Faites entrer l'accusé _ Trois hommes et un magot

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À Nice, le 10 mars 2002, Francine Véran-Raspini 71 ans et son fils Marc, 47 ans, disparaissent. Descendant d’une vieille famille niçoise, la septuagénaire gérait un patrimoine immobilier familial qui faisait des envieux. Leurs corps seront retrouvés dans un petit bois, en mars 2003 à la suite des aveux de l’un des suspects, Laurent Gauvin, qui, avec son père Patrick, voulait s’emparer de la fortune des Raspini. Mais le butin du vol était trop maigre et les Gauvin ont décidé de falsifier des chèques avec l’aide d’un complice, un certain Philippe Dubois.
Transcript
00:00:30Philippe Dubois, Patrick et Laurent Gauvain.
00:00:33Trois hommes, trois paumés,
00:00:35qui pensaient avoir trouvé le moyen pour sortir de la galère,
00:00:38assassiner une mère et son fils pour voler leurs magots.
00:00:41Des victimes idéales, sévérant Raspini.
00:00:44Des gens qui n'ont pas d'amis, pas de famille proche,
00:00:47qui ne sortent jamais de chez eux pour mieux compter leurs sous.
00:00:51Qui s'inquièterait de leur disparition ?
00:00:54Et pourtant...
00:01:00Colline de Guéraud, sur les hauteurs de Nice, mars 2002.
00:01:05Les voisins de Francine Véran Raspini sont inquiets.
00:01:08Voilà plusieurs jours qu'ils sont sans nouvelles de cette femme de 71 ans
00:01:12et de son fils Marc.
00:01:15Il a 47 ans et vit avec elle sur la propriété.
00:01:19Devant l'énorme bâtisse, le courrier s'amoncelle
00:01:23et dans la maison, le chat erre, affamé.
00:01:28La dernière fois que j'ai vu Mme Raspini,
00:01:31c'était, si je me souviens bien, un dimanche après-midi,
00:01:35le dimanche 10 mars.
00:01:37Je l'ai vue là.
00:01:40D'ailleurs, elle s'était accrochée avec un couple de visiteurs
00:01:43qui venaient pour des gens bien habillés, qui présentaient bien.
00:01:47Et puis après, je l'ai aperçue, j'ai dit bonjour.
00:01:50Et depuis ce jour-là, on ne les a plus vues.
00:01:54Les Véran Raspini ne s'absentent pourtant jamais sans confier le chat.
00:01:59Et sans prévenir Kamel, le jardinier.
00:02:04D'habitude, chaque matin, elle vient me voir.
00:02:07Le premier jour, le deuxième jour, le troisième jour,
00:02:10le quatrième jour, elle n'est pas venue.
00:02:12Tout le monde est choqué, il est allé, il est allé.
00:02:15Après, qu'est-ce qu'ils ont décidé, les locateurs de Mme Raspini ?
00:02:19Ils vont appeler le pompier.
00:02:23Les pompiers se rendent sur place le 15 mars.
00:02:26Ils libèrent le chat, mais ne peuvent pas faire plus,
00:02:29car dans la maison, il n'y a personne.
00:02:33C'est donc la police qui prend le relais.
00:02:41Ils ne sont pas du tout habitués à s'absenter.
00:02:44Les Raspini étaient partis une fois en croisière
00:02:47et ils en avaient parlé longtemps avant et longtemps après.
00:02:51Et là, on fait un message.
00:02:53On fait ce qu'on appelle une RIF,
00:02:55recherche dans l'intérêt des familles.
00:02:57Un message qui sera diffusé au plan national,
00:03:00police, gendarmerie, douane.
00:03:03Des gens casaniers et routiniers,
00:03:05c'est Véron Raspini.
00:03:07Voilà ce que les policiers découvrent.
00:03:09Ils apprennent aussi que la vieille dame et son fils
00:03:12sont à la tête d'une énorme fortune.
00:03:15Des appartements et des immeubles dans le centre-ville de Nice
00:03:18et un immense terrain sur la colline de Guéron.
00:03:21Madame Véron Raspini, qui est issue d'une vieille famille niçoise,
00:03:25gère les biens immobiliers de sa famille,
00:03:29un petit peu à l'ancienne.
00:03:31Elle est favorable au paiement en liquide de ses loyers.
00:03:35Elle a eu des problèmes avec le fisc.
00:03:38Donc elle a décidé visiblement
00:03:40de ne plus verser son argent sur des comptes.
00:03:44Elle vit un petit peu dans un système qui est assez autarcique,
00:03:48qui est fermé.
00:03:50Son terrain, Francine l'a découpé en lopins de terre.
00:03:53Elle les loue à des particuliers qui veulent jardiner.
00:03:56Certains habitent même dans les cabanons qu'elle a fait construire.
00:03:59Elle a une vingtaine de locataires.
00:04:02Pourtant, malgré de confortables revenus,
00:04:05la mère et le fils vivent chichement.
00:04:10Pour moi, c'était une femme de tête et d'affaires, ça c'est sûr.
00:04:14À fort caractère.
00:04:16Elle gérait sa propriété comme elle l'entendait,
00:04:19mais bon, c'est vrai que pour moi,
00:04:22elle était proche de l'argent.
00:04:24Elle aimait bien.
00:04:26Moi, j'ai constaté plusieurs fois que bon, un centime, c'était un centime.
00:04:29Elle y tenait.
00:04:31Madame Raspini, c'est une dame...
00:04:34On dirait...
00:04:37C'est elle qui commande à tous et tout.
00:04:40Elle a un caractère de patronne.
00:04:43Voilà, c'est ça.
00:04:45C'est le caractère de Madame Raspini.
00:04:48Elle vous donne pas ou elle vous prenne rien.
00:04:51C'était même quand elle...
00:04:53Le jour de...
00:04:55Quand elle me paye, s'il y a 20 centimes, un centime,
00:04:58elle vous donne dans l'enveloppe.
00:05:00Lorsqu'on la voyait, on avait plus l'impression
00:05:03que c'était une pauvre femme, une pauvre malheureuse.
00:05:06Parce que la façon de se vêtir, c'était un peu...
00:05:09Bon, un peu juste, quoi.
00:05:14Depuis la mort de son mari,
00:05:16Francine Véran, veuve Raspini,
00:05:18vit isolée avec son fils.
00:05:20Ils ne sortent pratiquement jamais.
00:05:23Même les cousins germains ne seront pas en mesure
00:05:26de nous les présenter comme assistants aux fêtes de famille, etc.
00:05:30Ils sont assez repliés sur eux-mêmes.
00:05:33Et petit à petit, Mme Raspini ne recevait plus personne
00:05:36à l'intérieur de son domicile.
00:05:41Personne ne met les pieds chez elle.
00:05:43Même pas ses locataires.
00:05:45Lorsqu'ils viennent payer leur loyer,
00:05:47elle les reçoit dehors, sur la terrasse.
00:05:50D'autres lui déposent les enveloppes
00:05:52directement dans sa boîte aux lettres.
00:05:55Elle vit avec son fils, c'est tout.
00:05:57Et son fils, il est un peu malade.
00:06:00Donc Mme Raspini, elle le traite, son fils,
00:06:03comme un bébé.
00:06:05Quand il essaie de discuter avec quelqu'un,
00:06:09elle le dit...
00:06:11Toujours, elle le dit comme ça.
00:06:14Marc ne travaille pas.
00:06:16Il aide sa mère dans la gestion de leurs biens
00:06:18et lui sert de chauffeur.
00:06:20Il souffre de problèmes psychologiques
00:06:22qui lui ont valu plusieurs séjours en hôpital psychiatrique.
00:06:26Et tant de fois, il se gonfle la tête
00:06:30et il commence à crier, à casser.
00:06:34Il y a eu une intervention de police
00:06:36à son domicile une fois précédente
00:06:39pour le calmer et obtenir sa reddition
00:06:42dans une espèce de petite crise.
00:06:44A cette occasion, on s'est aperçus aussi
00:06:46que Mme Véran Raspini n'était pas quelqu'un
00:06:48qui se laissait faire, qui ne se laissait pas convaincre
00:06:50par deux policiers en uniforme
00:06:52pour apaiser la situation.
00:06:55Au final, des gens assez sauvages
00:06:57qui ne quittent jamais leur maison.
00:06:59Peut-être pour mieux couver leur bien.
00:07:09Commandant Alain Brunache,
00:07:10vous êtes le chef de la brigade criminelle à la PJ de Nice.
00:07:13Quelles sont les premières hypothèses au début de l'enquête ?
00:07:15Les hypothèses sont larges.
00:07:18On balaye de la disparition inquiétante classique d'adultes
00:07:24pour une raison qui leur est propre.
00:07:27On peut imaginer aussi à ce moment-là
00:07:31un double suicide ou un geste désespéré du fils
00:07:34puisque Marc Raspini avait une personnalité
00:07:36un petit peu particulière.
00:07:38On peut également envisager un enlèvement.
00:07:40Mais dans ce cas-là, il n'y a pas de demande de rançon
00:07:43donc tout est ouvert à partir du moment
00:07:46où la police judiciaire revendique cette saisine.
00:07:48J'imagine que du côté de la famille,
00:07:49vous interrogez tout le monde.
00:07:51Alors, qu'est-ce que ça donne ?
00:07:52Du côté de la famille, ce sont des gens
00:07:54qui vivent un petit peu en reclus,
00:07:56qui se sont repliés sur eux-mêmes.
00:07:58Ils ont coupé les liens avec leur famille.
00:08:00Ils ne reçoivent plus leurs parents, en particulier leurs cousins.
00:08:03Et ce sont, je dirais, des rentiers sur le retour.
00:08:06Ils vivent repliés sur eux-mêmes.
00:08:08Est-ce que ces gens ont de l'argent, beaucoup d'argent ?
00:08:11Alors, ces gens ont de l'argent
00:08:13et cet argent ne va pas en banque.
00:08:15En tout état de cause, tous les locataires,
00:08:18toutes les personnes qui les côtoient au quotidien
00:08:20savent qu'il y a des rentrées d'argent importantes.
00:08:24Les policiers interrogent les hôpitaux,
00:08:26les commissariats et même les instituts psychiatriques.
00:08:29Mais aucune trace d'Evéran Raspini.
00:08:33La brigade criminelle reprend l'affaire
00:08:35et monte perquisitionner la maison.
00:08:39D'abord, c'est une belle bâtisse niçoise de l'extérieur
00:08:42avec des beaux jardins, des belles fleurs.
00:08:44Il y avait des légumes plantés
00:08:46et puis vraiment une colline magnifique.
00:08:48C'est une colline qui est vraiment
00:08:50dans un espace à Nice très vert.
00:08:53Mais à l'intérieur de la maison, changement de décor.
00:08:56La maison est complètement délabrée.
00:08:58Elle est laissée à l'abandon depuis plusieurs années.
00:09:02Aucun travaux sérieux n'a été fait
00:09:05ni à l'extérieur ni à l'intérieur.
00:09:08Et les pièces sont dédiées à différents entassements.
00:09:11C'est meublé très vieux,
00:09:13c'est les années 50 du vieux mobilier
00:09:16et puis rien n'a été fait.
00:09:18C'est une vieille maison où tout s'est figé.
00:09:21C'était un peu, disons, un café d'un homme.
00:09:24Les poubelles n'étaient pas vidées,
00:09:26on ouvrait les placards, il y avait des sacs qui tombaient.
00:09:29Dans l'espace de Mme Raspini, il y avait des vêtements au sol,
00:09:32l'armoire n'était pas rangée, le lit était encore défait.
00:09:35Donc ça, c'était important pour nous
00:09:37parce qu'on avait vraiment l'impression
00:09:39que les gens étaient partis précipitamment.
00:09:42Chez eux, pas de papier d'identité, pas d'argent liquide.
00:09:45Les Vérans Raspini peuvent-ils avoir pris l'avion ?
00:09:49La semaine où tombent les loyers, difficile d'y croire.
00:09:55On remarquera dans la boîte aux lettres
00:09:57des enveloppes contenant du liquide
00:09:59avec juste une mention, Pierre,
00:10:01et puis 50 euros,
00:10:04Marc, 200 euros.
00:10:07Francine n'était vraiment pas le genre à laisser traîner de l'argent.
00:10:12Mais ce qui est bizarre, si les Vérans Raspini ont été agressés,
00:10:16c'est qu'il n'y a pas de traces de lutte.
00:10:18Juste deux ou trois choses qui clochent.
00:10:22On va découvrir un mégot dans la partie vie de Marc Raspini,
00:10:27alors qu'il ne fume pas.
00:10:29Et ce mégot choque.
00:10:31On a trouvé un carton vide d'ordinateur.
00:10:33Or, en fouillant toute la maison
00:10:35et même le mobilhome de Marc Raspini,
00:10:37on ne retrouvera pas cet ordinateur.
00:10:40Et dans le garage, il y a bien l'une des voitures des Raspini.
00:10:43Mais il manque la Renault 11,
00:10:45dont se sert tout le temps Marc.
00:10:48Tout ça est franchement inquiétant.
00:10:53Quand on part en vacances,
00:10:55en général, on fait ses valises,
00:10:57on vide ses poubelles,
00:10:58on laisse pas de la vaisselle sale
00:11:00parce que si on part dix jours, on sait que ça va moisir.
00:11:02Donc là, la nourriture du chat a été éventrée au sol.
00:11:07Donc là, on a vraiment eu l'impression,
00:11:09au moment où on faisait les constatations,
00:11:10on a pris ça à cœur,
00:11:12parce qu'on s'est dit qu'ils avaient disparu
00:11:13ou qu'ils avaient été enlevés.
00:11:21Les policiers sont là
00:11:23quand une découverte vient relancer l'enquête.
00:11:2815 mars 2002,
00:11:29parking de l'Arenas, à l'ouest de Nice.
00:11:32Un parking que connaissent bien
00:11:34les petits dealers et les prostituées du coin.
00:11:37Ça fait 4 jours qu'une Renault 11 est garée là.
00:11:42De quoi intriguer le gardien du parking
00:11:45qui se rend au commissariat.
00:11:48Elle était garée normalement.
00:11:49Là, il y avait pas de problème.
00:11:52Mais il était un petit peu intrigué
00:11:53parce que, bon, là, ça faisait déjà quelques jours
00:11:55que la voiture ne bougeait pas.
00:11:56Et puis elle bougeait pas, elle bougeait pas.
00:11:59Les portières n'étaient pas verrouillées.
00:12:00Il a regardé à l'intérieur.
00:12:03C'est là qu'il a trouvé les clés de la voiture
00:12:05dans la boîte à gants.
00:12:08Ils nous donnent l'immatriculation.
00:12:10Nous, on pensait que ça pouvait être une voiture volée,
00:12:12tout simplement.
00:12:13Donc, quelque chose de banal, en fait, une fois de plus.
00:12:16Et on regarde l'immatriculation
00:12:18et ça ressort, donc, au nom de Francine Raspini.
00:12:23Voilà.
00:12:24Forcément, on fait le rapprochement là
00:12:26et fait immédiatement.
00:12:27Évidemment, on va faire des vérifications d'abord
00:12:29autour d'un parking
00:12:30en montrant les photos de Marc Raspini.
00:12:32S'il avait été vu dans le parking déposer ce véhicule,
00:12:34ce qui n'est pas le cas.
00:12:37Le parking est tout près de l'aéroport.
00:12:39De quoi relancer l'hypothèse des vacances.
00:12:43Mais pas longtemps, car après vérification,
00:12:46les vérans Raspini ne figurent sur aucun vol.
00:12:50Et c'est vrai que comme on est dans le quartier
00:12:52vraiment des prostituées le soir,
00:12:54on s'est dit dans un premier temps
00:12:56que peut-être Marc Raspini était descendu,
00:12:58avait descendu son véhicule
00:12:59et a été les voir, des prostituées.
00:13:02Grâce au relevé téléphonique,
00:13:04les policiers découvrent que Marc
00:13:06fréquentait justement une prostituée du quartier.
00:13:10Une bulgare surnommée Katia.
00:13:14Donc nous allons retrouver cette prostituée bulgare
00:13:18qui nous expliquera avoir rencontré Marc
00:13:21à l'occasion d'une passe dans un premier temps
00:13:24et puis petit à petit d'avoir sympathisé un petit peu avec lui.
00:13:27Et elle nous dira qu'elle était la copine
00:13:30entre guillemets privilégiée de Marc Raspini.
00:13:33Donc il lui téléphonait 3-4 fois par jour
00:13:35pour savoir comment ça allait.
00:13:36Il lui faisait des cadeaux comme si c'était sa fiancée.
00:13:39Parfois elle avait d'autres clients,
00:13:41donc elle l'envoyait un peu pêtre.
00:13:43Mais bon, il ne comprenait pas, il était jaloux.
00:13:45Donc il la considérait vraiment comme sa petite copine.
00:13:49Katia explique aux policiers
00:13:50qu'elle n'a pas vu Marc depuis un moment.
00:13:53Mais ça ne l'a pas vraiment inquiété.
00:13:56Dans le métier,
00:13:57les clients ne sont pas toujours très fidèles.
00:14:01Cette piste sera rapidement écartée
00:14:04puisque la piste d'une prostituée ou d'un proxénète
00:14:07qui aurait tué Marc Raspini ou l'aurait enlevé
00:14:09est complètement éloignée
00:14:11puisqu'on a la disparition à la fois du fils et de la mère.
00:14:14Si on a vu la disparition que de Marc Raspini,
00:14:16peut-être que cette piste aurait été prise plus en compte.
00:14:18Mais là, ce n'est pas le cas, on a les deux qui disparaissent.
00:14:21Trois semaines après la disparition d'Evéran Raspini,
00:14:24un cousin de Francine porte plainte pour enlèvement et séquestration.
00:14:27Une information judiciaire contrique s'est ouverte,
00:14:30mais les policiers n'ont pas grand-chose à se mettre sous la dent.
00:14:32Ils reprennent les vérifications de routine
00:14:34et l'enquête de voisinage.
00:14:36Retour à la case départ.
00:14:39Les policiers retournent donc à Guéraud.
00:14:42Il n'y a plus qu'une seule chose à faire.
00:14:44Répondre à l'enquête.
00:14:47Les policiers retournent donc à Guéraud.
00:14:50Ils entendent les locataires d'Evéran Raspini, un par un.
00:14:54Mais la pêche n'est pas très bonne.
00:14:56Le seul témoin qui leur apporte un élément intéressant, c'est Camel.
00:15:01Ce monsieur nous dit que sur place,
00:15:04il y avait un nommé Philippe Leblanc
00:15:06qui avait eu des problèmes avec Mme Raspini
00:15:10pour une histoire de facture.
00:15:12Et manifestement, il en voulait à Mme Raspini.
00:15:17Une facture d'électricité
00:15:19que ce Philippe Leblanc jugeait trop élevée
00:15:21et qu'il refusait de payer.
00:15:23Il était disputé avec Mme Raspini deux, trois fois.
00:15:27Et après, il m'a dit
00:15:29« Camel, quitte l'endroit.
00:15:32Je fais un coup pour Mme Raspini. »
00:15:36Quand il m'a dit ça, il est en couleur.
00:15:39Il est agressif comme ça.
00:15:41C'est ce que j'ai dit à la police.
00:15:43Camel Lejardini avait pris peur.
00:15:45« Qu'est-ce que vous allez faire ?
00:15:47Vous n'allez pas faire un coup chez Mme Raspini ?
00:15:49C'est pas possible. »
00:15:51Donc il l'avait envoyé un peu balader.
00:15:53Et quand M. et Mme Raspini ont disparu,
00:15:55Camel Lejardini a commencé à s'inquiéter
00:15:57et à penser à ce Philippe Leblanc,
00:15:59savoir s'il n'avait pas fait ce mauvais coup.
00:16:02D'autant que Philippe Leblanc,
00:16:04qui louait un cabanon sur la propriété,
00:16:06était considéré comme marginal.
00:16:08Depuis son arrivée,
00:16:10il ne passait pas très bien avec les autres locataires.
00:16:14Ce Philippe Leblanc aura aussi des histoires
00:16:16avec d'autres voisins à cause de son chien.
00:16:18Donc il n'était pas très aimé
00:16:20sur ce petit microcosme de l'opinthère
00:16:22où il y avait certains voisins qui étaient là depuis 20 ans.
00:16:24Or, celui-ci était venu récemment.
00:16:26Il y a eu quelques problèmes
00:16:28par rapport à son chien.
00:16:32C'était pas quelqu'un, à mon avis,
00:16:34tellement fréquentable.
00:16:36J'ai jamais eu de mots avec lui.
00:16:38Ce n'était certainement pas
00:16:40quelqu'un de facile.
00:16:42Les policiers s'intéressent donc
00:16:44à ce Philippe Leblanc.
00:16:46Et c'est là qu'ils découvrent
00:16:48que l'homme s'est présenté sous une fausse identité.
00:16:52Commandant Brunache, vous avez un nom,
00:16:54Philippe Leblanc. Comment vous procédez alors ?
00:16:56Effectivement, on a un nom,
00:16:58c'est-à-dire on a une orientation,
00:17:00on a un suspect possible.
00:17:02On apprend que ce Philippe Leblanc
00:17:04a eu des mots
00:17:06avec madame Raspini, avec Francine Raspini.
00:17:08Le Camel en question,
00:17:10le régisseur en question a été également menacé
00:17:12par ce même Philippe Leblanc.
00:17:14À partir du moment où on a le nom,
00:17:16on fait la téléphonie de Camel et on s'aperçoit
00:17:18que ce Philippe Leblanc s'appelle en réalité
00:17:20Philippe Dubois.
00:17:22Il est connu des services de police ?
00:17:24C'est un personnage qui a un passé pénal.
00:17:26Donc, il devient
00:17:28un suspect
00:17:30intéressant. Il va être considéré, bien sûr,
00:17:32et traité comme tel.
00:17:34Il est violent. C'est quelqu'un qui a eu
00:17:36mal à partir à la justice à plusieurs reprises
00:17:38et qui l'inspire
00:17:40de la crainte, y compris de la crainte auprès
00:17:42de ses voisins.
00:17:48Pendant que les policiers tentent de localiser
00:17:50Philippe Dubois, la Providence
00:17:52donne un petit coup de pouce à l'enquête.
00:17:54Depuis le 10 mars,
00:17:56les policiers gardent un œil
00:17:58sur les comptes en banque d'Evéran Raspini.
00:18:00Depuis leur disparition,
00:18:02pas un centime n'a été retiré.
00:18:04Jusqu'au 5 avril
00:18:062002, soit 3 semaines
00:18:08plus tard.
00:18:10Nous allons recevoir un avis
00:18:12dès l'établissement bancaire, la BNP,
00:18:14de Mme
00:18:16Véran Raspini, nous avisant
00:18:18de l'encaissement de 2 chèques d'un montant
00:18:20important.
00:18:22Le premier est de 17 503 euros
00:18:24et 51 centimes.
00:18:26L'autre,
00:18:28de 11 051 euros
00:18:3083.
00:18:32Or, ce n'est pas dans les habitudes de Mme Raspini
00:18:34de faire de si gros chèques.
00:18:36Et surtout,
00:18:38les signatures ont l'air d'avoir été
00:18:40imitées.
00:18:42Nous allons travailler sur les personnes
00:18:44les bénéficiaires des 2 chèques,
00:18:46Patrick et Laurent Gauvin.
00:18:48Patrick et Laurent Gauvin,
00:18:50un père et son fils.
00:18:52Ce sont des gens qui, sans être
00:18:54à la marge de la société,
00:18:56ils sont en bordure,
00:18:58ils travaillent, puis ils ne travaillent pas,
00:19:00ils sont un petit peu dans des situations,
00:19:02une certaine précarisation.
00:19:04Ce sont 2 personnes qui sont connues de la police,
00:19:06pas pour des faits très graves,
00:19:08mais bon, ils ne comprennent pas pourquoi
00:19:10ils créditent leurs comptes de 17 000 et 11 000 euros.
00:19:12Et ensuite, il y a des débits immédiats
00:19:14en 3 retraits.
00:19:16Ils retirent chacun la quasi-totalité
00:19:18du versement.
00:19:20Les policiers avaient déjà un suspect,
00:19:22Philippe Dubois.
00:19:24Voilà maintenant qu'ils en ont 2 autres,
00:19:26les Gauvins.
00:19:28Et ils découvrent que les 3 hommes
00:19:30se connaissent.
00:19:32Dubois travaille à l'OPAM,
00:19:34l'Office public des Alpes-Maritimes.
00:19:36Il est
00:19:38ripper, autrement dit
00:19:40il sort les poubelles dans une cité
00:19:42au nord de Nice, près des Moulins.
00:19:44Les Moulins,
00:19:46où Patrick Gauvin travaille lui aussi pour l'OPAM,
00:19:48comme gardien d'immeuble.
00:19:50Nous allons les placer
00:19:52sous écoute téléphonique
00:19:54et on va s'apercevoir très rapidement
00:19:56qu'ils sont en relation.
00:19:58Les Gauvins, Patrick et Laurent
00:20:00et Philippe Dubois sont en relation constante.
00:20:02Ils ont des relations d'amitié,
00:20:04ils ont des relations habituelles.
00:20:06On constatera aussi qu'ils ont
00:20:08pour les Gauvins un peu plus d'argent,
00:20:10ce qui n'était pas le cas.
00:20:12Laurent, un Gauvin, va s'acheter une monde,
00:20:14va s'acheter de gourmettes, il va faire des cadeaux à sa copine.
00:20:16Alors, auparavant,
00:20:18on sait qu'il n'avait pas du tout d'argent.
00:20:20Mais tout cela ne prouve rien.
00:20:22Alors, pour les inquiéter un peu
00:20:24et forcer les confessions au téléphone,
00:20:26les policiers ont une idée.
00:20:28Sortir l'affaire dans la presse,
00:20:30histoire de leur faire savoir
00:20:32qu'une enquête est en cours.
00:20:34Le 13 avril 2002,
00:20:36la disparition des Véran Raspini
00:20:38fait la une de Nice matin.
00:20:42Dans ce papier,
00:20:44on pose beaucoup de questions.
00:20:46On insiste sur l'aspect mystérieux,
00:20:48on parle un peu de leur vie.
00:20:50On dresse un peu le portrait de ces gens-là.
00:20:52Et on raconte
00:20:54les circonstances de leur disparition.
00:20:56Parce qu'à ce stade-là de l'enquête,
00:20:58c'est encore très mystérieux.
00:21:00Cet article
00:21:02parait, et immédiatement,
00:21:04nous avons des réactions le jour même
00:21:06des trois protagonistes.
00:21:08Tout de suite, ça va être l'affolement général.
00:21:10Patrick Gauvin va d'abord voir le journal.
00:21:12Il va appeler son fils en lui disant
00:21:14« Tu as vu ce qui s'est passé ? Tu as vu la première page ? »
00:21:16Donc Laurent n'a pas acheté le journal.
00:21:18Il s'arrêtera à acheter le journal.
00:21:20Il sera avec un copain. Le copain nous dira
00:21:22qu'il était complètement paniqué
00:21:24en voyant la première page.
00:21:26Et il ira prévenir immédiatement Philippe Dubois
00:21:28que l'article est sorti dans le journal.
00:21:30À 13h49,
00:21:32c'est Philippe Dubois qui appelle Patrick Gauvin.
00:21:34Les deux hommes conviennent d'un rendez-vous.
00:21:38« Tu me diras tout ça quand je passe te voir. »
00:21:40Parce que les communications...
00:21:42Une heure après,
00:21:44pas tranquille, Philippe rappelle
00:21:46Laurent Gauvin cette fois.
00:21:48« Putain, c'est grave ! Sérieux !
00:21:50Ça va ? Tu flippes pas au moins ? »
00:21:54Sur les surveillances téléphoniques,
00:21:56on constate que les trois
00:21:58protagonistes sont très inquiets.
00:22:00Ils se téléphonent sans prononcer
00:22:02le mot des Raspini. Ils se comprennent
00:22:04immédiatement, simplement en signalant
00:22:06la page de Nice Matins,
00:22:08la première page de Nice Matins. Mais à aucun
00:22:10moment, ils ne parlent de l'histoire, des faits.
00:22:12Or, c'est bizarre, parce que si on se téléphone
00:22:14normalement à son père, à son fils,
00:22:16on lui dit « Tu as vu dans le journal ?
00:22:18Tiens, la famille Raspini a disparu.
00:22:20C'est la femme chez qui je suis montée. »
00:22:22Pas du tout ! Là, on est
00:22:24en code et ils ne parlent absolument
00:22:26pas de cette famille. Et ils se donnent
00:22:28rendez-vous pour en parler.
00:22:30Et la valse des conversations téléphoniques
00:22:32n'est pas terminée.
00:22:34Une demi-heure plus tard,
00:22:36Philippe Dubois appelle Kamel.
00:22:38« Il m'a dit « T'as pas vu le journal ? »
00:22:40Eh bien, j'ai dit « J'ai pas vu le journal. »
00:22:42Il a dit « Madame Raspini,
00:22:44il était disparu. » Oh là là,
00:22:46je lui dis que c'est triste, ça va pas.
00:22:48Il m'a dit « Moi, je suis pas triste. »
00:22:54Philippe a surtout un service à demander à Kamel.
00:22:56L'appeler tout de suite
00:22:58si la police revient le voir.
00:23:00C'est une conversation
00:23:02où on verra bien quand même que
00:23:04Philippe est le responsable, qui s'inquiète,
00:23:06qui s'intéresse, et celui qui gère
00:23:08un petit peu le dossier, qui drive.
00:23:18Philippe Dubois,
00:23:20un homme violent qui a déjà menacé
00:23:22Francine Raspini. Les Gauvins,
00:23:24ce père et ce fils qui touchent soudain
00:23:26de grosses sommes d'argent des Raspini.
00:23:28Trois hommes qui partent dessus le marché
00:23:30par la mouche ouverte des Raspini.
00:23:32C'est largement suffisant pour les policiers
00:23:34qui décident d'interpeller tout ce petit monde.
00:23:38Le 16 avril 2002,
00:23:40plus d'un mois après la disparition d'Evéran Raspini,
00:23:42les policiers
00:23:44lancent les interpellations.
00:23:46Direction la cité des Moulins.
00:23:48Ils commencent par les Gauvins.
00:23:50Patrick Gauvin est interpellé
00:23:52au bas de son domicile. On monte
00:23:54pour faire la perquisition.
00:23:56Laurent Gauvin est chez son père.
00:23:58Laurent est cueilli dans son lit
00:24:00alors qu'il dort tranquillement.
00:24:04Le père et le fils sont conduits
00:24:06au feu de l'abricade criminel.
00:24:08Deux arrestations qui ne passent pas
00:24:10inaperçues dans la cité.
00:24:12Et Philippe les apprend vite.
00:24:14C'est ce que comprennent les policiers
00:24:16qui suivent en direct
00:24:18ces conversations téléphoniques.
00:24:22Ce laps de temps entre l'interpellation des Gauvins
00:24:24et l'interpellation de Dubois
00:24:26sera l'occasion d'enregistrer
00:24:28une conversation fort intéressante
00:24:30entre l'épouse à l'époque de M. Dubois
00:24:32et lui-même
00:24:34où il parle
00:24:36de ce dossier.
00:25:00On comprend quand même
00:25:02que c'est le chef qui s'inquiète
00:25:04de ce qui leur arrive et surtout
00:25:06il indique dans cette surveillance
00:25:08qu'il leur avait dit de ne pas déposer les chèques.
00:25:10Et donc ça, pour nous, c'est capital.
00:25:12Les policiers
00:25:14comprennent aussi que sa femme Geneviève
00:25:16semble au courant de quelque chose
00:25:18parce qu'elle s'inquiète.
00:25:20Pourvu qu'ils ne te mettent pas là-dedans,
00:25:22dit-elle, réponse de Dubois.
00:25:24C'est pour ça que je préfère envoyer
00:25:26l'avocat aller voir.
00:25:28Comme ça, je me tiens au courant.
00:25:32On se rend compte sur la surveillance téléphonique
00:25:34qu'elle est très prudente, voire plus prudente que Philippe Dubois.
00:25:36Et surtout, elle comprend aussi
00:25:38cette histoire de chèques.
00:25:40Or, si vous n'êtes pas au courant du tout de ce qui s'est passé,
00:25:42vous n'êtes pas là en disant
00:25:44qu'ils n'auraient pas dû déposer ce chèque.
00:25:46Elle est au courant de tout.
00:25:48Grâce à cet appel,
00:25:50Philippe Dubois est localisé.
00:25:52Il est dans une station-service à l'ouest de Nice
00:25:54où il boit un café.
00:25:56Il est midi et demi
00:25:58lorsque les policiers lui tombent dessus.
00:26:00On interpelle aussi
00:26:02Geneviève, la femme de Philippe Dubois,
00:26:04au vu de cette écoute, justement.
00:26:06Et puis parce qu'elle connaît
00:26:08Patrick et Laurent, elle aura certainement des choses
00:26:10à nous dire. Or, en garde à vue,
00:26:12elle se conduira comme une bonne femme de voyou.
00:26:14Elle ne dira absolument rien.
00:26:16Ça fait donc 4 personnes
00:26:18en garde à vue. Philippe Dubois,
00:26:20sa compagne, et les Gauvins père et fils.
00:26:22Les policiers ont
00:26:2448 heures pour les faire parler.
00:26:26Patrick Gauvin
00:26:28est assez calme.
00:26:30On sent qu'il est très tendu
00:26:32et que ça va pas du tout.
00:26:34Mais il a tendance à jouer
00:26:36le bonnet. Bon, manifestement,
00:26:38ils se sont entendus avant
00:26:40quand même l'interpellation, puisque ça se passe
00:26:42plus d'un mois après la commission des faits.
00:26:44Donc ils ont mis au point une stratégie
00:26:46de ce qu'ils allaient dire à la police.
00:26:48Ils avaient décidé de dire que c'était
00:26:50Marc Raspini qui leur avait confié ses chèques.
00:26:52Pour une raison qu'on ne comprend pas bien,
00:26:54mais il pouvait pas lui-même
00:26:56mettre les chèques
00:26:58sur un compte bancaire et tirer le liquide.
00:27:00Donc il aurait demandé ce service
00:27:02aux Gauvins.
00:27:04Et comme convenu dans le bureau d'à côté,
00:27:06Laurent Gauvin sert la même soupe que son père.
00:27:08À quelques détails près.
00:27:10Laurent Gauvin,
00:27:12dans ses auditions,
00:27:14il cherchait à plus que minimiser son rôle,
00:27:16puisqu'il prétendait
00:27:18connaître Mme Raspini
00:27:20et être en bons termes avec elle,
00:27:22et la considérer comme sa grand-mère.
00:27:24Evidemment, ce n'était pas sa grand-mère.
00:27:26Il ne la connaissait pas et il n'avait aucun rapport avec elle.
00:27:28On va faire 7 auditions
00:27:30de Laurent au cours de sa garde à vue.
00:27:32Quand on va le mettre devant
00:27:34les contradictions de son père,
00:27:36là maintenant c'était plus
00:27:38à cause de Marc Raspini, mais c'était son père
00:27:40qui lui avait donné le chèque.
00:27:42Quand il apprendra que Philippe Dubois est interpellé,
00:27:44la version va encore changer.
00:27:46Ce sera Philippe Dubois qui aura donné
00:27:48les chèques à son père.
00:27:50Finalement,
00:27:52après plusieurs heures de contradictions,
00:27:54après plusieurs heures de garde à vue et une nuit de réflexion,
00:27:56les Govins se mettent à table.
00:27:58Ils diront
00:28:00que Philippe Dubois leur fait très peur,
00:28:02qu'il a beaucoup de charisme,
00:28:04qu'il est violent,
00:28:06que Philippe Dubois leur a proposé de faire un mauvais coup
00:28:08chez la Raspini, mais que bien sûr,
00:28:10eux n'ont pas voulu le faire,
00:28:12qu'ils n'ont bénéficié que des chèques,
00:28:14puisque Dubois leur avait demandé d'encaisser les chèques pour lui.
00:28:16Mais eux ne seront jamais montés
00:28:18dans cette propriété. Ils rejetteront tout sur Philippe Dubois.
00:28:20Mais Philippe Dubois, lui,
00:28:22ne se couche pas.
00:28:24Il nie toute implication.
00:28:26Philippe Dubois, manifestement,
00:28:28a une autre épaisseur
00:28:30que les Govins.
00:28:32C'est un délinquant rompu
00:28:34à la garde à vue,
00:28:36qui a déjà eu
00:28:38plusieurs procédures,
00:28:40qui a déjà fait de la prison.
00:28:42Il est plus solide que les Govins.
00:28:44Il apparaît tout de suite
00:28:46comme étant le leader du trio.
00:28:48Philippe Dubois explique
00:28:50qu'il ne savait même pas que ces chèques existaient.
00:28:52Mais confronté aux écoutes,
00:28:54il est obligé de faire marche arrière.
00:28:56Oui, il était bien au courant
00:28:58pour les chèques, mais il croyait
00:29:00qu'il venait d'un cambriolage.
00:29:02Il charge les Govins en disant
00:29:04que les Govins ont toujours eu,
00:29:06c'était récurrent, des problèmes d'argent.
00:29:08Donc c'est pas étonnant
00:29:10que ce soit eux.
00:29:12Je pense que c'est eux. Donc il charge les Govins.
00:29:14Mais pas de chance pour
00:29:16Philippe Dubois.
00:29:18Un nouvel élément vient le mouiller un peu plus
00:29:20dans cette affaire.
00:29:22En perquisition, on retrouve
00:29:24un ordinateur portable. Le cri du coeur
00:29:26de Philippe Dubois, très gêné de voir ça,
00:29:28tout de suite il dit
00:29:30« Je l'ai acheté à Mme Raspigny,
00:29:323000 francs. »
00:29:34Il doit cogiter, il se rend compte
00:29:36pendant la perquisition
00:29:38que ça va pas.
00:29:40En sortant de l'appartement, il a déjà changé de version.
00:29:42Il dit « Non, en fait, c'est Patrick Govin qui me l'a donnée. »
00:29:44Les gardes à vue se terminent
00:29:46sans que les policiers n'aient de réponse
00:29:48à toutes leurs questions.
00:29:50Sur 48 heures
00:29:52de déclaration,
00:29:54ce ne sera qu'un chassé-croisé
00:29:56de mise en cause les uns des autres
00:29:58sans que l'on puisse y voir
00:30:00très clair à l'issue. En tout cas,
00:30:02tout le monde est bien concerné par ce dossier.
00:30:04Tout le monde est au courant.
00:30:06Tout le monde connaît les Raspigny.
00:30:08Mais personne ne sait où ils sont.
00:30:10Malgré leur dénégation,
00:30:12à l'issue de leur garde à vue,
00:30:14les 4 suspects sont mis en examen pour enlèvement
00:30:16et séquestration.
00:30:18Et écroués à la prison de Nice.
00:30:28Commandant Alain Brunache,
00:30:30vos clients, en fait, ce sont des véritables pieds niquelés.
00:30:32On pourrait les considérer
00:30:34comme tels, sauf que
00:30:36on a affaire à des individus qui, certes,
00:30:38sont relativement
00:30:40basiques au niveau intellectuel,
00:30:42mais ils sont particulièrement
00:30:44brutaux.
00:30:46Ils vont essayer
00:30:48de s'en sortir
00:30:50en mentant systématiquement.
00:30:52Qu'est-ce que vous décidez de faire
00:30:54pour essayer d'avoir
00:30:56quelques informations supplémentaires,
00:30:58puisque vos 4 clients, en fait, ne disent absolument rien ?
00:31:00À ce stade de l'enquête,
00:31:02et face au mutisme
00:31:04des intéressés, des suspects,
00:31:06on décide
00:31:08de faire un appel à témoin
00:31:10par voix de presse.
00:31:12Et à ce moment-là, on fait paraître un article
00:31:14dans Nice Matins
00:31:16pour essayer d'obtenir
00:31:18des témoignages susceptibles
00:31:20d'orienter nos recherches.
00:31:22Le 19 avril
00:31:242002, le nouvel appel à témoin
00:31:26est donc lancé dans Nice Matins.
00:31:28Avec cette fois-ci,
00:31:30non plus les photos d'Evéran Raspini,
00:31:32mais celles des 4 suspects.
00:31:38C'est très fructueux,
00:31:40parce que dès le lendemain,
00:31:42on a 2 témoignages clés,
00:31:442 relations de Patrick Gauvin.
00:31:46Un qui dit avoir vu Patrick Gauvin
00:31:48qui était blanc,
00:31:50liquéfié, et qui s'est confié
00:31:52bizarrement à lui en disant
00:31:54on a tué 2 personnes
00:31:56qu'on a enterrées.
00:32:00C'était un week-end de la fin mars.
00:32:02Le témoin raconte qu'il réparait sa voiture
00:32:04quand Patrick Gauvin s'est approché de lui
00:32:06et il a balancé ça comme ça.
00:32:08Et au moulin,
00:32:10il n'est pas le seul
00:32:12à qui Gauvin a fait des confidences.
00:32:14Il y aura une autre personne aussi
00:32:16qui viendra et qui nous dira
00:32:18Patrick Gauvin, je l'ai rencontré
00:32:20alors qu'il sortait de la banque
00:32:22et là il m'a dit je viens de déposer 17 000 euros
00:32:24je vais avoir de l'argent, j'ai tué la mère et le fils
00:32:26j'ai creusé un gros trou pour les mettre dedans
00:32:28et tout ça, ça s'est passé un dimanche soir.
00:32:30Bon, pensant qu'il plaisantait
00:32:32du coup,
00:32:34il n'a pas trop prêté attention et pareil,
00:32:36quand il verra l'article, il se présentera à notre service et déposera.
00:32:38Patrick Gauvin, en fait, son expression, c'est ça
00:32:40c'est j'ai
00:32:42fait un beaucoup, j'ai gagné 17 000 euros
00:32:44et on a fumé
00:32:46une femme et son fils qu'on a mis dans un trou.
00:32:48C'était horrible
00:32:50sa formulation.
00:32:52Des propos qui font avancer
00:32:54l'enquête des policiers
00:32:56et qui compliquent sérieusement la tâche
00:32:58de l'avocat de Patrick Gauvin.
00:33:00Patrick Gauvin a ça de particulier
00:33:02qu'il se laisse aller
00:33:04dans la rue
00:33:06comme ça, avec des gens
00:33:08qu'il rencontre à peine
00:33:10il se laisse aller à des confidences
00:33:12dont il ne mesure pas la portée
00:33:14ça confine quand même
00:33:16presque à la débilité.
00:33:18Nous sommes en l'état
00:33:20de la disparition d'une mère et de son fils
00:33:22on les cherche et lui
00:33:24il se répand dans son quartier
00:33:26de ce qu'ils ont fumé
00:33:28une mère et son fils pour 17 000 euros.
00:33:30Ça laisse effectivement
00:33:32à ses pantois.
00:33:34Et un troisième témoin
00:33:36une amie de Patrick Gauvin
00:33:38vient encore enfoncer le clou.
00:33:40Nous trouverons notamment
00:33:42une dame à laquelle M. Gauvin
00:33:44avait demandé d'encaisser le chèque.
00:33:46On voit bien qu'il connaissait
00:33:48les problèmes concernant ce chèque
00:33:50et qu'il essayait d'encaisser
00:33:52de façon dissimulée.
00:33:54Avant même la disparition
00:33:56des Raspigny, il se serait ouvert
00:33:58auprès de ce témoin de ce qu'il avait
00:34:00de grands projets
00:34:02des perspectives
00:34:04d'argent à venir
00:34:06un gros coup.
00:34:08Des témoignages
00:34:10accablants pour Patrick Gauvin
00:34:12et qui laissent peu d'espoir
00:34:14sur le sort réservé aux vérans Raspigny.
00:34:16Vu les détails
00:34:18ces détails donnés en disant
00:34:20qu'ils ont été tués sans douter
00:34:22mais qu'ils ont été mis dans un trou
00:34:24maintenant il faut essayer
00:34:26de déterminer où est-ce qu'ils ont été enterrés.
00:34:28Le 30 avril
00:34:302002, les policiers
00:34:32organisent des fouilles pour retrouver
00:34:34les corps de Francine Véran Raspigny
00:34:36et de son fils.
00:34:38Nous allons mettre des moyens un petit peu plus
00:34:40importants à la recherche
00:34:42des corps en se disant que
00:34:44s'ils ont été
00:34:46enlevés et puis
00:34:48assassinés sur place, ils sont peut-être
00:34:50enterrés quelque part
00:34:52à proximité.
00:34:56...
00:34:58...
00:35:00...
00:35:02Patrick Villardris, c'est vous qui dirigez
00:35:04les recherches pour retrouver les corps de Madame
00:35:06Véran Raspigny et de son fils Marc.
00:35:08Alors comment vous allez procéder ?
00:35:10J'ai procédé avec l'aide de mon chien à une recherche
00:35:12de personnes en Sololi au même titre
00:35:14que si ça avait été un immeuble qui était effondré dessus
00:35:16exactement pareil.
00:35:18Comment vous procédez sur le terrain ? Vous le quadrillez le terrain ?
00:35:20Il faut sectoriser, faire un secteur
00:35:22pour ne pas passer à côté
00:35:24des éventuelles victimes. Donc on prend
00:35:26une ligne imaginaire en montant,
00:35:28en laissant le chien aller
00:35:30soit de droite, soit de gauche et lui pendant ce temps
00:35:32il pipe les odeurs qui remontent de la terre
00:35:34et il va faire la différence entre celles
00:35:36qu'il y a, le thym, l'aurier, etc.
00:35:38et une victime qui est ensevelie.
00:35:40Il y a différents types d'odeurs ?
00:35:42Il y a deux types d'odeurs, des odeurs lourdes
00:35:44qui restent sur nous
00:35:46et les odeurs légères qui s'évaporent.
00:35:48Chaque individu dans le monde entier
00:35:50sur les milliards d'individus que nous sommes
00:35:52il n'y en a aucun qui a la même odeur.
00:35:54Donc on cadre le chien
00:35:56sur les molécules légères
00:35:58qui s'évaporent et non pas sur les lourdes
00:36:00qui sont les nôtres et qui font la différence
00:36:02avec les personnes qui sont sur le terrain
00:36:04vivant à l'extérieur, debout
00:36:06qui va croiser. Lui on le mécanise
00:36:08sur des odeurs légères
00:36:10qui sortent de la terre.
00:36:12La difficulté c'est quoi ?
00:36:14C'est l'immensité, 44 étages.
00:36:16C'est très vaste
00:36:18et donc là ça va nous prendre
00:36:20une bonne partie de la journée
00:36:22et je vais être obligé d'utiliser
00:36:24les trois chiens puisque
00:36:26un chien a une autonomie de 20 à 25 minutes
00:36:28après il se fatigue,
00:36:30après il se déconcentre,
00:36:32donc c'est une grosse intervention.
00:36:34Et à la fin de vos recherches sur le terrain
00:36:36qu'est-ce que vous trouvez ?
00:36:38On n'a rien trouvé, aucun indice
00:36:40de quoi que ce soit, de personnes ensevelies.
00:36:42Donc là les policiers vont aller chercher ailleurs ?
00:36:44Ils vont aller chercher ailleurs
00:36:46grâce au travail du chien au départ
00:36:48qui ont déterminé que sur le terrain
00:36:50là où il y avait la maison,
00:36:52il n'y avait strictement rien.
00:36:58Michel-Lys Chahal,
00:37:00vous êtes la juge d'instruction qui a clos ce dossier.
00:37:02Courant mai 2002,
00:37:04Philippe Dubois, Laurent Gauvin
00:37:06et son père Patrick sont mis en examen
00:37:08cette fois pour assassinat. Pourquoi ?
00:37:10Parce qu'en fait les corps n'ont toujours pas été retrouvés.
00:37:12La découverte des corps n'est absolument pas nécessaire
00:37:14pour une mise en examen, ni d'ailleurs
00:37:16pour une déclaration de culpabilité.
00:37:18Même pour un assassinat.
00:37:20Et à cette époque de l'instruction,
00:37:22les indices étaient réunis.
00:37:24C'est-à-dire ?
00:37:26Alors il y avait plusieurs indices.
00:37:28On avait trouvé l'ordinateur de Marc Raspigny
00:37:30au domicile de Philippe Dubois.
00:37:32Il y avait les deux chèques
00:37:34qui avaient été débités du compte de Mme Raspigny
00:37:36et qui avaient été encaissées par les
00:37:38consorts Gauvin.
00:37:40Il y avait les écoutes téléphoniques
00:37:42des suspects.
00:37:44Les déclarations de l'ouvrier agricole
00:37:46de Mme Raspigny
00:37:48qui avait relaté les disputes
00:37:50qu'il y avait eues entre Mme Raspigny
00:37:52et Philippe Dubois.
00:37:54Et les menaces qu'il avait proférées
00:37:56contre Mme Raspigny.
00:37:58Et il y avait surtout les aveux
00:38:00du père Gauvin
00:38:02qui avait déclaré à certains témoins
00:38:04qu'il avait tué deux personnes, une mère et son fils.
00:38:06Ça suffisait pour une mise en examen
00:38:08pour assassinat.
00:38:10Après deux mois de prison, la compagne de Philippe Dubois
00:38:12est remise en liberté sous contrôle judiciaire
00:38:14et elle bénéficiera plus tard d'un non-lieu.
00:38:16Pourquoi ?
00:38:18Dès le départ, elle apparaît comme avoir un rôle
00:38:20très mineur dans l'affaire.
00:38:22De plus, c'était une mère de trois enfants.
00:38:24Il n'y avait pas de nécessité à la maintenir
00:38:26en détention provisoire pour poursuivre l'instruction.
00:38:28Mais manifestement, sur les écoutes téléphoniques,
00:38:30elle était quand même au courant de quelque chose.
00:38:32La seule chose qu'on a pu démontrer,
00:38:34c'était sa connaissance
00:38:36de l'implication de son compagnon
00:38:38dans la disparition de Mme Raspigny.
00:38:40Mais on n'a pas du tout pu démontrer
00:38:42qu'elle ait eu connaissance avant du projet criminel.
00:38:44Donc c'est pour ça qu'elle a bénéficié d'un non-lieu.
00:38:46Parce qu'il n'y avait pas de charge suffisante
00:38:48pour la renvoyer devant la cour d'assises.
00:38:52Retour à l'enquête.
00:38:54Le juge d'instruction veut savoir
00:38:56qui a rempli les deux chèques encaissés par les Gauvins.
00:38:58Et pour cela,
00:39:00il fait appel à un expert graphologue.
00:39:06La première des opérations,
00:39:08c'était de savoir
00:39:10si M. ou Mme Raspigny
00:39:12pouvaient être ou ne pas être
00:39:14les auteurs des écrits.
00:39:16Pour l'écriture, il n'y avait aucune difficulté.
00:39:20C'était évidemment pas eux qui avaient rédigé.
00:39:24Reste maintenant à savoir
00:39:26lequel des trois accusés
00:39:28a imité l'écriture d'Evéran Raspigny.
00:39:30L'expert compare
00:39:32l'écriture de chacun d'entre eux
00:39:34avec celle des chèques
00:39:36remplis par les policiers auprès de la banque.
00:39:40Prenons par exemple
00:39:42un usage particulier,
00:39:44qui est la construction des dates.
00:39:46On voit qu'on a une majuscule de petite taille.
00:39:48Et surtout,
00:39:50la construction du millésime,
00:39:52qui est tout à fait remarquable,
00:39:54avec le premier et le dernier chiffre
00:39:56de très grande taille,
00:39:58avec ces petits zéros étriqués,
00:40:00on a un geste parfaitement identique.
00:40:02C'est un geste qui est évidemment naturel
00:40:04et qui est attribuable
00:40:06puisqu'on le retrouve à l'identique
00:40:08dans l'écriture de Philippe Dubois.
00:40:12Confronté au résultat de cette expertise,
00:40:14Philippe Dubois ne peut plus nier.
00:40:16Il reconnaît que c'est bien lui
00:40:18qui a rédigé les chèques dérobés au Véran Raspigny.
00:40:26Et puis un autre élément scientifique
00:40:28vient l'enfoncer un peu plus.
00:40:30C'est l'expertise génétique
00:40:32du mégot retrouvé dans la maison.
00:40:34Monsieur Dubois a été formel
00:40:36lors de sa guerre d'avu.
00:40:38Il n'a jamais mis les pieds
00:40:40dans l'espace-vie des Vérans Raspigny.
00:40:42Or, l'expertise ADN
00:40:44qui a été effectuée sur le mégot
00:40:46découvert dans l'espace-vie
00:40:48de Marc Raspigny
00:40:50appartient à Philippe Dubois.
00:41:00Madame le juge, vous présentez
00:41:02ces expertises graphologiques
00:41:04à Philippe Dubois.
00:41:06Il ne peut plus nier.
00:41:08Il ne peut plus nier
00:41:10avoir écrit les formules de chèques.
00:41:12Et pourquoi les aurait-il écrites ?
00:41:14Il a plusieurs explications
00:41:16qui ne sont pas très convaincantes.
00:41:18Il dira à un moment
00:41:20qu'il était le seul capable
00:41:22finalement d'écrire ces formules de chèques
00:41:24et d'essayer d'imiter
00:41:26la signature de Madame Raspigny.
00:41:28Et lui, il n'a rien touché ?
00:41:30Il n'a rien touché
00:41:32par l'encaissement de chèques.
00:41:34En revanche, on peut se demander
00:41:36s'ils n'ont pas pris de l'argent liquide
00:41:38puisque les Raspigny avaient
00:41:40énormément de liquide chez eux.
00:41:42Est-ce que vous avez d'autres éléments contre lui ?
00:41:44L'élément le plus important qu'il y a eu
00:41:46contre Philippe Dubois, c'était le mégot
00:41:48avec l'ADN de Philippe Dubois
00:41:50qu'on trouve dans le cabanon
00:41:52dans lequel vivait Marc Raspigny.
00:41:54Et quand on lui demande
00:41:56est-ce que vous voyez la présence de ce mégot
00:41:58avec votre ADN dans la maison de Marc Raspigny,
00:42:00il n'aura pas d'explication.
00:42:02La présence de ce mégot, ça signe
00:42:04l'implication de Philippe Dubois
00:42:06sur les lieux du crime, en tous les cas.
00:42:10Pendant des mois, c'est donc le statut quo.
00:42:12Philippe Dubois et les Gauvins
00:42:14sont derrière les barreaux
00:42:16et les policiers cherchent toujours les corps.
00:42:18Alors,
00:42:20ils ne lâchent pas les trois hommes.
00:42:23Nous surveillons les parloirs
00:42:25des Gauvins, nous surveillons
00:42:27les parloirs de Dubois.
00:42:29Nous avons différentes sources d'informations
00:42:31au sein de la maison d'arrêt et nous apprenons
00:42:33que Laurent Gauvin souhaite se confier
00:42:35et libérer sa conscience dans ce dossier.
00:42:37On apprend qu'une lettre
00:42:39a été rédigée
00:42:41par Laurent Gauvin
00:42:43et serait encore
00:42:45en sa possession. Donc le juge
00:42:47d'instruction nous demande
00:42:49d'aller très rapidement faire une perquisition
00:42:51de la cellule de Laurent Gauvin.
00:42:54Le 28 février 2003,
00:42:56près d'un an après la disparition
00:42:58de Francine et de son fils Marc,
00:43:00les policiers débarquent à la prison
00:43:02de Nice.
00:43:04Il doit savoir pourquoi on vient.
00:43:06De lui-même, il nous remet la lettre.
00:43:08Et dans cette lettre,
00:43:10il reconnaît être l'auteur
00:43:12du double
00:43:14assassinat, mais son but
00:43:16surtout, c'est de dégager Philippe Dubois
00:43:18et de minimiser au maximum
00:43:20le rôle de son père.
00:43:22Ce qui est très important pour lui, c'est de dégager
00:43:24totalement toute implication de Dubois
00:43:26et dire qu'il y a un autre
00:43:28homme, mais dont
00:43:30il ne donnera pas l'identité.
00:43:32Laurent Gauvin refuse
00:43:34de dire qui est son complice.
00:43:36Et il refuse aussi de révéler
00:43:38l'endroit où sont enterrés
00:43:40l'évérant Raspini.
00:43:42J'ai trop peur, dit-il. Trop peur qu'avec
00:43:44la découverte des corps, on puisse
00:43:46retrouver des éléments qui pourraient identifier
00:43:48le troisième homme, c'est-à-dire
00:43:50mon ami qui m'a aidé et qui est
00:43:52tout à fait capable de commettre de lourdes
00:43:54représailles sur ma famille.
00:43:56Mais finalement,
00:43:58une semaine plus tard, il change d'avis.
00:44:00Il accepte de conduire les policiers
00:44:02à l'endroit où il a enseveli les corps.
00:44:08On l'extrait de la maison d'arrêt,
00:44:10avec une grosse équipe d'identité judiciaire
00:44:12parce qu'on se doute qu'on va avoir un gros travail
00:44:14d'identité judiciaire, médecin légiste
00:44:16et il nous amène
00:44:18sur une colline
00:44:20à Nice-Ouest.
00:44:24On arrive sur place avec
00:44:26le magistrat instructeur,
00:44:28le procureur de la République, les collègues
00:44:30et puis l'identité judiciaire et Laurent Gauvin
00:44:32qui
00:44:34nous désigne la plateforme
00:44:36où ont été enterrés les corps.
00:44:38Dans un premier temps, il nous désigne un endroit
00:44:40un peu plus sur la gauche
00:44:42et puis finalement, en se repérant
00:44:44par rapport à la route,
00:44:46il nous désigne cet endroit-là
00:44:48et
00:44:50on creuse avec pelle et pioche.
00:44:54On a commencé en début d'après-midi à 14h.
00:44:56On était un peu sceptiques au départ
00:44:58parce que la terre était très dure
00:45:00et puis à 15h,
00:45:02on n'avait fait que 50 cm
00:45:04et puis à 16h, on n'avait fait que 60 cm,
00:45:06on n'avait toujours pas de corps,
00:45:08au point qu'on se demandait si Laurent Gauvin
00:45:10n'avait pas menti une énième fois
00:45:12qu'il n'avait pas voulu faire un transport
00:45:14et puis nous expliquer que ce n'était pas là, qu'il ne trouvait pas.
00:45:16Mais en l'interrogeant le magistrat,
00:45:18Laurent confirmait que c'était bien là
00:45:20et puis on voyait au fur et à mesure qu'il blanchissait,
00:45:22il n'était pas bien, il transpirait,
00:45:24il ne voulait pas trop rester sur place.
00:45:26Donc avec l'équipe, on s'est dit
00:45:28ça doit être là mais ça doit être profond.
00:45:30Et puis au bout d'un moment, à 70 cm,
00:45:32on voit un pied avec des cerflexes,
00:45:34avec un linge autour.
00:45:36Une vision insupportable
00:45:38pour Laurent Gauvin.
00:45:40On demande au juge d'instruction de retourner dans sa cellule.
00:45:42Pendant ce temps-là,
00:45:44les policiers continuent de creuser.
00:45:46Donc là, ça va durer encore très longtemps.
00:45:48À un moment donné,
00:45:50on verra en fait qu'il y a deux corps tête bêche.
00:45:52On verra la tête de Madame Raspini
00:45:54sous les pieds de Marc Raspini
00:45:56et ils sont vraiment en position en X,
00:45:58comme on dit, et ils sont
00:46:00comment dire,
00:46:02momifiés, on ne voit pas trop
00:46:04dans un premier temps ce qui se passe
00:46:06parce qu'ils sont couverts de terre.
00:46:08On verra seulement les liens cerflexes sur les pieds de Marc Raspini.
00:46:12Les corps sont extraits de la fosse.
00:46:14Sur place,
00:46:16les policiers et le médecin légiste
00:46:18font les premières constatations.
00:46:20On constatera à ce moment-là que Marc Raspini,
00:46:22il a des cerflexes autour des pieds
00:46:24et du scotch qui lui entoure les pieds
00:46:26et surtout qu'il a un baillon
00:46:28autour du visage.
00:46:30Dans un deuxième temps, on verra
00:46:32la mère et ce qui va être
00:46:34frappant, c'est que
00:46:36elle a la main gauche sur son visage
00:46:38elle a le bras comme pour se protéger
00:46:40le visage,
00:46:42elle a un baillon qui est descendu au niveau du menton
00:46:44pas sur la bouche et elle aura la bouche ouverte.
00:46:46Ça c'est quelque chose d'impressionnant.
00:46:48On a comme l'impression
00:46:50qu'elle a été jetée vivante.
00:46:52C'est la première impression qu'on a tous.
00:46:54Donc on se dit, c'est pas possible,
00:46:56ils ont dû la jeter morte.
00:46:58Mais il nous reste à l'esprit quand même
00:47:00qu'ils l'ont peut-être jetée vivante
00:47:02et qu'ils ont jeté le fils mort dessus.
00:47:06Commandant Brunache,
00:47:08après un an d'enquête,
00:47:10vous retrouvez enfin les corps.
00:47:12Quand on retrouve les corps,
00:47:14j'ai le souvenir
00:47:16qui me reste à l'esprit
00:47:18d'une symbolique assez forte
00:47:20puisqu'à ce moment-là,
00:47:22on a Francine Raspini qui est en dessous
00:47:24et on a Marc Raspini,
00:47:26son fils,
00:47:28qui est au-dessus.
00:47:32La maman qui tient son fils
00:47:34dans les bras,
00:47:36sauf que tous les deux sont morts.
00:47:38Les corps sont excessivement dégradés.
00:47:40C'est un moment fort et la symbolique est forte.
00:47:42Vous avez dû creuser pendant des heures
00:47:44et à plusieurs. Qu'est-ce que ça raconte
00:47:46de ce crime ?
00:47:48On a dû creuser pendant plusieurs heures
00:47:50pour mettre à jour
00:47:52ces deux corps
00:47:54dans un sol particulièrement dense
00:47:56qui est fait de ce qu'on appelle du pouding
00:47:58chez nous, c'est-à-dire un mélange
00:48:00très compact de terre et de galets.
00:48:02On a creusé très profondément.
00:48:04Ça valide l'après-méditation
00:48:06et donc il a fallu
00:48:08que les auteurs
00:48:10de cet assassinat
00:48:12fassent ce trou
00:48:14préalablement à leur action.
00:48:16Ça leur a pris aussi certainement
00:48:18beaucoup de temps donc on est en phase
00:48:20d'un assassinat.
00:48:22Dans la foulée,
00:48:24Laurent Gauvin est entendu par le juge d'instruction.
00:48:28La première chose que le magistrat veut savoir
00:48:30c'est pourquoi. Pourquoi
00:48:32s'en est-il pris à cette femme et à son fils ?
00:48:36À la base, il faut quand même préciser que le mobile
00:48:38c'est le vol. Il est clair
00:48:40que dans sa position, il estime
00:48:42que du fait que ces personnes sont toujours
00:48:44chez elles, qu'elles vivent de la façon
00:48:46la plus
00:48:48casanière qu'elles soient, ils n'avaient d'autre
00:48:50choix que de se résoudre à cette évidence
00:48:52c'est-à-dire devoir les éliminer parce qu'ils ne pouvaient
00:48:54pas faire autrement.
00:48:56Le mode de vie de Mme Véran
00:48:58était incompatible avec un casse. En fait, elle était
00:49:00tout le temps au domicile. Et monter
00:49:02un projet de casse semblait quand même
00:49:04vraiment aventurier.
00:49:06Donc en fait, c'était prémédité, il fallait
00:49:08pour piquer le magot, les tuer.
00:49:12Une fois leur décision prise, les trois larons
00:49:14ont préparé le coup. Laurent,
00:49:16son père et le mystérieux
00:49:18troisième homme. Ils ont
00:49:20creusé un trou où ils pourraient
00:49:22ensevelir les cadavres.
00:49:24Il y a eu des repérages qui ont été
00:49:26effectués. Et effectivement, il y a eu des actes
00:49:28préparatoires. Le père a acheté des vêtements,
00:49:30des vêtements militaires
00:49:32face à la caserne
00:49:34de police.
00:49:36Donc il y a eu quand même une certaine
00:49:38préparation.
00:49:40Le dimanche 10 mars 2002,
00:49:42ils sont montés à Guérault dans la soirée
00:49:44avec un fusil,
00:49:46une kalachnikov,
00:49:48des cagoules et des serflex.
00:49:50Pour ne pas se faire repérer,
00:49:52ils ont laissé la voiture en contrebas
00:49:54de la propriété. Laurent
00:49:56explique que son père les a attendus là.
00:49:58Pendant qu'avec son complice,
00:50:00ils montaient à pied à travers les broussailles.
00:50:02Ils sont partis du canal,
00:50:04la partie inférieure.
00:50:06Pour atteindre la résidence principale,
00:50:08ils ont évité les cabanons
00:50:10où des chiens agressifs étaient présents.
00:50:12Ils n'ont pas hésité à faire des détours.
00:50:14Laurent raconte
00:50:16qu'ils ont d'abord attaqué Marc
00:50:18dans la dépendance qu'il habite à côté de chez sa mère.
00:50:20Par surprise,
00:50:22ils l'ont maîtrisé pour le ligoter sur une chaise.
00:50:24Mais pendant qu'il fouillait la pièce
00:50:26avec son complice,
00:50:28Marc a réussi à se libérer
00:50:30et lui a sauté dessus.
00:50:32Une bagarre a commencé.
00:50:34Et rapidement, puisqu'il se défend,
00:50:36qu'il ne se laisse pas faire,
00:50:38et ça c'est tout à fait dans le comportement
00:50:40de Véran Raspini,
00:50:42de ne pas se laisser faire,
00:50:44il va risquer de prendre le dessus.
00:50:46C'est un solide gaillard Marc Raspini.
00:50:48À deux,
00:50:50ils ont finalement réussi à le maîtriser.
00:50:52Puis,
00:50:54ils l'ont traîné jusque dans la baignoire.
00:50:56Là, son complice a ouvert le robinet
00:50:58pendant que Laurent
00:51:00étranglait Marc.
00:51:04Ils vont
00:51:06tremper la tête de Marc Raspini
00:51:08dans l'eau
00:51:10tout en maintenant
00:51:12une pression sur sa gorge
00:51:14ce qui va le faire suffoquer,
00:51:16le faire s'étouffer.
00:51:22Ils vont le
00:51:24mettre dans un drap
00:51:26et ils vont ensuite
00:51:28le porter dans le coffre
00:51:30de la Renault 11
00:51:32qui lui appartient.
00:51:34Ensuite,
00:51:36l'équipe passe à l'attaque
00:51:38de la mer.
00:51:40Nous n'avons pas trop le détail
00:51:42pour la pénétration.
00:51:44Est-ce qu'ils ont récupéré les clés
00:51:46de Marc ? Ce qui semble plus probable.
00:51:48En tout cas, ils nous expliquent qu'ils vont
00:51:50directement sur
00:51:52Mme Raspini qui est couchée dans son lit.
00:51:56Lorsqu'elle ouvre les yeux,
00:51:58Francine Véran Raspini a deux hommes
00:52:00cagoulés au pied de son lit et une arme
00:52:02braquée sur elle.
00:52:04Ils vont essayer de lui extorquer
00:52:06certaines informations quant à savoir
00:52:08où se situent
00:52:10les espèces seulement étribuchantes
00:52:12qu'ils pensent qu'elle dispose
00:52:14à son domicile.
00:52:16Mais elle est têtue, Francine.
00:52:18Elle ne lâche rien. Laurent explique
00:52:20alors qu'ils ont dû fouiller toute la maison.
00:52:24Ils n'ont pas trouvé d'argent.
00:52:26Ils n'ont pas trouvé
00:52:28de magots, de coffres
00:52:30ou quoi que ce soit.
00:52:32Est-ce qu'ils ont tout tenté pour faire avouer
00:52:34Mme Raspini ? On n'en sait rien.
00:52:36Est-ce que Mme Raspini a caché quelque chose ?
00:52:38On n'en sait rien. Est-ce qu'il y avait
00:52:40quelque chose ? On n'en sait rien.
00:52:44Ils embarquent le sac à main.
00:52:46Dans le sac à main, il y a le chéquier.
00:52:48Ils en tireront deux chèques
00:52:50dans un premier temps pour les
00:52:52deux gauvins. On prend
00:52:54rapidement ce qui traîne, qui a de la valeur
00:52:56à leurs yeux, que nous retrouvons.
00:52:58C'est l'ordinateur portable.
00:53:00C'est dire le caractère dérisoire du résultat
00:53:02de leur crime par rapport
00:53:04à ce qu'ils ont commis.
00:53:06C'est-à-dire qu'on va commettre un double crime
00:53:08quelque part pour embarquer un ordinateur,
00:53:10une imprimante, un scanner
00:53:12et un sac à main.
00:53:14Ensuite, ils ont forcé
00:53:16Francine à s'habiller. Ils lui ont
00:53:18expliqué qu'elles avaient enlevé son fils.
00:53:20Si elle voulait le revoir vivant, elle devait
00:53:22les suivre, sans faire d'histoire.
00:53:24La vieille dame
00:53:26a obéi. Ils lui ont couvert la tête
00:53:28avec une tête d'oreiller et l'ont
00:53:30aidée à monter dans la rue 11.
00:53:32Puis, ils ont
00:53:34regagné le canal où Patrick s'était
00:53:36mis dans la voiture. Laurent s'est
00:53:38assis à côté de son père. Le 3e homme,
00:53:40lui, a pris le volant de la Renault 11.
00:53:42Madame Raspini était
00:53:44assise à côté de lui, le cadavre
00:53:46de Marc dans le coffre.
00:53:48Ils ont roulé en se suivant
00:53:50jusqu'au bosquet où ils avaient
00:53:52creusé une tombe.
00:53:54Laurent raconte que là encore, son père
00:53:56les a attendus dans la voiture
00:53:58pendant qu'avec son complice,
00:54:00il conduisait Francine vers la fosse.
00:54:02Madame Raspini,
00:54:04il lui aurait fait monter
00:54:06ce talus, toujours
00:54:08avec sa tête d'oreiller
00:54:10sur la tête, et poussé dans le trou.
00:54:14Là, elle aurait hurlé en disant
00:54:16mais qu'est-ce que vous faites ?
00:54:18Laurent Gauvin affirme qu'il a entendu
00:54:20une détonation
00:54:22et son ami dire
00:54:24ça y est, je l'ai tué.
00:54:26Laurent Gauvin, à ce moment-là,
00:54:28n'a pas souhaité regarder cette scène.
00:54:30C'est retourné
00:54:32et attendu que les choses se passent.
00:54:34Une fois que la mère est dans le trou,
00:54:36ils prennent le corps de Marc Raspini
00:54:38et puis le jettent sur la mère
00:54:40qui est déjà dans le trou.
00:54:42Après avoir rebouché le trou,
00:54:44Laurent Gauvin est rentré
00:54:46au moulin avec son père.
00:54:48Son complice, lui,
00:54:50est allé garer la Renault 11
00:54:52dans le parking de l'Arenas.
00:54:56Il a emporté avec lui le butin
00:54:58les armes et le matériel.
00:55:06Dominique, que nous apprennent
00:55:08les autopsies de Mme Véran Raspini
00:55:10et de son fils ?
00:55:12Ces autopsies ont lieu le 10 mars 2003,
00:55:14c'est-à-dire un an exactement,
00:55:16jour pour jour,
00:55:18après la disparition de Marc Véran Raspini
00:55:20et de sa mère.
00:55:22Il faut absolument vérifier
00:55:24la version donnée par Laurent Gauvin
00:55:26parce qu'il y a des choses
00:55:28qui ne sont pas claires.
00:55:30Pour Marc Véran Raspini,
00:55:32il a des lésions au visage,
00:55:34c'est-à-dire qu'il a été frappé.
00:55:36Il a un baillon adhésif sur la bouche.
00:55:38Il a un cerflexe,
00:55:40ce sont des liens en plastique,
00:55:42autour des jambes.
00:55:44Il est sans doute mort étranglé
00:55:46pour deux raisons.
00:55:48D'abord, parce qu'il y a
00:55:50une infiltration sanglante
00:55:52dans les muscles de la trachée,
00:55:54ça correspond à un étranglement.
00:55:56Quand on positionne des mains comme ça,
00:55:58ça correspond à un étranglement.
00:56:00Laurent Gauvin dit que Marc Véran Raspini
00:56:02est mort noyé,
00:56:04mais on ne peut pas le vérifier
00:56:06car le corps est tellement abîmé
00:56:08que l'autopsie ne peut pas
00:56:10donner de précision là-dessus.
00:56:12Et sa mère, Francine,
00:56:14a également des lésions au visage.
00:56:16Elle a du ruban adhésif autour du cou.
00:56:18Laurent Gauvin dit qu'elle a été tuée par balle,
00:56:20que le mystérieux homme
00:56:22était en haut de la fosse
00:56:24et qu'il a tiré sur elle.
00:56:26A l'autopsie, on va chercher un projectile
00:56:28dans son corps, on n'en trouve pas.
00:56:30On va chercher des orifices de pénétration
00:56:32parce que la balle aurait pu traverser
00:56:34le corps de Mme Véran Raspini
00:56:36et aller se ficher dans le sol.
00:56:38On ne trouve pas d'orifices d'entrée.
00:56:40Les enquêteurs vont aller jusqu'à
00:56:42passer le détecteur de métaux
00:56:44au fond de la fosse où on ne trouvera pas
00:56:46non plus le projectile.
00:56:48La vérité, c'est que Mme Véran Raspini
00:56:50a été tuée par suffocation.
00:56:52Donc ça ne correspond pas à ce que raconte Laurent Gauvin.
00:56:54Très vraisemblablement, elle a été poussée
00:56:56dans ce trou. On a jeté le corps
00:56:58de son fils mort au-dessus d'elle
00:57:00et on l'a recouverte de terre
00:57:02encore vivante. Elle était ensevelie,
00:57:04vivante.
00:57:06Laurent Gauvin a avoué.
00:57:08Mais pour les policiers,
00:57:10ces aveux sont à prendre avec des pincettes
00:57:12car beaucoup de choses ne collent pas.
00:57:14C'est une propriété
00:57:16où il y a beaucoup de chiens.
00:57:18C'était de nuit.
00:57:20Lui ne connaissait pas la propriété.
00:57:22Comment il aurait pu monter
00:57:24alors que ça représentait des centaines
00:57:26de mètres jusqu'à la propriété
00:57:28où étaient Mme Raspini
00:57:30et son fils sans que les chiens
00:57:32abouent.
00:57:34Pour les policiers, cela prouve bien
00:57:36que le mystérieux troisième homme
00:57:38n'est pas si mystérieux.
00:57:40Manifestement, son complice
00:57:42était quelqu'un qui connaissait parfaitement la propriété.
00:57:44Et c'était le cas de Philippe Dubois
00:57:46le propriétaire de cette propriété.
00:57:48Et puis,
00:57:50le récit de Laurent n'est pas cohérent
00:57:52avec la personnalité des victimes.
00:57:56Là aussi, quand on connaît Mme Raspini,
00:57:58il n'est pas possible qu'elle soit réveillée
00:58:00par deux individus cagoulés de nuit
00:58:02et que, gentiment, elle accepte de les suivre.
00:58:04Il a fallu, là aussi, faire preuve de violence.
00:58:06Ce n'était pas quelqu'un
00:58:08à se laisser faire et à se laisser
00:58:10emmener.
00:58:12Quant au déroulement de la soirée,
00:58:14tel que le raconte Laurent,
00:58:16il n'est pas plus crédible.
00:58:20Laurent serait monté avec son père
00:58:22et, par contre, le deuxième homme
00:58:24serait resté seul
00:58:26avec le macchabée dans le coffre
00:58:28et Mme Raspini
00:58:30avec son oreiller sur la tête
00:58:32qui serait restée bien docilement passive
00:58:34alors que ce n'était pas du tout
00:58:36le tempérament de cette femme-là.
00:58:38Donc ce n'est certainement pas la vérité.
00:58:40Laurent Gauvin a aussi prétendu
00:58:42que son père n'avait assisté à rien.
00:58:44Ni au crime, ni à l'enfouissement des corps.
00:58:48Pendant tout ce temps-là,
00:58:50il dormait dans la voiture.
00:58:52Ce sera le rôle de Patrick Gauvin,
00:58:54c'est de dormir auprès du canal de Guérault
00:58:56puis dormir avenue Sainte-Marguerite.
00:58:58C'est une belle soirée.
00:59:00On ne comprend pas du tout
00:59:02pourquoi il aurait été emmené en promenade ce soir-là
00:59:04pour rester dans la voiture et ne rien faire.
00:59:06Donc évidemment, ce n'est pas crédible
00:59:08mais il a participé activement à l'assassinat.
00:59:10Donc probablement que c'est Dubois et Laurent
00:59:12qui ont tué le fils.
00:59:18Patrick Gauvin faisait le guet
00:59:20et empêchait que,
00:59:22puisque c'est quand même un terrain
00:59:24où il y avait des locataires,
00:59:26veiller à ce qu'il n'y ait pas
00:59:28un témoin de leurs agissements.
00:59:32Et bien que Laurent Gauvin ait tout fait
00:59:34pour mettre Philippe Dubois hors de cause,
00:59:36les policiers en reviennent toujours à lui.
00:59:40Laurent Gauvin dit que c'est son complice
00:59:42qui a récupéré le matériel
00:59:44et puis également l'ordinateur.
00:59:46Et donc Laurent dit que c'est le complice,
00:59:48le X, qui a récupéré ça
00:59:50et on retrouve comme par hasard
00:59:52l'ordinateur chez Philippe Dubois.
00:59:54Donc il n'y a aucun doute que le X,
00:59:56en fait, c'est Philippe Dubois.
00:59:58...
01:00:04Commandant Brunage, ce qui est évident,
01:00:06c'est que Laurent Gauvin
01:00:08veut inocenter Dubois et son père.
01:00:10Son père, ça peut se comprendre, mais pourquoi Dubois ?
01:00:12Très probablement parce que
01:00:14Dubois a un ascendant très fort
01:00:16sur les Gauvins,
01:00:18sur Laurent et sur Patrick
01:00:20et il leur inspire de la crainte,
01:00:22y compris en maison d'arrêt.
01:00:24A ce moment-là, tous ces individus sont en prison
01:00:26et c'est Philippe Dubois
01:00:28qui mène la danse
01:00:30et c'est lui qui décide
01:00:32depuis sa prison
01:00:34qui va faire quoi et à quel moment.
01:00:36Vous n'avez aucun doute
01:00:38sur la participation de Philippe Dubois
01:00:40à l'assassinat ?
01:00:42Il a né le concepteur,
01:00:44il a né l'organisateur
01:00:46et il a né la cheville ouvrière.
01:00:48Vous avez des preuves matérielles ?
01:00:50En faisant des investigations téléphoniques,
01:00:52on va s'apercevoir que
01:00:54le sort de l'homicide,
01:00:56le bornage de son téléphone
01:00:58va accrocher la zone
01:01:00d'enfouissement.
01:01:02En plus, bien entendu, il connaissait les lieux
01:01:04parfaitement. Il avait fait part
01:01:06d'un projet criminel
01:01:08au régisseur à Camel.
01:01:10Donc tous ces éléments
01:01:12font de lui
01:01:14le concepteur
01:01:16et l'acteur principal de ces assassinats.
01:01:18Et Patrick Gauvin, le père, est-ce qu'il est crédible
01:01:20dans son rôle de touriste sur les lieux ?
01:01:22Les victimes,
01:01:24Marc et Francine Raspigny,
01:01:26étaient solides, costauds,
01:01:28donc il fallait les neutraliser
01:01:30de façon physique.
01:01:32Marc a été neutralisé le premier,
01:01:34mais il s'est rebellé.
01:01:36Quant à Francine Raspigny,
01:01:38elle était réputée
01:01:40comme une forte femme,
01:01:42une femme de tête,
01:01:44et il fallait également être à plusieurs
01:01:46pour la neutraliser.
01:01:48Et Patrick Gauvin a participé
01:01:50très activement à cet assassinat.
01:01:58À ce stade, le juge d'instruction
01:02:00se penche sur le parcours de ces hommes
01:02:02pour comprendre comment ils en sont
01:02:04arrivés là, être capables d'enterrer
01:02:06une vieille dame vivante.
01:02:08Le père, Patrick Gauvin,
01:02:10est né le 18 octobre 1950
01:02:12à Nancy.
01:02:14Il a grandi à quelques kilomètres de là,
01:02:16à Lunéville, dans un milieu modeste.
01:02:18Patrick Gauvin
01:02:20est un enfant d'une famille
01:02:22nombreuse.
01:02:24Et en plus,
01:02:26il ne connaît pas son père biologique.
01:02:28La maman
01:02:30ne l'a pratiquement pas élevé.
01:02:32Et Patrick, comme sa soeur,
01:02:34d'ailleurs, sa soeur aînée, ont été élevés
01:02:36par les grands-parents.
01:02:38Le petit Patrick
01:02:40n'est pas doué à l'école.
01:02:42Il a du mal à apprendre à écrire.
01:02:45Après le certificat d'études,
01:02:47il passe à un CAP
01:02:49de boucher charcutier.
01:02:51Mais il ne réussit
01:02:53que l'examen pratique.
01:02:55Il a vite changé d'emploi.
01:02:57Puis il a fait plusieurs petits boulots,
01:02:59finalement, toujours en passant
01:03:01par des agences de travail temporaires.
01:03:03Il a travaillé dans le bâtiment.
01:03:05Il a été manouvrier.
01:03:07Enfin, on peut dire qu'il a manqué de stabilité.
01:03:09C'est évident.
01:03:11En 1974,
01:03:13Patrick rencontre Gisèle.
01:03:15Il a 24 ans. Elle a déjà deux enfants.
01:03:19Il est tombé amoureux.
01:03:21Et c'était une de ses premières conquêtes.
01:03:23Mais Gisèle était déjà mariée.
01:03:25Et elle avait un compagnon qui était...
01:03:27C'était un braqueur.
01:03:29Un braqueur, un homme violent,
01:03:31qui n'a pas accepté que sa compagne le quitte pour un autre
01:03:33et qui, donc, a continué à la harceler,
01:03:35à la menacer de mort.
01:03:37Ce qui a entraîné le départ de Gisèle
01:03:39dans le Midi.
01:03:42Patrick et Gisèle s'installent au Moulin.
01:03:44Ensemble, ils ont deux fils,
01:03:46dont Laurent.
01:03:48Mais en 1991,
01:03:50Gisèle le quitte
01:03:52parce qu'il est trop laxiste avec les gosses
01:03:54et qu'il ne pense qu'à lui
01:03:56et à l'alcool.
01:03:58C'est quelqu'un qui n'a pas de caractère.
01:04:00C'est une évidence.
01:04:02C'est pas lui faire offense
01:04:04que de dire que c'est un suiveur,
01:04:06c'est pas un meneur.
01:04:08Après cette séparation,
01:04:11Patrick Gauvin parvient à décrocher un nouveau boulot.
01:04:13Il entre à l'OPAM
01:04:15comme gardien d'immeuble
01:04:17et c'est là qu'il dit
01:04:19j'ai atteint le sommet de ma carrière.
01:04:21J'étais au sommet avec une certaine fierté.
01:04:23Je me souviens à ce moment-là.
01:04:25Pour lui, il avait vraiment atteint un poste important.
01:04:27Quelques temps plus tard,
01:04:29Laurent vient habiter avec lui
01:04:31dans sa loge de gardien.
01:04:33Le gamin non plus n'a pas eu une enfance facile.
01:04:35Il y a eu une enquête sociale
01:04:37qui a demandé d'ailleurs
01:04:40par le principal du collège
01:04:42et il s'avère
01:04:44que la maman se livrerait
01:04:46à la boisson.
01:04:48Elle a le RMI
01:04:50donc elle n'a pas beaucoup de ressources.
01:04:52Ce RMI, elle le consacre plus
01:04:54à son intérêt personnel
01:04:56qu'à celui de Laurent
01:04:58et finalement, Laurent est livré à lui-même.
01:05:00Il est livré à lui-même au point que
01:05:02on le voit laver des voitures sur la voie publique
01:05:04pour se débrouiller,
01:05:06pour pouvoir s'alimenter même.
01:05:09Laurent est définitivement renvoyé de l'école
01:05:11à 16 ans.
01:05:13Il entre dans la vie active sans y être préparé.
01:05:15Son parcours professionnel,
01:05:17il est assez superficiel
01:05:19là aussi, donc il n'y a pas de formation professionnelle.
01:05:21Tout au moins, on lui en propose une
01:05:23qu'il ne fait pas parce qu'il trouve que c'est trop difficile
01:05:25et il l'abandonne.
01:05:27Côté cœur,
01:05:29Laurent a 19 ans lorsqu'il croise
01:05:31le grand amour.
01:05:33Laurent, il rencontre
01:05:35une jeune niçoise, Cindy,
01:05:37dont il tombe amoureux.
01:05:39Apparemment, ça se passe bien.
01:05:41Le couple décide de se mettre en ménage.
01:05:43Et très vite,
01:05:45Cindy met au monde une petite fille.
01:05:49Et puis assez rapidement,
01:05:51les relations du couple se dégradent
01:05:53et donc
01:05:55la séparation va mal se passer.
01:05:57Il va être menaçant.
01:05:59C'est la fin de l'histoire.
01:06:01Cindy dépose plainte.
01:06:03Laurent l'a menacée de mort.
01:06:07C'est la fin de l'histoire.
01:06:11Dominique, que racontent
01:06:13les casiers judiciaires des trois accusés ?
01:06:15Déjà, ils ont tous les trois un casier judiciaire frédéricain.
01:06:17Laurent Gauvin, le fils,
01:06:19condamné en 1998 pour vol aggravé,
01:06:21tentative de vol aggravé, détention
01:06:23d'armes de sixième catégorie.
01:06:25Son père, Patrick,
01:06:27il est condamné, lui, en 1993,
01:06:29pour violence volontaire avec armes.
01:06:31Il est allé au collège,
01:06:33régler ses comptes avec un prof
01:06:35qui avait renvoyé son fils
01:06:37parce que son fils se tenait mal en gymnastique.
01:06:39Donc le père y est allé avec un couteau
01:06:41pour le menacer.
01:06:43Et Dubois, il joue dans la même catégorie ?
01:06:45Dubois, c'est catégorie supérieure, lui.
01:06:47Il est un casier conséquent,
01:06:49multicondamné. Il a commencé par
01:06:51des vols de cyclomoteurs, de motos,
01:06:53de voitures, coups et blessures volontaires
01:06:55sur sa voisine, qui était aussi son amie,
01:06:57violences et menaces,
01:06:59menaces de mort sur son père,
01:07:01trafic de stupéfiants,
01:07:03on parle d'héroïne,
01:07:05et proxénétisme.
01:07:07Lui, il a fait l'objet
01:07:09de tout un tas de procédures,
01:07:11il a fait de la prison,
01:07:13il a commencé très tôt,
01:07:15et c'est aussi un homme qui n'a pas eu
01:07:17une enfance tranquille.
01:07:19Philippe Dubois est né à Nice
01:07:21le 19 août 1968.
01:07:23Il a vécu une enfance heureuse
01:07:25et reçu une bonne éducation.
01:07:27Du moins, c'est ce qu'il dit.
01:07:30Il semble que son enfance
01:07:32ait été peut-être
01:07:34un peu chaotique,
01:07:36avec en tous les cas
01:07:38une forme d'incompréhension
01:07:40assez précoce,
01:07:42entre notamment son père et lui.
01:07:44Il a une sœur, Philippe Dubois,
01:07:46et cette sœur, elle a des problèmes,
01:07:48elle est toxicomane,
01:07:50et donc elle va attraper le sida,
01:07:52et elle est handicapée.
01:07:54Donc c'est un souci majeur pour la mère,
01:07:56qui va plonger dans la dépression
01:07:58nerveuse.
01:08:00Philippe connaît vite des problèmes
01:08:02avec l'autorité.
01:08:04Il n'y a qu'au foot
01:08:06qu'il respecte les règles.
01:08:08Défenseur dans un club amateur,
01:08:10il est même plutôt bon.
01:08:12Mais côté études,
01:08:14c'est pas brillant.
01:08:16Il n'était pas promis
01:08:18au prix Nobel de physique-chimie,
01:08:20et il était apparemment
01:08:22un peu réfractaire
01:08:24à l'autorité,
01:08:26à partir de l'adolescence,
01:08:28à peu près à l'âge de 14 ans.
01:08:30Et à partir de là,
01:08:32ses fréquentations,
01:08:34notamment au lycée professionnel
01:08:36où il exerçait,
01:08:38où il était plutôt élève,
01:08:40ont fait qu'il a été tenté
01:08:42par des camarades,
01:08:44et surtout pour le gain
01:08:46de l'argent facile.
01:08:48Philippe Dubois enchaîne
01:08:50les bêtises,
01:08:52les séjours en prison
01:08:54et les opérations à Nice,
01:08:56mais chaque fois, c'est un échec.
01:08:58Et puis l'homme a une réputation
01:09:00qui lui colle à la peau.
01:09:02C'est quelqu'un de violent.
01:09:04Il est donc décrit comme violent
01:09:06effectivement par tout l'environnement
01:09:08professionnel.
01:09:10Il est décrit comme violent
01:09:12par des voisins de l'immeuble
01:09:14où il habitait.
01:09:16Il est décrit comme violent à l'époque
01:09:18où il était au lycée,
01:09:20puisqu'il était très indiscipliné.
01:09:22Le tort de Philippe Dubois,
01:09:24c'est d'avoir voulu se faire
01:09:26trop respecter dans le quartier.
01:09:28Il passait pour un petit caïd,
01:09:30et peut-être que les enquêteurs aussi
01:09:32quelque part se sont dit
01:09:34c'est un caïd de ce quartier,
01:09:36tout le monde le craint.
01:09:38Un caïd dans le quartier,
01:09:40alors qu'à la maison, Philippe est un bon mari
01:09:42et un bon père.
01:09:44A l'époque, il vit avec Geneviève
01:09:46et leurs trois enfants.
01:09:48Ils se sont rencontrés, ils étaient jeunes.
01:09:50Philippe avait 19-20 ans
01:09:52quand il a rencontré Geneviève.
01:09:54Ils se sont mis en ménage.
01:09:56C'est le seul point de stabilité
01:09:58qui ressort, c'est la seule chose
01:10:00qui a l'air d'être sincère,
01:10:02c'est cet attachement à ses enfants
01:10:04et à cette femme.
01:10:10Voilà donc les hommes auxquels on a affaire,
01:10:12des pieds nickelés qui s'improvisent meurtriers.
01:10:14Reste à savoir quel est le rôle exact
01:10:16des uns et des autres.
01:10:18Le juge d'instruction organise une reconstitution.
01:10:26Le 20 novembre 2003,
01:10:28près de deux ans après la mort de Francine
01:10:30et de Marc Véran-Raspini,
01:10:32tout le monde se retrouve sur les lieux.
01:10:38Un gros service d'ordre
01:10:40va être mis en place
01:10:42et on va se munir
01:10:44de cagoules, de fusils
01:10:46pour qu'ils nous expliquent comment ça s'est passé.
01:10:48La reconstitution
01:10:50commence sur la propriété colline de Guéraud.
01:10:52Le cortège
01:10:54suit pas à pas Laurent Gauvin
01:10:56qui, froidement, refait
01:10:58les gestes qu'il a accomplis ce soir-là.
01:11:00Laurent Gauvin joue totalement de jeu
01:11:02et il joue son rôle, à savoir
01:11:04il étrangle Marc Raspini,
01:11:06il bascule
01:11:08dans la baignoire.
01:11:10Son complice fait couler de l'eau
01:11:12et en fait il meurt
01:11:14étranglé et noyau.
01:11:16Mais Laurent Gauvin
01:11:18refuse toujours de dire qui est son complice,
01:11:20le fameux
01:11:22troisième homme.
01:11:24Il maintient que ce n'est pas Philippe Dubois
01:11:26et Philippe Dubois martèle la même chose.
01:11:28Il a compris
01:11:30que quelque part il se passait
01:11:32quelque chose de grave et qu'il n'avait
01:11:34rien à voir dans ce dossier.
01:11:36Alors il a carrément dit je ne veux pas participer.
01:11:40Quant à Patrick Gauvin,
01:11:42il s'entête à minimiser son rôle.
01:11:46Mais la reconstitution
01:11:48démolit sa version
01:11:50et confirme ce que les policiers
01:11:52pensaient déjà.
01:11:54On s'apercevra
01:11:56que Marc Raspini était quelqu'un
01:11:58de costaud, que deux hommes ça ne suffit pas.
01:12:00Il manque le troisième homme pour faire
01:12:02le gai, pour amener les serfex
01:12:04qu'on retrouvera sur les pieds de Marc Raspini
01:12:06et donc forcément
01:12:08le trio est constitué.
01:12:10La reconstitution continue
01:12:12avec l'agression de Francine
01:12:14et l'étape morbide
01:12:16de la fosse.
01:12:18Là encore, la version de Laurent
01:12:20ne tient pas.
01:12:22C'est une petite butte
01:12:24mais c'est difficile.
01:12:26Un corps d'un homme de 90-100 kilos
01:12:28c'est quelque chose qui est difficile
01:12:30à manipuler et on n'est pas
01:12:32trop de trois pour pouvoir
01:12:34effectuer le transport.
01:12:36Nous aurons toujours
01:12:38un troisième homme qui est indispensable
01:12:40à la réalisation
01:12:42de l'agression et ce troisième
01:12:44homme, chaque fois qu'il est décrit
01:12:46il n'y a pas assez d'imagination
01:12:48pour que ce soit quelqu'un d'autre que Philippe Dubois.
01:12:50Philippe Dubois qui connaît les lieux,
01:12:52qui connaît les victimes,
01:12:54qui n'a aucune possibilité de laisser les victimes
01:12:56vivantes puisqu'ils risquent
01:12:58d'être reconnus.
01:13:06Les policiers n'ont aucun doute,
01:13:08Philippe Dubois est dans le coup.
01:13:10La tâche sera rude pour la défense
01:13:12mais depuis sa cellule et avec la nouvelle femme
01:13:14qu'il vient d'épouser en prison,
01:13:16Dubois se défend pied à pied.
01:13:18Philippe Dubois, c'est quelqu'un qui
01:13:20clame son innocence depuis son interpellation
01:13:22le 16 avril 2002.
01:13:24Il est arrêté
01:13:26dans une station de service près de Nice.
01:13:28Il ne cesse, à partir de ce moment-là,
01:13:30de clamer son innocence,
01:13:32de se défendre,
01:13:34et de dire que ce n'est pas lui.
01:13:36Pour sa nouvelle épouse et ses avocats,
01:13:38tous les éléments que l'accusation présente
01:13:40à charge contre Philippe Dubois
01:13:42peuvent être retournés.
01:13:44Le mégot avec son ADN, par exemple,
01:13:46eh bien, quelqu'un aurait très bien pu
01:13:48l'apporter.
01:13:50Le mégot qui aurait été oublié sur les lieux,
01:13:52comme si quelqu'un qui connaît déjà la prison
01:13:54ne sait pas que sur le mégot
01:13:56on peut trouver de l'ADN,
01:13:58et qu'avec l'ADN on peut remonter
01:14:00à fortiori,
01:14:02à quelqu'un qui a déjà été condamné.
01:14:04Quant aux chèques dérobés
01:14:06au véran Raspini,
01:14:08si Philippe Dubois les a remplis,
01:14:10c'était uniquement pour rendre service
01:14:12à Patrick Gobin, qui n'écrit pas très bien.
01:14:16Philippe Dubois a effectivement
01:14:18renseigné les chèques,
01:14:20avec une naïveté, une imbécilité,
01:14:22permettez-moi l'expression déroutante,
01:14:24mais si Philippe a rempli ses chèques,
01:14:26qu'il a fait de sa plus belle écriture,
01:14:28qu'il n'a pas fait plus attention que ça,
01:14:30et qu'il a accepté du premier coup,
01:14:32ça prouve bien qu'il n'était pas coupable.
01:14:36Ça paraît évident.
01:14:40Quant à l'ordinateur de Marc Raspini
01:14:42retrouvé chez lui...
01:14:44Cet ordinateur, c'est un ordinateur
01:14:46qu'il a reçu en cadeau de la part de Patrick Gobin,
01:14:48lorsque ce dernier lui a demandé
01:14:50de renseigner les chèques qui provenaient
01:14:52d'un crime, mais dont Philippe Dubois
01:14:54n'avait bien évidemment aucune connaissance,
01:14:56puisqu'il pensait que les chèques provenaient
01:14:58des chèques faits chez Raspini.
01:15:00En tout état de cause,
01:15:02Philippe Dubois aurait eu le temps,
01:15:04entre la révélation de la disparition
01:15:06de Mme Raspini
01:15:08et de son fils,
01:15:10et son interpellation, et la perquisition
01:15:12qui a été effectuée à son domicile,
01:15:14de faire disparaître
01:15:16cet ordinateur.
01:15:18Et la description que les policiers
01:15:20font de Philippe n'est pas cohérente.
01:15:24L'accusation dit que Philippe Dubois
01:15:26est quelqu'un d'intelligent et de manipulateur,
01:15:28et d'un autre côté,
01:15:30l'accusation présente
01:15:32également comme élément d'accusation
01:15:34des choses qui participeraient
01:15:36d'un amateurisme
01:15:38qui semble à l'inverse
01:15:40de la description qui a été faite
01:15:42de Philippe Dubois.
01:15:44Un manipulateur, donc c'est bête ou intelligent,
01:15:46pour les enquêteurs,
01:15:48Philippe Dubois, il est bête et intelligent,
01:15:50il est les deux. C'est-à-dire qu'à midi,
01:15:52il est intelligent, à trois heures, il est bête.
01:15:54C'est un peu qu'on pioche,
01:15:56on fait comme on a envie, mais comme ça, on est sûr
01:15:58qu'il restera derrière les barreaux.
01:16:02La défense n'en démord pas.
01:16:04Philippe Dubois n'a rien à voir avec les deux assassinats.
01:16:08Quatre ans après les faits,
01:16:10le procès s'ouvre le 19 juin 2006 à Nice,
01:16:12devant la cour d'assises des Alpes-Maritimes.
01:16:14Les accusés comparaissent
01:16:16tous les trois pour vol et assassinat.
01:16:20Ce procès s'ouvre dans une ambiance
01:16:22difficile,
01:16:24lourde. On sent déjà
01:16:26que
01:16:28la partie est jouée
01:16:30et qu'elle est pratiquement perdue.
01:16:32Et pourtant, ce n'est pas
01:16:34la partie civile qui complique la tâche
01:16:36de la défense.
01:16:38On pourrait avoir l'impression
01:16:40d'assister à un procès particulièrement lourd
01:16:42en émotions, lourd
01:16:44en sentiments, tellement
01:16:46nous sommes dans l'horreur
01:16:48et dans l'inimaginable.
01:16:50Mais paradoxalement,
01:16:52dans ce dossier, on a eu
01:16:54une espèce de ribambelle de victimes
01:16:56qui était parente
01:16:58au xième degré et qui venaient
01:17:00manifestement récupérer un titre de justice
01:17:02pour pouvoir hériter des personnes décédées.
01:17:04Ce qui fait qu'il n'y avait pas
01:17:06la lourdeur qu'on pouvait imaginer dans le cadre
01:17:08de ce dossier.
01:17:10Ni pleurs, ni cris,
01:17:12ni dans la salle, ni dans le box.
01:17:14Laurent Gauvin est toujours le seul
01:17:16à reconnaître les faits, mais sans aucune émotion.
01:17:18Laurent Gauvin est
01:17:20quelqu'un d'apparence très froide,
01:17:22qui vient, il sait qu'il va prendre
01:17:24cher, il sait qu'il va être sanctionné sévèrement.
01:17:26Donc il vient,
01:17:28il vient pour assumer.
01:17:30Patrick Gauvin, le père,
01:17:32n'assume pas vraiment. Il reconnaît toujours
01:17:34avoir participé à l'expédition,
01:17:36mais de loin. Et devant la cour,
01:17:38il fait profil bas.
01:17:40Patrick Gauvin, c'est pas la grosse personnalité
01:17:42du dossier. C'est le faible.
01:17:44C'est celui à qui l'on demande
01:17:46de repeindre les murs en rouge, il va les repeindre en rouge.
01:17:48Il ne cherchera pas trop à comprendre.
01:17:50On a eu l'impression d'un
01:17:52papy un peu paumé.
01:17:54On se demandait un peu ce qu'il faisait là. C'était un peu un chien
01:17:56dans un jeu de qui qui assistait
01:17:58à quelque chose qui lui dépassait manifestement.
01:18:00Quant à Philippe Dubois,
01:18:02il continue de crier son innocence.
01:18:04Il n'a pas tué
01:18:06le véran Raspini. Le problème,
01:18:08c'est qu'il passe pour le chef de la bande.
01:18:12Je vais être franc, il n'a pas de mal.
01:18:14Parce que vu le niveau
01:18:16entre guillemets des deux autres,
01:18:18Philippe Dubois n'a vraiment pas de mal
01:18:20à se retrouver quelque part
01:18:22celui qui est à l'ascendance de les autres.
01:18:24Ça n'en fait pas forcément un assassin.
01:18:26Philippe Dubois passe effectivement pour le cerveau de la bande.
01:18:28Excusez-moi,
01:18:30mais quand on voit la façon dont
01:18:32cette expédition a été accomplie,
01:18:34j'ai du mal à trouver du cerveau
01:18:36là-dedans. J'ai du mal à trouver
01:18:38une réflexion intellectuelle haut de gamme
01:18:40pour venir parvenir au crime parfait.
01:18:42Parce qu'on est très, très, très loin
01:18:44du crime parfait.
01:18:46Les débats se déroulent calmement
01:18:48jusqu'au quatrième jour du procès.
01:18:50Là, coup de théâtre.
01:18:52Laurent Gauvin veut
01:18:54s'entretenir avec son avocat
01:18:56avant de faire des révélations.
01:18:58La présidente suspend l'audience.
01:19:00Tout le monde se retire.
01:19:02Et au bout de quelques minutes,
01:19:04tout le monde revient
01:19:06et Laurent Gauvin se lève.
01:19:08Et devant
01:19:10tout le monde, et face à la cour,
01:19:12crie ouvertement
01:19:16Philippe Dubois n'a rien à voir dans ce dossier.
01:19:18Celui qui était avec nous,
01:19:20c'est monsieur. Et du doigt,
01:19:22il nous montre Camelle le jardinier.
01:19:26Et là, un
01:19:28roi,
01:19:30le public,
01:19:32moi je vois les jurés se regarder
01:19:34et la présidente
01:19:36sourire.
01:19:38Mais le pauvre Camelle, lui,
01:19:40ne sourit pas.
01:19:42C'est pas moi, j'ai rien fait.
01:19:44Si j'étais là-dedans,
01:19:46pourquoi j'ai laissé mon adresse ?
01:19:48Pourquoi j'ai laissé mon numéro de téléphone ?
01:19:50Pourquoi j'ai resté à l'endroit
01:19:52quand moi j'en ai pas les papiers
01:19:54et je me suis échappé ?
01:19:56Mais moi j'ai rien fait.
01:19:58Et fort heureusement pour lui,
01:20:00ce revirement de dernière minute
01:20:02n'est pas pris au sérieux.
01:20:04Personne n'y croit.
01:20:06C'est un coup de vent,
01:20:08un coup de bluff
01:20:10qui, semble-t-il,
01:20:12n'a vraiment pas marché.
01:20:14On avait l'impression que cette accusation d'un nouveau jardinier maghrébin
01:20:16était un petit peu une répétition
01:20:18des grosses affaires de la Côte d'Azur.
01:20:20Cet événement a eu l'effet inverse
01:20:22parce qu'effectivement, ça aurait pu
01:20:24dédouaner Philippe Dubois,
01:20:26mais ça n'a fait qu'aggraver son cas
01:20:28parce qu'il avait tellement
01:20:30d'ascendants sur les autres
01:20:32que les jurés n'ont pas pu ne pas penser
01:20:34que c'est lui qui a dicté
01:20:36à Laurent Gauvin de dire ça.
01:20:38Les avocats de Philippe Dubois
01:20:40vont pourtant s'engouffrer dans la brèche
01:20:42et plaider l'acquittement
01:20:44au nom du doute.
01:20:46Mais ça ne suffit pas à faire tanguer les jurés.
01:20:48Le 23 juin 2006,
01:20:50ils reconnaissent les trois hommes coupables d'assassinat
01:20:52et les condamnent à la réclusion criminelle
01:20:54à perpétuité.
01:20:56Dubois et les Gauvins font aussitôt appel.
01:20:58Deux ans plus tard,
01:21:00le nouveau procès se tient à Aix-en-Provence.
01:21:04Le procès d'appel a été abordé
01:21:06avec beaucoup d'espoir, bien évidemment,
01:21:08avec une défense nouvelle,
01:21:10en pensant qu'en changeant de région,
01:21:12la donne allait être différente.
01:21:18Mais à Aix comme à Nice,
01:21:20le verdict est le même.
01:21:22Coupables, tous les trois.
01:21:24Seules les peines s'allègent.
01:21:26Philippe Dubois est condamné à 28 ans de prison,
01:21:28comme Laurent Gauvin.
01:21:30Son père, Patrick,
01:21:32prend 25 ans.
01:21:44Maître Hervé Juel-Garaï,
01:21:46vous êtes l'avocat des parties civiles dans ce dossier.
01:21:48Vous n'êtes pas intervenu devant la Côte-Assise,
01:21:50mais uniquement au procès civil.
01:21:52Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi et qu'est-ce que vous avez fait exactement ?
01:21:54J'ai été chargé de défendre
01:21:56les intérêts d'une partie des héritiers,
01:21:58dans des conditions
01:22:00assez originales,
01:22:02puisque,
01:22:04en 2003, lorsque la succession
01:22:06s'est ouverte,
01:22:08le notaire a tenté
01:22:10d'établir le règlement de cette succession,
01:22:14et il s'est très rapidement aperçu
01:22:16qu'il n'y avait pas d'héritier direct,
01:22:18ni de Mme Veuve-Raspi, ni de son fils.
01:22:22Il a donc mandaté
01:22:24un généalogiste
01:22:26pour rechercher des héritiers.
01:22:28Ce généalogiste est parvenu
01:22:30à identifier 12 cousins
01:22:32héritiers
01:22:34des consorts Raspigny,
01:22:36mais la difficulté
01:22:38était la suivante,
01:22:40c'est qu'il fallait déterminer
01:22:42l'ordre des décès, pour précisément
01:22:44dire qui devait hériter
01:22:46de Mme Raspigny
01:22:48ou de son fils. – Qu'est-ce qui a été décidé ?
01:22:50– Alors le notaire a,
01:22:52dans un premier temps, fait application
01:22:54de la loi des comourants, la théorie des comourants,
01:22:56à savoir très simplement
01:22:58que les plus jeunes sont censés
01:23:00survivre aux plus anciens.
01:23:02– C'est-à-dire que dans cette histoire, Marc serait mort
01:23:04après sa mère, le contraire de ce qu'a
01:23:06décrété la cour d'assises.
01:23:08– Exactement. S'en est suivie
01:23:10une bataille judiciaire
01:23:12sur le plan du gouvernement civil,
01:23:14entre différents héritiers,
01:23:16ceux que je représentais,
01:23:18et une cousine éloignée,
01:23:20censée hériter, dans l'hypothèse
01:23:22où M. Marc Raspigny
01:23:24a décédé le premier,
01:23:26de la moitié
01:23:28de la succession
01:23:30dévolue
01:23:32dans cette affaire. Nous sommes allés jusqu'en
01:23:34cours de cassation pour faire juger
01:23:36que la mère était décédée avant son fils.
01:23:38– Dans cette histoire, tout le monde s'est battu
01:23:40pour ce magot ?
01:23:42– Oui.
01:23:44– Les lointains héritiers des Vérans Raspigny
01:23:50se sont donc partagés la maison,
01:23:52le terrain, les appartements à Nice,
01:23:54les livrets, du moins,
01:23:56tous les biens qu'on a pu recenser.
01:23:58Parce qu'il reste une question,
01:24:00la mère et le fils cachaient-ils un magot ?
01:24:02Un magot que leurs assassins
01:24:04ont peut-être bien trouvé.
01:24:36Abonnez-vous !

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