Le 15 juin 2005, Jean-Pierre Faure disparaît mystérieusement à Sanary-sur-Mer, près de Toulon. A ses proches, sa femme Béatrice explique qu'il est parti refaire sa vie à Marseille. Mais cette version ne convainc pas Angélique, leur fille. Quelques jours après la disparition, elle fait part de ses doutes à la gendarmerie.
Category
✨
PersonnesTranscription
00:00L'histoire commence un jour de mars 2005 à Sanary, sur la côte varoise.
00:06Comme chaque semaine, Angélique Fort se rend chez ses parents, Béatrice, employée de maison,
00:13et Jean-Pierre, maçon, en invalidité. Mais ce matin-là, lorsqu'Angélique arrive
00:22devant leur maison, elle remarque quelque chose d'inhabituel.
00:26Elle va au domicile de ses parents, elle observe une situation qui la choque. Le
00:33volet de chez ses parents est baissé. Ses parents habitent là depuis quasiment une
00:40dizaine d'années. Ils n'ont jamais baissé ce volet.
00:43Ce volet fermé a de quoi surprendre. En effet, Jean-Pierre, le père d'Angélique,
00:49est casagné et passe toutes ses journées dans le salon. Angélique est donc intriguée.
00:56C'est alors que sa mère sort de la maison.
01:01Et là, elle voit sa mère qui sort du domicile. Elle est pimpante. C'est le
01:08terme qui sera utilisé dans la procédure. Elle est décrite comme pimpante et guillourette.
01:13Sa mère, Béatrice Frustierifort, a 44 ans. Et ce jour-là, face à sa fille,
01:19qui lui demande où est passé son père, voici ce qu'elle explique.
01:22Sa maman lui dit que son père a volontairement disparu, qu'il réapparaîtra à un moment ou à
01:28un autre. Sa mère va d'abord lui expliquer qu'elle ne doit pas chercher à avoir son père.
01:32Qu'il s'agit vraisemblablement de disparition, si ce n'est volontaire,
01:35pour au moins décider de sa part. Béatrice ajoute que Jean-Pierre est
01:40parti à Marseille trois jours plus tôt, le 15 mars. Elle précise qu'il aurait quitté le
01:45domicile sans sa voiture. L'explication paraît plausible, car depuis plusieurs mois,
01:52le couple fort se déchirait. Jean-Pierre et Béatrice en étaient même venus aux mains.
01:57A plusieurs reprises, on va évoquer des violences. On va évoquer des violences,
02:02on va évoquer une jalousie de fort vis-à-vis de sa femme.
02:08D'ailleurs, quelques semaines auparavant, Béatrice s'était rendue à la gendarmerie
02:12pour se plaindre de l'agressivité de son mari. On apprendra qu'effectivement,
02:17Béatrice a déposé plainte pour des coups et blessures que son mari lui a infligés.
02:22Je viens vous informer suite à l'agressivité de mon époux à mon
02:27encontre. Il m'a dit, fais les démarches pour le divorce.
02:32A plusieurs reprises, on va sentir que le climat dans la maison de Jean-Pierre Fort,
02:40il n'est pas forcément serein. Il est même parfois très lourd.
02:43Le couple était au bord du divorce et Jean-Pierre aurait décidé de prendre le large. C'est en tout
02:50cas la version que Béatrice donne à sa fille. Pourtant, dans ce scénario, un détail intrigue
02:56Angélique. Angélique sait parfaitement que son père n'est pas un homme à marcher,
03:03à quitter son véhicule. Il ne se déplace qu'en voiture, même pour aller acheter sa
03:08cigarette ou le pain. La voiture est garée devant. S'il était parti, effectivement,
03:14il aurait d'abord pris son véhicule. Angélique imagine alors que sa mère lui cache quelque
03:19chose. D'autant qu'elle sait depuis peu qu'elle a un amant, un certain Jean-Claude Doulieri.
03:26Elle va avoir la certitude de cette situation un 14 février où Doulieri fait un cadeau à
03:36Béatrice Frustieri. Je t'ai acheté un petit pendentif. Il est magnifique. Ce soir là,
03:44Béatrice dîne chez sa fille en compagnie de Doulieri. Elle lui offre un pendentif, à toi pour toujours.
03:57Jean-Claude Doulieri, 36 ans, est maçon. C'est un collègue de Jean-Pierre Fort,
04:01le mari de Béatrice. Un ami de longue date devenu envahissant. Il était au départ l'ami de Jean-Pierre
04:09Fort. Il est de plus en plus présent. Il prend de plus en plus part aux discussions, aux décisions.
04:15Et c'est vrai que pour la famille Fort, sa présence, elle est pesante. Une mère qui
04:23entretient une relation extra-conjugale. Un père qui disparaît du jour au lendemain. Angélique,
04:31la fille, est perplexe. Pourtant, curieusement, elle décide de ne pas alerter la gendarmerie.
04:39La jeune femme va d'abord mener sa propre enquête. Pendant quinze jours, Angélique va chercher à
04:47savoir, va chercher à comprendre. Elle a une intuition. Pour autant, son intuition, elle n'est
04:51corroborée par rien, si ce n'est par le fait qu'elle connaît son père et que ce que lui
04:54présente sa mère, ça lui semble pas réaliste. Quelques jours plus tard, Angélique retourne
05:00chez ses parents. Ce qu'elle découvre alors renforce ses soupçons. L'intérieur du salon
05:08de la maison a été repeint. Il y a du mobilier qui manque. Il y a des balais qui manquent,
05:12qui ne sont plus là. Et Angélique, qui vient tous les jours chez ses parents, elle voit tout de suite
05:16que des choses ne sont plus en place. Face à ces disparitions en série, Angélique exige des
05:22explications. Et progressivement, sa mère craque. Les confessions que Béatrice Frustieri fait à sa
05:32fille sont assez extraordinaires. Dans les grandes lignes, moins tu en sauras, mieux ça vaut. Elle
05:37est dans la dramaturgie, elle est dans la théâtralisation, dans la scénarisation. Voici
05:43pêle-mêle ce que Béatrice lâche à sa fille. Ton père ne le cherche pas, tu ne le retrouveras jamais.
05:51Il s'est battu comme un diable. Il était lourd comme un âne mort.
06:00Il y avait du sang de partout, j'ai dû nettoyer.
06:02On a jeté le corps à la mer. Le récit est elliptique et pose question.
06:11Désormais, Angélique a une certitude. Il est arrivé malheur à son père le soir du 15 mars.
06:20Et sa mère et son amant y sont pour quelque chose.
06:26Désemparée, elle confie ses soupçons à sa famille. Angélique me téléphone en me disant qu'elle a
06:38quelque chose de très grave à nous annoncer et qu'il faut que je réunisse toute la famille.
06:43Lorsqu'Angélique explique la situation à ce conseil de famille, Robert Faure alors
06:49comprend tout de suite que le pire est arrivé.
06:52Angélique et son oncle sont montés pour nous dire que Jean-Pierre avait disparu.
07:02Le nom de Gilles, vous ne reverrez plus Jean-Pierre.
07:10Elle est fille unique, elle est seule, elle a besoin je pense d'être soutenue à ce moment-là et que
07:14la décision soit collective et ensemble ils vont aller voir les enquêteurs pour faire part de leurs
07:18soupçons sur ce qui s'est passé sur la disparition de Jean-Pierre et de leurs soupçons clairement sur
07:23la personne de Doulieri et éventuellement aussi de Béatrice puisque Angélique elle sait très bien
07:29qu'en dénonçant Doulieri, elle dénonce sa mère.
07:32Marseille, le 31 mars 2005. Deux semaines après la disparition de Jean-Pierre Faure, Angélique se rend à la gendarmerie.
07:42Devant les enquêteurs, elle détaille le contexte dans lequel son père a disparu.
07:54Elle explique qu'un homme, Doulieri, s'est immiscé dans le couple des parents, qu'aujourd'hui le père Jean-Pierre Faure n'est plus au domicile, que c'est assez inquiétant.
08:02Depuis que Jean-Pierre a disparu, Doulieri il a pris ses aises à la maison.
08:07Il s'est quasiment installé, il est là tout le temps et ils ont presque une vraie relation de couple avec sa mère.
08:15À mesure où Angélique nous précise que sa mère et Jean-Claude Doulieri ont une relation amoureuse, ça peut constituer effectivement un mobile.
08:24Angélique répète surtout aux gendarmes les confessions que sa mère lui aurait fait.
08:29Tout ça a été terrible et monstrueux.
08:32C'était lourd comme un anneau mort.
08:35Il y avait du sang.
08:36Il s'est battu comme un diable.
08:41Les gendarmes sont très intéressés par ces révélations, d'autant que l'amant de Béatrice ne leur est pas tout à fait inconnu.
08:51Ils ont découvert aussi les enquêteurs que Jean-Claude Doulieri avait été le petit copain d'une jeune fille qui avait disparu sur Marseille.
09:02Cette jeune femme s'appelle Dominique Ortiz.
09:05Depuis sa disparition en 2001, quatre ans plus tôt, personne n'a plus eu de ces nouvelles.
09:12Et dans cette affaire, Doulieri a été inquiété.
09:15La coïncidence est troublante.
09:19Alors là, effectivement, ils ont fait le lien.
09:21Ils se sont dit bon, deux fois la même personne autour d'une idée disparue, donc un questionnement d'enquêteurs logique.
09:31On appréhende un petit peu le personnage d'une façon un peu plus suspecte.
09:37Et on sait pour le moins, si on n'a pas affaire à un assassin, on a pour le moins affaire à un personnage suspect.
09:45Pour les gendarmes, l'enquête commence avec en ligne de mire deux suspects, Béatrice Frustieri et bien sûr Jean-Claude Doulieri.
09:55Reste à trouver des preuves pour les confondre.
10:01À l'issue de la déposition d'Angélique le soir même, une voiture de gendarmerie banalisée se poste devant le domicile des forts.
10:10Et les enquêteurs constatent que l'amant s'est installé chez Béatrice à peine deux semaines après la disparition du mari.
10:19On verra effectivement de manière très concrète la présence de Jean-Claude Doulieri, son véhicule stationné devant la propriété du couple.
10:28Les gendarmes scrutent les faits et gestes des deux amants et placent leur portable sur écoute.
10:43Béatrice et Jean-Claude entretiennent une relation amoureuse, cela ne fait aucun doute.
10:49Mais au téléphone, ils ne font aucune allusion à la disparition de Jean-Pierre Fort.
10:54L'enquête piétine.
11:02Et c'est grâce à Angélique que les enquêteurs vont trouver un premier indice.
11:08Le 4 avril 2005, la fille Fort vient signaler à la gendarmerie un nouveau détail confié par sa mère.
11:15On va s'appuyer sur les révélations d'Angélique, notamment sur le fait qu'il, en parlant de Doulieri, aurait fait exploser un véhicule.
11:25Les enquêteurs s'intéressent alors aux interventions des pompiers la nuit du 15 mars.
11:30La nuit pendant laquelle Jean-Pierre a disparu.
11:34C'est ainsi qu'on remontera la trace d'un véhicule découvert calciné,
11:39C'est ainsi qu'on remontera la trace d'un véhicule découvert calciné sur la commune de Saint-Marie-sur-Mer et qui va nous intéresser.
11:49Par chance, le véhicule calciné a été conservé et placé dans un garage.
11:55En l'examinant, les enquêteurs parviennent à identifier son propriétaire.
12:00Ils contactent cet individu, cet individu dit moi j'ai vendu un véhicule.
12:04Ah bon, vous l'avez vendu à qui ? Je l'ai vendu à Jean-Pierre Fort.
12:08Une vente conclut le jour de la disparition de Jean-Pierre Fort, le 15 mars 2005.
12:15Les gendarmes demandent alors à l'homme de décrire l'acquéreur de la voiture.
12:20Agé d'une bonne trentaine, taille moyenne, cheveux coupés courts.
12:26Et il apporte un dernier détail qui va faire basculer l'enquête.
12:33Il avait un sourcil plus haut que l'autre.
12:37Un signalement qui ne correspond pas à Jean-Pierre Fort, mais à Jean-Claude Doulieri.
12:42Il présente une photo de Jean-Pierre Fort et le vendeur dit non c'est pas cet homme.
12:48Et là il présente une photo de Doulieri.
12:51Cet homme dit oui je reconnais.
12:53Donc on sait que Doulieri a acheté ce véhicule la veille du décès.
12:57Dans la voiture qu'elle signait, les gendarmes font surtout une découverte de première importance.
13:02Il s'agira d'une serviette épaisse.
13:05C'est un véhicule qui a été acheté par Jean-Pierre Fort,
13:08une découverte de première importance.
13:10Il s'agira d'une serviette éponge souillée, partiellement imbibée en corps de sang,
13:15dont on apprendra ensuite par analyse qu'il s'agira du sang de Jean-Pierre Fort.
13:21Du sang, mais pas de corps.
13:24Les gendarmes le savent, il leur faut beaucoup plus d'indices.
13:30Deux jours plus tard, à 6h du matin, les enquêteurs toquent à la porte du domicile des forts pour une perquisition.
13:39On se présente au domicile, on est une dizaine d'enquêteurs,
13:42appuyés par le concours des techniciens de l'investigation criminelle.
13:47Les gendarmes fouillent les lieux pendant deux heures.
13:52Ils sont persuadés que c'est ici que s'est déroulée la scène de crime.
13:59On s'aperçoit qu'effectivement les vêtements de Jean-Pierre Fort sont là,
14:02son portefeuille est là, sa paire de lunettes est là.
14:05Tout ce qui corrobore avec, si vous voulez, l'absence de disparition volontaire.
14:08Dans la maison, des choses ont disparu.
14:10Une chaise, un tapis également, et puis notre bibelot.
14:15Les effets de nettoyage, serpillères, balais, tout a été changé.
14:20En réalité, la maison a été nettoyée littéralement, passée au peigne fin,
14:26et toutes les traces apparentes ont disparu.
14:31Tout a été nettoyé, et curieusement, les murs viennent d'être repeints.
14:37Mais les enquêteurs ne s'avouent pas vaincus.
14:40On fait procéder par nos techniciens à ce qu'on appelle des révélations booster.
14:46Ce produit que l'on vaporise permet de détecter des traces de sang invisibles à l'œil nu.
14:51Et l'opération porte ses fruits.
14:54On détermine dans l'appartement un nombre considérable de traces de sang.
14:57Il y en a devant le réfrigérateur, au pied du meuble télé, et sur les murs.
15:07Pourtant, le couple d'amants ne semble pas inquiet.
15:12Aucun commentaire, aucune réaction.
15:15Ils laissent procéder aux investigations et ils émettent aucun commentaire.
15:19Les preuves rassemblées par les enquêteurs ne laissent guère de place aux doutes.
15:24Encore faut-il maintenant faire parler les suspects.
15:33Les deux amants sont conduits à la gendarmerie pour interrogatoire.
15:38Mais Jean-Claude Doulieri va donner du fil à retordre aux enquêteurs.
15:44Il dit qu'il ne se rappelle pas précisément s'il était là ce soir-là.
15:47Doulieri ne répond pas aux questions. Il reste silencieux.
15:50L'enquêteur tape. Doulieri regarde le plafond.
15:56On pose des questions à un fantôme.
15:58Doulieri regarde ses chaussures et se gratte la tête.
16:03Il en dit le moins possible. Il en a toujours dit le moins possible.
16:07Il ne dit rien. Il ne lâche rien.
16:11Jean-Claude Doulieri refuse même de signer sa déposition.
16:16Béatrice, quant à elle, se montre plus bavarde.
16:19Même si elle nie les confessions qu'elle aurait faites à sa fille,
16:22elle finit par avouer aux enquêteurs qu'il s'est bien passé quelque chose le soir du 15 mars 2005.
16:31Elle admettra qu'il y a eu une bagarre,
16:34qu'il y a eu une dispute entre Jean-Pierre Faure et Jean-Claude Doulieri.
16:40Béatrice précise qu'elle n'a pas assisté à l'altercation
16:43mais qu'elle a tout entendu.
16:46En effet, ce soir-là, elle était chez ses parents
16:48qui vivent dans la maison mitoyenne de la sienne.
16:51Les murs sont séparés par des cloisons extrêmement fines
16:55où on entend tout.
17:01La bagarre augmente. Que fait-elle ?
17:04Elle monte le volume de la télévision.
17:06Et là, on va lui dire, pourquoi monter le volume du son ?
17:09Il dit, c'est parce que je ne voulais pas que mes parents s'inquiètent
17:12et couvrient le bruit de la bagarre.
17:15Une demi-heure plus tard, quand elle est rentrée chez elle,
17:18Béatrice constate les dégâts
17:20mais elle ajoute que les deux hommes semblaient réconciliés.
17:24Suite à cette dispute, Jean-Pierre Faure et Jean-Claude Doulieri sont partis ensemble
17:28et qu'ils se sont réconciliés.
17:31Implicitement.
17:32Béatrice reconnaît donc que Jean-Claude Doulieri serait à l'origine
17:35de la disparition de son mari.
17:37Mais elle refuse d'en dire plus.
17:39Elle a peur. Elle a peur.
17:41Moi, c'est ce qu'elle m'a toujours dit.
17:43J'ai peur. J'ai peur de cet homme.
17:45La prison, on en sort. Le cimetière, on n'en sort pas.
17:48Donc, je préfère aller en prison et ne plus y aller.
17:50C'est ce qu'elle dit.
17:51C'est ce qu'elle dit.
17:52C'est ce qu'elle dit.
17:53C'est ce qu'elle dit.
17:54C'est ce qu'elle dit.
17:55C'est ce qu'elle dit.
17:56C'est ce qu'elle dit.
17:57C'est ce qu'elle dit.
17:58Le cimetière, on n'en sort pas.
17:59Donc, je préfère aller en prison et ne rien dire
18:01plutôt que de livrer Doulieri
18:04au risque, moi aussi, de perdre la vie un jour.
18:07Quoi qu'il en soit, la conviction des gendarmes est faite.
18:14On a l'intime conviction que Jean-Claude Doulieri a assassiné Jean-Pierre Faure, oui.
18:18Concernant Jean-Claude Doulieri, on a la certitude
18:21qu'il a participé à l'homicide, à l'assassinat de Jean-Pierre Faure.
18:29L'amant est donc mis en examen et écroué.
18:34Béatrice Frustieri, quant à elle, est placée en détention.
18:37Mais elle en ressort quelques mois plus tard
18:40car un élément fondamental manque encore au dossier.
18:43Il n'y a pas de corps.
18:44Il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas de corps.
18:46Personne n'imagine alors que c'est au procès que tout va se jouer.
18:51L'audience se tient deux ans et demi plus tard,
18:54le 14 novembre 2007, devant les assises de Draguignan.
19:01Vous avez donc Béatrice Frustieri qui arrive libre.
19:06Elle arrive à son procès et manifestement elle est bien décidée
19:09à en être l'actrice principale et à jouer le premier rôle.
19:13Il y a surtout une tension vraiment très très lourde
19:16entre Angélique et Béatrice.
19:18Ils sont ensemble et la famille Faure de l'autre côté,
19:20c'est un bloc de haine.
19:21Angélique essaie d'aller leur parler.
19:23Ça se passe très très mal.
19:24Pour elle, c'est la traître.
19:27Elle a pris le parti de sa mère plutôt que celui de son père.
19:29Évidemment, on attend avec impatience une explication
19:32si ce n'est de Jean-Claude Ullery
19:34pour le moins d'avoir une idée de ce qui se passe.
19:37C'est un bloc de haine.
19:39On attend l'explication si ce n'est de Jean-Claude Ullery
19:42pour le moins de Béatrice Faure et on va te servir.
19:45En effet, dès l'ouverture du procès, Béatrice demande à être entendue.
19:50Je m'appelle Béatrice Frustieri, j'ai 45 ans.
19:54Le président l'appelle à la barre d'entrée,
19:56dit Madame Frustieri, ce procès s'ouvre,
19:58je crois savoir que vous avez des révélations à faire,
20:01qu'est-ce que vous avez à dire ?
20:02Et là, on a un coup de théâtre phénoménal aux assises de Draguignan.
20:06Elle dit, je sais où est le corps de mon mari.
20:10Tout le monde était effectivement surpris, interloqué.
20:14De mémoire judiciaire, je crois qu'en France,
20:17cela ne s'est jamais produit.
20:19Premier jour d'audience,
20:20accusez-vous d'avoir quelque chose à déclarer ?
20:22Oui.
20:23Je vais vous dire où se trouve le corps de mon mari.
20:26Il est mort, je vais me conduire au cadavre.
20:28Donc là, effectivement, stupeur générale.
20:30Pourquoi elle n'a pas fait avant ?
20:32Pourquoi attendre qu'on soit tous en cours de justice
20:38pour dire qu'elle sait où il y a le corps ?
20:40Et à votre avis, pourquoi ?
20:42Pourquoi ? Elle a fait un coup de théâtre.
20:44Elle a essayé de, je ne sais pas,
20:46de retarder peut-être l'affaire ou d'avoir moyen de peine.
20:49Je n'en sais rien.
20:52Devant un douliéri impassible,
20:54Béatrice précise que le squire du drame,
20:57elle et son amant,
20:58se sont débarrassés du corps de Jean-Pierre
21:01dans un endroit bien connu dans la région,
21:04le Cap Canaille.
21:08C'est un lieu très beau, très sauvage.
21:11C'est escarpé, quoi.
21:12Il y a peu de voitures qui circulent.
21:14Si vous voulez, il y a un plateau
21:16et de chaque côté une falaise,
21:17donc côté mer et côté terre.
21:19L'endroit est effectivement
21:21porteur déjà de beaucoup de mystères.
21:26On appelle cet endroit le triangle des vermules,
21:28le lieu où on fait disparaître les gêneurs.
21:32Il faut y aller pour un but précis, déterminé,
21:34soit pour la beauté du site ou du paysage,
21:36soit pour se débarrasser d'un corps.
21:38Il ne va pas pour rien.
21:41Et avant de quitter la barre,
21:43Béatrice fait une dernière révélation
21:45tout aussi fracassante.
21:48Elle dit qu'il n'y a pas que le corps de son mari
21:52qui se trouve au pied de cette falaise.
21:55Donc, mystère, évidemment.
22:00Le procès est suspendu.
22:02La cour veut d'abord vérifier ses révélations.
22:07Dès le lendemain, Béatrice va tenter d'indiquer
22:09le lieu où Jean-Pierre Faure a été jeté.
22:15Arrivée dans ce massif du Cap Canaille,
22:17on est en courvoie.
22:18Elle guide la colonne de 40 ou 50 véhicules
22:20qui suit derrière.
22:22Le problème, c'est qu'on ne sait pas trop où on va.
22:25Béatrice explique que ça s'était passé en pleine nuit,
22:28donc elle n'a pas trop le souvenir
22:30des détails des lieux.
22:32La météo n'est pas favorable.
22:33Il fait beaucoup de vent.
22:35Les recherches ne sont pas faciles.
22:38Ça va durer toute une journée.
22:41Chacun va patauger dans la boue
22:44et être confronté au froid.
22:46Ils vont sur plusieurs endroits à la recherche.
22:50À chaque fois, c'est non, ce n'est pas là.
22:54Le président de la cour d'assises
22:56va mettre un terme à ces recherches
22:58en disant qu'on ne trouvera pas,
22:59que ce n'est pas possible,
23:00que c'est trop vaste.
23:02Béatrice Faure n'est pas en mesure
23:04de fournir plus de précisions.
23:06Pourtant, alors que tout le monde
23:08s'apprête à quitter les lieux,
23:10l'espoir renaît.
23:12Il y a un homme qui est un secouriste
23:15qui travaille sur les lieux,
23:16qui demande la permission de s'adresser
23:18directement à Béatrice Crustieri, au président,
23:20et qui lui dit, écoutez,
23:21je connais très bien les lieux,
23:22j'y fais des secours réguliers,
23:24laissez-moi cinq minutes avec elle.
23:26Si elle m'explique ce dont elle se souvient,
23:28je saurais vous y conduire.
23:29Et Béatrice va dire, je me souviens notamment
23:31que sur notre gauche,
23:33il y avait comme un immeuble ou une tour
23:35ou quelque chose de haut en métal
23:37avec une lumière qui clignotait.
23:42Et là, l'enquêteur dit, je sais où c'est.
23:44C'est le relais de la Saoupe.
23:45Je vous y conduis.
23:47Le relais de la Saoupe est une antenne relais.
23:50Béatrice parle aussi d'une cabane de surveillance,
23:53une vigie,
23:55deux éléments qui font tilt
23:57chez les enquêteurs.
23:59Elle nous accompagne
24:01et à mi-parcours,
24:03lorsqu'on a vraiment vu sur la vigie,
24:07là, elle a le souffle coupé,
24:10elle se met à genoux
24:12et elle nous dit, c'est là.
24:17Les gendarmes déploient alors les grands moyens.
24:22Il y a un hélicoptère qui survole,
24:24il y a les enquêteurs
24:27qui font des recherches
24:28à la mesure de leurs possibilités.
24:30Et il y a ces militaires qui vont, eux,
24:32faire effectuer des descentes à rappel
24:34pour accéder à l'endroit précis.
24:39Après des heures de recherche,
24:41au pied de la falaise,
24:43au beau milieu de la végétation,
24:45les enquêteurs font leur première trouvaille.
24:49On va découvrir dans un premier temps
24:51un bas de survêtement
24:52qui correspond en tout point
24:54à la tenue vestimentaire de Jean-Pierre Faure.
25:03Puis les découvertes s'enchaînent,
25:05de plus en plus macabres.
25:08On a des ossements qui semblent être,
25:11qui pourraient être ceux de Jean-Pierre Faure.
25:16Des morceaux de mandibules,
25:18un tibia, un crâne.
25:21Et ce n'est pas tout.
25:25Ensuite, on va découvrir des vêtements autres,
25:29et notamment des vêtements féminins,
25:32et des bijoux.
25:39On a, à côté de ça,
25:41des ossements qui sont ceux
25:43d'une personne de sexe féminin.
25:45Et on est sous le choc aussi
25:47de la découverte du second corps.
25:50Béatrice avait donc dit vrai.
25:52Il y a bien un deuxième corps.
25:54Et chose incroyable,
25:56il ne va falloir que quelques minutes
25:58aux enquêteurs pour l'identifier.
26:01Lors de ces recherches,
26:02on a découvert des bijoux,
26:04boucles d'oreilles,
26:06bracelets, montres,
26:10et une bague.
26:12Cette bague, lorsqu'elle remonte,
26:14je vois cette bague et je dis
26:16c'est celle de Dominique Ortiz.
26:19Dominique Ortiz,
26:20justement l'ancienne petite amie
26:22de Jean-Claude Doulieri,
26:24portée disparue depuis 2001.
26:27Cette bague, elle figure
26:29sur de nombreux documents,
26:31notamment son avis de recherche,
26:34où on voit bien cette bague
26:36à la main de Dominique Ortiz.
26:39Cette découverte est capitale
26:41pour les gendarmes,
26:43et en particulier pour l'adjudant Cruz,
26:45qui depuis le début enquête
26:47sur la disparition de Dominique Ortiz.
26:50Il a toujours soupçonné Doulieri
26:52sans jamais parvenir à le confondre.
26:55Pour lui, c'est donc l'épilogue
26:57d'une traque commencée 6 ans plus tôt.
27:03Nous sommes en 2001.
27:05Dominique Ortiz, passionnée d'équitation,
27:07entretient une relation amoureuse
27:09avec Jean-Claude Doulieri.
27:12Ironie du sort,
27:14le couple s'est rencontré 6 mois plus tôt
27:16au mariage du frère de Jean-Pierre Fort.
27:18Comme le montre cette vidéo amateur
27:20que nous nous sommes procurée.
27:28A priori, Dominique et Jean-Claude
27:30filent le parfait amour.
27:32Dominique Ortiz, c'est la copine
27:34de Jean-Claude Doulieri,
27:36et c'est une copine sérieuse,
27:38puisqu'elle est enceinte de lui.
27:40C'est pourtant dans ce contexte
27:42que la jeune femme
27:44va disparaître subitement.
27:46Le 24 mars,
27:48elle a préparé un sac
27:50avec 4 vêtements,
27:524 affaires, pour aller passer le week-end
27:54avec son copain.
27:56Dès le lendemain, elle devait revenir
27:58au moment du repas.
28:00Quand on ne l'a pas vu arriver
28:02sur le coup de midi, on s'était inquiété
28:04parce que ce n'est pas du tout Dominique.
28:06Manuel Ortiz se tourne aussitôt
28:08vers Jean-Claude Doulieri.
28:10La version que donnera
28:12Doulieri à la famille de Dominique
28:14et aux enquêteurs,
28:16c'est qu'ils ont passé
28:18la nuit ensemble à l'hôtel.
28:20Le lendemain,
28:22il a laissé au niveau du métro
28:24La Rose, à Marseille,
28:26de manière à ce qu'elle rejoigne
28:28la famille Ortiz pour le repas,
28:30et que lui, de son côté, est parti
28:32chez sa mère pour l'anniversaire de son petit frère.
28:34A priori, Jean-Claude
28:36a donc un alibi.
28:40Les jours passent.
28:42Dominique Ortiz reste introuvable.
28:46Son père, remu ciel et terre,
28:48il crée une association d'enfants disparus
28:50et promet même une forte récompense.
28:56De leur côté, les gendarmes
28:58s'intéressent de plus près à Doulieri
29:00et ils s'aperçoivent qu'il a menti dans ses déclarations.
29:04D'abord, concernant la nuit qu'il aurait passée
29:06avec Dominique à l'hôtel,
29:08la veille de sa disparition.
29:12Le réceptionniste
29:14se rappelle très bien
29:16de l'arrivée
29:18de Dominique Ortiz,
29:20mais pas avec Jean-Claude Doulieri,
29:22il était seul.
29:24Elle était inquiète, elle descendait souvent à la réception
29:26pour savoir si celui qui devait la rejoindre
29:28était arrivé.
29:30Il arrive à 1h du matin,
29:32seul, et il en repart,
29:34toujours seul,
29:36mais à 3h du matin.
29:38Donc lorsque Doulieri explique qu'il a passé
29:40à l'hôtel, c'est complètement fou.
29:42Quelques jours plus tard, Dominique Ortiz
29:44se serait présenté chez Jean-Claude
29:46Doulieri à Marseille,
29:48ce qu'il n'avait jamais mentionné.
29:50C'est en tout cas ce que laisse
29:52penser un témoignage recueilli par
29:54les gendarmes.
29:56Une voisine de Jean-Claude Doulieri
29:58va déclarer qu'une
30:00femme a voulu entrer dans cette
30:02habitation, elle a sonné à cette
30:04voisine, voyant que c'était une femme
30:06qui voulait voir
30:08Doulieri, a fini par lui ouvrir
30:10la porte d'entrée du bâtiment.
30:12La dernière fois que la jeune femme
30:14a été vue, c'est donc le matin
30:16chez Doulieri.
30:18Pour l'après-midi, l'homme dispose
30:20d'un alibi, l'anniversaire de son petit frère
30:22chez sa mère.
30:24Les enquêteurs
30:26retrouvent même des photos de l'événement.
30:34Seulement, ils s'aperçoivent que ces clichés
30:36n'ont pas pu être pris le jour de l'anniversaire.
30:38C'est en fait une mise en scène.
30:40Ils en tiennent pour preuve
30:42les relevés téléphoniques de Jean-Claude Doulieri.
30:46Les enquêteurs vont dire à monsieur Doulieri
30:48vous n'avez pas pu passer,
30:50comme vous le dites, avec votre mère
30:52l'après-midi et assister
30:54à l'anniversaire de votre frère, parce que votre mère
30:56a tenté de vous joindre 40 fois.
30:58Ce qui prouve
31:00qu'il n'était pas avec sa mère
31:02et qu'ils ne se sont pas vus à ce moment-là.
31:04Mais là, on se dit qu'il y a un problème.
31:06Il y a eu certainement
31:08un montage d'alibi.
31:10Jean-Claude Doulieri
31:12aurait donc pu faire disparaître sa petite amie.
31:14Mais quelle serait le mobile ?
31:18Pour les gendarmes, la réponse réside peut-être
31:20dans les relations très ambiguës
31:22que l'homme entretenait avec sa mère,
31:24Georgette Roux,
31:26une femme à la personnalité singulière.
31:28La fameuse Georgette,
31:30personnage haut en couleur,
31:32un personnage extrêmement violent,
31:34extrêmement emporté,
31:36particulièrement vulgaire.
31:38Georgette, c'est une matrone autoritaire
31:40qui mène sa famille
31:42comme un camp,
31:44une espèce de camp militaire
31:46où elle prend toutes les décisions.
31:48C'est une femme qui est particulièrement
31:50agressive,
31:52un caractère bien trempé.
31:54Elle est hystérique, possessive, autoritaire.
31:56Et c'est une femme
31:58au passé sulfureux.
32:00Elle a déjà été impliquée
32:02dans une affaire d'empoisonnement
32:04en la personne
32:06de son mari.
32:08Le père de Doulieri
32:10est mort quand Doulieri a 10 ans.
32:12C'est Charlie, le boulanger,
32:14qui décède après avoir
32:16avalé un bouillon.
32:20Georgette n'a pas fait l'objet de poursuites,
32:22mais dans la famille,
32:24on raconte qu'elle n'est pas
32:26étrangère à la mort
32:28de Charlie, son premier mari.
32:30Les enquêteurs retrouvent
32:32aussi un ancien compagnon de Georgette.
32:34Ils ont retrouvé cet homme
32:36apeuré, quelque part,
32:38à qui on va dire
32:40« Vous connaissez Georgette Roux ? »
32:42L'homme va dire « Si je la connais,
32:44oui, je la connais, bien sûr.
32:46Vous pouvez nous en parler ? »
32:48« Elle est terrible. Elle a failli
32:50me poignarder avec une paire de ciseaux. »
32:54En me disant
32:56« Tu ne vas pas m'emmerder.
32:58J'ai tué mon mari et toi, je vais te buter aussi. »
33:00Et je suis parti tout de suite.
33:02En somme, la famille Doulieri,
33:04c'est une famille de tradition violente
33:06entourée d'épisodes
33:08inhabituels.
33:10Les gendarmes vont jusqu'à s'interroger
33:12sur la nature du lien qui unit
33:14cette mère autoritaire à son fils.
33:16Doulieri et sa mère
33:20forment un couple assez malsain.
33:22Doulieri et sa mère
33:24ont d'après
33:26tout ce qui apparaît
33:28une relation incestueuse.
33:30Doulieri,
33:32c'était l'homme
33:34de la maison.
33:36La maman de Jean-Claude Doulieri
33:38contrôle,
33:40j'allais dire, sa relation amoureuse, plus ou moins,
33:42puisqu'elle est très présente
33:44et elle s'initie
33:46dans sa vie sentimentale.
33:48Elle n'a jamais entretenu des bonnes relations
33:50avec les compagnes
33:52de son fils, Jean-Claude Doulieri.
33:54Ça lui a insupporté
33:56que son fils ait une relation amoureuse
33:58avec une autre femme qu'elle-même.
34:00En fait,
34:02Georgette, la possessive,
34:04aurait très mal vécu l'arrivée
34:06de Dominique Ortiz dans la vie de son fils.
34:08Et plus encore,
34:10l'heureux événement qui s'annonçait
34:12car Dominique était enceinte de 3 mois.
34:16Elle ne supporte pas cette femme
34:18qui aime son fils.
34:20Elle dit qu'elle est en train de lui voler,
34:22qu'elle ne l'acceptera pas,
34:24que c'est une pute, une garce.
34:26Dominique avait rendez-vous pour acheter une nouvelle voiture
34:28parce que sa voiture,
34:30je ne le savais pas,
34:32soit disant que la voiture était tombée en panne.
34:34En réalité, la voiture a été défoncée par la mère.
34:38Elle a tellement tapé sur la voiture
34:40que c'était une épave.
34:42Doulieri et Dominique Ortiz
34:44attendaient un enfant.
34:46La question qui se posait dans ce couple
34:48c'est de savoir comment
34:50Georgette allait prendre la nouvelle.
34:52Ça ne pouvait pas bien se passer
34:54avec sa mère
34:56qui lui interdisait
34:58formellement
35:00de mettre qui que ce soit enceinte.
35:02L'adjudant Cruz imagine alors
35:04que Jean-Claude Doulieri
35:06a tué Dominique Ortiz
35:08pour mettre fin à une liaison
35:10que sa mère désapprouvait.
35:12Effectivement, il y a une intime conviction.
35:14La participation
35:16de Georgette Cruz
35:18reste à établir
35:20mais c'est
35:22Jean-Claude Doulieri, sûr.
35:24Pour nous, c'est sûr.
35:26En février 2002,
35:2811 mois après la disparition
35:30de Dominique Ortiz
35:32et 3 ans avant l'affaire,
35:34Jean-Pierre Fort,
35:36Doulieri et sa mère Georgette sont mis en examen
35:38pour enlèvement et séquestration.
35:40Tous deux sont incarcérés.
35:44Mais 4 mois plus tard,
35:46coup de théâtre.
35:48Faute d'aveu et faute de preuve,
35:50la justice ordonne leur remise en liberté.
35:54Les enquêteurs
35:56voient sortir de prison
35:58la mère et le fils
36:00la mort dans l'âme
36:02parce qu'effectivement, ils pensaient les avoir accrochés
36:04et l'intime conviction
36:06des enquêteurs ne suffit pas.
36:08En tant qu'enquêteur, c'est
36:10très, très frustrant.
36:12Oui, on peut dire que c'est un échec
36:14dans le sens où
36:16on a effectivement des faisceaux de présomption,
36:18on a des
36:20contradictions dans leurs auditions,
36:22des mensonges, des alibis
36:24créés de toutes pièces.
36:26Mais il nous manque l'essentiel.
36:28Il nous manque surtout le corps.
36:30Il aura donc fallu attendre
36:325 ans, la disparition
36:34de Jean-Pierre Fort,
36:36les révélations de Béatrice Frustieri
36:38et les fouilles du Cap Canaille
36:40pour que les enquêteurs retrouvent le corps
36:42qui manquait.
36:44Cette fois, Jean-Claude Doulieri ne peut
36:46plus échapper à la justice.
36:52Septembre 2008.
36:54Jean-Claude Doulieri comparaît d'abord
36:56devant les assises de Draguignan pour le meurtre
36:58de Jean-Pierre Fort.
37:00Après le coup de théâtre de 2007
37:02et la découverte des deux corps,
37:04le procès fait sale
37:06comble.
37:08Quand le procès de septembre 2008
37:10s'ouvre, alors là on a
37:12une pression médiatique beaucoup plus importante
37:14puisque les médias s'intéressent à cette affaire.
37:16Il y a énormément de journalistes.
37:18Il y a des médias parisiens,
37:20tout le monde est descendu
37:22pour savourer un petit peu
37:24cette galerie de personnages.
37:26L'ambiance dans la salle d'audience est une ambiance
37:28électrique, attisée par le crépitement
37:30des flashs des journalistes
37:32qui se mélangent à la souffrance
37:34des familles.
37:36J'en ai eu six.
37:38Je sais que ça ne me fera pas
37:40revenir mon petit frère, malheureusement,
37:42mais je veux qu'il soit puni.
37:44La foule est venue
37:46découvrir ce que la presse a baptisé
37:48les amants du Cap Canaille.
37:50Avec d'un côté
37:52un Jean-Claude Doulieri
37:54taciturne.
37:56Doulieri apparaît dans le box
37:58comme un homme qui avance
38:00à l'échafaud en chemise blanche,
38:02mal rasé, mal coiffé.
38:04Comme d'habitude, tête
38:06en bas,
38:08tout calme.
38:10Bon, pour pas changer,
38:12il dit qu'il n'y était pas,
38:14qu'il n'a rien fait.
38:16Et de l'autre côté, une Béatrice
38:18frustiérie qui comparaît libre
38:20et qui joue les vedettes.
38:22Elle est apprêtée,
38:24elle est parfaitement maquillée,
38:26magnifiquement peignée.
38:28Elle est belle et c'est déjà extrêmement
38:30blessant pour les familles.
38:32Elle était coiffée, pomponnée.
38:34Enfin, on aurait dit qu'elle...
38:36Elle n'est pas dans un procès,
38:38je vous le dis franchement.
38:40Tout le monde croyait que c'était une actrice.
38:42Tantôt elle souriait,
38:44tantôt elle pleurait,
38:46tantôt elle essuyait les larmes.
38:48Et puis, même que le président
38:50l'a repris,
38:52il a dit,
38:54mais on est un tribunal, madame.
38:56C'est presque une pièce de théâtre
38:58qui se joue dans l'enceinte
39:00du tribunal.
39:02D'ailleurs, dès le lever de rideau,
39:04le président de la cour assure le spectacle.
39:06Le président
39:08va ordonner
39:10l'ouverture d'une scellée.
39:12La famille ne sait pas encore
39:14quel va vivre probablement le cauchemar
39:16le plus atroce et le plus inenvisageable
39:18de son existence.
39:20C'est vrai qu'il a pris le crâne de Jean-Pierre Faure,
39:22presque à pleine main,
39:24pour justement le montrer
39:26comme ça, on était tous vraiment
39:28ménusés.
39:30Moi, j'avais jamais vu ça.
39:32Et c'est une scène assez surréaliste.
39:34Mais ce qui est le plus surréaliste, finalement,
39:36c'est de voir les deux accusés qui restent dans le box
39:38sans manifester
39:40ni regret,
39:42ni empathie particulière,
39:44en voyant le crâne de Jean-Pierre Faure
39:46sorti de son carton devant
39:48la cour d'assises.
39:50En fait,
39:52le président a pris cette initiative
39:54inhabituelle dans un but précis.
39:56Après que Jean-Pierre Faure a bien été tué
39:58froidement.
40:02Cette boîte crânienne a été
40:04transpercée de quatre impacts
40:06de coups de couteau.
40:08L'expert nous explique que pour donner
40:10quatre coups de couteau comme ça,
40:12il faut avoir envie de tuer.
40:16Béatrice Frustieri observe
40:18la réaction de ses beaux-parents
40:20avec un sourire en coin de bouche.
40:22Là, je suis scandalisé.
40:24Et je demande immédiatement au président
40:26de remarquer qu'elle est en train de sourire
40:28et de narguer ses beaux-parents
40:30et de lui demander ce qui l'a fait rire.
40:34Le président l'interroge.
40:36Elle ne se démonte pas.
40:38Elle explique
40:40qu'elle le sourit et juste,
40:42mais que c'est nerveux.
40:44Béatrice provoque
40:46ses beaux-parents
40:48et ignore superbement son ancien amant.
40:52Ce qui est étonnant, c'est qu'il n'y a pas
40:54un regard de l'un vers l'autre.
40:56Ils ne se regardent pas.
40:58Leurs regards ne se croisent pas.
41:00Quand elle va parler de lui, elle va dire
41:02Monsieur Doulieri, alors qu'il a été son amant.
41:04Il a des mots très durs envers elle.
41:06Il la traite de mythomane.
41:08Il la traite vraiment avec beaucoup de mépris
41:10voire d'agacement.
41:12C'est de la haine
41:14que se portent
41:16les anciens amants diaboliques.
41:18Et à la barre, les amants d'hier
41:20ne font aucun cadeau.
41:22D'abord, Béatrice Frustieri
41:24tente de charger Doulieri
41:26et minimise son rôle dans le meurtre.
41:28Voici comment elle raconte
41:30la nuit du drame.
41:36Béatrice explique que le soir des fées,
41:38elle rentre chez elle vers 20h.
41:40Elle doit aider sa mère à faire sa déclaration d'impôt.
41:42Qu'elle voit de la lumière chez elle.
41:44Jean-Claude et Jean-Pierre
41:46sont tous les deux seuls
41:48et boivent.
41:50Elle entend du bruit. Elle entend une bagarre.
41:52A priori,
41:54la soirée dégénère.
41:56Béatrice dit
41:58j'ai entendu un peu de bruit mais je ne me suis pas affolée.
42:00Pas plus que ça. Pour moi, c'était pas grave.
42:02Une demi-heure plus tard,
42:04Béatrice, qui est dans la maison voisine,
42:06rentre chez elle.
42:08Sans se douter une seconde,
42:10dit-elle, de ce qu'elle va découvrir.
42:12Elle rentre.
42:14Elle referme la vieillitrée. Quand elle allume,
42:16elle voit le corps de son mari dans un bain de sang.
42:18Couché sur le dos,
42:20les yeux ouverts.
42:22Doulieri est au fond de la pièce.
42:24Avec un couteau à la main,
42:26ensanglanté.
42:28Et Béatrice explique
42:30qu'elle entre enceinte,
42:32qu'elle hurle, qu'elle pleure.
42:34Mais qu'est-ce que tu as fait ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
42:36Elle dit je veux appeler la police.
42:38Doulieri m'en empêche. On peut l'imaginer.
42:40Doulieri m'oblige.
42:42Il a toujours son couteau
42:44à transporter Jean-Pierre,
42:46à le mettre dans le coffre de la voiture
42:48et ensuite à partir vers le Cap Canaille.
42:54A l'entendre, Béatrice Frustieri
42:56aurait donc agi sous la menace de son amant.
43:00Pourtant, à l'audience,
43:02une pièce à conviction va remettre en cause sa version.
43:06Après que Béatrice Frustieri vienne dire
43:08qu'elle était menacée sous la coupe de cet homme sanguinaire
43:10qui était son amant
43:12et qu'elle ne savait pas comment elle avait pu tomber
43:14sous le charme de ce monstre,
43:16on va écouter les écoutes téléphoniques.
43:18Cette communication téléphonique
43:20a pour objet de prendre un rendez-vous
43:22chez un médecin parce que
43:24Doulieri a mal au dos.
43:26Il nous a donné rendez-vous le vendredi...
43:28Et elle lui dit tu te rends compte ?
43:30Il me demande depuis combien de temps tu as mal au dos.
43:32Alors en substance,
43:34lui lui dit ah bon et tu lui as dit quoi ?
43:36Et elle lui répond or
43:38environ 15 jours.
43:40Et puis elle le glousse.
43:4615 jours plus tôt,
43:48effectivement cet homme s'est fait un tour d'or
43:50parce qu'il a porté quelque chose
43:52de très lourd,
43:54le cadavre de Jean-Pierre Faure
43:56dont elle dira qu'il était lourd
43:58comme un âne mort.
44:04Il rit.
44:06Il rit et puis il se donne rendez-vous.
44:08Lorsque cette écoute téléphonique
44:10retentit dans cette
44:12salle d'audience,
44:14c'est un silence de mort
44:16après l'écoute téléphonique.
44:18Béatrice maintenait
44:20que tout ce qu'elle avait fait, elle l'avait fait sur la peur,
44:22qu'elle avait peur qu'il allait la tuer.
44:24Mais avec ces écoutes téléphoniques,
44:26je vous prie de croire
44:28que la peur n'y était pas.
44:30On a vraiment l'impression d'un couple d'amoureux
44:32qui gazouillent et non pas d'une femme
44:34qui vit dans la peur comme elle, elle le dit.
44:36On voyait très bien qu'il lui manquait,
44:38qu'elle voulait le voir,
44:40mais elle n'avait pas peur.
44:42Béatrice est en difficulté.
44:44Jean-Claude Doulieri
44:46tente alors à son tour de lui faire porter le chapeau.
44:52Dans le boxe, il crie son innocence
44:54tout en disant qu'un jour la vérité jaillira,
44:56que seule Béatrice Rustieri,
44:58qui a seule montré l'endroit
45:00où cela s'était passé,
45:02connaît la vérité.
45:04Si elle a désigné l'endroit
45:06où le corps a été projeté,
45:08il n'y a qu'elle qui dit que c'est
45:10Jean-Claude Doulieri
45:12qu'il y a à jeter.
45:14A l'appui de cette thèse,
45:16la défense de Doulieri fait valoir
45:18que si quelqu'un avait intérêt
45:20à voir Jean-Pierre Faure disparaître,
45:22c'est bien Béatrice.
45:24L'avantage que Béatrice avait
45:26à voir disparaître son mari,
45:28c'est qu'elle était en instance de divorce
45:30et que son mari était devenu
45:32elle.
45:34Elle, une jolie femme,
45:36avec un homme
45:38plutôt quelconque.
45:40Ce n'est pas
45:42le prince charmant à ses yeux.
45:44En tout cas, Jean-Pierre Faure ne représentait
45:46plus trop à ses yeux
45:48le prince charmant.
45:50Rien ne le prouve.
45:52Il s'est dit que Béatrice avait utilisé Jean-Claude
45:54pour faire disparaître Jean-Pierre.
45:56Le 18 septembre 2008,
45:58le verdict tombe.
46:00Béatrice Frustieri
46:02est condamnée pour complicité
46:04à 20 ans de prison.
46:06Jean-Claude Doulieri,
46:08quant à lui, est cop de 30 ans
46:10pour meurtre.
46:12La peine maximale.
46:14Et l'homme n'en a pas encore fini
46:16avec la justice.
46:22Un an et demi plus tard,
46:24à Aix,
46:26Jean-Claude Doulieri compare à nouveau devant les assises,
46:28cette fois pour le meurtre
46:30de Dominique Ortiz.
46:34Face à lui, un homme
46:36attend ce moment depuis près de 9 ans.
46:38Manuel Ortiz, il répète régulièrement
46:40qu'il est mort le jour où sa fille est morte.
46:42Et que depuis,
46:44il survit pour savoir la vérité.
46:46Moi, tout ce que je voulais, c'est avoir
46:48une raison.
46:50Pourquoi il avait assassiné ma fille ?
46:52Parce que s'il ne voulait pas,
46:54il avait qu'à dire,
46:56bon, casse-toi.
46:58Pourquoi il a assassiné ma fille ?
47:00Pourquoi il a assassiné l'enfant,
47:02son enfant qu'elle portait ?
47:04L'audition du père de la victime
47:06restera ancrée, je crois,
47:08pour toujours.
47:10De la dignité
47:14de ce père venu porter
47:16à la cour d'assises et au juré
47:19l'incompréhension
47:21de la disparition de sa fille.
47:23Le témoignage du père
47:25émeut l'auditoire.
47:27Sauf l'accusé,
47:29qui reste impassible.
47:31Il dit rien.
47:33À part qu'il se demande
47:35ce qu'il fait là. Il est innocent,
47:37il n'a jamais rien fait,
47:39il n'a jamais tué personne.
47:41Je n'ai rien à voir là-dedans.
47:43Je ne peux pas expliquer
47:45ce qui me concerne.
47:48Il était innocent dans le premier dossier,
47:50il est innocent dans le second.
47:52C'est un coup monté.
47:54Je ne suis pas concerné
47:56à ce qui se passe, à ses démarches.
47:58Finalement, Doulieri sera
48:00égal à lui-même jusqu'à la fin,
48:02au mépris de Dominique
48:04et devant son père, devant Manuel Ortiz.
48:06Face au mutisme de Doulieri,
48:08l'avocate générale en est réduite
48:10à échafauder des hypothèses
48:12sur les circonstances de la disparition
48:14de la jeune fille.
48:17Le drame se serait noué à l'hôtel
48:19lors de la dernière nuit que Doulieri
48:21et Dominique Ortiz ont passée ensemble.
48:23Ce qui s'est dit dans cette chambre
48:25et dont on ne saura jamais exactement
48:27la nature,
48:29on peut en tracer
48:31quand même les contours.
48:33Dans le dossier, on voit qu'il dit
48:35à des témoins, je vais devoir faire un choix.
48:37Il vient et il a fait son choix.
48:39Sa mère exerce une pression trop importante.
48:41Donc il lui demande de ne pas garder l'enfant.
48:43Et donc Jean-Claude,
48:45il n'a pas d'autre issue
48:47que d'éliminer Dominique,
48:49choisissant cette solution-là
48:51pour ne pas se séparer de sa mère.
48:53Plus tard,
48:55sans doute chez lui,
48:57Jean-Claude Doulieri aurait poignardé
48:59Dominique Ortiz,
49:01puis aurait jeté son corps du haut
49:03des falaises du Cap Canaille.
49:05Les liens entre lui
49:07et Georgette étaient plus forts
49:09que ceux avec Dominique.
49:11Voilà pour le mobile du crime.
49:15Quant au rôle exact
49:17joué par sa mère dans cette affaire,
49:19le mystère demeure.
49:21Georgette Roux, décédée en 2005,
49:23n'est plus là pour répondre.
49:25Et à la barre, l'accusé
49:27veille sur sa mémoire.
49:29Et il explique qu'il ne supporte plus
49:31qu'on parle de sa mère.
49:33Je lui dis, est-ce que votre mère
49:35est quelque chose pour la disparition
49:37de Dominique Ortiz ?
49:39C'est la seule fois où il a été
49:41vraiment humain et actif.
49:43Il crie dans la salle d'audience,
49:45non, elle n'est pour rien.
49:47C'est la seule fois où il a eu
49:49une réaction normale.
49:51Au terme de 3 jours d'audience,
49:53Jean-Claude Doulieri
49:55est condamné à 20 ans de prison pour meurtre.
49:57Un procès qui laisse
49:59pourtant un goût amer
50:01au père de la victime.
50:05Je sors de ce procès
50:07déçu, déçu
50:09parce que j'attendais des réponses
50:11à toutes mes questions.
50:13Pourquoi ?
50:15Il aurait pu simplement me dire, oui,
50:17ta fille me cassait les pieds,
50:19on s'est disputé,
50:21ça a dégénéré.
50:23Bon, après, après,
50:25je me suis senti couessé
50:27et j'ai essayé
50:29de m'enlever de là, c'est tout.
50:33Me demander, me demander
50:35simplement pardon.
50:37Essayer quand même
50:39d'avoir un rapport humain.
50:41Ma fille avait 30 ans.
50:43Elle avait toute la vie devant elle.
50:47Bon, c'est vrai que
50:49quand on parle d'un coupable,
50:51on trouve que 20 ans de prison,
50:53c'est dur, c'est tout.
50:55Mais ma fille, elle reviendra jamais.
50:57Et elle avait une espérance de vie
50:59d'une quarantaine d'années.
51:01Elle avait une espérance de se marier,
51:03d'avoir des enfants,
51:05de mener une vie.
51:09Aujourd'hui,
51:11Béatrice Frustieri et Jean-Claude Douliry
51:13ont épuisé tous les recours possibles.
51:17Elle purge
51:19sa peine de 20 ans de prison
51:21à la maison d'arrêt des Baumettes, à Marseille.
51:25Lui est incarcéré à Draguignan,
51:27dans le Var.
51:29Ses peines ont été confondues.
51:31Il devrait rester en détention au moins jusqu'en 2020.
51:33Dominique Ortiz
51:35a été inhumée l'an dernier
51:37à Marseille,
51:398 ans après sa disparition.
51:45Quant à la famille Fort,
51:47elle attend encore
51:49que la justice lui rende
51:51le corps de Jean-Pierre.