Jean-Michel Lemétayer, président de la Fnsea : « La Fnsea n’a jamais été aussi vivante ! »

  • il y a 3 mois
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00:00La FNSEA avait obtenu de bons résultats lors des élections chambres en 2007 et à nouveau lors des élections MSA plus récemment.
00:09Ce début d'année.
00:11Pourtant elle apparaît comme affaiblie au regard de la crise laitière, des manifestations de la pluie et plus récemment des manifestations des céréaliers, notamment d'Ile-de-France.
00:21Est-ce que la FNSEA n'est pas débordée et même débordée par ses propres troupes ?
00:25Écoutez, le seul vrai jugement sont quand même les urnes.
00:29Donc vous avez eu raison de dire, elle apparaît.
00:32Parce que les urnes ont parlé en janvier, là, il y a moins de deux mois, après 2009.
00:39Ou même dans les départements où il y avait une forte concurrence syndicale avec une participation aux urnes comme on en retrouve dans aucun autre secteur professionnel.
00:51Puisque près de 50% dans le collège exploitant et 45% dans le collège employeur, que nous sommes dans les deux collèges, ont participé au vote à la MSA.
01:02Et on a gagné dans tous les départements et très largement dans tous les départements.
01:06Donc si vous appelez ça être affaiblie, je ne crois pas.
01:10Donc il y a sans doute les images et la réalité.
01:15La réalité elle est simple concernant la FNSEA.
01:19Il faudrait que d'autres syndicats se regardent un peu de la même manière dans la glace.
01:25Ce sont les adhérents.
01:27On va sans doute, du fait de la crise laitière ou d'autres crises, le bilan de santé de la PAC ou la crise arboricole,
01:34de toute façon perdre peut-être ici ou là des adhérents.
01:37Puis dans d'autres secteurs on en gagne.
01:39On fera le bilan puisque les cotisations c'est encore trop tôt pour faire le bilan.
01:44Mais la réalité est pour avoir fait de nombreuses assemblées générales.
01:49C'est une très forte participation à l'assemblée générale.
01:52Nous attendons une des plus importantes participations à notre prochain congrès.
01:57Je dirais que la FNSEA n'a jamais été aussi vivante.
02:01Et que s'il y avait des élections demain, on serait sans doute surpris du score.
02:05Parce que ce qu'on oublie, c'est qu'une seule production, ce n'est pas la FNSEA.
02:13La FNSEA, c'est toutes les productions, tous les territoires, tous les dossiers.
02:18Et je prends un dossier qui peut paraître marginal.
02:21Et pourtant, Dieu sait, si le jour où il y a eu une décision du gouvernement, tout de suite c'est rebellé.
02:28Et on a appelé immédiatement évidemment nos départements à la FNSEA, c'est le photovoltaïque.
02:32Quand on a changé le montant d'achat du kilowatt, voilà.
02:42La FNSEA, ce n'est pas que le lait.
02:44C'est le lait, les céréales, l'arbreau et tout ça.
02:47Mais c'est aussi la fiscalité, l'emploi, l'énergie renouvelable.
02:51Regardez la Vendée.
02:56Frappée, non mais pardonnez-moi, frappée par la tempête Cynthia.
03:00Qui s'occupe des paysans le long du littoral en Vendée et en Charente-Maritime ?
03:06Si ce n'est la FNSEA de Vendée, les FNSEA de Vendée et de Charente-Maritime.
03:10Et si on devait voter demain en Vendée, je peux vous assurer que les seuls à nous défendre, ce sont les FNSEA.
03:16Donc voilà.
03:18Les manifestations traduisent tout de même certains mécontentements.
03:23Mais non mais attendez.
03:25La plus grosse manifestation, ça a été 52 000 personnes le 16 octobre dans toutes les capitales régionales.
03:32Si vous appelez ça là encore un affaiblissement de la FNSEA, ou bien au contraire, c'est la deuxième...
03:38Nous n'avions pas connu un tel rassemblement depuis les années 80...
03:46Je vais m'être provocateur.
04:01La FNSEA, mais via la FNPE, parce que n'oublions pas que dans le secteur des productions, ce sont d'abord nos fédérations spécialisées.
04:10Mais là je dis sans provocation, plus encore aujourd'hui qu'hier, l'accord du 3 juin.
04:17Pourquoi je dis ça ?
04:19Parce que c'est sur la base de l'accord du 3 juin qu'a été faite cette mobilisation anti-FNSEA.
04:29Qu'est-ce que c'est que ce syndicat qui signe un accord dont on avait nous-mêmes qualifié qu'il était insuffisant pour le revenu,
04:38mais malgré tout nécessaire.
04:40Et j'ai cru entendre ou lire ces derniers jours, au moment où les industriels ne veulent plus le respecter,
04:46de la part des mêmes qui ont appelé et qui ont même été extrêmement critiques à l'égard de la FNSEA,
04:55j'entends les mêmes dire qu'il faut le faire respecter, l'accord.
04:58Il a au moins le mérite d'exister.
04:59Non mais attendez, c'est plus que du mérite.
05:02Parce qu'on l'avait toujours dit, il est insuffisant et il protège.
05:06Il protège de quoi ?
05:08Du chacun fait ce qu'il veut, de la part des entreprises.
05:12Et d'ailleurs on l'avait pourtant expérimenté.
05:14Et c'est d'ailleurs le thème de notre congrès.
05:18Sauf que quand, dans notre secteur agricole comme dans d'autres secteurs,
05:25nous traversons une aussi dure crise, être un syndicalisme responsable, c'est très difficile.
05:34Alors justement, vous allez en parler au congrès, le syndicalisme responsable.
05:37Alors concrètement, qu'est-ce que c'est et qu'est-ce que ça apporte concrètement pour l'agriculteur ?
05:42Le syndicalisme responsable, c'est d'abord rappeler qu'il est avant tout revendicatif.
05:48Parce que vous ne prenez vos responsabilités que quand vous avez négocié.
05:53Donc, cette maison FNSEA, avec ses fédérations spécialisées, travaille tous les dossiers.
06:00Et pas seulement agricole, de filière, mais aussi d'environnement, de fiscalité, d'Europe, le monde, à l'OMC, à l'OMC.
06:10Qui est-ce qui est présent à Genève quand il faut défendre, j'allais dire presque la peau du paysan français ?
06:16Donc c'est tout ça la FNSEA.
06:19Donc, revendicatif.
06:21Et puis, il y a toujours, à un moment donné, sur le dossier, quel qu'il soit, une négociation.
06:31Et à un moment donné, il faut savoir dire oui ou dire carrément non.
06:35Et quand on dit non, ça doit pouvoir aller, comme on l'a fait le 16 octobre, comme on l'a fait avant l'été,
06:42avec les grandes surfaces, qui a abouti aux brigades de contrôle dans les magasins,
06:48et là où aussi encore les dossiers nous donnent raison.
06:51Ça peut aller jusqu'à passer à l'action, comme vient de le faire encore, en ce début de semaine,
06:58un certain nombre de départements sur le dossier laitier.
07:02Ou d'autres sur les dossiers des grandes cultures à Paris, ou l'arboriculture à Paris ou ailleurs, et ainsi de suite.
07:12Donc, c'est le plus dur.
07:15Être un syndicalisme que revendicatif, je crois que tout le monde sait faire.
07:21Être un syndicalisme revendicatif et en même temps responsable, et j'ajoute pourquoi responsable,
07:27parce que nous ne devons jamais oublier que nous sommes, c'est un mot qui quelquefois choque, mais il est simple,
07:33nous sommes aussi entrepreneurs.
07:36Parce que notre ferme, même toute petite, c'est une entreprise.
07:43On est de l'entreprise individuelle, en agriculture, à des entreprises qui ont de nombreux salariés.
07:52Et vous imaginez, vous, le monde de l'entreprise, même toute petite, qui n'aurait pas de représentant, qui assume ?
07:59Et j'ajoute que quand je parle de cela, si je prends le dossier emploi, nous sommes les seuls représentants,
08:06dans tout le débat social, avec les partenaires sociaux.
08:10Et vous savez que tous les producteurs qui ont de la manœuvre, savent que c'est ici, à la FNSA,
08:17que se discute tout le débat avec les partenaires sociaux.
08:21Et notamment dans un débat extrêmement important, puisqu'il est, j'emploie un vocabulaire un peu technocratique,
08:29il est hors champ, c'est-à-dire qu'on essaie d'avoir un débat avec les partenaires sociaux
08:34qui soit spécifique à l'agriculture, compte tenu de notre réalité.
08:37Et c'est validé d'ailleurs, par des accords.
08:40On l'a vu sur la prévoyance, on l'a vu sur la santé, etc.
08:44Donc, être à la FNSA, c'est défendre son revenu, c'est défendre le prix des marchés,
08:52mais c'est tous les autres dossiers qui doivent être défendus au ministère de l'Agriculture,
08:59au ministère de l'Environnement, à Bercy, au ministère de la Santé.
09:05Prenons un exemple, au ministère de la Santé.
09:08Il m'est arrivé, contre cette dernière campagne, de conduire une délégation
09:12pour qu'on se comprenne en matière de promotion du vin,
09:16dans le cadre de l'AITIC et la loi Evin, publicité, pas publicité,
09:22si on veut se défendre et se battre par rapport à une activité extrêmement importante pour notre pays.
09:29Donc, vous imaginez la lourde responsabilité,
09:34au-delà d'être responsable, c'est la lourde responsabilité qui pèse sur les épaules des dirigeants de la FNSA.
09:40Vous nous présentez le syndicalisme responsable, je dirais, comme un syndicalisme d'avenir.
09:44Nous reparlerons tout à l'heure de l'avenir du syndicalisme.
09:47Est-ce que ce syndicalisme d'avenir ne se fait pas au détriment du court terme pour l'agriculteur
09:54et du revenu court terme, comme c'est le cas, justement, sur ce type d'accord du 3 juin, par exemple ?
09:59La difficulté, elle, ne vient pas de là.
10:03La difficulté, elle, naît d'avoir la capacité à expliquer un choix qui est fait, surtout quand ce choix est difficile.
10:14Et si on devait regarder les choses avec un peu de recul sur l'an dernier, par exemple, cet accord sur le nez,
10:22mais d'autres décisions, l'exemple du bilan de santé aussi, et je pourrais prendre plein d'autres exemples.
10:26C'est comment, après avoir mené toute l'action qu'un syndicat comme le nôtre doit être capable de mener,
10:36avec sa force de représentation, c'est comment, lorsqu'on franchit le pas de dire oui ou de dire non, d'ailleurs,
10:45mais en tout cas, si on prend l'exemple du 3 juin, d'avoir finalement acté, nous, dans notre...
10:51Je pense à Henri Brichard, évidemment, le président de la FNPL, et il l'a fait avec le soutien de son conseil d'administration,
10:56donne son accord à une évolution des prix, puisque c'était de ça dont il était question,
11:04c'est comment on fait pour que ce soit compris sur le terrain, et assumé ensuite par nos responsables départementaux,
11:16parce qu'on prend nos responsabilités dans une négociation à Paris, mais je pourrais prendre un exemple à Bruxelles ou ailleurs,
11:22mais prenons, n'allons pas trop loin de nos propres fermes, à Paris, et si vous n'avez pas immédiatement le relais
11:30pour expliquer une position difficile à prendre, vous êtes dans la situation qu'on a connue,
11:37et c'est vrai que nous avons été défaillants en communication sur la responsabilité qu'on a prise le 3 juin.
11:46Les gens comprennent mieux aujourd'hui, quand vous publiez, vous ne pouvez pas le faire le 3 juin,
11:51quand vous expliquez au terrain, vous présentez les chiffres au terrain, les courbes au terrain,
11:57que le prix de lait en France a été un des plus élevés des 27 pays de l'Union Européenne,
12:06c'est tellement vrai que c'est un des arguments de nos industriels pour ne pas respecter l'accord.
12:11Nous, on savait ça le 3 juin.
12:14Quand Henri Brichard a pris ses responsabilités le 3 juin, il savait qu'il allait permettre aux producteurs français
12:22d'avoir un prix meilleur que nos voisins allemands, meilleur que nos voisins belges.
12:28Mais c'est plus dur à expliquer que de dire c'est scandaleux, regardez c'est vendu, parce qu'on nous a traité de tous les noms,
12:37c'est 400€ la tonne qu'il faut, bien sûr qu'il faut 400€ la tonne.
12:42Mais ça existe 400€ la tonne, en Franche-Comté.
12:48Les producteurs de lait qui vendent leur lait pour faire du Comté, en Savoie, pour faire du Roblochon ou de Beaufort.
12:56Mais oser dire que c'est possible, quand on fait du beurre et de la poudre dans un marché où vous êtes inondés dans notre pays,
13:05d'importation belge, allemande ou ailleurs, alors c'est là qu'est la limite.
13:09Est-ce qu'on doit être que revendicatif ?
13:11Et après tout, on a fait notre boulot, on a dénoncé une situation, chacun se débrouille, ou on assume ?
13:18Ben nous on assume. On assume parce que, je vais vous dire, la FNSFA, elle se porterait mieux si elle n'avait pas signé le droit de juin.
13:29Les producteurs de lait auraient eu moins d'argent en recette de leur vente.
13:36A la limite, faut-il mieux que la FNSFA soit faite en violée, ou que les paysans aient moins de recettes ?
13:43Moi je préfère avoir défendu la recette, même si ce n'est pas suffisant pour le revenu,
13:48mais je préfère avoir défendu le meilleur niveau de recette possible par l'industrie laitière,
13:53pour les producteurs français, quitte à ce que la FNSFA se fasse en violée ou ne soit pas comprise pendant quelques semaines.

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