• le mois dernier
Transcription
00:00C'est au tour de Paul Midi, député de l'Essonne et chef d'entreprise, à venir sur scène
00:15pour clôturer cette riche matinée, on peut l'acclamer.
00:17Merci beaucoup, merci pour les acclamations, ça on n'en a pas fait encore, c'est génial.
00:26Je suis très content d'être avec vous ce matin, on approche dangereusement de l'heure
00:31du déjeuner, mais merci pour l'invitation, je vais essayer d'être synthétique pour
00:38ne pas vous retarder trop et le taux de sucre a dû baisser dans le corps de chacun d'entre
00:43nous.
00:44Je pense que c'est très important qu'on se réunisse ce matin et qu'il y ait les activités
00:50comme celle de Marie-Claire, parce que la situation elle est inacceptable, je le dis
00:55comme ça, je redonne quelques chiffres, on en a aigréné beaucoup ce matin, dans
00:59le secteur du numérique et de la tech, 20% d'hommes, 80% de femmes, si je regarde les
01:04start-up de la tech, les fonds d'investissement, c'est au moins 90% d'hommes et puis si je
01:10regarde un petit peu au bout du fennel, je prends nos 40 meilleures start-up de la tech,
01:15le next 40, il y en a 39 dirigées par des hommes et une dirigée par une femme et on
01:21salue Eleonore Crespo, la CEO de Pigment, donc cette situation elle est inacceptable
01:27et elle vient de très loin parce que quand on regarde les études, il y en a évidemment
01:32qui sont faites très régulièrement, une récente qui a été faite sur le CP, donc
01:36ce n'est pas un truc d'il y a 30 ans, c'était il y a quelques mois, quelques années, les
01:41biais de genre sur les matières scientifiques, calculs, mathématiques, ils arrivent très
01:45très tôt, vous testez à l'entrée en CP, hommes, femmes, garçons, filles à cet âge-là,
01:52pas de biais, 6 mois après vous retestez sur mathématiques, calculs et il y a déjà
01:58des biais de genre en défaveur évidemment des femmes, au bout de 6 mois de CP et donc
02:03ça c'est évidemment une situation qui est inacceptable parce qu'après chaque année
02:07ces biais progressent et c'est ce qui fait qu'on arrive au bout à 20% de femmes dans
02:15les écoles d'ingénieurs, 80% d'hommes. Donc une situation inacceptable. On a deux enjeux,
02:21pour moi il y a un enjeu évidemment, moi j'appelle ça un enjeu politique, mais vous
02:25pouvez appeler ça peut-être un enjeu moral ou un enjeu philosophique ou un enjeu éthique,
02:29vous le mettez sur le plan que vous voulez, mais d'égalité homme-femme, d'égalité
02:35des chances, de capacité à maîtriser son destin, ça c'est évidemment moi ce qui me
02:41fait réagir le plus et ce qui me motive le plus, c'est le premier enjeu. Mais il faut
02:46citer un deuxième enjeu pour peut-être ceux ou celles, peut-être ceux surtout qui seraient
02:52moins intéressés par ce premier enjeu politique moral, c'est l'enjeu d'efficacité économique.
02:58Vous savez moi avant d'être député j'étais entrepreneur donc je suis très souvent avec
03:04nos start-up de la French Tech, la French Tech elle a eu une trajectoire exceptionnelle
03:09si vous regardez les 5-10 dernières années, avant 2007 nos start-up elles levaient entre
03:151 et 2 milliards par an, on est arrivé en 2022 à quasiment 14 milliards d'euros levés,
03:21donc très très belle trajectoire, on est devenu numéro 1 d'Europe continentale, super,
03:27par contre on est encore loin du Royaume-Uni, quand nous on levait 14 milliards, les start-up
03:32du Royaume-Uni elles en levaient 2 fois plus, 28 milliards, donc l'objectif qu'on doit
03:36se donner dans les prochaines années c'est de faire x2 pour être numéro 1 d'Europe
03:42inclus le Royaume-Uni et on fera pas ce x2 en se privant de la moitié des cerveaux disponibles.
03:48Le NEX 40 il doit devenir un NEX 80 et donc si on embarque autant les femmes que les hommes,
03:57on va garder nos 39 CEO hommes et notre CEO femmes, on va en rajouter 39 femmes CEO et
04:0439 CEO hommes et puis on a la parité, on fait x2, c'est magique. On sait aussi maintenant,
04:11c'est prouvé scientifiquement que les équipes qui sont diverses, qui sont paritaires sont
04:14beaucoup plus efficaces que les autres. Et puis si on regarde des sujets spécifiquement
04:19qu'on a regardé depuis ce matin sur l'intelligence artificielle, on a des enjeux de talent énormes.
04:25Aujourd'hui l'IA ça se joue, c'est quelques centaines de cerveaux qui structurent l'IA
04:33fortement, il y a beaucoup plus de gens qui travaillent dans ce secteur mais qui structurent
04:36l'IA, qui fabriquent les modèles, c'est quelques centaines de cerveaux et donc on
04:40a besoin de tous les cerveaux disponibles et les meilleurs cerveaux et donc pareil on
04:45peut pas faire ça en se privant de la moitié des cerveaux disponibles. Donc on a un enjeu
04:51politique moral mais on a un enjeu d'efficacité économique. Alors moi je vais vous partager
04:56quelques convictions. Première conviction c'est que les choses progressent mais beaucoup
05:02trop lentement, il faut qu'on aille beaucoup plus vite et qu'en fait, je le dis comme
05:05ça, il faut qu'on arrive à renverser la table. Moi j'étais étudiant à Polytechnique
05:11il y a 20 ans, alors si je vais un peu plus loin, il y a 50 ans à Polytechnique on a
05:17pour la première fois accepté que des femmes passent le concours. Il a quand même fallu
05:22attendre je crois quasiment 150 ans pour que ce soit le cas et vous connaissez tous et
05:27c'est toute l'histoire d'Anne Chopinet qui non seulement a passé le concours, a intégré
05:32l'ICSE, c'était la première fois que les femmes étaient acceptées au concours mais
05:35elle l'a majoré. Donc voilà ça c'était il y a 50 ans. Moi quand je suis arrivé et
05:40que j'ai passé l'ICSE il y a 20 ans, il y avait à peu près 10% de femmes. 20 ans après
05:45aujourd'hui si vous regardez il y en a 20%. Donc si vous faites un magnifique petit calcul
05:51de coin de table, il va falloir attendre à ce rythme là 2085 pour avoir la parité
05:57à l'ICSE. Donc quasiment un siècle. Donc en fait ça ne va pas assez vite. Et on a
06:05besoin de ces cerveaux, je parle de l'ICSE en particulier parce que ça fait partie des
06:08formations qui nous sortent les compétences pour aller faire l'intelligence artificielle.
06:14Donc il faut qu'on arrive vraiment à aller beaucoup plus vite et à retourner la table.
06:19Deuxième conviction, il faut qu'on le fasse tous et toutes ensemble. Parce que moi je
06:28vois beaucoup de startups, j'adore ça, j'étais entrepreneur avant d'être député, je vais
06:34toujours poser la question au CTO qui est dans 95% des cas un homme, je lui demande
06:40toujours quel est le pourcentage de femmes dans son équipe. Alors généralement un regard
06:45un peu gêné parce que le pourcentage est évidemment toujours très bas. Mais tout le
06:50monde se retourne un peu vers son voisin ou plutôt la personne derrière en disant il
06:54a raison c'est pas faux. Ah oui mais moi j'ai 15% de femmes mais il y a 90% d'hommes
06:59à l'EPITA, c'est très dur de trouver des femmes qui ont les compétences de développeuse
07:04etc. Ok, je vais voir le directeur ou la directrice de l'EPITA qui me dit ah oui mais moi j'ai
07:0980% d'hommes et parce que j'ai 90% d'hommes qui déposent des dossiers, j'ai que 10% de
07:16femmes qui déposent des dossiers etc. Je vais bac scientifique pareil etc. Donc tout le
07:22monde se retourne un peu vers son voisin ou sa voisine mais surtout sur le cran derrière.
07:26Donc soit on se retourne tous vers nos professeurs de maternelle et on leur met une énorme pression
07:34pour qu'il n'y ait pas de biais de genre à ce moment là et on attend 30 ans pour
07:39qu'il y ait un impact, soit en fait tout le monde selon la chaîne fait quelque chose
07:44et agit à son niveau. Donc ça je pense que c'est très important qu'on en ait tous conscience.
07:49Troisième conviction, évidemment il faut faire des mesures incitatives. C'est ce sur
07:57quoi on travaille ce matin, c'est par exemple je cite le programme Tech pour toutes qui
08:05fait partie du plan interministériel d'égalité homme femme où on va accompagner 10 à 20
08:10000 jeunes femmes pour avoir une carrière dans la tech avec potentiellement des bourses
08:15etc. C'est très bien, il faut le faire beaucoup plus. Quand je vous cite même Tech pour toutes
08:20je cite exprès le chiffre de 10 à 20 000 parce qu'en fait c'est pas beaucoup, c'est
08:24du petit 10 à 20 000 par rapport aux besoins qu'il y a si on regarde dans l'IA il va falloir
08:30former 100 000 personnes en France, experts et expertes de l'IA pour réussir à faire
08:37la trajectoire qu'on veut faire et être un des pays leaders de l'IA. Donc 10 à 20 000
08:41c'est super et bravo à tous ceux qui travaillent sur le sujet mais c'est pas encore suffisamment
08:46à l'échelle. Donc mesures incitatives il faut y aller. Mais c'est ma quatrième conviction
08:51c'est que je pense que ça suffira pas et qu'on n'arrivera pas à accélérer à renverser
08:54la table si on fait pas des mesures qui sont contraignantes. Il faut qu'on fasse des mesures
08:59contraignantes. Alors moi je connais un secteur très bien qui a mis en place des mesures
09:04contraignantes, je crois que ça a bien marché, c'est le secteur de la politique. Parce que
09:08pour être élu, l'isle municipale, l'isle départementale, l'isle régionale, les législatives
09:15avec un système un petit peu différent, c'est obligation de parité. Donc depuis qu'on a
09:20mis ces mesures contraignantes, il y a 500 000 élus en France, il y a 250 000 hommes
09:26et il y a 250 000 femmes. Alors vous pouvez avoir une estimation de la qualité du personnel
09:33politique dans notre pays, je vous la laisse, mais je ne crois pas que vous avez vu la qualité
09:39s'effondrer au moment où on a mis en place ces mesures contraignantes et on a forcé la
09:44parité dans le système politique. Donc je pense qu'il faut mettre ces mesures contraignantes
09:50en place et y aller et ne pas avoir peur. On a commencé à en mettre, la loi Rixin sur
10:01les conseils d'administration, c'est une première étape, et c'est une très bonne
10:05première étape, il faut aller plus loin parce qu'elle est un peu loin dans le temps,
10:09sur des seuils qui sont assez élevés, c'est pas tout à fait la parité, mais c'est une
10:13très très belle première étape, et je salue Marie-Pierre, mais je pense qu'il faut qu'on
10:17aille beaucoup plus loin sur les mesures contraignantes. Et moi ce que je proposerais,
10:21ce sont des mesures contraignantes progressives, parce que je vous disais tout à l'heure,
10:26je pense qu'il faut qu'on renverse la table, et je pense qu'on peut renverser la table
10:31sans attendre un siècle, mais sans non plus casser toute la vaisselle qui est posée sur
10:35la table. Et donc je m'explique, cette année à l'IX ont été reçus 20% de femmes, 80%
10:43d'hommes, et bien on peut fixer que l'année prochaine, ça doit être au moins 21%, puis
10:49l'année d'après, ça doit être au moins 22%, puis l'année d'après encore, c'est
10:54au moins 23%, etc. Je sais pas si c'est la bonne trajectoire, 1% par an, je fais ça
11:01pour expliquer, peut-être qu'il faut aller plus ou moins vite à définir, mais c'est
11:05en faisant ça qu'on peut tirer, structurer tout un écosystème, et forcer le système
11:14à s'adapter. Donc on peut retourner la table, la renverser, mais le faire d'une façon où
11:19on le fait pas d'une façon trop brutale, où on casse pas toute la vaisselle, parce
11:22que évidemment si je vous dis demain, l'année prochaine, c'est 50% d'hommes, 50% de femmes,
11:30là ça va pas marcher, il y a des gens qui vont hurler, les responsables du concours
11:36de Polytechnique vont dire mais ça n'est pas possible, ça va créer des injustices,
11:40tout ça est en vrai, il faut évidemment y aller de façon progressive, donc faire
11:44du contraignant et faire du contraignant progressif.
11:46Mais cinquième conviction, qui est pas encore à ce stade une conviction, mais qui est plutôt
11:50une question que je vous pose, moi j'ai pas la réponse, mais je suis sûr qu'il faut
11:54répondre à cette question pour pouvoir avancer sur ce que je vous dis, là je vous ai focalisé
12:01évidemment sur des filières, ingénieurs, certaines filières de sciences, où le biais
12:06de genre il est très en défaveur des femmes, en faveur des hommes, mais il y a plein de
12:09filières dans lesquelles le biais est inversé, biologie, vétérinaire, les magistrats, l'école
12:16de la magistrature c'est 80% de femmes, 20% d'hommes, et donc il faut qu'on se pose la
12:21question, si on met des mesures contraignantes en place, est-ce qu'on les met sur toutes
12:25les filières, inclut les filières dans lesquelles le biais de genre est inversé.
12:29Honnêtement j'ai pas la réponse, c'est juste qu'il faut qu'on trouve une bonne
12:34réponse à cette question pour pouvoir mettre en place ce type de mesure, parce qu'il faut
12:39regarder évidemment le sujet dans son ensemble.
12:41Voilà, moi je voulais vous partager ces quelques convictions, je vais m'arrêter maintenant
12:46comme ça on va pouvoir tous profiter du cocktail et du déjeuner, mais je voulais vous remercier
12:51de m'avoir écouté, merci d'être là, merci pour votre engagement, merci à Marie-Claire
12:56d'être très engagée sur ces sujets, et puis moi à votre disposition, vous pouvez
13:00compter sur moi aussi là-dessus, donc voilà, merci à tous, merci infiniment, merci à toutes.

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