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00:00J'arrête avec notre invité Florent Parmentier, bonjour et merci de répondre à France 24, vous avez cofondé le site Eurasia Prospective, vous enseignez à Sciences Po Paris, on vous doit également notamment les chemins de l'état de droit, la voie étroite des pays entre Europe et Russie, ça s'est paru aux presses de Sciences Po, on vient de le voir dans le sujet, bombardement donc meurtrier à Poltava hier, des raids meurtriers également à Lviv, mais dans la ville également natale de Zelensky à Krivirig,
00:28quelle lecture faites-vous de cette actualité, est-ce qu'il faut le voir comme un message de Poutine après l'incursion ukrainienne à Kursk ?
00:36On peut le voir de cette manière-là, on peut aussi faire la distinction entre ce qui se passe sur les lignes de front, les lignes de front c'est tout simplement cette capacité de surprise qu'a eue l'armée ukrainienne à Sudja pour surprendre la partie russe,
00:51mais aussi en parallèle le front c'est également la détérioration de la position ukrainienne dans le Donbass, mais au-delà de ce front finalement il y a à la fois d'autres zones et d'autres cibles qui sont susceptibles d'être frappées à plus de 100 km, 900 km pour Lviv et 100 km pour Poltava comme ça a été dit dans le reportage,
01:11qui sont susceptibles d'être frappées également par la Russie avec un enjeu particulier pour l'Ukraine depuis le début de cette guerre qui est la question de sa défense anti-aérienne.
01:22Et puis il y a ce qui se passe au sein du pays et notamment au sein du cercle politique et du système politique ukrainien qui, on l'a vu ces dernières heures,
01:32a aussi fait preuve de, et bien tout simplement a vu un large remaniement qui concerne des ministres clés des affaires étrangères à l'intégration européenne en passant par la réintégration et les territoires temporairement occupés.
01:48Donc on le voit, il y a à la fois cette tension qui est perceptible sur le front et puis il y a également les répercussions que ce combat sur l'île de front a au sein du système politique
01:59et les différentes vulnérabilités que vous avez mentionnées de la part tout simplement sur le terrain ukrainien.
02:06Sur ce remaniement, c'est le plus gros remaniement gouvernemental depuis le début de la, pas de la guerre, mais de l'offensive à grande échelle puisque la guerre remonte à plus loin.
02:17Ça peut avoir quoi comme impact sur le terrain militaire ? C'est une manière quoi pour Zelensky de renforcer son pouvoir ?
02:25Sur le terrain militaire, le président Zelensky gère le conflit avec son chef d'état-major des armées, monsieur Sierski.
02:35Cela ne change pas, j'allais dire, l'exercice de la guerre elle-même, les opérations militaires elles-mêmes, mais cela a certainement à voir avec la manière dont cette guerre est conduite,
02:47sachant que pour le moment la population ukrainienne soutient évidemment très largement ses autorités, mais on peut voir un certain nombre de critiques.
03:00Critiques qui peuvent paraître paradoxales puisque l'offensive à Sudja avait suscité au sein de l'Ukraine,
03:09chez les partenaires de l'Ukraine internationaux et au sein même du pays, un énorme élan,
03:14à quelque sorte l'idée selon laquelle il était possible de rompre avec une dynamique qui semblait plutôt enclenchée du côté russe depuis quelques mois.
03:22Donc il y a eu cette capacité de surprise.
03:24La question à présent pour le président Zelensky est de pouvoir capitaliser, à savoir est-ce que le président Zelensky cherche à effectuer une reprise en main pour changer la manière dont il va mener la guerre
03:36ou est-ce qu'il procède à une reprise en main du gouvernement, non pas pour changer, mais plutôt pour confirmer ce qu'il a fait,
03:43confirmer en changeant peut-être des politiques qui pour certains ont fait l'objet de critiques.
03:50Alors ce ne sont pas les premières politiques à démissionner depuis le début de la guerre.
03:54On avait en mémoire un ancien ministre de la Défense qui avait démissionné cette fois-ci avec des soupçons de corruption.
04:02Ceux qui ont été démis de leur fonction, en l'occurrence présentement, ne le font pas pour des mêmes motifs.
04:13Il faut donc voir quelque chose d'assez massif et qui est de l'ordre de la reprise en main politique.
04:17Mais se séparer par exemple de grandes figures comme le ministre des Affaires étrangères, Kouléba, qui lui-même a remis sa démission,
04:23n'est-ce pas une manière de se tirer une balle dans le pied ?
04:27Est-ce qu'il est bien introduit dans le cercle occidental et qui est très bien connu et apprécié ?
04:36Le ministre des Affaires étrangères Kouléba a effectivement eu l'occasion depuis le début du conflit de faire la tournée des chancelleries.
04:46La question est peut-être pour Zelensky de savoir comment apporter un nouveau souffle, de nouvelles perspectives.
04:55Peut-être c'est ce qu'il va attendre d'un nouveau ministre des Affaires étrangères.
04:58Soit il faut le voir comme une confirmation, soit peut-être comme une inflexion.
05:02Il faut se souvenir qu'au début du mois de juillet dernier, la question qui était posée était de savoir,
05:09en tout cas c'était une réflexion qui avait lieu du côté ukrainien,
05:12s'il ne fallait pas que la prochaine conférence de paix se fasse cette fois-ci en présence de représentants du gouvernement russe.
05:20Est-ce que dans ce cadre-là, M. Kouléba serait le mieux placé pour incarner une éventuelle inflexion ?
05:27Ce n'est pas sûr.
05:28Est-ce qu'il est le mieux placé pour continuer sur cette même ligne qui consiste à, en quelque sorte,
05:34avoir un discours qui est que l'Ukraine peut gagner cette guerre, mais elle peut le gagner à condition
05:40que derrière les paroles de soutien des États occidentaux, il y ait de véritables actes ?
05:46Peut-être qu'à ce moment-là aussi, comme interlocuteur, M. Kouléba est à la fois très connu et peut-être attendu.
05:52Peut-être s'agit-il pour le président Zelensky d'essayer de brouiller un peu davantage les lignes,
05:57de manière à lui laisser un peu plus de capacité d'initiative sur le plan politique.
06:02Et justement, Florent Parmentier, est-ce qu'on se rapproche de négociations ?
06:07Il y a cette visite normalement ce mois-ci, ce mois de septembre, de Volodymyr Zelensky à Washington,
06:15qui devrait être reçue par Joe Biden.
06:17Il y a aussi cette incursion ukrainienne sur le terrain russe, à course,
06:22que les Ukrainiens contrôleraient plus de 1 000 km².
06:26Est-ce que c'est une manière d'établir un rapport de force avec les Russes en vue des négociations ?
06:31L'argument du rapport de force sur Soudzha est peut-être exagéré,
06:35dans la mesure où cela concerne 1 000 km² sur le territoire russe,
06:39mais que dans le même temps, l'occupation de la Russie du territoire ukrainien représente 110 000 km².
06:44Donc là, on a un écart qui est considérable,
06:46et le fait de posséder 1 000 km² ne change pas véritablement le rapport de force.
06:52En revanche, ce qu'il faut regarder, c'est non seulement les déplacements du président Zelensky aux États-Unis,
06:57mais aussi la volonté de ce même président Zelensky d'aller chercher la Chine
07:02pour envisager une sortie de la guerre qui puisse se faire dans des conditions
07:07qui soient potentiellement acceptables de part et d'autre.
07:11Et ces lignes rouges vont être effectivement très difficiles à trouver.
07:15Le président Zelensky, à mon sens, en envoyant quelques signaux,
07:21en essayant tout simplement de chercher à donner un rôle à la Chine,
07:26est peut-être en train d'essayer de trouver ce point de négociation.
07:30Officiellement, la partie russe dit qu'à partir du moment où il y a une armée ukrainienne sur son sol,
07:35elle ne souhaite pas procéder à des négociations.
07:39C'est également vrai qu'à partir du moment où il y a des diplomaties,
07:45en tout cas il y a des rencontres diplomatiques qui se font à la vue de tous,
07:49et puis il y a des négociations qui, elles, ne sont pas nécessairement connues du grand public.
07:54Peut-être parce que cette partie de secret permet précisément d'essayer de rapprocher les points de vue.
07:59Donc on est dans ce moment très particulier effectivement où le président Zelensky
08:04va essayer de peser de manière à avoir un rapport de force politique, diplomatique,
08:10qui puisse, en quelque sorte, offrir à l'Ukraine la possibilité d'une sortie de cette guerre.
08:17Mais est-ce qu'il se résout rapidement, s'il vous plaît, à faire des concessions,
08:22à perdre quelques pans de territoire, notamment dans l'Est, Zelensky ?
08:28Non, cette question serait évidemment très compliquée.
08:32La question est plutôt de savoir aujourd'hui non pas ce qui risque d'être perdu,
08:36mais aussi ce qui doit être sauvé.
08:37Et c'est peut-être là-dessus que le président Zelensky essaiera de reprendre.
08:41Savoir ce qui peut être sauvé, c'est un positionnement de l'Ukraine indépendante,
08:45et puis la fin d'un conflit qui a déjà causé la mort de plusieurs centaines de milliers d'Ukrainiens.
08:51Merci infiniment, Florent Parmentier, pour votre point de vue.

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