La descente aux enfers du commerce extérieur français [Alexandre Mirlicourtois]

  • il y a 4 jours
C’est oublié, mais le commerce extérieur français n’a pas toujours été déficitaire. La preuve. Si le début des années 90 commence mal, le solde se redresse, atteint l’équilibre en 1992, et redevient positif en 1993. Il faut remonter avant le premier choc pétrolier pour trouver un tel niveau ! Ce rétablissement spectaculaire est justement lié au contrechoc pétrolier qui réduit le déficit énergétique. [...]

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00:00C'est oublié, mais le commerce extérieur français n'a pas toujours été déficitaire.
00:13La preuve, si le début des années 90 commence mal, le sol se redresse, atteint l'équilibre en 1992 et redevient positif en 1993.
00:24Il faut remonter avant le premier choc pétrolier pour trouver un tel niveau.
00:28Ce rétablissement spectaculaire est justement lié au contre-choc qui réduit le déficit énergétique.
00:35La panne de la demande intérieure entraîne aussi celle des volumes importés et contribue à l'amélioration.
00:40Il faut ajouter à ce tableau la reconquête des marchés extérieurs.
00:44Encore déficitaire de 6 milliards d'euros en 1991, le solde des produits manufacturés passe au vert en 1993.
00:51Pourtant, des premières digues se fissurent déjà.
00:54L'habillement en équilibre précaire depuis le milieu des années 80 chute et est devenu déficitaire.
01:00Après la crise, la coubre reprend son ascension.
01:03Les excédents s'accumulent pour atteindre le record de 1,8% du PIB, l'équivalent de 24 milliards d'euros.
01:09C'est un record qui tient toujours aujourd'hui.
01:13Ce sont les excédents industriels qui exposent.
01:15La France est alors triomphante.
01:16Dans l'automobile et succès d'Airbus Aydan, les résultats de la branche transport s'envolent.
01:21Le couple agriculture-agroalimentaire parachève ce succès du Made in France.
01:27Seule ombre à ce tableau, la déconfiture de la filière textile dans son ensemble qui plonge.
01:32C'est un héritage des dévaluations en série de nos plus proches concurrents, Royaume-Uni, Italie, Espagne,
01:38qui ont entraîné une brutale perte de compétitivité.
01:42Le millésime 98 ne sera pas aussi bon.
01:45A l'époque, la crise asiatique est mise en accusation.
01:49Le problème, c'est que ce décrochage se poursuit jusqu'en 2000
01:52et le sol commercial redevient déficitaire pour la première fois depuis huit ans.
01:57Le bref sursaut de 2001-2002 ne sera qu'une rémission liée à l'attrition de la demande intérieure.
02:03Ensuite, c'est la déringolade, sans fin, du solde du commerce extérieur jusqu'en 2011.
02:08C'est un véritable précipice.
02:10Alors, quelle explication ?
02:13Il y a d'abord un choc exogène.
02:15Le déficit pétrolier est multiplié par 2,5 avec la flambée du cours du brut qui passe de 25 à 112 dollars le baril.
02:22Il y a ensuite un choix politique constant de cajoler à tout prix le consommateur.
02:27Le revers de la médaille, c'est que l'on sacrifie les industriels.
02:32Le textile, le cuir et la chaussure deviennent un champ de ruines.
02:36Déjà déstabilisé dans les années 90, le secteur subit l'assaut décisif de la Chine après son entrée dans l'OMC en décembre 2001.
02:44La filière informatique-électronique chute à son tour et devient le premier déficit manufacturier.
02:50Dans l'électronique grand public, Thomson est balayé.
02:53Mais ce sont aussi les choix stratégiques de plusieurs grands groupes qui sont en cause.
02:57Dans l'automobile, Renault s'oriente vers le low cost et délocalise.
03:01Pas seulement pour servir les marchés émergents, mais aussi pour réimporter vers la France et l'Europe occidentale.
03:07Le solde auto français bascule dans le rouge.
03:09Mais il y a plus.
03:11D'autres bastions jugées imprenables vont tomber à leur tour.
03:14C'est le cas de l'industrie alimentaire qui subit les coûts de boutoir des industriels allemands.
03:19L'alimentaire, le fameux pétrole vert de la France, passe dans le rouge.
03:24Le déficit manufacturier sombre à 32 milliards d'euros.
03:27La descente aux enfers a heureusement une fin.
03:30Le déficit s'allège à partir de 2012.
03:32Des mécanismes plus favorables se mettent peu à peu en place.
03:35D'abord, le ralentissement de la demande intérieure limite les importations
03:39alors que la croissance européenne reprend les couleurs.
03:42Puis en 2014, ce sont les bonnes surprises du contre-choc pétrolier, de la baisse de l'euro
03:47et du début de l'amélioration de la compétitivité, notamment grâce au CICE.
03:52Mais c'est très poussif et l'essai n'est pas transformé.
03:56Le simple réveil de la demande domestique en 2016-2017 fait replonger la courbe.
04:01L'impact direct de la pandémie en 2020 est limité, exportations et importations reculant de façon synchrone.
04:08En revanche, la désorganisation des chaînes de production en sortie de crise
04:12et ses conséquences sur les prix des matières premières et des composants font à nouveau plier le commerce extérieur.
04:18Le coup de grâce est donné en 2022 par les répercussions sur le prix de l'énergie du conflit en Ukraine.
04:24Le déficit extérieur sombre dans les abysses à près de 165 milliards d'euros, soit 6,2% du PIB.
04:30Bien entendu, des temps des cours des hydrocarbures aidant, la situation va nettement s'améliorer cette année.
04:38Et même s'approcher de l'équilibre est hors d'atteinte.
04:40La base exportatrice s'est atrophiée au fil du temps, malgré les mesures pro-offres prises ces dernières années.
04:48Notre commerce extérieur est dans le rouge et l'on ne voit pas vraiment comment la vapeur pourrait s'inverser à court terme.

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