviter au pays le drame de l'austérité et de la casse des services publics ou pas ?
06:11Et c'est là-dessus qu'on jugera.
06:12– Et justement, Olivier Pacot, est-ce que Michel Barnier doit garder
06:15des amendements qui ont été votés par la gauche à l'Assemblée nationale ?
06:19La gauche, que Total a voté 35 milliards d'euros d'impôts supplémentaires.
06:24Est-ce que le gouvernement Barnier doit faire un geste
06:26en reprenant certains amendements de gauche ?
06:29– Alors, on ne peut pas faire tout et n'importe quoi,
06:31mais je vais vous prendre un exemple précis.
06:34À l'Assemblée nationale, il y a eu un vote concernant la mesure
06:39que le gouvernement va mettre en place sur le prix de l'électricité.
06:43Je prends cet exemple très précis. Pourquoi ?
06:44Parce qu'au Sénat, nous avons commencé l'examen en commission,
06:49et en commission des finances, je suis membre de la commission des finances,
06:52nous avons supprimé, nous aussi, la hausse de l'électricité,
06:56du prix de l'électricité.
06:58Je suis sûr que ce point précis sera gardé par…
07:02– Sur certaines hausses d'impôts, parce que là, c'est une baisse de taxes,
07:04en l'occurrence, mais sur certaines hausses d'impôts votées par la gauche,
07:07est-ce que le gouvernement Barnier devrait en retenir certaines ?
07:10– Je pense qu'il y aura certaines hausses sur des points précis
07:15concernant des super-profits de façon temporaire,
07:19mais pour être très honnête, ça m'étonnerait que la grande majorité
07:23des éléments de ce que M. Saint-Martin appelle de matraquage fiscal,
07:27ça, je ne pense pas que ce sera retenu.
07:29Mais il ne peut pas, Michel Barnier, ne pas retenir beaucoup d'amendements du Sénat,
07:34et quelques-uns qui viendront de la gauche, il faut faire des gestes.
07:38– Benjamin, Lucas, au total, la gauche a fait voter 35 milliards d'euros
07:43d'impôts supplémentaires, en tout cas a modifié le budget
07:45en ajoutant ces hausses d'impôts qui, finalement, n'ont pas été votées.
07:50En France, la pression fiscale est très lourde,
07:52et notre pays n'est pas forcément en bonne santé économique.
07:54Est-ce que c'est raisonnable, autant de hausses d'impôts proposées ?
07:58– Je crois qu'il faut rétablir des vérités,
07:59parce qu'on a un débat public, là, qui est tourmenté,
08:02et les Français ont du mal à y voir clair, compte tenu de tout ce qu'ils entendent,
08:06et notamment de la propagande gouvernementale,
08:09qui, vous avez repris cette expression, parle de matraquage fiscal.
08:13L'effort qui est fait sur la fiscalité, sur les recettes,
08:16il est à la hauteur du défi qui est celui de nos déficits publics aujourd'hui,
08:19et qui est celui de nos services publics.
08:20Je le dis, l'austérité, elle serait dramatique,
08:22elle serait dramatique pour l'attractivité économique de la France,
08:24elle serait dramatique pour son activité,
08:26elle entraînerait un ralentissement de son activité économique,
08:29donc, par un effet, par un cycle infernal, j'allais dire,
08:33elle serait pire encore pour les déficits et pour la dette.
08:36Cet effort de justice fiscale, pardon, mais il est juste,
08:40parce qu'aujourd'hui, à proportion de ce que vous gagnez,
08:42les classes moyennes et les classes populaires payent moins,
08:44payent plus, pardon, d'impôts, payent plus de prélèvements obligatoires
08:48que les ultra-riches dans notre pays.
08:49Et nous avons effectivement créé des taxes et des impôts supplémentaires,
08:52nous en avons augmenté certains,
08:53mais nous en avons aussi réduit beaucoup d'autres.
08:56– Alors, ce n'est pas passé également.
08:57– Notamment sur les classes moyennes et les classes populaires,
08:59notamment aussi pour aider le logement social,
09:02pour aider la transition écologique,
09:03pour aider nos collectivités territoriales.
09:05On est ici au Sénat qui ont besoin d'une collectivité
09:08qui sont aujourd'hui le premier rempart des Français face aux crises,
09:11qui sont le premier instrument de leur sécurité du quotidien,
09:13de leur service public, de leur solidarité essentielle.
09:15Donc, nous avons fait ce travail-là, qui est un travail de justice,
09:19de justice fiscale et de justice sociale,
09:20qui me paraît indispensable aujourd'hui,
09:22compte tenu de ce qu'est, et je termine par cela,
09:24ce qu'est l'accumulation ces dernières années
09:26des richesses et des ressources par une infime minorité de privilégiés.
09:29Le patrimoine des plus riches a été multiplié par 6 ces dernières années.
09:33Je ne crois pas que ce soit le cas des classes moyennes et des classes populaires.
09:35Il faut remettre de l'équité et de la justice.
09:36– Olivier Pacot, on a parlé de ce qu'a voté la gauche,
09:38je voudrais qu'on parle également du socle commun,
09:41les députés macronistes et les républicains
09:43qui sont censés soutenir le gouvernement de Michel Barnier,
09:45mais en réalité, dans cet examen budgétaire,
09:47ils ont souvent voté contre ce que proposait le gouvernement dans ce budget
09:52Est-ce qu'il n'y a pas un manque de cohésion de ces députés du socle commun
09:55vis-à-vis du gouvernement ?
09:57– Alors, il faut reprendre quand même la genèse du budget,
10:00et la genèse du budget, c'est la formation d'un gouvernement très tardif.
10:05On a, je crois qu'il a été nommé le 5 septembre, Michel Barnier,
10:08puis il a composé son gouvernement,
10:10et pour être très clair, ce n'est pas le gouvernement qui a fait le budget,
10:14c'est Bercy, ce sont ce que certains appellent les petits hommes gris de Bercy.
10:18Et les ministres ont hérité d'un budget qui ne leur convient pas forcément,
10:23et les parlementaires du socle commun ont vu arriver un budget qui ne leur convenait pas.
10:28Et donc, ce budget, il est encore, entre guillemets,
10:32non seulement en discussion, mais en construction.
10:34Et en tant que rapporteur spécial du budget de l'éducation nationale,
10:37et je sais que Benjamin Lucas y est sensible,
10:40moi, j'ai vu à plusieurs reprises Madame le ministre,
10:43ainsi que le ministre chargé de la réussite scolaire Alexandre Portier,
10:46ainsi que le conseiller auprès de Michel Barnier pour les affaires scolaires,
10:51pour essayer de trouver la meilleure solution.
10:54Donc, très concrètement, que le socle commun n'ait pas fait preuve toujours de cohérence,
10:58c'est une évidence, mais c'est lié à cette genèse.
11:01– Anophémisme, cher collègue.
11:04– C'est la première fois qu'on a cette situation,
11:07et malheureusement, on ne pouvait pas faire autrement.
11:09– Mais ce socle commun, en attendant, il a quand même réussi à vous faire barrage,
11:12vous n'avez pas pu faire passer les impôts.
11:13– Oui, parce que le Rassemblement national de Marine Le Pen lui a fait du bouche à bouche,
11:17comme à chaque fois, Monsieur Barnier n'est là que parce que Madame Le Pen
11:20a refusé de le censurer et qu'elle a permis à Monsieur Macron
11:23de procéder à ce coup de force qui vise à nier le résultat des élections législatives.
11:26Il n'y a pas de socle commun, il y a un dislogue commun.
11:28Il y a aujourd'hui un cartel, même pas une coalition,
11:31une coalition ça implique une certaine forme de cohérence, d'accord politique.
11:33Il y a un cartel qui s'est constitué pour que le NFP ne gouverne pas, j'entends.
11:37Il peut y avoir des alliances en défensive,
11:39nous avons nous-mêmes fait un barrage républicain
11:41pour empêcher que l'extrême droite ne l'emporte,
11:44même si je pense que ce n'est évidemment pas la même chose.
11:46Ce cartel, on voit, il n'a aucune forme de cohérence.
11:50Et aujourd'hui on voit, pour reprendre l'expression du Président Chirac,
11:53la politique avec un petit P.
11:54Quand vous avez Monsieur Wauquiez qui court aux 20 heures,
11:56annonçait quelque chose dont on apprend qu'en fait le ministre des Comptes publics
11:59n'était pas vraiment au courant, qui n'a pas été discuté collectivement.
12:01Quand vous avez une démission de fait des parlementaires macronistes
12:06qui ne viennent pas siéger en séance pendant des journées et des nuits entières,
12:10alors qu'on parle du budget qui est présenté par le gouvernement qu'ils soutiennent,
12:13tout ça renvoie une image détestable de la politique qui nourrit l'antiparlementarisme.
12:16Mais encore une fois, il n'y a pas de socle commun,
12:18il n'y a pas de cohérence gouvernementale,
12:20tout ça fait du mal aussi à la politique.
12:21– Olivier Pacot, 30 secondes avant de passer au budget au Sénat,
12:24quand on voit cet épisode Laurent Wauquiez qui fait les annonces
12:26à la place du gouvernement sur les pensions de retraite,
12:28il y a quelque chose qui cloche ?
12:30– C'est un coup politique, un coup médiatique,
12:32mais ce n'est pas un coup de force parce que,
12:34je ne veux pas défendre Laurent Wauquiez,
12:35mais le budget, il est voté par qui ?
12:39Il est voté par le Parlement, alors que des parlementaires
12:42puissent mettre en avant leur poids pour avoir fait évoluer certaines choses…
12:46– Mais là, c'est un peu trop jaundement, c'est cohérent.
12:49– Oui, c'est certainement très maladroit, très politique,
12:52mais que le Parlement soit au centre du jeu,
12:54ce n'est pas une mauvaise chose finalement.
12:55Malheureusement, avec l'archipel d'aujourd'hui de l'Assemblée Nationale,
12:58c'est sûr que les choses sont compliquées.
12:59– C'est surtout l'enfumage, pardon, sur les retraites, c'est surtout l'enfumage.
13:01Monsieur Wauquiez vient nous annoncer finalement une sous-valorisation en deux temps,
13:07en fait, les retraités vont perdre du poids.
13:09– On va en parler, puisque maintenant, c'est le Sénat qui est au centre du jeu budgétaire,
13:14les sénateurs veulent examiner la version initiale du budget
13:17proposée par le gouvernement de Michel Barnier,
13:19et la majorité de droite sénatoriale souhaite la modifier.
13:22Flora Sauvage.
13:24– C'est un projet de budget dans sa version initiale dont s'est emparé le Sénat.
13:32Rejeté par les députés après un examen chaotique à l'Assemblée Nationale,
13:35les sénateurs entendent apposer leur marque.
13:37– La première des priorités, nous devons faire davantage d'efforts
13:41pour réduire la dépense publique et les dépenses de l'État.
13:45Je crois qu'on peut aujourd'hui considérer que ce budget est enfin
13:51celui qui marque la fin du quoi qu'il en coûte.
13:53– Dans son projet de budget pour 2025, l'exécutif vise 60 milliards d'euros d'économie
13:59pour ramener le déficit à 5% du PIB.
14:02Si le rapporteur général du budget, le sénateur LR Jean-François Husson,
14:05soutient le projet du gouvernement, il n'entend pas moins imprimer sa vision.
14:09– Je pense personnellement qu'on peut faire mieux avec moins d'argent.
14:16Pour certains, c'est une formule un peu éculée,
14:19mais je pense que c'est un objectif que nous devons poursuivre.
14:22– Parmi les amendements adoptés en commission,
14:25la majorité sénatoriale veut réaliser 150 millions d'euros d'économie
14:28sur l'apprentissage.
14:30Elle entend aussi insérer dans le projet de loi de finances
14:33des dispositifs contre les abus et la fraude.
14:35Son objectif est de réduire les hausses d'impôts
14:38en réalisant des économies supplémentaires.
14:40– Nous avons déjà adopté un certain nombre d'amendements,
14:43nous sommes aujourd'hui à plus de 4 milliards d'économies.
14:46– Sur les dépenses de l'État, le Sénat promet notamment
14:49la suppression du service national universel,
14:51la réduction du budget de la formation des enseignants
14:54et une baisse des fonds alloués à l'aide médicale d'État.
14:57Mises bout à bout, ces mesures pourront selon la majorité sénatoriale
15:01compenser la suppression de la hausse de la taxe sur l'électricité
15:04adoptée à l'unanimité en commission.
15:07– Il ne serait pas juste de profiter de la baisse à venir
15:11des prix de l'électricité pour augmenter subrepticement
15:16les impôts pour les Français.
15:18– La Chambre des territoires cherche enfin à cajoler
15:21les collectivités locales qui sont ciblées dans le budget
15:24proposé par le gouvernement.
15:26Quant à la gauche, minoritaire au Sénat, elle fourbit ses armes
15:29en vue de l'examen en séance publique à compter du 25 novembre.
15:33– Olivier Pacot, la droite sénatoriale souhaite 4 milliards d'euros
15:36d'économies supplémentaires, rien que ça, sur l'aide médicale d'État,
15:40le service national universel ou encore le budget formation des enseignants
15:43mais trop de réduction de dépenses, ce n'est pas très bon
15:46pour préserver les services publics ?
15:48– Alors, tout à l'heure, je crois que Benjamin Lucas
15:51a utilisé le mot austérité.
15:54Le Sénat ne souhaite pas un budget d'austérité,
15:55il souhaite un budget de rigueur.
15:57Quand je dis le Sénat, c'est la Commission des finances à majorité LR
16:01parce que nous savons très bien que l'austérité aurait des effets
16:04récessifs sur la croissance.
16:06Le meilleur exemple, ce sont les collectivités.
16:08Lorsqu'on a appris que dans le budget, on voulait ponctionner
16:125 milliards sur les collectivités, nous nous sommes dit
16:15c'est une grosse erreur et nous allons tout faire
16:17pour que des 5 milliards, nous arrivions seulement à 2 milliards
16:20de prélèvements.
16:21– Vous allez tout faire pour empêcher ces réductions ?
16:24– Oui, alors on va vous prendre un exemple très précis.
16:27En Commission des finances, mercredi matin,
16:29nous avons supprimé l'amendement qui concerne le reparamétrage
16:32du FCTVA, le fonds de compensation de la TVA.
16:36C'est quelque chose auquel les départements notamment
16:39sont très attachés.
16:40Ça permet de donner de l'activité dans les collectivités.
16:44– En gros, les départements touchaient une fraction de TVA, c'est ça ?
16:47– Alors non, le FCTVA a récupéré la TVA
16:50qu'ils versent dans un premier temps, voilà, 20%, tout à fait.
16:54Et donc là, concrètement, c'est de l'ordre de 800 millions d'euros.
16:57Pas tellement important, mais par rapport aux 5 milliards,
17:01c'est déjà une marche sur laquelle on permet de faire des économies.
17:05– Donc vous dites rigueur, mais attention, pas d'austérité.
17:07– Surtout pas d'austérité, parce que ça aura un effet récessif.
17:10– Benjamin Lucalindi, pour reprendre les mots du rapporteur
17:12Jean-François Husson, est-ce qu'on peut faire mieux
17:14avec moins de moyens ?
17:16– Oh, c'est un vieux slogan.
17:18– Et rationaliser la machine administrative française.
17:20– C'est un vieux slogan, moi je n'ai pas d'austérité par principe aux économies.
17:24Simplement, je regarde où elles sont proposées.
17:26Je le disais tout à l'heure, 4 000 postes en moins dans l'éducation nationale,
17:29ça va pénaliser les enfants des classes moyennes et des classes populaires.
17:31Et ça va faire que notre école, qui, malgré l'engagement fort
17:35des équipes éducatives, reste et demeure une école profondément inégalitaire,
17:40qui d'ailleurs est soumise à des changements incessants de ministres,
17:42à des réformes consécutives qui font qu'il n'y a aucune lisibilité
17:45pour les personnels, cette école va être encore affaiblie.
17:47Vous parliez des collectivités, je disais, ce sont les services publics du quotidien.
17:52Je disais tout à l'heure qu'il y avait du bon dans l'ancienneté,
17:54si je puis dire, de Michel Barnier.
17:55Vous savez, moi, je respecte et j'ai même une forme de sympathie
17:59pour les convictions, qu'elles soient de droite ou de gauche.
18:02Je pense que la vie politique, démocratique de notre pays,
18:05s'est structurée autour de ça depuis deux siècles.
18:06Donc je suis plutôt content d'avoir un Premier ministre qui s'assume,
18:08venant d'une droite, d'une histoire, d'une idéologie, au sens noble du terme.
18:12Mais j'allais dire, il y a du bon dans l'idée de venir de loin,
18:15mais il y a du mauvais dans ce budget, c'est que c'est un budget
18:17qui n'est pas du tout tourné vers l'avenir.
18:18On a besoin aujourd'hui d'investir massivement dans nos services publics
18:21pour protéger les Français.
18:22On a besoin d'investir aujourd'hui massivement dans la transition écologique
18:25parce qu'on voit, au regard de cette course contre la montre
18:27engagée avec le réchauffement climatique,
18:29ne pas avancer assez vite, c'est reculer,
18:32pour adapter notre société au réchauffement climatique, par exemple.
18:34On a besoin d'investir pour l'école,
18:35on a besoin d'investir pour la sécurité des Français,
18:38on a besoin d'investir pour nos protections du quotidien,
18:40sociales, environnementales, etc.
18:42Or, là, on a un budget qui est très frileux sur ces sujets,
18:46pour ne pas dire plus, et moi, je considère que c'est encore
18:48et toujours, malheureusement, un budget d'austérité,
18:50au regard des saignées qui sont proposées dans un certain nombre de domaines.
18:54Et je termine par ça, pour ça, et si on veut être un peu audacieux,
18:56il faut regarder les sources de financement,
18:58parce qu'on ne peut pas réduire à l'os la puissance publique.
19:00Et donc, les sources de financement, c'est de faire contribuer,
19:02exceptionnellement, les ultra-riches de notre pays,
19:05dont je le disais, le patrimoine a augmenté,
19:06dont les revenus et les dividendes ont augmenté ces dernières années,
19:09et que ce n'est pas dramatique, ça s'est fait ailleurs,
19:11ça s'est fait dans d'autres temps,
19:12et ça nous permettra de faire tenir la République debout.
19:14Notre contrat social est en jeu.
19:15Ce qui joue, quand même, c'est l'effritement de notre société.
19:17– Olivier Pacot, une réaction sur l'école,
19:18le gouvernement souhaite 4 000 suppressions de postes d'enseignants,
19:22est-ce que la majorité de droite du Sénat va laisser passer cette mesure ?
19:25– Alors, il a beaucoup de verve, Benjamin,
19:28mais il faut rétablir une petite vérité, le budget de l'école,
19:31je suis rapporteur spécial du budget de la mission d'enseignement scolaire,
19:35eh bien, il augmente, il augmente, de peu,
19:38il augmente de 0,1%, mais il augmente.
19:39– Moins que l'inflation, donc il recule.
19:42– Il augmente, alors que le nombre d'élèves baisse dramatiquement,
19:46et je suis le premier à en être contrarié,
19:50mais on a une chute qui a pris naissance depuis des années,
19:54mais on a de moins en moins d'élèves.
19:56Et donc, pourquoi doit-on faire des efforts ?
19:59C'est parce qu'on est dans une situation économique aujourd'hui,
20:01et budgétaire, avec une charge de la dette de 50 milliards d'euros.
20:04Ce serait bien de pouvoir mettre ces 50 milliards d'euros
20:06ailleurs que dans le remboursement, et par exemple dans l'école.
20:09Pour revenir sur vos 4 000 postes,
20:11moi j'aimerais bien effectivement qu'il n'y ait pas 4 000 suppressions.
20:14Et hier, j'étais à Matignon pour discuter de cette problématique.
20:17Je ne dis pas que je vais gagner, simplement, il y a une écoute.
20:20Et je pense qu'au lieu de 4 000 suppressions,
20:22si on ne pouvait en avoir que 2 000, ce serait pas mal.
20:24Parce qu'il ne faut pas oublier que l'année prochaine,
20:26il y a 100 000 élèves en moins.
20:27– Et que vous a dit Matignon sur ces suppressions de postes ?
20:30– Matignon n'a pas encore arbitré.
20:32Matignon n'a pas arbitré.
20:33La ministre elle-même ne souhaite pas avoir 4 000.
20:38À l'origine, ça devait être 4 800, ils ont descendu à 4 000.
20:41Objectivement, moi je leur propose, pour être très clair,
20:44de passer à 2 000 suppressions et de financer ces 2 000 suppressions sur…
20:49– Et au sein de la droite du Sénat, ça pourrait être voté, votre amendement ?
20:53– Ce n'est pas aussi simple que ça, soyons très francs.
20:56Mais il faut proposer des solutions et donc moi, très concrètement,
20:59je finance ce maintien de postes par 100 millions d'euros
21:02qu'on prendrait sur l'augmentation du pacte enseignant
21:05qui veulent faire passer de 700 à 800 millions d'euros.
21:07Le pacte n'a pas forcément donné totalement satisfaction.
21:10Je pense qu'on pourrait trouver l'argent là-dessus.
21:12– Olivier Paco, Benjamin Lucas, le Sénat s'oppose à une hausse de la taxe
21:16sur l'électricité au-delà du niveau d'avant crise.
21:19Ça, c'est peut-être une mesure sur laquelle on peut vous mettre d'accord tous les deux.
21:22– Bien sûr, moi je crois qu'aujourd'hui, dès qu'on peut construire des unions sacrées
21:25pour préserver le pouvoir d'achat des Français, qui est un pouvoir de vivre,
21:29parce qu'aujourd'hui, le passage à la caisse du supermarché devient un calvaire,
21:31parce qu'à chaque fois qu'on reçoit une facture d'électricité,
21:33on a des gens qui décident de ne plus se chauffer,
21:36dont les enfants vivent dans des conditions de précarité énergétique considérables.
21:40Donc à chaque fois qu'on peut protéger leur pouvoir d'achat,
21:42évidemment, moi, on me trouvera du côté de celles et ceux qui le proposent.
21:46Simplement, la question énergétique, elle est aussi liée par exemple
21:50à la question de la lutte contre les passoires thermiques
21:51et donc à l'investissement dans la transition écologique.
21:53Il faut avoir une vision globale aussi de ces sujets.
21:56Donc évidemment, on sera d'accord pour empêcher une hausse des tarifs
22:00de l'électricité et du gaz qui va pénaliser durement
22:03les Français et notamment les Français les plus modestes.
22:05Mais il faut aussi qu'on aille plus loin encore dans les investissements
22:07pour adapter notre société à ce qu'est aujourd'hui le défi énergétique.
22:10Olivier Pacot, il nous reste 2-3 minutes.
22:12Je voudrais qu'on parle des pensions de retraite,
22:14puisque finalement, après les annonces de Laurent Wauquiez,
22:16le gouvernement va revaloriser toutes les pensions de retraite
22:19dès le mois de janvier 2025, mais à hauteur de la moitié de l'inflation,
22:23au lieu de les revaloriser au niveau complet d'inflation en juillet.
22:27Au final, une majorité de retraités vont être perdants avec ce nouveau dispositif.
22:31Qu'est-ce que vous leur dites à ces retraités ?
22:32Qu'il faut faire un effort ?
22:34C'est ce que leur dit le gouvernement.
22:36Moi, je comprends tout à fait que les retraités ne soient pas heureux
22:41de faire des efforts fiscaux après avoir fait des efforts
22:45dans leur travail toute leur vie.
22:46Maintenant, objectivement, il faut trouver des moyens de faire des économies.
22:51Alors, soit en baissant la dépense publique, soit en augmentant la fiscalité.
22:55Tout le monde doit y contribuer.
22:57Mais très honnêtement, moi, je fais partie de ceux qui pensent
22:59qu'on ne peut pas exonérer totalement les retraités,
23:03mais il faut qu'ils prennent un petit peu leur part.
23:06Benjamin, Lucas, les retraités doivent prendre leur part ?
23:09Vous avez démontré d'abord que les retraités vont y perdre.
23:12Moi, je crois qu'aujourd'hui, je vous parlais tout à l'heure
23:14des tabous sur le patrimoine, sur l'accumulation et sur l'explosion
23:17du patrimoine des ultra-riches.
23:18Je pense qu'il faut d'abord aller regarder du côté de ceux
23:20qui, aujourd'hui, sont l'infime minorité qui accumule les richesses
23:24et qui laisse accaparer les ressources naturelles
23:26avant d'aller embêter nos aînés qui, par ailleurs,
23:31se sont paupérisés ces dernières années.
23:33Rapidement, une réponse très courte à cette question.
23:36Est-ce qu'il faut faire travailler les Français une journée de plus,
23:38gratuitement, chaque année, pour financer notamment la solidarité ?
23:42Rapidement, Olivier Dracau.
23:43Je ne suis pas pour la suppression d'un jour férié,
23:44mais travailler un peu plus, ça peut être une seconde journée
23:47de solidarité ou un allongement à la carte, oui.
23:51Benjamin, Lucas ?
23:52Non, j'y suis hostile.
23:53On ne va pas faire reposer sur les travailleurs l'effort nécessaire.
23:56Je le dis, aujourd'hui, l'inégalité entre capital et travail,
23:59elle a explosé ces dernières années.
24:00La rémunération du capital a considérablement augmenté.
24:03C'est là qu'il faut aller regarder le financement de nos services
24:05publics et la réduction des déficits, et pas en allant encore plus
24:08pénaliser les salariés des travailleurs qui ont perdu
24:10en pouvoir d'achat ces dernières années.
24:11Peut-être que les Français accepteraient plus ça plutôt que
24:13d'avoir des hausses d'impôts pour redresser les comptes sociaux.
24:15Vous l'admettez ?
24:16Je pense que les Français sont prêts à la justice fiscale.
24:18Encore une fois, rétablissons l'impôt de solidarité sur la fortune,
24:20taxons comme le propose le MoDem, qui n'est pas réputé
24:22pour être un groupuscule gauchisant.
24:26Taxer mieux les super-dividendes, par exemple.
24:28Allons regarder dans les super-profits, c'est-à-dire vraiment dans ce qui
24:31génère aujourd'hui de l'argent qui n'est pas utile à celles et ceux
24:36qui les récupèrent et dont ils n'ont pas besoin pour vivre.
24:38Et puis, aidons celles et ceux qui n'ont que leur force de travail pour vivre.
24:41C'est ça, à mon avis, la priorité des choix et des arbitrages
24:43que l'on doit faire.
24:43Olivier Pacot, en dix secondes, le gouvernement de Michel Barnier
24:46avait dit qu'on ne touchera pas aux travailleurs dans ce budget.
24:48En tout cas, c'est ce que dit la droite.
24:49Finalement, avec une mesure comme ce que proposent les sénateurs,
24:51ça va être le cas.
24:52Oui, un petit peu, bien sûr.
24:54Mais 3 250 milliards de dettes, n'oublions jamais ça.
24:59Et ce seront nos enfants, nos petits-enfants qui paieront les pots cassés.
25:03Et c'est la fin de ce débat.
25:04Merci d'y avoir participé, Olivier Pacot.
25:07Alors, parce que Benjamin, il va apprendre un grade supplémentaire.
25:11Mais bien sûr, lui, il travaille pour notre avenir.
25:14Il va avoir un petit garçon.
25:15Et alors, au Sénat, on a du cœur.
25:17Je t'ai amené, pour le petit qui sera gâté, je sais,
25:20un petit nounours qui vient du Sénat.
25:22Merci beaucoup.
25:23Je connais bien la maman.
25:24Merci beaucoup.
25:25Un cadeau du Sénat à la Sénat.
25:27La généreuse des sénatoriaux.
25:28Merci.
25:29Ce sera le mot de la fin.
25:30Merci à vous deux d'avoir été avec nous sur ce plateau.
25:33Et merci d'avoir suivi cette émission.
25:35On se retrouve la semaine prochaine.
25:36À très bientôt.
25:37Ciao, ciao.
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