• il y a 5 mois
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Aujourd’hui nous allons parler de planification écologique. En effet, la crise dont nous faisons face est le reflet d’un laissez faire économique et une confiance aveugle au marché pour résoudre les problèmes sociaux et environnementaux par la régulation des prix.

Nous devons maintenant reprendre le contrôle de ce système économique afin de revenir sous le seuil des limites planétaires et offrir un niveau de vie décent pour toutes et tous.

Vous êtes sur le podcast Circular Metabolism, le podcast pour mieux comprendre le métabolisme de nos sociétés et leurs impacts socio-environnementaux.

Pour parler de ces sujets, j’ai le plaisir d'accueillir Cédric Durand, professeur associé à l’Université de Genève. Il est l’auteur des livres Techno-féodalisme: critique de l’économie numérique et plus récemment Comment bifurquer: les principes de la planification écologique co-écrit avec Razmig Keucheyan

Dans cet épisode nous allons explorer comment les crises actuelles sont liées à une perte de contrôle, des exemples passés de planification économique pour enfin proposer des principes pour une planification écologique du XXIè siècle.

SOMMAIRE

00:00:00 Introduction

La planification aujourd'hui
00:02:02 La “crise de contrôle”
00:09:50 Requestionner le capitalisme vert

Histoire de la planification
00:19:12 Comment a-t-on planifié jusqu’à présent ?
00:30:26 Socialisation de l’investissement
00:34:56 Planification et économie de guerre

Avenir de la planification
00:41:01 Quelle planification pour demain ?
00:49:39 Quelles mesures concrètes ?
00:54:08 Budget multi-critères
00:56:44 Besoins essentiels vs. superflus
01:11:15 Prochaines étapes ?
01:15:12 La place du numérique ?

RÉFÉRENCES

Aspects clés de la planification : Besoins • Comptabilité • Socialisation de l’investissement • Emancipation de la demande

Livres de l'invité :
• Techno-féodalisme : Critique de l’économie numérique (2021)
• Comment bifurquer (2024) avec Razmig Keucheyan

Autres livres :
• Marx in the Anthropocene (2023), Kohei Saito
• The Price is Wrong: Why Capitalism Won't Save the Planet (2024) Brett Christophers

Personnes citées :
• Göran Therborn : Sociologue marxiste
• Christian Gollier : Economiste, défenseur de la taxe carbone.
• Otto Neurath (1882-1945) : Philosophe et économiste. Un des principaux penseurs de la planification économique et sociale.
• Oskar Lange (1904-1965) : Economiste
• Friedrich Hayek (1899-1992) : Économiste et philosophe, défenseur du libéralisme et critique de l’interventionnisme étatique.
• Erik Olin Wright (1947-2019) : Sociologue, ayant travaillé sur la théorie de la classe sociale et inventeur du concept d’utopie concrète.
• Agnès Heller (1929-2019) : Philosophe et sociologue, inventeuse du concept de “dictature sur les besoins” dans le contexte du socialisme réel.
Transcription
00:00:00l'heure n'est certainement pas à la fin du travail.
00:00:02Bifurquer, ça veut dire d'abord et avant tout
00:00:04démanteler des activités qui sont sales.
00:00:06Donc il va falloir continuer à produire les choses qu'on ne va pas pouvoir consommer
00:00:09et simultanément travailler à démanteler un héritage néfaste.
00:00:13La bifurcation écologique va plutôt être une grande bataille.
00:00:16Il y a collectivement des comportements écologiques indécents
00:00:19qui seront sortis du domaine des possibles.
00:00:21Jean Covici avec Jif Project lui dit
00:00:22ben voilà, ça serait deux vols par personne au cours de sa vie.
00:00:26Si certains ont les moyens de s'acheter de la viande tous les jours
00:00:29ou de voyager régulièrement au bout du monde etc.
00:00:32alors que d'autres ne l'ont pas, ça ne pourra pas avoir lieu.
00:00:34Donc la question de la justice écologique, c'est quelque chose qui est nécessaire.
00:00:38Donc il y a cette dimension si vous voulez écologie punitive qu'on assume.
00:00:44Aujourd'hui, nous allons parler de planification écologique.
00:00:47En effet, les crises que nous traversons sont le reflet d'un laisser-faire économique
00:00:50et une confiance aveugle au marché pour résoudre les problèmes par la régulation des prix.
00:00:54Nous devons maintenant reprendre le contrôle de ce système économique
00:00:57afin de revenir sous le seuil des limites planétaires
00:01:00et offrir un niveau de vie décent pour toutes et tous.
00:01:03Vous êtes sur le podcast Circular Métabolisme,
00:01:05le podcast pour mieux comprendre le métabolisme de nos sociétés
00:01:08et leurs impacts sociaux-environnementaux.
00:01:11Et pour parler de ces sujets, j'ai le plaisir d'accueillir Cédric Durand,
00:01:13professeur associé à l'Université de Genève.
00:01:16Il est l'auteur des livres Technophéodalisme, Critique de l'économie numérique
00:01:20et plus récemment Comment bifurquer les principes de la planification écologique,
00:01:24co-écrit avec Rasmig Keshayan.
00:01:26Dans cet épisode, nous allons voir dans quelle mesure
00:01:28une planification écologique est nécessaire aujourd'hui,
00:01:31ce que nous apprennent les tentatives du passé
00:01:34et jusqu'où on pourrait pousser la planification dans le monde à venir.
00:01:39Bonjour Cédric Durand.
00:01:40Bonjour.
00:01:41Merci de passer.
00:01:42Je me lance directement avec une citation de la page 108.
00:01:46Évidemment, on est dans le podcast Circular Métabolisme,
00:01:49donc je vais me lancer directement.
00:01:52La crise écologique correspond à un désajustement du métabolisme de nos sociétés
00:01:56par rapport aux cycles permettant à la biosphère de se régénérer.
00:02:00Elle peut être conçue comme une crise de contrôle.
00:02:03Oui, donc cette idée est effectivement tout à fait centrale dans le livre,
00:02:07l'idée qu'il faut penser la crise écologique du point de vue de l'humanité
00:02:11en tant qu'entité, espèce capable d'agir sur son devenir.
00:02:16Et agir sur son devenir, c'est prendre conscience
00:02:20de la transformation de notre rapport à la nature
00:02:22et du fait que ce qui était le programme cartésien
00:02:24de se rendre comme maître et possesseur de la nature
00:02:27est finalement aujourd'hui un programme qui est complètement dans l'impasse
00:02:30tout simplement parce que cette tentative
00:02:32de se rendre comme maître et possesseur de la nature
00:02:35s'est retournée contre l'humanité elle-même et contre la nature en général
00:02:38dans la mesure où notre capacité à maîtriser de plus en plus la nature
00:02:42s'est en fait retournée contre nous
00:02:44puisque l'emprise sur la nature aujourd'hui est quelque chose qui est
00:02:47une emprise qui est destructrice, qui détruit la nature elle-même
00:02:50et qui aussi affecte le devenir possible de l'humanité.
00:02:52Donc poser cette idée de crise de contrôle, c'est bien
00:02:55poser deux choses absolument fondamentales.
00:02:58La première chose, c'est d'une certaine façon
00:03:01l'irréductibilité de la nature au point de vue de l'humanité.
00:03:04Il y a une autonomie de la nature et finalement la connaissance humaine
00:03:07ne pourra jamais atteindre une perfecte connaissance de la nature.
00:03:10On est toujours en second dans notre rapport à la nature.
00:03:14Par exemple, ce travail, cette idée est très bien démontrée par Koei Seito
00:03:19dans son livre sur Marx dans l'Anthropocène, il réfléchit beaucoup à cette idée.
00:03:22Et puis il y a une deuxième idée qui à mon avis est aussi tout à fait importante
00:03:25c'est qu'il y a néanmoins une singularité de l'humanité.
00:03:28C'est que l'humanité elle dispose d'une forme de réflexivité sur sa propre action
00:03:31et on pourrait suivre ici un sociologue qui est le sociologue
00:03:34Goran Thornborn qui dit la chose suivante, qui dit que
00:03:37si on veut être optimiste, on peut observer que jamais dans l'histoire de l'humanité
00:03:41celle-ci n'a eu autant conscience de sa propre capacité d'action.
00:03:45Effectivement pour observer les destructions qu'elle génère
00:03:47mais il y a une forme de prise de conscience de ça.
00:03:50Si on a ces deux éléments, d'une part l'idée que
00:03:53on doit être retenu d'une certaine façon par rapport à la nature
00:03:56puisqu'on est toujours dérivé par rapport à celle-ci
00:03:58mais d'un autre côté qu'on a collectivement une capacité d'agir
00:04:01et bien la question qui se pose c'est
00:04:03que fait-on face à cette crise écologique ?
00:04:05Comment peut-on agir en tant qu'humanité pour reprendre le contrôle
00:04:09ou plus ou moins, plutôt que reprendre le contrôle
00:04:12peut-être de manière un peu plus prudente pourrait-on dire
00:04:15contenir les dérèglements que l'on a dégénérés par le passé
00:04:19et mettre la crise écologique sous contrôle ?
00:04:22En effet il y a certains fondamentaux de l'écologie
00:04:25mais aussi de notre manière de fonctionner
00:04:28qui sont en désaccord et il faut
00:04:31je ne sais pas si c'est juste avec une qualification et une quantification
00:04:36on va arriver mais en tout cas retrouver cette harmonie
00:04:40qui par le passé également n'était pas tout le temps là
00:04:43c'est-à-dire que même à les débuts 20e
00:04:46on avait aussi ce mismatch entre la vitesse qu'on produit
00:04:52la vitesse qu'on est en train de fonctionner
00:04:54et puis notre contrôle, le contrôle est vraiment un peu au centre
00:04:58Oui vous avez raison, la crise écologique s'accélère
00:05:01mais elle ne date pas d'hier, les dérèglements ont pu exister
00:05:04au niveau de telle ou telle société
00:05:07ou tel ou tel écosystème qui a été déstabilisé par le passé
00:05:10par d'autres genres de sociétés humaines que celles que l'on connaît aujourd'hui
00:05:13Ce qu'il y a de singulier dans la crise écologique contemporaine
00:05:16c'est son caractère absolument global
00:05:18et lié à un système économique particulier
00:05:20qui poussant à l'accumulation de profits
00:05:23a une logique d'expansion perpétuelle
00:05:26qui vient confronter le caractère cyclique
00:05:32mais au sens de reproduction simple de la nature
00:05:35Donc on a le capital qui suit une logique de reproduction étendue
00:05:39c'est-à-dire toujours plus large
00:05:41qui doit s'appuyer sur un espace de reproduction simple
00:05:44qui est celui de la nature
00:05:45et entre les deux, le désajustement va grandissant
00:05:48C'est le constat qui, à notre sens en tous les cas
00:05:51est le point de départ de la réflexion qu'on doit avoir
00:05:54Dans votre question, il y avait aussi
00:05:56quelque chose d'autre qui était extrêmement intéressant
00:05:58c'est la dimension d'une part quantification
00:06:00et la dimension qui est peut-être plus politique, idéologique, mode de vie, etc.
00:06:06C'est vraiment exactement là où on a essayé de travailler
00:06:09La planification écologique au fond c'est deux choses
00:06:12c'est du calcul et de la politique
00:06:15du calcul parce que si on ne prend pas la mesure
00:06:20au sens technique de mesure
00:06:22de l'impact de nos activités sur la nature
00:06:25il est extrêmement difficile pour nous de réguler ce rapport-là
00:06:31On peut arriver à le faire à un niveau local
00:06:34peut-être au niveau du local d'une communauté par rapport à une forêt
00:06:36par rapport à une rivière
00:06:38mais l'impact de l'humanité aujourd'hui
00:06:40s'inscrit véritablement à l'échelle de la planète elle-même
00:06:43et à cette échelle-là, les individus n'ont pas un point de vue direct
00:06:46Il faut des appareils, des communautés
00:06:48pour travailler, mesurer, prendre conscience
00:06:50Donc ça c'est la partie calcul
00:06:52et le calcul doit être aussi un calcul
00:06:55qui doit permettre de se projeter et de définir des trajectoires
00:06:58dans ce qui est tolérable, acceptable
00:07:01Mais il y a aussi la question politique
00:07:03parce qu'il n'y a pas une vérité scientifique par rapport à la crise écologique
00:07:07Il y a différentes trajectoires possibles pour la surmonter
00:07:10Il y a différentes crises écologiques dans la crise écologique en général
00:07:13Donc là il y a de la délibération
00:07:15et la délibération c'est comparer des choses qui ne sont pas comparables
00:07:19qui ont leur propre qualité intrinsèque
00:07:22et c'est donc du jugement de valeur collectif
00:07:24et donc c'est de la politique
00:07:26Et cette idée qu'il faut qu'il y ait de la politique
00:07:28pour pouvoir définir des scénarios
00:07:31pour contenir cette crise écologique
00:07:34est aussi quelque chose qui dit qu'il faut y avoir de la politique
00:07:36pour définir le genre de vie que l'on veut
00:07:39pour s'inscrire dans ces scénarios
00:07:41Donc voilà, cette espèce de tension
00:07:43entre technique d'un côté mesure
00:07:45et d'un autre côté politique, mode de vie, pratique
00:07:48est vraiment fondamentale dans ce que l'on essaie de faire dans ce livre
00:07:53Et on retrouve ici un héros, un de nos héros du livre
00:07:56C'est Otto Neurath
00:07:58qui est un des penseurs de la planification au XXe siècle
00:08:02qui avait conscience dans son idée de planification
00:08:04mais était déjà au centre la question des générations futures
00:08:06et la question des ressources naturelles
00:08:08Mais Otto Neurath disait la chose suivante
00:08:10Il disait que la planification démocratique
00:08:12c'est en fait le combat entre les experts et les personnes ordinaires
00:08:16Et ce combat entre les experts et les personnes ordinaires
00:08:19c'est vraiment cette idée de confronter
00:08:21la question de la politique
00:08:23et la question du calcul, du technique
00:08:25Et le travail, la proposition portée dans ce livre
00:08:28c'est exactement celle-ci
00:08:29Un chemin possible, des institutions
00:08:31permettant d'articuler ces deux dimensions
00:08:33On va voir tout ça en détail
00:08:36J'ai beaucoup aimé aussi ce personnage à travers le livre
00:08:40Il me parle pas mal
00:08:43Évidemment, le cœur du problème
00:08:46et la difficulté du problème
00:08:48c'est l'agencement
00:08:50c'est les différents niveaux, les différentes échelles
00:08:52parce qu'en effet, dans un niveau local
00:08:54on peut réfléchir à des communs
00:08:56on peut réfléchir à une bio-région
00:08:58on peut réfléchir à différentes modalités
00:09:01pour réussir, combiner politique et ressources locales
00:09:05Évidemment, là où ça achoppe
00:09:07c'est une fois qu'on généralise ça
00:09:09c'est une fois qu'on se met en tension
00:09:11avec notre voisin, notre communauté voisine
00:09:13notre communauté moins voisine, etc.
00:09:16Et c'est là où, comme vous avez dit tout à l'heure
00:09:19la crise écologique contemporaine
00:09:21sa spécificité, c'est qu'elle a touché les bouts
00:09:25On n'a plus de moyens d'expansion
00:09:28On est arrivé au bout
00:09:30Il y a différentes phases et vagues d'exploitation
00:09:33Certaines personnes vont être ré-exploitées
00:09:35Mais on a touché un peu les bords
00:09:37Et du coup, dans cette prise d'étau
00:09:40on peut se poser la question
00:09:42Est-ce que dans le cadre actuel
00:09:44on peut encore modeler, bouger des choses
00:09:48ou c'est ce cadre-là qu'on doit réellement discuter ?
00:09:51Le livre rentre en discussion avec deux secteurs
00:09:55Un premier secteur qui est celui des partisans du capitalisme vert
00:09:59ce qui est évidemment le narratif dominant
00:10:01C'est d'une certaine façon notre adversaire principal
00:10:04dans le débat qu'on essaie de construire dans le livre
00:10:06Et puis il y a une discussion plus fraternelle
00:10:08mais néanmoins aussi critique
00:10:13dans les approches de la décroissance
00:10:15mais qui sont essentiellement centrées sur le niveau local
00:10:17et pour lesquelles l'idée d'une économie de la convivialité
00:10:20repliée sur des petites communautés
00:10:22serait une alternative à la croissance verte
00:10:24C'est un peu pour poser le paysage
00:10:28L'ennemi principal, l'idée de capitalisme vert
00:10:33Pourquoi le capitalisme vert peut à notre sens ne pas fonctionner ?
00:10:38Il y a vraiment plusieurs dimensions
00:10:40et on essaie de rentrer dans le détail de cette discussion dans le livre
00:10:42mais je vais juste effleurer quelques aspects
00:10:44Peut-être l'aspect le plus compréhensible immédiatement
00:10:46c'est le fait que sortir de la crise écologique
00:10:51implique de bifurquer
00:10:53mais bifurquer ça veut dire d'abord et avant tout
00:10:55démanteler des activités qui sont sales
00:10:57Et le capital ne sait pas faire des profits
00:10:59avec des choses qu'il faut démanteler
00:11:01Toute cette question de la prise en charge
00:11:03de l'héritage d'une structure polluante
00:11:07est quelque chose qui est impossible à prendre en compte
00:11:09de la part du capital
00:11:11Il va bien falloir socialiser ce travail de démantèlement
00:11:15Internaliser d'une certaine manière
00:11:17Ce n'est même pas internaliser
00:11:19Il va falloir qu'il y ait un autre mécanisme
00:11:21que la propriété privée
00:11:23pour pouvoir prendre en charge le démantèlement
00:11:25Les gens qui vont travailler
00:11:27pour démanteler des aéroports
00:11:29qui seront devenus inutiles
00:11:31ou des usines chimiques dont on aura décidé de se passer
00:11:33Ce sont des gens qui ne pourront pas vivre
00:11:35de la vente du produit de leur travail
00:11:37Il n'y a personne qui va acheter ça
00:11:39bien que tous et toutes nous allons en bénéficier collectivement
00:11:41Donc il va falloir socialiser leur travail
00:11:43Donc ça c'est quelque chose d'extrêmement important
00:11:45et qui montre comment la question de la bifurcation
00:11:47est, si on veut d'une certaine façon
00:11:49opposée à la logique entrepreneuriale
00:11:51Donc ça c'est un premier point
00:11:53D'ailleurs ça me permet de mettre l'accent
00:11:55sur ce qui a été à mon avis
00:11:57une des apories d'une partie du mouvement climat
00:11:59sur un exemple précis
00:12:01qui est la logique du désinvestissement
00:12:03Alors il y a eu des campagnes importantes sur le désinvestissement
00:12:05et il y a effectivement une vertu politique
00:12:07de parler de ce que font
00:12:09les fonds de pension avec leur argent
00:12:11ou ce que font les universités
00:12:13avec leur dotation
00:12:15Donc de ce point de vue là c'était très intéressant
00:12:17Mais l'idée qu'une des solutions à la crise climatique
00:12:19allait être de faire pression
00:12:21sur les investisseurs pour qu'ils vendent
00:12:23les actifs qu'ils possèdent
00:12:25des énergies les plus polluantes
00:12:27et d'une aporie. Pourquoi ?
00:12:29Parce qu'une fois que ces actifs sont vendus
00:12:31comme on a pu l'observer avec les géants de l'énergie européens
00:12:33et bien ils sont rachetés par d'autres individus
00:12:35qui eux ne sont pas sous le regard
00:12:37des activistes, qui ne sont pas sur les marchés financiers
00:12:39qui sont des investisseurs privés
00:12:41et qui ont racheté par exemple ces centrales à charbon
00:12:43et ont fait des fortunes avec elles
00:12:45Donc l'idée de désinvestir ne suffit pas
00:12:47Il faut vraiment démanteler
00:12:49et démanteler c'est une autre machine
00:12:51Un autre problème absolument fondamental
00:12:53de l'idée de capitalisme vert c'est l'idée qu'on va pouvoir
00:12:55internaliser dans le mécanisme de prix
00:12:57la contrainte écologique
00:12:59La taxe carbone quoi
00:13:01C'est la taxe carbone mais c'est aussi
00:13:03les services rendus à la nature par exemple
00:13:05Et le problème
00:13:07est vraiment multidimensionnel
00:13:09mais je voudrais simplement évoquer trois aspects de celui-ci
00:13:11Le premier aspect
00:13:13c'est l'idée que
00:13:15donner un prix aux services rendus
00:13:17par la nature implique finalement
00:13:19de comparer des choses
00:13:21qui ne sont pas comparables
00:13:23On va donner un prix aux jipahètes barbus
00:13:25et un prix aux lismartagons
00:13:27On va donner un prix aux services que nous rend une forêt
00:13:29dans laquelle on va se promener
00:13:31et un prix à l'eau
00:13:33que l'on va récupérer
00:13:35d'un lac montagneux
00:13:37Ces choses-là ne sont pas comparables
00:13:39Mais si vous leur donnez un prix
00:13:41vous allez les comparer et donc vous allez choisir
00:13:43de supprimer les lismartagons
00:13:45pour protéger les jipahètes barbus
00:13:47de polluer un lac
00:13:49de protéger une rivière
00:13:51Vous allez pouvoir faire ce genre d'arbitrage
00:13:53Ça c'est pas possible
00:13:55C'est le principe de substituabilité
00:13:57C'est l'idée de substituabilité
00:13:59On ne peut pas remplacer
00:14:01Le lien avec la substituabilité va encore plus loin
00:14:03L'idée de substituabilité c'est que
00:14:05non seulement on va pouvoir arbitrer
00:14:07entre différents services naturels
00:14:09mais on va pouvoir remplacer
00:14:11du capital économique
00:14:13en lieu et place de la nature
00:14:15que l'on aura détruite
00:14:17Une deuxième opération
00:14:19Mais au fond de tout ça
00:14:21il y a l'idée que donner un prix à la nature
00:14:23est quelque chose qui est absurde
00:14:25Quelque chose qui est très agaçant
00:14:27dans le langage des économistes mainstream
00:14:29c'est vraiment qu'ils se présentent comme ayant une démarche
00:14:31qui est scientifique
00:14:33Nous on est scientifique, on veut quelque chose qui soit rigoureux
00:14:35C'est rigoureux, c'est compliqué, mais c'est pas scientifique
00:14:37En particulier, cette idée que la nature
00:14:39est un prix n'est pas scientifique
00:14:41parce que si l'on raisonne dans la totalité
00:14:43Quel est le prix total de la nature ?
00:14:45Le prix total de la nature du point de vue de l'humanité
00:14:47Les prix renvoient à l'humanité
00:14:49Ce prix là est infini
00:14:51Le prix de la nature est infini
00:14:53puisque c'est la condition même de notre existence
00:14:55Et dès lors, chaque parcelle de la nature
00:14:57a un prix qui ne peut pas être réduit
00:14:59à une donnée particulière
00:15:01Donc il y a vraiment une forme
00:15:03d'impasse logique
00:15:05dans cette idée d'internaliser dans le système de prix
00:15:07la nature
00:15:09On pourrait évoquer encore beaucoup d'autres exemples
00:15:11Peut-être que j'en rajoute encore deux à ces trois premiers éléments
00:15:13Un premier élément
00:15:15concerne le rapport entre les générations
00:15:17L'idée là encore
00:15:19c'est que, à travers notamment
00:15:21le cas de la taxe carbone, on va pouvoir
00:15:23raisonner en
00:15:25prenant en compte les préférences des individus
00:15:27Christian Gaullier, qui est
00:15:29l'apôtre le plus ailé de la taxe carbone
00:15:31et qui a des vertus pédagogiques
00:15:33incontestables, un vrai enthousiasme pour son projet
00:15:35dit la chose suivante
00:15:37Pourquoi
00:15:39ne pourrions-nous pas prendre en tant que
00:15:41société le même type de risque
00:15:43que l'on peut prendre comme individu ?
00:15:45Après tout, certains et certains d'entre nous décident bien
00:15:47de boire de l'alcool
00:15:49de traverser la rue
00:15:51de faire un sport qui peut être dangereux, etc
00:15:53Et donc il y a une forme d'acceptation du risque
00:15:55Et bien, collectivement
00:15:57pourquoi ne pourrions-nous pas avoir ce type d'acceptation
00:15:59du risque ?
00:16:01Je paye les conséquences de prendre un jet privé
00:16:03Exactement, et donc à travers le système
00:16:05de prix, on finalement
00:16:07on exprimerait ses préférences
00:16:09sur ce rapport au risque
00:16:11Alors là, il y a beaucoup de choses qui ne vont pas, mais ce qui ne va pas en particulier
00:16:13c'est l'idée que la communauté des vivants
00:16:15permet d'internaliser
00:16:17l'ensemble du rapport au risque
00:16:19Pourquoi ? Parce qu'une grande partie des conséquences
00:16:21des désastres écologiques, évidemment, vont être
00:16:23subies par les générations à venir
00:16:25Et donc, les préférences des vivants ne suffisent pas
00:16:27à exprimer leur rapport au futur
00:16:29Autrement dit, l'idée d'un calcul individuel
00:16:31par rapport à la question écologique
00:16:33est une impasse
00:16:35Le calcul du risque
00:16:37par rapport à la nature
00:16:39est un calcul qui est éminemment spécifique
00:16:41au sens d'espèces
00:16:43C'est collectivement, les humains, en tant qu'espèces
00:16:45qu'il nous faut réfléchir sur ce rapport-là
00:16:47Un dernier élément, peut-être plus technique
00:16:49et plus économique, mais qui permettra peut-être
00:16:51de faire le lien avec d'autres éléments dans le livre
00:16:53c'est que l'idée du mécanisme de prix
00:16:55est l'idée qu'on va
00:16:57signaler à court terme, immédiatement
00:16:59aux agents économiques, les coûts réels
00:17:01et que donc ceux-ci vont devoir
00:17:03pouvoir s'ajuster
00:17:05en fonction de ces coûts réels
00:17:07Ce qu'on observe avec le cas de la taxe carbone
00:17:09c'est qu'en fait, ce n'est pas possible
00:17:11Soit le prix n'est pas très élevé
00:17:13et du coup, ça n'affecte pas profondément les comportements
00:17:15soit le prix
00:17:17est très élevé
00:17:19et dans ce cas-là, qu'est-ce qu'on a ?
00:17:21Les gilets jaunes, comme on a pu le voir en France, il y a quelques années
00:17:23ou bien on a quelque chose comme la grande crise industrielle
00:17:25que vit aujourd'hui l'Allemagne, suite
00:17:27à l'invasion russe de l'Ukraine et l'arrêt des livraisons de gaz
00:17:29qui est en fait un désajustement
00:17:31majeur, mais sans maîtrise
00:17:33Pourquoi ça ?
00:17:35Et bien parce que les structures économiques, contrairement
00:17:37au modèle des néoclassiques, ne sont pas
00:17:39malléables à l'infini, ne sont pas flexibles à l'infini
00:17:41Il leur faut du temps pour s'ajuster
00:17:43Et justement, l'idée de planification
00:17:45c'est l'idée de définir
00:17:47à cette trajectoire
00:17:49de transformation, et pas supposer
00:17:51une forme d'ajustement instantanée, comme par magie
00:17:53Oui, il y a cette magie de l'élasticité
00:17:55que tout peut bouger
00:17:57comme on veut
00:17:59Si on voit que le désinvestissement
00:18:01ne fonctionne pas, si les prix ne fonctionnent pas
00:18:03si
00:18:05tout ça ne fonctionne pas
00:18:07Évidemment, c'est une tradition
00:18:09Ce n'est pas juste le néolibéralisme
00:18:11des 30 dernières années
00:18:13Il y a une tradition économique
00:18:15qui date quasi du début du siècle
00:18:17Ce combat entre
00:18:19le marché qui va résoudre
00:18:21ou on doit avoir plutôt cette comptabilité
00:18:23en nature
00:18:25d'autonorat
00:18:27c'est un conflit qui existe
00:18:29Et
00:18:31il y a des arguments
00:18:33des deux côtés, mais
00:18:35là-dedans, ce qui est intéressant, c'est
00:18:37que de toute façon, on va devoir agir
00:18:39Dans tous les cas, on voit
00:18:41que malheureusement, il n'y a pas
00:18:43de planification
00:18:45long terme par le marché
00:18:47Donc si
00:18:49votre livre prône
00:18:51la planification écologique
00:18:53ce qui serait intéressant, c'est de voir
00:18:55est-ce que la planification économique
00:18:57fonctionne ?
00:18:59Évidemment, dès qu'on parle planification économique
00:19:01on va tout de suite penser à l'URSS
00:19:03on va tout de suite penser à la Chine
00:19:05Il y a d'autres exemples qu'on va pouvoir
00:19:07mentionner, mais
00:19:09quand on regarde la planification économique
00:19:11du passé, que voyons-nous ?
00:19:21Il y a deux manières
00:19:23de regarder la question de la planification
00:19:25Il y a une manière plus théorique
00:19:27qui renvoie au grand débat des années
00:19:291920 et 1930 sur le calcul socialiste
00:19:31et puis il y a une manière plus historique
00:19:33qui est de regarder quelles ont été dans leur diversité
00:19:35les expériences de planification
00:19:37Et à ces deux niveaux, il y a beaucoup de choses
00:19:39à apprendre pour la planification
00:19:41écologique contemporaine
00:19:43Sur le plan théorique, le débat
00:19:45sur le calcul socialiste
00:19:47confrontait trois types de positions
00:19:49Une première position
00:19:51était celle des socialistes scientifiques
00:19:53comme Oscar Lange par exemple
00:19:55et leur ligne était la suivante
00:19:57de dire qu'on peut finalement remplacer
00:19:59le système, le modèle
00:20:01de marché des néoclassiques
00:20:03par une économie planifiée
00:20:05où le planificateur sera d'une certaine façon
00:20:07celui qui va observer les prix d'équilibre
00:20:09et qui va pouvoir intervenir pour
00:20:11organiser scientifiquement
00:20:13l'économie
00:20:15en ayant finalement une espèce
00:20:17de vue d'ensemble de celle-ci
00:20:19et de cette manière-là, de prévenir les crises
00:20:21d'être plus rationnel
00:20:23que le désordre du marché
00:20:25Opposé à celle-ci
00:20:27et c'est surtout ce débat-là dont on a entendu parler
00:20:29il y avait la position de Friedrich Hayek
00:20:31et de la tradition autrichienne
00:20:33qui disait en substance, malheureux
00:20:35vous vous faites une illusion immense
00:20:37en pensant que vous allez pouvoir de manière centralisée
00:20:39intégrer toute la connaissance
00:20:41qui circule à travers le système de prix
00:20:43à travers le système de marché
00:20:45C'est peine perdue, c'est impossible
00:20:47Et l'idée de Friedrich Hayek
00:20:49c'est que le marché c'est un processus
00:20:51d'information, un processus
00:20:53de digestion
00:20:55de l'information et des connaissances
00:20:57qui existent de manière dispersée
00:20:59et qu'à travers celui-ci sont révélés
00:21:01finalement les goûts des individus
00:21:03mais aussi les opportunités des producteurs
00:21:05et qu'il y a une forme d'ajustement, de gestion
00:21:07de la connaissance qui ne peut pas être faite de manière centralisée
00:21:09Et puis il y avait une troisième proposition
00:21:11qui était celle d'Otto Neurath
00:21:13le héros que j'ai évoqué
00:21:15il y a un moment
00:21:17Neurath disait la chose suivante
00:21:19il disait, Friedrich Hayek a entièrement raison
00:21:21il n'y a pas, on ne peut pas d'un point de vue
00:21:23central
00:21:25tenir ensemble
00:21:27toute l'intégralité
00:21:29de la connaissance qui est nécessaire
00:21:31pour organiser de manière scientifique et exacte
00:21:33la société
00:21:35et donc il propose même
00:21:37de over Hayek Hayek
00:21:39c'est-à-dire de faire plus que Hayek, d'aller plus loin que Hayek
00:21:41Et de quelle manière propose-t-il d'aller plus loin que Hayek ?
00:21:43C'est en pointant une forme
00:21:45d'incohérence dans le point de vue de Hayek
00:21:47parce que Hayek il dit, on ne peut pas centraliser
00:21:49toute la connaissance, et il a parfaitement raison
00:21:51mais en même temps Hayek nous dit
00:21:53au point de vue local, on peut
00:21:55décentraliser la connaissance, on peut avoir
00:21:57accès au point de vue local à l'ensemble des connaissances
00:21:59qui sont nécessaires
00:22:01Et là Otto Neurath dit, ben non c'est pas vrai
00:22:03on a besoin collectivement
00:22:05d'avoir recours
00:22:07à des organisations
00:22:09à un point de vue centralisé pour prendre
00:22:11un certain nombre de décisions
00:22:13Si effectivement la centralisation
00:22:15l'illusion d'un contrôle total
00:22:17du point de vue centralisé
00:22:19ne doit pas être suivi
00:22:21il ne faut pas non plus penser
00:22:23que l'on va pouvoir, du point de vue local
00:22:25avoir un comportement qui
00:22:27de manière agrégée va conduire à quelque chose de rationnel
00:22:29Il faut donc des institutions
00:22:31délibératives qui permettent
00:22:33au niveau central de discuter
00:22:35des différents scénarios, mais tout en étant
00:22:37conscient que cette connaissance centrale
00:22:39est imparfaite
00:22:41Et Otto Neurath évoquait cette idée
00:22:43de calcul en nature, qui est un calcul
00:22:45sur des valeurs, sur des scénarios
00:22:47et qui permet de prendre en compte différentes dimensions
00:22:49du devenir des sociétés humaines
00:22:51qui ne sont pas réductibles à un système de prix
00:22:53Alors Otto Neurath est quelqu'un de très intéressant
00:22:55aussi parce qu'il a aussi
00:22:57développé des systèmes de représentation
00:22:59de ces différentes
00:23:01dimensions économiques avec notamment cette idée
00:23:03de silhouette économique
00:23:05plutôt que d'avoir un seul indicateur
00:23:07Donc vraiment il cherchait à rendre
00:23:09compte de cette nécessaire diversité
00:23:11des dimensions à prendre en compte dans la délibération
00:23:13économique à l'opposé
00:23:15du système de prix. De ce point de vue là
00:23:17c'est quelque chose d'extrêmement intéressant
00:23:19pour aujourd'hui. Alors ça c'est pour le débat théorique
00:23:21Si on veut faire de la planification écologique
00:23:23il faut s'inspirer de Neurath
00:23:25parce qu'effectivement le système de prix
00:23:27ne permet pas de résumer l'information
00:23:29nécessaire, mais tout simplement
00:23:31aussi parce que le système au niveau local
00:23:33on ne peut pas avoir accès à toute la connaissance
00:23:35écologique nécessaire pour faire des choix rationnels
00:23:37Un exemple, chacune et chacun d'entre
00:23:39vous peut essayer au supermarché de se comporter
00:23:41de manière parfaitement écologique, c'est peine perdue
00:23:43il va ressortir déprimé et incapable
00:23:45d'agir du supermarché. Pour quelle raison ?
00:23:47Parce que cette connaissance là
00:23:49doit être nécessairement filtrée par des organisations
00:23:51elle est technique, elle est experte
00:23:53elle met de nombreuses années à être acquise
00:23:55Le deuxième
00:23:57volet de l'histoire de la
00:23:59planification c'est finalement la planification
00:24:01en tant qu'expérience historique
00:24:03expérience réelle. Et
00:24:05effectivement c'est quelque chose qui importe beaucoup
00:24:07pour nous dans le livre. La méthode
00:24:09qu'on propose dans le livre c'est pas une méthode qui
00:24:11consiste à inventer un modèle
00:24:13avec nos petits cerveaux
00:24:15et nos lectures simplement, mais c'est
00:24:17essayer de s'appuyer sur des expériences
00:24:19historiques véritables pour
00:24:21les redéployer et voir. On propose
00:24:23le terme
00:24:25suivant, on parle d'utopie
00:24:27institutionnelle. Utopie institutionnelle
00:24:29ça s'oppose à l'idée de modèle utopique
00:24:31mais ça s'oppose aussi à l'idée
00:24:33d'utopie concrète qui a été développée
00:24:35par le sociologue Eric Olin-Wright
00:24:37Eric Olin-Wright lorsqu'il parle
00:24:39d'utopie concrète il parle par exemple des
00:24:41coopératives, il parle des communs
00:24:43il parle de choses plus méso-sectorielles
00:24:45comme Wikipédia. Ce sont des expériences
00:24:47très fortes et dont il dit on doit
00:24:49s'inspirer pour pouvoir penser une alternative
00:24:51au système existant
00:24:53Nous on dit c'est super
00:24:55cette démarche là nous plaît beaucoup, son côté réaliste
00:24:57nous plaît beaucoup. Mais néanmoins
00:24:59il y a une forme de limite dans cette démarche
00:25:01qui est que si on
00:25:03pose la question du système, il faut aussi
00:25:05avoir des institutions, des alternatives
00:25:07qui se posent à l'échelle systémique
00:25:09et donc notre méthode elle va consister
00:25:11à aller regarder dans les expériences historiques
00:25:13ou dans ce qui existe aujourd'hui
00:25:15des choses qui soient suffisamment macros
00:25:17et qui puissent néanmoins
00:25:19informer une transformation
00:25:21Alors, quelles sont ces expériences
00:25:23historiques auxquelles on fait référence ?
00:25:25Vous avez évoqué la planification soviétique
00:25:27qui est évidemment une des grandes expériences
00:25:29une expérience qui est
00:25:31de développementalisme radical et brutal
00:25:33qui jusqu'aux années 60 a
00:25:35fait penser à beaucoup
00:25:37en Occident et évidemment
00:25:39aussi en Union soviétique
00:25:41qu'il y aurait une forme de rattrapage
00:25:43de dépassement peut-être même
00:25:45de l'économie soviétique par rapport aux économies occidentales
00:25:47mais c'est aussi
00:25:49un modèle qui, outre son épuisement
00:25:51dans les dernières décennies
00:25:53était un modèle dictatorial
00:25:55un modèle brutal sur les travailleurs
00:25:57mais un modèle aussi dictatorial
00:25:59sur le contenu de l'activité économique
00:26:01De ce point de vue-là, il y avait
00:26:03une sociologue hongroise
00:26:05qui parle de dictature sur les besoins
00:26:07Cette idée de dictature sur les besoins
00:26:09est précisément quelque chose
00:26:11auquel on s'oppose
00:26:13dans le livre et qu'on a cherché
00:26:15à mettre à distance
00:26:17Les autres expériences qu'on peut évoquer
00:26:19sont des expériences
00:26:21beaucoup plus ambivalentes
00:26:23Par exemple
00:26:25il y a l'expérience du développementalisme
00:26:27dans la période d'après-guerre
00:26:29que ce soit dans des pays comme le Japon
00:26:31des pays comme la Corée
00:26:33ou des pays comme la France par exemple
00:26:35Dans ces cas-là, on a bien vu
00:26:37un état stratège prendre le contrôle
00:26:39d'un certain nombre d'outils économiques
00:26:41pour diriger le développement économique
00:26:43Un développement économique
00:26:45qui a été un succès
00:26:47du point de vue de l'enrichissement
00:26:49mais évidemment un développement économique
00:26:51productiviste, des structures de la nature
00:26:53Lorsqu'on pose la question aujourd'hui
00:26:55de la planification écologique
00:26:57c'est une planification qui est très différente
00:26:59de cette planification développementaliste
00:27:01C'est une planification qui ne doit pas être productiviste
00:27:03qui doit sortir du productivisme
00:27:05Donc là encore, vous voyez
00:27:07une mise à distance, une expérience
00:27:09dont il faut tirer des enseignements
00:27:11Troisième expérience importante
00:27:13dont on parle dans le livre, c'est l'expérience chinoise
00:27:15et la planification chinoise en particulier
00:27:17telle qu'elle a existé ces dernières décennies
00:27:19depuis 1980 jusqu'à aujourd'hui
00:27:21L'économie chinoise
00:27:23est une économie qui est
00:27:25parfaitement intégrée dans le capitalisme mondial
00:27:27C'est une chose évidente aujourd'hui
00:27:29où il y a un secteur privé, il y a des bourses, etc
00:27:31Mais c'est aussi une économie qui est encore
00:27:33très largement contrôlée, pilotée stratégiquement
00:27:35par la puissance publique, l'État
00:27:37et le Parti communiste chinois
00:27:39Et cela se fait en particulier
00:27:41à travers un certain nombre
00:27:43de contrôles directs en termes de propriété
00:27:45ce que les Chinois
00:27:47appellent les hauteurs stratégiques de l'économie
00:27:49Les grandes banques, les grandes sociétés
00:27:51de transport, les grandes sociétés de construction
00:27:53les grandes sociétés d'énergie sont des
00:27:55grandes entreprises publiques qui sont
00:27:57des leviers de la planification
00:27:59Mais il y a un autre élément qui nous a beaucoup intéressé
00:28:01dans l'expérience chinoise, c'est le fait que
00:28:03cette planification est en grande partie
00:28:05décentralisée
00:28:07Elle est décentralisée parce que
00:28:09la Chine est un pays continent
00:28:11gigantesque dans lequel finalement
00:28:13les provinces ont beaucoup d'autonomie
00:28:15Et donc le processus de planification implique la chose
00:28:17suivante, que certes les objectifs sont
00:28:19décidés au niveau central, mais simultanément
00:28:21les solutions qui vont être proposées par rapport
00:28:23à ces objectifs sont différentes
00:28:25selon les régions. Et ensuite
00:28:27il y a un bilan de ces expériences qui est fait
00:28:29et puis certaines solutions sont
00:28:31abandonnées, d'autres sont suivies
00:28:33Pourquoi ça, ça nous a intéressé ?
00:28:35Parce que ça c'est une réponse au modèle
00:28:37soviétique et au modèle développementiste
00:28:39d'après-guerre dans une de leurs limites
00:28:41qui était le fait de générer
00:28:43des monocultures techniques, la même solution
00:28:45partout. Et ça c'est quelque chose
00:28:47évidemment qui a atteint ses limites
00:28:49de façon importante.
00:28:51C'est important d'avoir une économie
00:28:53des capacités de consommation et de production
00:28:55qui soit diversifiées ou liées
00:28:57à l'innovation. Cette idée
00:28:59d'expérimentation, cette logique de
00:29:01décentralisation dans la planification
00:29:03est à notre avis quelque chose d'absolument essentiel
00:29:05Donc voilà quelques éléments
00:29:07dans lesquels on peut un peu
00:29:09circuler, mais peut-être pour tout de suite
00:29:11distancier en même temps que l'on s'appuie sur
00:29:13ces expériences. Pas de dictature sur
00:29:15les besoins, pas de logique productiviste,
00:29:17pas de logique monoculturelle
00:29:19techniquement, mais au contraire
00:29:21un espace pour l'innovation. Voilà
00:29:23en négatif la manière
00:29:25dont on a pu réagir
00:29:27par rapport à ces expériences de planification
00:29:29qui en même temps, par leur existence
00:29:31démontrent que l'on peut organiser
00:29:33l'économie autrement que
00:29:35par des marchés
00:29:37prétendument autorégulés.
00:29:39Ce qui est intéressant en effet c'est que même dans
00:29:41la Cesse il y avait des états spécialisés,
00:29:43il y avait les états voitures, il y avait les états agricoles
00:29:45et la même chose
00:29:47s'est fait en France avec
00:29:49différentes régions plutôt agricoles, plutôt
00:29:51minières, plutôt autre chose
00:29:53donc en effet il y avait
00:29:55ces régions ou ces
00:29:57sous-secteurs qui étaient là
00:29:59spécialisés
00:30:01et on voit les limites aujourd'hui
00:30:03c'est à dire certaines régions
00:30:05sont obligées
00:30:07de trouver des nouveaux
00:30:09emplois pour des personnes qui se trouvent bloquées
00:30:11dans une monofilière.
00:30:13Bon,
00:30:15la Suède peut-être se rapproche un peu
00:30:17du développementaliste mais
00:30:19il y avait aussi l'expérience très brève
00:30:21du Chili qui pourrait être aussi
00:30:23intéressante, enfin qu'est-ce qu'il y a eu de différent au Chili
00:30:25par rapport à ces expériences-ci ?
00:30:27Alors en fait, là on rentre
00:30:29dans un point un petit peu plus précis de la discussion
00:30:31du livre qui concerne
00:30:33l'outil principal de la planification.
00:30:35Quel est l'instrument principal de la planification ?
00:30:37Eh bien au fond, c'est le contrôle de l'investissement.
00:30:39La planification, on insiste
00:30:41aussi sur cette idée-là, de notre point de vue
00:30:43c'est une extension de la liberté.
00:30:45Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui
00:30:47pour l'historien ordinaire,
00:30:49toute une série de décisions absolument fondamentales
00:30:51concernant notre devenir commun
00:30:53sont monopolisées par les entreprises privées.
00:30:55Et c'est quoi ces décisions ? Ce sont les décisions
00:30:57qui concernent l'investissement.
00:30:59Alors, la planification c'est fondamentalement
00:31:01délibérée sur l'orientation de l'investissement.
00:31:03Quel est le type de forme
00:31:05que l'on veut donner à la société
00:31:07dans sa transformation ?
00:31:09C'est donc vraiment
00:31:11une institution clé de la planification.
00:31:13Alors, lorsqu'on parle de planification,
00:31:15il y a effectivement différentes expériences
00:31:17qui ont différents rapports à la socialisation
00:31:19de l'investissement.
00:31:21Et dans ce cadre-là,
00:31:23un des points qui est important
00:31:25lorsqu'on évoque le cas
00:31:27chilien et le cas suédois,
00:31:29c'est de dire que finalement,
00:31:31ces formes de socialisation de l'investissement
00:31:33impliquent aussi de réfléchir à la manière
00:31:35dont on donne un espace pour les travailleurs,
00:31:37pour les producteurs. Non seulement,
00:31:39on doit délibérer en tant que citoyen
00:31:41sur la trajectoire qu'on doit avoir,
00:31:43mais aussi, on se pose la question,
00:31:45quelle est la place des producteurs
00:31:47dans ce modèle-là ?
00:31:49Le modèle suédois
00:31:51est extrêmement intéressant.
00:31:53C'est la social-démocratie
00:31:55la plus avancée dans l'histoire
00:31:57de l'humanité. C'est un modèle qui s'est développé
00:31:59à partir des années 1930
00:32:01et fin des années 1970, on va dire.
00:32:03À son apogée,
00:32:05à la fin des années 1970,
00:32:07on voit l'émergence
00:32:09d'un plan appelé le plan Meidner
00:32:11qui visait, via
00:32:13une taxe sur les profits,
00:32:15à petit à petit manger la propriété privée
00:32:17et la redistribuer aux travailleurs,
00:32:19mais au niveau des entreprises.
00:32:21C'est là où on est sur un point
00:32:23extrêmement intéressant. C'est qu'en fait,
00:32:25la social-démocratie suédoise envisageait ainsi
00:32:27une forme de contrôle par les travailleurs
00:32:29et par l'économie, mais on restait dans une logique
00:32:31sans planification, sans coordination centrale
00:32:33de la politique d'investissement.
00:32:35Alors, ça ne répond donc pas à notre problème.
00:32:37Mais par contre, cela révèle une préoccupation qui est majeure,
00:32:39c'est que c'était bel et bien
00:32:41les travailleurs et les travailleuses qui, dans les entreprises,
00:32:43allaient être à même
00:32:45de décider techniquement
00:32:47la manière d'organiser le travail,
00:32:49mais aussi des types de technologies à développer.
00:32:51Et c'est cette préoccupation-là que l'on a mis au centre.
00:32:53L'expérience chilienne est très
00:32:55brève et très
00:32:57inspirante, parce qu'elle est extrêmement
00:32:59créative,
00:33:01pourrait-on dire, mais évidemment
00:33:03très dramatique, puisque l'élection de la Viennese
00:33:05est suivie très peu de temps après,
00:33:07deux ans après, par le coup d'État
00:33:09du général
00:33:11Augusto Pinochet en 1973.
00:33:13Et donc, dans ce bref interstice,
00:33:15s'est développé un programme
00:33:17de planification appelé Cybersyn,
00:33:19dont l'idée était d'avoir une logique
00:33:21de cybernétique,
00:33:23de boucle en temps réel
00:33:25entre l'espace
00:33:27de planification et
00:33:29les points de production,
00:33:31et aussi la situation des consommateurs.
00:33:33Et donc, c'était cette idée extrêmement
00:33:35intéressante de faire réagir
00:33:37en temps réel, si vous voulez, la société
00:33:39à l'espace de planification,
00:33:41qui nous a semblé intéressante,
00:33:43puisque son aspiration, fondamentalement,
00:33:45est donc d'être ni du côté de la dictature sur les besoins,
00:33:47ni du côté de la soumission
00:33:49des producteurs à la logique du plan,
00:33:51mais au contraire, d'une forme d'association
00:33:53de ces deux pôles dans le processus
00:33:55de planification.
00:33:56Quand on regarde les images de cette
00:33:58zone de contrôle ou bureau de contrôle,
00:34:00c'est assez incroyable. On se dirait
00:34:02dans un film de science-fiction
00:34:04avec les fauteuils et tout, et les écrans.
00:34:06C'est vrai que c'était assez impressionnant.
00:34:10Donc voilà, on sait vers où
00:34:12on ne doit pas aller quand on fait de la planification
00:34:14économique. Pas d'autoritarisme,
00:34:16il y a de la planification
00:34:18forcée ou délibérée,
00:34:20il y a de la planification capitaliste-communiste,
00:34:23disons, on a
00:34:25les frontières
00:34:27du système à l'intérieur
00:34:29duquel on veut
00:34:31agir. Il y a peut-être juste une autre expérience
00:34:33que les gens connaissent aussi,
00:34:35ou deux autres expériences qu'on connaît aussi.
00:34:37Ce n'est pas vraiment une planification
00:34:39économique, mais c'est une planification
00:34:41envers une crise.
00:34:43Cette crise peut être une guerre, ou cette crise
00:34:45peut être une pandémie, comme on l'a reçu
00:34:47dernièrement.
00:34:49Quels petits éléments peut-on apprendre
00:34:51à travers une
00:34:53économie réactive
00:34:55à une guerre ou à une crise ?
00:34:57Vous avez tout à fait raison
00:34:59d'insister sur ce rapport entre
00:35:01économie de guerre et planification,
00:35:03puisque quand il y a
00:35:05une guerre, c'est-à-dire quand une société
00:35:09joue son existence
00:35:11même, le marché est
00:35:13suspendu. La politique est aux commandes.
00:35:15Il y a une forme de priorité et de mobilisation générale
00:35:17autour de ça. Et ce qui se
00:35:19joue dans une guerre, c'est
00:35:21finalement quelque chose qui dépasse
00:35:23la période immédiate,
00:35:25les enjeux immédiats, mais c'est une vision
00:35:27pour le futur. Et donc,
00:35:29on est capable, en tant que société,
00:35:31de se mobiliser,
00:35:33de mettre entre parenthèses
00:35:35les intérêts à court terme pour aller vers
00:35:37cet horizon futur.
00:35:39C'est des fois très spectaculaire.
00:35:41Aux États-Unis, dans la période 1943-1944,
00:35:43on ne produit plus aucune voiture,
00:35:45plus aucune voiture individuelle.
00:35:47L'ensemble de l'effort est retourné vers
00:35:49l'économie de guerre.
00:35:51Ce sont vraiment des choix qui sont très forts.
00:35:53Juste une petite parenthèse. Ce qui est intéressant,
00:35:55c'est qu'on ne produit plus de voitures,
00:35:57mais on produit quand même.
00:35:59La machine ne s'arrête pas forcément,
00:36:01elle se redirige.
00:36:03Exactement.
00:36:05Il y a beaucoup de choses à dire.
00:36:07Une des premières choses,
00:36:09sur laquelle on insiste
00:36:11dans le livre, c'est que
00:36:13la logique de guerre implique
00:36:15de pénurie et de priorisation.
00:36:17Dans ce contexte-là,
00:36:19il y a souvent aussi des effets égalitaires.
00:36:21Une des choses que l'on met en évidence,
00:36:23c'est que pendant la Première Guerre mondiale,
00:36:25la question du charbon à Paris
00:36:27était distribuée sous la forme de coupons
00:36:29en fonction de la taille des familles.
00:36:31C'est quelque chose qui, pour une grande partie
00:36:33de la population la plus pauvre de Paris,
00:36:35avait donné accès à un confort énergétique
00:36:37qui n'existait pas auparavant.
00:36:39Il y a des effets égalitaires
00:36:41dans cette gestion de la pénurie qui peuvent exister.
00:36:43Le deuxième point,
00:36:45c'est cette idée
00:36:47que lors de la réorientation en fonction
00:36:49des priorités,
00:36:51on est capable
00:36:53de faire une mobilisation
00:36:55pour l'avenir.
00:36:57Là, il y a un parallèle avec la situation
00:36:59contemporaine.
00:37:01De notre point de vue, l'heure n'est
00:37:03certainement pas à la fin du travail,
00:37:05comme ça a pu être évoqué un moment.
00:37:07On pense plutôt que ce moment de la bifurcation
00:37:09est un moment où, même si ce n'est pas un horizon
00:37:11nécessairement désirable en soi,
00:37:13on va avoir besoin des capacités
00:37:15de travail, de l'effort de toutes et tous.
00:37:17Pour quelles raisons ?
00:37:19Non seulement il va falloir
00:37:21créer des
00:37:23moyens de production plus propres,
00:37:25mais simultanément, il va falloir
00:37:27démanteler, comme je l'ai dit tout à l'heure,
00:37:29un certain nombre d'infrastructures sales.
00:37:31Ce travail de démantèlement
00:37:33ne va pas produire des choses
00:37:35que l'on va pouvoir consommer.
00:37:37Il va falloir continuer à produire les choses que l'on va pouvoir consommer
00:37:39en faisant un effort d'investissement
00:37:41parce que ça doit être des choses plus propres,
00:37:43et simultanément travailler à ne rien faire
00:37:45ou à démanteler un héritage néfaste.
00:37:47Tout ça, c'est beaucoup de travail.
00:37:49Cette idée de bifurcation est aussi
00:37:51une idée où, temporairement,
00:37:53pendant une dizaine d'années,
00:37:55peut-être quinze,
00:37:57il y a un surcroît d'effort qui doit être réalisé.
00:37:59Par exemple,
00:38:01la réduction du temps de travail, à mon avis,
00:38:03est un horizon extrêmement émancipateur,
00:38:05extrêmement important, crucial,
00:38:07mais ce n'est pas le levier principal
00:38:09dans ce moment de bifurcation.
00:38:11Ensuite,
00:38:13le parallèle avec l'économie de guerre
00:38:15est évidemment limité par certains autres aspects,
00:38:17et en particulier par l'idée qu'il y a
00:38:19une forme d'union sacrée dans le contexte de l'économie de guerre.
00:38:21La bifurcation écologique
00:38:23va plutôt être une grande bataille, sans doute,
00:38:25entre une partie
00:38:27de la société arc-boutée
00:38:29sur les intérêts liés
00:38:31à des activités économiques destructrices,
00:38:33et en particulier une partie de la communauté financière.
00:38:35On sait aujourd'hui,
00:38:37on mesure assez précisément pour le climat en tous les cas,
00:38:39que l'essentiel de la capitalisation
00:38:41boursière est associé
00:38:43à des activités très intensives en carbone
00:38:45et donc très destructrices du climat.
00:38:47On voit aujourd'hui les réticences.
00:38:49Il y a un mouvement un peu en faveur
00:38:51d'une finance plus verte, mais aujourd'hui,
00:38:53on est vraiment dans une logique complètement inverse.
00:38:55Ça résiste très dur.
00:38:57Là, ce sont des batailles. Ce n'est pas l'union sacrée,
00:38:59au contraire, c'est la bataille écologique
00:39:01pour l'hégémonie sur le devenir du système économique.
00:39:03Donc voilà, des parallèles
00:39:05avec les mouvements d'économie de guerre,
00:39:07cette idée de mobilisation,
00:39:09cette idée de dépasser
00:39:11les effets à court terme économiques,
00:39:13cette idée aussi
00:39:15d'exigence de plus d'égalité face à une contrainte forte,
00:39:17mais en même temps des différences importantes.
00:39:19Pas d'union sacrée, au contraire,
00:39:21une dynamique sans doute
00:39:23de conflictualité axée autour
00:39:25de ces enjeux écologiques.
00:39:27Et en effet, cet exemple
00:39:29sur l'économie américaine
00:39:31est frappant. On peut aussi
00:39:33se rappeler que pendant une année,
00:39:35on n'avait plus d'avions et tout le monde
00:39:37se portait bien aussi, et que ça a été
00:39:39du jour au lendemain. Donc, on voit que
00:39:41les étapes peuvent être assez radicaux par rapport
00:39:43à leur choix, mais en effet,
00:39:45l'ennemi, la guerre, elle est diffuse.
00:39:47L'ennemi n'est pas unique,
00:39:49l'ennemi n'est pas
00:39:51cerné dans le temps.
00:39:53Ça va être un travail de longue haleine.
00:39:55D'où la planification.
00:39:57Ce n'est pas un travail de courte haleine,
00:39:59mais plutôt de longue haleine.
00:40:01Et d'ailleurs, je ne me souviens plus qui
00:40:03dans votre livre disait que la bifurcation
00:40:05écologique sera différente d'une économie de guerre
00:40:07parce qu'elle sera encore plus complexe.
00:40:09C'est une nouvelle ère. Ce n'est plus
00:40:11cette simplicité.
00:40:13Souvent, on fait ce rapprochement
00:40:15ou ce parallèle-ci pour se dire
00:40:17que c'est François Ruffin qui parle
00:40:19qu'on peut remettre, réarmer
00:40:21les personnes pour agir là-dedans,
00:40:23mais peut-être que
00:40:25les parallèles ne sont pas si
00:40:27efficaces.
00:40:29Oui, c'est vrai.
00:40:31Le parallèle n'est certainement
00:40:33pas complet. Et dans l'idée de bifurcation,
00:40:35il n'y a pas l'idée de revenir
00:40:37à l'état antérieur ex poste.
00:40:39Dans les périodes de guerre aussi, c'est vrai.
00:40:41Une société qui a traversé une guerre ne sort jamais indemne
00:40:43de cette expérience-là, elle-même transformée.
00:40:45Mais dans le cas de la bifurcation écologique, c'est intentionnel.
00:40:47Il s'agit de manière intentionnelle
00:40:49de définir un autre
00:40:51type d'organisation de l'économie.
00:40:53Passons sur
00:40:55le chantier à venir, cette fameuse
00:40:57planification écologique
00:40:59non-productiviste et démocratique.
00:41:07Petite pause avant
00:41:09la prochaine partie. Ce podcast est 100%
00:41:11indépendant et entre les déplacements,
00:41:13le matériel, les charges,
00:41:15le montage, chaque épisode nous coûte
00:41:17pas loin de 900 euros. Si vous souhaitez
00:41:19nous soutenir, n'hésitez pas à vous abonner,
00:41:21liker, commenter, partager
00:41:23ou même, si vous avez les moyens,
00:41:25nous faire un don sur Tipeee.
00:41:27Le lien est en description ci-dessous.
00:41:29Un grand merci et place à la suite.
00:41:31On a déjà beaucoup de présent,
00:41:33mais il faudra reconstruire énormément de choses également.
00:41:35Quand je dis
00:41:37reconstruire et démanteler,
00:41:39on peut penser à des infrastructures physiques,
00:41:41mais aussi à des systèmes économiques,
00:41:43des systèmes de gouvernance,
00:41:45plein de chantiers.
00:41:47Et aussi une culture, c'est-à-dire une culture
00:41:49d'auto-limitation, une culture de
00:41:51se dire que la limitation
00:41:53devient une liberté également.
00:41:55Peut-être qu'on peut commencer par
00:41:57ces fameuses trajectoires,
00:41:59comment on choisit ces trajectoires-ci ?
00:42:01En fait, peut-être pour
00:42:03donner un point de vue d'ensemble sur la logique de la planification,
00:42:05on pourrait dire que c'est 4 blocs,
00:42:07l'architecturation de 4 blocs. Le premier, ça va être
00:42:09effectivement de définir les scénarios
00:42:11à partir des besoins. Quels sont les besoins
00:42:13qui nous permettent
00:42:15de rester dans les limites
00:42:17planétaires et en même temps qui correspondent
00:42:19à ce que, collectivement, nous acceptons
00:42:21comme besoins qui peuvent être satisfaits.
00:42:23La deuxième chose, c'est le moment
00:42:25proprement technique de la planification.
00:42:27C'est la comptabilité écologique. Et on développe
00:42:29ce point-là en détail dans le livre parce que
00:42:31ce n'est pas du tout quelque chose de secondaire. Si on n'est pas
00:42:33capable de mesurer, d'avoir une idée
00:42:35de notre impact qui est précise sur
00:42:37la nature au niveau global, mais également
00:42:39au niveau des écosystèmes,
00:42:41on n'arrivera pas à discriminer entre les usages
00:42:43des ressources naturelles
00:42:45que l'on peut faire,
00:42:47les activités économiques que l'on peut maintenir
00:42:49et celles qu'il va falloir abandonner.
00:42:51Ce moment de la comptabilité écologique est absolument
00:42:53essentiel. Aujourd'hui, elle commence
00:42:55à se développer, mais de manière problématique.
00:42:57Il y a beaucoup de débats autour de ça.
00:42:59Le troisième moment, c'est l'institution
00:43:01clé du plan pour son déploiement.
00:43:03C'est la question de la socialisation de l'investissement.
00:43:05Il faut définir
00:43:07des trajectoires en termes de
00:43:09développement économique
00:43:11qui passent par des décisions concrètes
00:43:13d'investissement ou de désinvestissement
00:43:15ou de démantèlement. Quelle route
00:43:17on va fermer ? Quelle ligne de train on va ouvrir ?
00:43:19Quel bâtiment on va construire ? Quel bâtiment
00:43:21on ne va pas construire ?
00:43:23Enfin,
00:43:25un quatrième point, c'est ce qu'on appelle
00:43:27l'émancipation de la demande
00:43:29qui joue sur deux niveaux.
00:43:31C'est à la fois que les consommateurs individuels
00:43:33soient plus conscients
00:43:35de l'impact de leurs propres
00:43:37dépenses ou de leurs propres
00:43:39usages sur la biosphère,
00:43:41mais c'est aussi l'idée
00:43:43d'une demande qui soit en partie
00:43:45plus maîtrisée parce que plus collective.
00:43:47C'est la question des services publics.
00:43:49Les services publics
00:43:51existent déjà dans le domaine
00:43:53de l'éducation, parfois dans le domaine de la santé,
00:43:55ça dépend des pays, dans le domaine des transports
00:43:57publics, mais on peut imaginer
00:43:59l'extension de cette logique des services
00:44:01publics en fonction des priorités
00:44:03de la bifurcation écologique. Un des exemples qu'on donne
00:44:05c'est celui de la réparation.
00:44:07L'idée d'un service public de la réparation
00:44:09serait à la fois une solution
00:44:11pour modérer
00:44:13notre rapport polluant à la nature
00:44:15et d'un autre côté un moyen
00:44:17pour apporter de la satisfaction à tout
00:44:19un chacun en permettant
00:44:21d'augmenter la durée de vie des objets, de donner
00:44:23des jobs qui peuvent être intéressants, etc.
00:44:25Voilà un peu les quatre piliers.
00:44:27Processus de délibération sur les
00:44:29besoins, comptabilité écologique
00:44:31pour avoir effectivement une capacité
00:44:33effective à se projeter, socialisation
00:44:35de l'investissement et
00:44:37demande émancipée.
00:44:39On rentre en détail
00:44:41dans chacun de ces tiroirs. Peut-être plus
00:44:43pour me concentrer sur le point
00:44:45de départ de votre question, sur
00:44:47comment on fait pour décider.
00:44:49Le point de vue qui est défendu dans
00:44:51ce livre, c'est un point de vue qui met l'accent
00:44:53sur l'idée de fédéralisme.
00:44:55Autrement dit, plus ça peut se décider
00:44:57au niveau local, mieux c'est.
00:44:59Il y a vraiment cette idée
00:45:01d'expérimentation au niveau local, d'autoplanification
00:45:03au niveau local qui est extrêmement importante.
00:45:05On peut aussi imaginer que
00:45:07le local est très loin. Pourquoi pas
00:45:09la place que des
00:45:11ZAD puissent avoir leur place, jouer des
00:45:13rôles de lieu d'expérimentation, etc.
00:45:15Mais cette idée du
00:45:17local est, autant que
00:45:19possible, doit nécessairement
00:45:21être conçue comme limitée. Il y a,
00:45:23on l'a dit aussi, la nécessité d'un point de vue
00:45:25plus global. Et donc la planification implique
00:45:27aussi un moment de centralisation.
00:45:29Comment procéder pour ce moment de centralisation ?
00:45:31Là encore, on s'appuie sur
00:45:33les expériences historiques.
00:45:35Un des points qu'on met en avant, c'est l'idée
00:45:37des commissions de modernisation
00:45:39qui avaient été développées en France par
00:45:41Jean Monnet dans la période d'après Seconde
00:45:43Guerre mondiale. Et nous, on parle de commissions
00:45:45de post-croissance. Que sont ces
00:45:47commissions de post-croissance qui peuvent exister
00:45:49au niveau local, mais aussi ensuite au niveau
00:45:51national ou plus ? Ce sont des commissions
00:45:53dans lesquelles se réunissent trois types
00:45:55de communautés. Une communauté
00:45:57qui serait celle des citoyens ordinaires,
00:45:59un peu avec la logique
00:46:01des conventions citoyennes,
00:46:03exactement.
00:46:05Et puis ensuite,
00:46:07la logique des producteurs,
00:46:09les représentants des secteurs
00:46:11qui peuvent être là, travailleurs,
00:46:13organisations productives,
00:46:15etc. Puis, effectivement,
00:46:17un troisième point qui est celui des scientifiques
00:46:19auxquels pourraient s'adjoindre sans doute
00:46:21les associations de protection
00:46:23de l'environnement, etc.
00:46:25Ces différents acteurs travaillent
00:46:27ensemble pour
00:46:29élaborer des scénarios. Et donc là,
00:46:31c'est vraiment le moment clé.
00:46:33Donc, il y a une forme,
00:46:35si vous voulez, c'est le moment
00:46:37de la démocratie qualitative, celui-ci.
00:46:39On a le mouvement le plus local possible
00:46:41qui est celui de la démocratie directe.
00:46:43On a, au niveau local, essayé
00:46:45directement de prendre des décisions.
00:46:47On a le mouvement de la démocratie
00:46:49qualitative qui est celui des conventions citoyennes
00:46:51qui permettent de travailler sur les scénarios.
00:46:53Et puis, on a ensuite une forme de
00:46:55verrou démocratique. Verrou, le terme n'est pas
00:46:57juste une forme, au contraire, de validation
00:46:59démocratique générale pour
00:47:01s'appuyer aussi sur ce qui existe et ce qui est admis dans nos
00:47:03sociétés. C'est à travers, tout simplement,
00:47:05une validation par le Parlement
00:47:07des différents plans. Et donc, notre
00:47:09idée, c'est vraiment de monter en intensité
00:47:11dans la démocratie. On parle de démocratie
00:47:13augmentée. Alors,
00:47:15là encore,
00:47:17le projet se veut vraiment très réaliste.
00:47:19Donc, démocratie augmentée en s'appuyant sur
00:47:21des expériences qui existent, mais
00:47:23une démocratie augmentée qui ne soit pas
00:47:25une perte de vie dans la démocratie.
00:47:27L'horizon
00:47:29d'une vie passée intégralement en Réunion et à
00:47:31s'en former n'est pas non plus quelque chose qui, à notre
00:47:33avis, est désirable.
00:47:35C'est pour ça qu'en partie, se livre aussi
00:47:37une ode à l'administration, une administration
00:47:39de qualité, une administration
00:47:41contrôlée par la démocratie,
00:47:43mais une administration qui a les moyens de
00:47:45fonctionner, qui est compétente et qui est fière
00:47:47de la mission qu'elle accomplit. Et donc,
00:47:49c'est une dimension aussi très importante.
00:47:51Donc, voilà un peu pour l'élaboration des scénarios,
00:47:53la façon dont on propose
00:47:55de procéder.
00:47:57C'est assez intéressant parce que,
00:47:59il y a eu l'expérience de la convention
00:48:01citoyenne. En effet,
00:48:03il y avait quand même
00:48:05un tout petit peu
00:48:07un accompagnement scientifique
00:48:09à cette convention citoyenne.
00:48:11Il n'y avait pas forcément, mais peut-être
00:48:13que je me trompe, le volet
00:48:15ouvrier,
00:48:17syndicat, enfin,
00:48:19la compréhension.
00:48:21Est-ce que c'est réellement faisable ?
00:48:23Mais j'ai l'impression que
00:48:25ça reste un tout petit peu heuristique.
00:48:27C'est-à-dire, oui, on doit juste diminuer ça,
00:48:29augmenter un peu ça.
00:48:31Je trouve que, en tout cas,
00:48:33en premier abord, il y a un côté heuristique assez
00:48:35facile. Dès qu'on fait des études
00:48:37métaboliques, que ce soit pour une ville, un pays,
00:48:39une région ou au niveau mondial,
00:48:41on sait qu'on doit juste réduire.
00:48:43Maintenant, la subtilité
00:48:45ou le moment clé, c'est réduire
00:48:47jusqu'où ? Et réduire
00:48:49qui et réduire comment ?
00:48:51Je pense que c'est là où ça devient
00:48:53intéressant. Non seulement
00:48:55on sait ce qu'on doit faire, on doit
00:48:57éliminer la voiture individuelle,
00:48:59on doit éliminer les jets privés,
00:49:01on doit taxer
00:49:03majoritairement des personnes
00:49:05qui sont trop riches, on doit rénover
00:49:07les bâtiments, voilà. Je veux dire, les grands
00:49:09chantiers sont là. Mais
00:49:11comment on
00:49:13redistribue ça ? Comment on affine
00:49:15ça ? Quels sont les petits leviers
00:49:17plus spécifiques ? Et je pense que c'est
00:49:19là où les trajectoires sont
00:49:21intéressantes. Est-ce qu'on
00:49:23va aller vers
00:49:25une économie plutôt
00:49:27renouvelable, plutôt biosourcée,
00:49:29plutôt machin ? Là, il y a quand même
00:49:31des visions du monde qui sont très
00:49:33différentes également. Toutes vont être
00:49:35sobres, mais quand même
00:49:37il y a sobriété et sobriété.
00:49:39Donc ça, c'est vraiment très
00:49:41intéressant parce que cette médiation entre
00:49:43finalement la prise de conscience de la crise écologique
00:49:45et des limites à atteindre et puis
00:49:47l'implémentation effective dans
00:49:49les structures économiques est,
00:49:51à notre avis, le point le
00:49:53plus faiblement développé dans les discussions
00:49:55contemporaines sur la question
00:49:57de la transformation écologique.
00:49:59Et l'institution clé, de ce point de vue-là,
00:50:01c'est effectivement cette question
00:50:03de la socialisation d'investissement. Et ça,
00:50:05pour le coup, on peut s'appuyer sur les expériences
00:50:07passées de planification. Celles-ci étaient
00:50:09certes productivistes, mais elles indiquaient
00:50:11qu'il va falloir construire tant de routes,
00:50:13il va falloir construire tant de
00:50:15voies de chemin de fer. Pour
00:50:17faire ça, il va falloir construire tant d'acieries.
00:50:19Pour avoir tant d'acieries, il va falloir avoir tant de
00:50:21mines. Donc on a cette logique, si vous voulez,
00:50:23on appelle ça techniquement, les économistes, la logique
00:50:25des matrices input-output.
00:50:27Et c'est aussi quelque chose qu'utilisent d'ailleurs
00:50:29qu'on utilise en
00:50:31écologie économique beaucoup. Et donc,
00:50:33il s'agit de regarder, pour atteindre tel objectif,
00:50:35quels sont tous les intrants qui sont nécessaires
00:50:37et d'avoir une espèce de logique
00:50:39de chaîne qui
00:50:41permet de construire ces scénarios.
00:50:43Donc effectivement, lorsque l'on parle de
00:50:45planification, de
00:50:47socialisation de l'investissement et de planification,
00:50:49on parle précisément de ça, d'avoir des
00:50:51scénarios, et à partir de ces scénarios, d'être capable
00:50:53de déployer ces
00:50:55matrices input-output qui
00:50:57sont capables de dire quel est le rapport entre les
00:50:59décisions concernant les chemins de fer
00:51:01et les voitures, que l'on va arrêter,
00:51:03et les emplois dans le secteur des
00:51:05acieries. Alors,
00:51:07ça c'est vraiment crucial.
00:51:09Et de quelle manière on peut
00:51:11rendre ces matrices input-output
00:51:13et les décisions qui correspondent
00:51:15au scénario que l'on a choisi, opérant ?
00:51:17J'ai évoqué tout à l'heure
00:51:19cette idée de socialisation de l'investissement,
00:51:21mais qu'est-ce que ça veut dire très concrètement ?
00:51:23Très concrètement, ça veut dire deux choses.
00:51:25Ça veut dire d'abord, et là un peu comme en Chine,
00:51:27un contrôle, ou comme
00:51:29dans les expériences développementalistes,
00:51:31un contrôle public sur les hauteurs stratégiques
00:51:33de l'économie. On ne peut pas faire la bifurcation
00:51:35écologique en laissant trois entreprises
00:51:37d'énergie se faire concurrence sur les mêmes territoires.
00:51:39Non, il faut qu'il y ait une logique unifiée
00:51:41pour les services de base,
00:51:43les services fondationnels, dans le domaine
00:51:45des grandes infrastructures de transport,
00:51:47d'énergie, peut-être
00:51:49de la construction.
00:51:51En tous les cas, cette idée qu'il y a
00:51:53un certain nombre d'entreprises
00:51:55clés qui doivent être
00:51:57sous contrôle public pour pouvoir piloter
00:51:59la planification, la bifurcation écologique,
00:52:01à notre avis, est essentielle.
00:52:03Le deuxième levier, c'est la politique
00:52:05du crédit. Et ça, c'est très intéressant
00:52:07parce que ça donne beaucoup de flexibilité.
00:52:09La politique du crédit, vous pouvez dire par territoire
00:52:11et par branche,
00:52:13à un niveau plus ou moins précis,
00:52:15ou même par type
00:52:17de projet, quelle est la quantité
00:52:19de crédit que vous allez allouer.
00:52:21De cette manière-là, vous allez pouvoir décider
00:52:23quelque chose dont on évalue assez précisément
00:52:25l'impact écologique,
00:52:27mais sans décider concrètement
00:52:29les modalités techniques du déploiement.
00:52:31C'est les organisations, les collectivités
00:52:33locales qui vont demander
00:52:35des crédits, et il y a une certaine
00:52:37quantité de crédit qui pourra être
00:52:39abordée, qui pourra être
00:52:41mobilisée pour ce
00:52:43besoin spécifique, pour cette demande spécifique.
00:52:45Donc là, vous voyez, c'est vraiment quelque
00:52:47chose qui est à la fois
00:52:49connu, de la politique
00:52:51du crédit a existé
00:52:53dans l'après-guerre en France,
00:52:55notamment, il y avait ces commissions
00:52:57de modernisation qui étaient associées à la politique du crédit,
00:52:59mais c'est aujourd'hui aussi
00:53:01en partie le cas en Chine où la banque centrale
00:53:03décide, alors c'est pas sur
00:53:05un tangentement en termes de volume,
00:53:07mais c'est sur des niveaux de prix du crédit,
00:53:09décide quel type de projet peut avoir accès
00:53:11à des crédits à meilleur marché,
00:53:13et en même temps, c'est quelque chose qui donne
00:53:15de la flexibilité. Donc, nous,
00:53:17ce qu'on propose, c'est
00:53:19d'avoir ces scénarios qui soient contraints
00:53:21et élaborés
00:53:23à partir de la comptabilité écologique,
00:53:25s'il vous plaît, il y a une forme de subordination du calcul
00:53:27économique au calcul écologique,
00:53:29et qu'il puisse se déployer
00:53:31concrètement à travers
00:53:33ces entreprises publiques qui doivent donc
00:53:35se conformer aux injonctions
00:53:37du scénario choisi
00:53:39et la politique du crédit qui permet
00:53:41d'aller de manière plus fine
00:53:43en laissant davantage d'autonomie
00:53:45aux acteurs économiques. Et ça,
00:53:47comme je l'ai dit tout à l'heure, à différents niveaux.
00:53:49On ne va pas le planifier
00:53:51au même degré de détail
00:53:53au niveau
00:53:55d'un pays et au niveau d'une région.
00:53:57Il y a une forme de
00:53:59processus de désagrégation.
00:54:01Quand vous parlez de crédit, j'imagine que vous parlez en euros
00:54:03ou en financier,
00:54:05mais on pourrait faire
00:54:07l'approche de Tonnerrat
00:54:09où il s'agit, si on
00:54:11dit que c'est un budget monétaire,
00:54:13mais on a aussi un budget carbone
00:54:15alloué, un budget
00:54:17ressources, un budget etc.
00:54:19Et comme ça, on a une approche
00:54:21multidimensionnelle ou une analyse
00:54:23multicritère ou un
00:54:25projet doit
00:54:27cocher toutes les cases pour pouvoir y arriver.
00:54:29Alors ça, c'est très intéressant.
00:54:31En fait, la difficulté
00:54:33avec la question de
00:54:35la prise en compte de la nature dans les
00:54:37calculs économiques et cette articulation
00:54:39entre le niveau local et le niveau global.
00:54:41Les scénarios permettent
00:54:43d'avoir une cohérence globale. Et du coup,
00:54:45en termes de biodiversité, en termes
00:54:47d'impact sur le climat, en termes de pollution
00:54:49chimique, etc., on peut arriver
00:54:51à un niveau macro et avoir des choses assez précises.
00:54:53Et donc, le plan doit permettre
00:54:55de se conformer à cet
00:54:57objectif macro. Mais ensuite,
00:54:59au niveau local concret, les
00:55:01destructions de tel ou tel écosystème vont
00:55:03avoir des particularités très difficiles à saisir
00:55:05au niveau central. Et c'est pourquoi,
00:55:07on mobilise dans le
00:55:09livre aussi l'approche de comptabilité dite
00:55:11CARE. C'est une approche qui consiste
00:55:13à dire qu'il faut prendre en compte
00:55:15au niveau des écosystèmes
00:55:17l'impact des différentes organisations sur ceux-ci.
00:55:19Et il ne faut pas prendre en compte
00:55:21cet impact de la manière
00:55:23qui consisterait à dire, on va
00:55:25avoir une logique de
00:55:27mesurer quels sont les services écosystémiques
00:55:29réalisés par tel ou tel
00:55:31forêt, rivière, etc.
00:55:33Mais au contraire, il faut mettre autour de la table
00:55:35les différentes organisations qui
00:55:37pèsent sur ces écosystèmes, un peu dans une logique
00:55:39de commun, et faire en sorte que ceux-ci
00:55:41doivent intégrer à leur comptabilité
00:55:43le coût de la préservation de ces écosystèmes
00:55:45et éventuellement, soient
00:55:47liquidés s'ils ne sont pas capables d'assumer ce coût
00:55:49de la préservation. Et donc ça, c'est quelque chose
00:55:51aussi auquel on tient beaucoup. C'est que là, il y a
00:55:53un critère de viabilité au niveau local
00:55:55des organisations.
00:55:57Donc de ce point de vue-là, si vous voulez, le calcul
00:55:59en nature d'autonomie réelle qu'on évoquait,
00:56:01il a lieu au niveau macro. C'est lui
00:56:03qui va permettre de piloter
00:56:05l'allocation des crédits. Mais on ne peut pas
00:56:07allouer les crédits dans 10 monnaies différentes en parallèle.
00:56:09C'est pour ça qu'on ne peut pas avoir un crédit
00:56:11biodiversité, un crédit carbone, un crédit
00:56:13monnaie, un crédit machin. Donc il faut
00:56:15un calcul plus général entre les scénarios
00:56:17qui est un calcul en valeur dans lequel
00:56:19on décide de prendre en compte ces différents
00:56:21facteurs, à partir duquel on va
00:56:23donner des crédits qui sont là cette fois-ci monétaires
00:56:25pour pouvoir développer l'activité économique.
00:56:27Et au niveau micro, on retrouve cette approche
00:56:29multicritère pour de manière fine
00:56:31être assuré la préservation
00:56:33des écosystèmes.
00:56:35Peut-être qu'il y a évidemment l'éléphant dans la pièce,
00:56:37l'unité
00:56:39la plus nucléaire, la plus fondamentale
00:56:41de ces discussions-ci.
00:56:43C'est un peu les besoins.
00:56:45Parce que comment on réduit ?
00:56:47Jusqu'où on réduit ?
00:56:49Qui décide ?
00:56:51Il faut qu'idéalement
00:56:53on puisse avoir un niveau de vie
00:56:55décent.
00:56:57Et comment choisir entre ces
00:56:59différents besoins ?
00:57:01Qu'est-ce qu'un besoin ?
00:57:03Qu'est-ce qu'un besoin superflu ?
00:57:05Qu'est-ce qu'un besoin essentiel ? Sachant que
00:57:07certains besoins qu'on a aujourd'hui
00:57:09n'étaient pas un besoin il y a
00:57:11X années parce qu'on n'avait pas l'électricité.
00:57:13Ça reste quand même un autre
00:57:15volet ou une autre parenthèse
00:57:17qui reste un peu importante.
00:57:19Il y a pas mal de travaux
00:57:21sur
00:57:23le Decent Living Standards
00:57:25dans les niveaux de vie
00:57:27décentes.
00:57:29Sur la question
00:57:31des besoins, il y a
00:57:33Nashima Rao, il y a Julia Steinberger
00:57:35et plein d'autres personnes qui parlent de tout ça.
00:57:37Comment on agit ?
00:57:39Comment on délibère autour de besoins ?
00:57:41En tant que citoyenne,
00:57:43citoyen, à quel niveau ?
00:57:45Comment on
00:57:47navigue là-dedans ?
00:57:49La question générale des besoins, on l'aborde
00:57:51de la manière suivante dans le livre en disant qu'il y a
00:57:53deux logiques d'universalité.
00:57:55D'abord, il y a des besoins essentiels qui doivent être
00:57:57satisfaits et qui sont des
00:57:59besoins spécifiques dont les modalités
00:58:01peuvent différer dans le temps
00:58:03mais c'est ceux qui sont pris en compte par
00:58:05l'approche des besoins
00:58:07du niveau de vie décent.
00:58:09Ce niveau de vie décent,
00:58:11ce que montrent les travaux de Steinberger et de ses
00:58:13co-auteurs, c'est qu'on peut
00:58:15satisfaire à l'échelle de la planète
00:58:17un niveau de vie décent pour tous les individus
00:58:19et ça c'est une bonne nouvelle. Ça veut dire qu'il n'y a
00:58:21pas de fatalité à
00:58:23se trouver face à une crise
00:58:25écologique qui de toute façon serait insurmontable
00:58:27avec la population que l'on connaît aujourd'hui.
00:58:29C'est possible. Mais un niveau
00:58:31de vie décent, ça permet de vivre
00:58:33de manière décent mais c'est bien
00:58:35moins qu'un niveau de vie confortable.
00:58:37Ensuite il y a des niveaux de vie qui sont
00:58:39complètement indécents.
00:58:41Il faut naviguer là. C'est là où il y a
00:58:43une deuxième frontière
00:58:45au-delà du
00:58:47le minimum c'est le niveau de vie décent
00:58:49et le maximum c'est
00:58:51les besoins que je vais pouvoir satisfaire
00:58:53sans portée atteinte
00:58:55aux conditions
00:58:57de vie et aux besoins
00:58:59des concitoyens
00:59:01des autres. C'est si vous voulez
00:59:03cet espace de
00:59:05liberté entre les deux qui pour nous est très important.
00:59:07Ce qu'on essaie de dire c'est que
00:59:09le niveau de vie décent doit être garanti
00:59:11mais ce niveau de vie décent n'épuise pas
00:59:13la logique des besoins. On continuera
00:59:15et heureusement à avoir des besoins qui ne sont pas
00:59:17des besoins seulement correspondant
00:59:19à un niveau de vie décent qui sont des choses que l'on désire.
00:59:21Et c'est bien que le système économique
00:59:23puisse permettre de satisfaire
00:59:25ces besoins qui correspondent aussi à des envies
00:59:27à des désirs. Mais tant que
00:59:29ceci n'altère pas
00:59:31les conditions de vie des autres.
00:59:33Alors concrètement comment ça se matérialise ?
00:59:35Eh bien ça se matérialise dans
00:59:37ce que j'évoquais tout à l'heure autour des scénarios.
00:59:39Les scénarios ça coupe des choses,
00:59:41ça interdite des choses. Si on décide
00:59:43qu'il n'y a plus de jet privé, il n'y a plus de jet privé.
00:59:45Et là on ne peut pas payer contrairement à la logique de la taxe
00:59:47carbone où c'est possible toujours de payer pour ses besoins.
00:59:49Non là c'est pas possible. Donc il y a collectivement
00:59:51des comportements écologiques
00:59:53indécents qui seront sortis
00:59:55du domaine des possibles. Mais
00:59:57une fois que
00:59:59ces comportements sont sortis
01:00:01hors du domaine des possibles,
01:00:03les possibilités pour chacune et chacun
01:00:05de satisfaire ses besoins comme
01:00:07ils le souhaitent restent préservées.
01:00:09Alors on va un petit peu plus loin dans le livre
01:00:11parce qu'un des autres
01:00:13adversaires ou une des autres batailles que l'on mène dans le livre
01:00:15c'est contre l'idée de souveraineté du consommateur.
01:00:17Ça c'est vraiment une des pièces
01:00:19maîtresses dans l'édifice de la pensée néoclassique.
01:00:21Le marché c'est supérieur. Pourquoi ?
01:00:23Parce que finalement chacun peut choisir librement
01:00:25de consommer comme il le souhaite
01:00:27et il n'y a pas un point de vue moral qui vient
01:00:29dire ça c'est bien ça c'est pas bien.
01:00:31Et c'est quelque chose qui sur le papier est très fort mais c'est
01:00:33quelque chose qui est une fable qui n'a absolument aucun rapport
01:00:35avec la réalité. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui
01:00:37les patterns de consommation sont en très grande partie
01:00:39déterminés par les grandes firmes
01:00:41à travers un système marketing qui est
01:00:43extrêmement puissant, qui nourrit des besoins artificiels,
01:00:45des besoins artificiels qui ne sont pas
01:00:47source de satisfaction des individus
01:00:49et des besoins artificiels qui par ailleurs sont
01:00:51très largement destructeurs de la nature.
01:00:53Donc déjà faire sauter
01:00:55ce carcan du consumérisme
01:00:57c'est commencer par l'appareil
01:00:59marketing extrêmement sophistiqué,
01:01:01la publicité est un premier levier.
01:01:03Mais un deuxième levier qu'on évoque aussi
01:01:05autour de cette idée de demande émancipée
01:01:07c'est faire émerger ce qu'on appelle
01:01:09à un moment donné des cyber-soviets.
01:01:11C'est quoi ces cyber-soviets de consommateurs ?
01:01:13C'est l'idée que comme pour les
01:01:15AMAP qui existent déjà au niveau local
01:01:17on peut être conscient de son
01:01:19mode de consommation et de ses conséquences
01:01:21ou comme d'une certaine façon les associations
01:01:23de consommateurs peuvent peser et défendre
01:01:25un certain nombre d'intérêts, on peut avoir
01:01:27des rassemblements de consommateurs en fonction
01:01:29de valeurs ou d'activités communes
01:01:31par exemple les aficionados
01:01:33d'escalade ou les aficionados
01:01:35de musique qui vont avoir
01:01:37une forme de consommation experte et qui vont
01:01:39par le biais de cette
01:01:41organisation nécessairement
01:01:43numérique, pourquoi ? Parce qu'à l'échelle
01:01:45du village où vous pouvez habiter ou de la petite ville
01:01:47il n'y aura pas nécessairement autant de spécialistes
01:01:49que vous le souhaiteriez, vont
01:01:51permettre donc d'agir pour peser
01:01:53sur les producteurs, imposer des standards
01:01:55imposer des normes, abandonner
01:01:57des directions plutôt que d'autres.
01:01:59Elles existent déjà ces communautés
01:02:01de consommateurs spécialistes
01:02:03à l'échelle latente.
01:02:05Leurs avis sont souvent
01:02:07les avis de certains individus vont être suivis
01:02:09vont avoir un caractère prestricteur mais elles sont
01:02:11très largement manipulées par les firmes
01:02:13et n'ont pas l'audience qu'elles pourraient avoir.
01:02:15Notre idée c'est justement de donner
01:02:17une institution, de donner davantage de pouvoir
01:02:19à ces consommateurs
01:02:21émancipés, ce qui est aussi une autre manière
01:02:23finalement de donner
01:02:25entre les différents moments du plan
01:02:27aussi une
01:02:29remontée, si vous voulez bottom-up
01:02:31directe, sans passer par la délibération
01:02:33vers une meilleure satisfaction des besoins.
01:02:35Donc dans les besoins
01:02:37si je me souviens bien il y en avait
01:02:39plusieurs, il y en avait neuf ou quelque chose comme ça
01:02:41où il y a des besoins plutôt physiques
01:02:43et il y avait des besoins aussi plus
01:02:45démocratiques.
01:02:47Ah oui, quatre sur le bien-être social,
01:02:49donc sur le bien-être physique, donc il y a se nourrir,
01:02:51se loger, accès à l'énergie, se vêtir,
01:02:53se soigner,
01:02:55donc ça c'est plutôt du côté du
01:02:57bien-être physique et dans le bien-être social
01:02:59s'éduquer, s'informer
01:03:01et communiquer, se déplacer
01:03:03et la liberté de circuler et s'assembler.
01:03:05Donc
01:03:07à quel niveau, disons
01:03:09moi je veux
01:03:11faire quelque chose de plus
01:03:13dans me loger et moins dans me vêtir
01:03:15et vous un peu plus sur
01:03:17vous éduquer et un peu
01:03:19moins sur vous déplacer.
01:03:21Donc ça c'est quoi ?
01:03:23C'est le foyer qui décide ? En interne ?
01:03:25Est-ce qu'il y a une régulation ?
01:03:27Est-ce qu'il n'y a pas de régulation ?
01:03:29C'est assez simple, il faut partir de l'existant.
01:03:31En fait il y a deux modes de satisfaction
01:03:33des besoins. Il y a un mode qui est collectif,
01:03:35c'est la logique des services publics essentiellement
01:03:37et dans ce cas-là, l'université
01:03:39ou le lycée dans lequel vous allez
01:03:41aller est piloté par le canton
01:03:43ou par le
01:03:45ministère de l'éducation nationale
01:03:47et puis les transports
01:03:49vont être déterminés par
01:03:51une société publique de transport comme
01:03:53les chemins de fer suisse.
01:03:55Donc on a ce niveau collectif
01:03:57de satisfaction des besoins. Et puis ensuite
01:03:59le genre de pâtes que vous allez manger à midi,
01:04:01si vous êtes flexitarien
01:04:03ou complètement végétarien ou vegan,
01:04:05ça c'est votre choix individuel
01:04:07qui se reflètera dans le système
01:04:09économique à partir des contraintes qui auront été mises
01:04:11sur le système d'investissement. Pour prendre l'exemple
01:04:13de la viande, une des décisions
01:04:15qui pourraient être prises, c'est considérer que
01:04:17la viande jusqu'à un certain point est
01:04:19acceptable mais pas au-delà d'un certain point
01:04:21du point de vue de son impact environnemental
01:04:23et donc qu'il y aura une quantité
01:04:25relativement limitée de viande qui sera disponible
01:04:27donc sans doute que ça sera cher d'avoir accès
01:04:29à la viande et peut-être qu'on l'aura moins
01:04:31ou peut-être que...
01:04:33Donc là il y aura des choix qui pourront être faits par les
01:04:35consommateurs. Mais il y a vraiment cette idée
01:04:37de deux niveaux. Il y a un
01:04:39niveau qui est le niveau
01:04:41de satisfaction collective des besoins
01:04:43et l'autre niveau qui est le niveau
01:04:45de satisfaction individuelle des besoins
01:04:47et qui là dépend de
01:04:49des décisions de chacun en tant que consommateur
01:04:51mais aussi en tant que participant
01:04:53à un collectif au niveau local
01:04:55qui va par exemple continuer à aller à son amap
01:04:57et à la développer, etc.
01:04:59Ça me permet d'aborder un point
01:05:01qui est essentiel. On finit le livre
01:05:03là-dessus en disant, il n'y aura pas de bifurcation
01:05:05écologique s'il n'y a pas de justice sociale
01:05:07si cette bifurcation n'est pas sociale.
01:05:09L'exemple de la viande le montre bien.
01:05:11Si certains ont les moyens de s'acheter de la viande
01:05:13tous les jours ou de
01:05:15voyager régulièrement au bout du monde
01:05:17alors que d'autres ne l'ont pas
01:05:19et voient leur consommation contrainte par
01:05:21de nouvelles contraintes écologiques, ça ne pourra pas avoir lieu.
01:05:23Ça sera refusé, ça sera bloqué.
01:05:25Donc la question de la justice écologique,
01:05:27la prescription des comportements
01:05:29exagérés, des comportements...
01:05:31C'est quelque chose qui va...
01:05:33qui est nécessaire.
01:05:35Il y a cette dimension écologie punitive
01:05:37qu'on assume. En gros,
01:05:39des comportements
01:05:41écologiques qui sont
01:05:43indécents
01:05:45et bien seront prescrits
01:05:47comme d'autres comportements indécents sont
01:05:49interdits dans nos sociétés.
01:05:51Mais en positif,
01:05:53il y a aussi des garanties
01:05:55qui doivent être abordées. Les garanties, à notre avis,
01:05:57elles sont à deux niveaux. D'abord, c'est des garanties sociales.
01:05:59J'évoquais tout à l'heure le fait que
01:06:01cette bifurcation écologique
01:06:03nécessitait
01:06:05une mobilisation très importante
01:06:07de la population. Ça veut donc dire
01:06:09que chacun va pouvoir y trouver sa place.
01:06:11Et une des garanties que l'on propose
01:06:13dans le livre, c'est l'idée de garantie
01:06:15d'emploi, le modèle de garantie d'emploi
01:06:17qui fait que toute personne
01:06:19qui perdrait son emploi
01:06:21aurait la garantie de trouver immédiatement
01:06:23un autre emploi dont ce serait à l'État
01:06:25de trouver,
01:06:27de proposer quelque chose.
01:06:29Donc cette idée de garantie de l'emploi
01:06:31qui a été développée notamment par une économiste
01:06:33Pavlina Tchernéva
01:06:35ou par Imane Minsky auparavant,
01:06:37est une idée vraiment, à notre avis, extrêmement importante
01:06:39pour justement garantir
01:06:41aux classes populaires qu'elles ne vont pas
01:06:43être abandonnées, elles ne vont pas être victimes
01:06:45dans ce processus-là.
01:06:47Le deuxième niveau,
01:06:49c'est qu'il y a aussi l'idée d'un enrichissement
01:06:51de la satisfaction. Prenons l'exemple
01:06:53du voyage.
01:06:55Beaucoup de personnes aspirent à voyager.
01:06:57Certaines aspirent moins à voyager.
01:06:59Il y a des désirs qui sont différents.
01:07:01La qualité du voyage peut aussi être transformée.
01:07:03On sera amené à voyager
01:07:05autrement.
01:07:07Et ce n'est pas sûr que le voyage soit au moins intéressant.
01:07:09Aller d'un centre commercial à un autre,
01:07:11ce qui est en fait le voyage auquel correspond
01:07:13un voyage d'un aéroport à un autre, ou même d'un centre-ville
01:07:15d'une ville touristique à une autre aujourd'hui,
01:07:17eh bien finalement ce n'est pas plus divers
01:07:19du point de vue de l'expérience que d'autres formes de voyages.
01:07:21Donc cette idée que transformer
01:07:23les modes de consommation,
01:07:25y compris dans leur dimension
01:07:27loisir, découverte, épanouissement,
01:07:29soit nécessairement un appauvrissement,
01:07:31on est radicalement opposé à ça. On ne pense pas du tout
01:07:33que c'est une logique
01:07:35de souffrance,
01:07:37de malthusienne, de réduction.
01:07:39Ce n'est pas ça. L'abusurcation écologique,
01:07:41c'est aussi transformer nos modes de satisfaction
01:07:43des besoins. Ce n'est pas les satisfaire moins,
01:07:45c'est sans doute les satisfaire mieux
01:07:47et plus que ce n'est le cas aujourd'hui.
01:07:49En tout cas, équitablement,
01:07:51les garantir, et puis on verra,
01:07:53on choisit comment on va là-dedans.
01:07:55Je ne sais pas si on rentre dans
01:07:57ce petit détail méthodo pour
01:07:59essayer de comprendre si on prend l'exemple de la viande
01:08:01ou de la mobilité.
01:08:03Il y a un ratio au niveau étatique
01:08:05qui,
01:08:07celui-ci, rentre à l'intérieur
01:08:09en dessous des limites planétaires.
01:08:11Celui-ci est subdivisé par
01:08:13territoire d'une certaine manière ou d'une autre.
01:08:15Est-ce que l'État
01:08:17nous garantit de pouvoir nous déplacer
01:08:19de X kilomètres et nous on choisit d'en faire
01:08:21plus ou moins ?
01:08:23Il n'y a pas la réponse dans le livre.
01:08:25Pourquoi il n'y a pas la réponse dans le livre ?
01:08:27Parce que c'est typiquement là-dessus que doit porter la délibération.
01:08:29Est-ce que la délibération va consister
01:08:31à dire qu'on interdit
01:08:33tous les voyages à partir d'un certain âge
01:08:35parce que c'est les jeunes qui doivent voyager
01:08:37parce que c'est à cet âge-là qu'on découvre le monde ?
01:08:39Est-ce qu'on peut avoir X
01:08:41voyages dans sa vie ? Est-ce que c'est
01:08:43quelque chose qui est individuel ou est-ce que c'est quelque chose
01:08:45qui est aussi associé aux organisations ? Parce qu'on va peut-être
01:08:47considérer que c'est important
01:08:49qu'il y ait des
01:08:51organisations puissent faire voyager certains de leurs membres
01:08:53pour s'organiser.
01:08:55Toutes ces décisions-là, elles seront de l'ordre de la délibération.
01:08:57Mais vous avez raison de dire
01:08:59que le rationnement peut faire
01:09:01partie de ça. Ça peut être une des modalités.
01:09:03Jean Covissier, avec Jif Project, lui dit
01:09:05que ça serait deux vols
01:09:07par personne au cours
01:09:09de sa vie. J'ai aucune idée
01:09:11du calcul d'un ingénieur qui permet d'arriver à ce résultat
01:09:13ni si c'est le bon moyen de délibérer.
01:09:15Ce que je sais, par contre, c'est qu'il va falloir compter
01:09:17quel est l'impact de l'aviation et qu'est-ce qu'on peut
01:09:19se permettre et qu'est-ce qu'on veut collectivement se permettre
01:09:21et répartir cette contrainte-là.
01:09:23Et c'est précisément là-dessus que porte le
01:09:25processus de planification.
01:09:27Pour en revenir
01:09:29également sur, j'imagine,
01:09:31la critique majeure de la
01:09:33planification, c'est un peu un autre
01:09:35type d'austérité, alors que les gens ne réalisent pas
01:09:37qu'on est dans une espèce de grosse austérité
01:09:39en ce moment aussi,
01:09:41ou en tout cas que ça va être très
01:09:43bâton, beaucoup moins
01:09:45carotte. J'aime beaucoup
01:09:47cette phrase de
01:09:49George Monbiot sur la
01:09:51sobriété privée et luxe public. Je pense
01:09:53que c'est vraiment quelque chose qui
01:09:55attire certaines personnes, repousse
01:09:57d'autres, mais en tout cas je trouve qu'elle est
01:09:59très parlante, que c'est quelque chose vers
01:10:01où on devrait aller, de pouvoir garantir
01:10:03pour tous et toutes un
01:10:05seuil qui rentre
01:10:07dans les limites planétaires.
01:10:09Et après, chacun d'entre nous,
01:10:11on serre un peu la ceinture sur des
01:10:13trucs superflus que nous-mêmes
01:10:15ont choisis. La logique d'extension
01:10:17de services publics correspond précisément
01:10:19en grande partie à ça. Cette idée de
01:10:21garantir et finalement de soulager
01:10:23aussi l'inquiétude
01:10:25associée à la précarité économique que
01:10:27beaucoup connaissent aujourd'hui. Ne pas être sûr
01:10:29d'avoir un boulot, ne pas être sûr de
01:10:31trouver un logement, ne pas être sûr de pouvoir payer
01:10:33ses frais de santé, ne pas être sûr de pouvoir payer l'éducation
01:10:35de ses enfants, etc. C'est des choses
01:10:37qui évidemment sont très
01:10:39insécurisantes pour tout un chacun.
01:10:41Et l'idée justement de cette
01:10:43extension de services publics,
01:10:45du niveau de videsson qu'on évoquait
01:10:47tout à l'heure, c'est d'enlever cette
01:10:49inquiétude, de donner une forme de liberté
01:10:51au fait d'enlever cette inquiétude-là.
01:10:53Et donc ça n'épuise pas la satisfaction
01:10:55des besoins, comme je l'expliquais aussi,
01:10:57mais c'est quand même quelque chose, une grande source
01:10:59de liberté.
01:11:01On vit beaucoup mieux lorsqu'on peut penser à autre chose
01:11:03qu'à ses problèmes essentiels
01:11:05au jour le jour.
01:11:06Peut-être pour clôturer,
01:11:08déjà je ne sais pas s'il y a des sujets
01:11:10qu'on n'a pas couverts, qu'il faudrait qu'on touche
01:11:12absolument, et puis
01:11:14comment on avance ?
01:11:16C'est-à-dire que ça, c'est un projet
01:11:18politique sociétal.
01:11:20Quelles sont les batailles
01:11:22à gagner là-dedans ? Comment on peut
01:11:24avancer ? Est-ce que c'est juste au niveau politique ?
01:11:26Est-ce qu'il y a certainement
01:11:28des critiques qui peuvent être que c'est très
01:11:30descendant comme projet, alors que
01:11:32au final, il est tout autant ascendant
01:11:34que descendant comme projet.
01:11:36Mais comment on avance ?
01:11:38Quelles sont certaines pistes ? Est-ce que vous avez déjà
01:11:40des réflexions sur
01:11:42les prochaines étapes ? Comment on mobilise ça ?
01:11:44Le livre est sorti vraiment
01:11:46récemment, il y a quelques semaines seulement.
01:11:48Nous, ce qu'on espère, c'est qu'il va susciter des
01:11:50discussions dans différents secteurs.
01:11:52Différents secteurs, quels sont-ils ?
01:11:54Effectivement, les militants, qu'ils soient politiques
01:11:56ou écologistes, on sent qu'il y a une vraie
01:11:58appétence de discussion aujourd'hui sur
01:12:00comment bifurquer ? Quelle est la question ?
01:12:02Quels sont les éléments
01:12:04institutionnels qui permettent
01:12:06de rendre crédible cette idée d'une sortie
01:12:08de la logique de la croissance capitaliste ?
01:12:10Ça, c'est un des premiers
01:12:12secteurs avec lesquels on souhaite discuter.
01:12:14On pense aussi qu'il y a beaucoup de gens qui, aujourd'hui, travaillent
01:12:16dans les administrations publiques ou dans les cadres
01:12:18du privé, qui ont conscience
01:12:20du caractère destructeur ou de l'impasse
01:12:22des politiques qui sont menées ou
01:12:24des décisions prises par leurs organisations.
01:12:26On s'adresse aussi
01:12:28à ceux-ci.
01:12:30Il y a dans le livre
01:12:32une volonté de prendre au sérieux
01:12:34les efforts qui sont faits sur la
01:12:36comptabilité écologique, sur la question
01:12:38des institutions
01:12:40d'investissement.
01:12:42On essaie de
01:12:46prendre en compte tous les
01:12:48efforts qui sont faits aujourd'hui
01:12:50et de discuter de manière critique, mais d'engager avec ceux-ci.
01:12:52C'est pour ça qu'on discute, par exemple, assez longuement
01:12:54de l'expérience de Biden aux États-Unis et de
01:12:56l'ARE, ou alors de ce qui a pu être
01:12:58fait au niveau européen. On évoque aussi
01:13:00le cas de
01:13:02les questions de comptabilité écologique qui sont
01:13:04faites par les comptables nationaux, au niveau de l'ONU.
01:13:06Toutes ces communautés expertes,
01:13:08on essaie de dire que c'est super ce que vous faites,
01:13:10qu'il y a vraiment des réflexions
01:13:12importantes, mais on essaie
01:13:14de faire des liens entre ces
01:13:16éléments-là pour proposer
01:13:18un paradigme, d'une certaine façon,
01:13:20qui permettrait de donner confiance
01:13:22à ces différentes communautés
01:13:24et d'aller de l'avant. Et puis, il y a aussi un autre
01:13:26enjeu qui est important, c'est pour les sciences sociales.
01:13:28C'est un livre qui est pluridisciplinaire.
01:13:30Je viens de l'économie politique, Rasmig est
01:13:32sociologue, et donc on travaille
01:13:34à la frontière de ces deux disciplines, mais avec la volonté
01:13:36plus largement d'intégrer
01:13:38les questions écologiques comme
01:13:40des questions de sciences sociales au sens fort,
01:13:42avec
01:13:44l'idée de construire
01:13:46une grammaire commune. Et on voit, par
01:13:48exemple, qu'aujourd'hui, il y a un développement important de l'économie écologique
01:13:50et que la discussion
01:13:52avec l'économie
01:13:54politique ne va pas nécessairement de soi.
01:13:56On essaie de s'inscrire
01:13:58dans cette conversation, de citer
01:14:00les uns et les autres, de les mettre en relation
01:14:02pour faire émerger cette communauté épistémique
01:14:04aussi au niveau de la recherche,
01:14:06une recherche tournée vers l'action, puisqu'on n'a pas
01:14:08le temps d'attendre.
01:14:10Oui, c'est quelque chose qu'on retrouve énormément dans
01:14:12la thématique du métabolisme sociétal
01:14:14ou des villes,
01:14:16où il y a ces noyaux d'écologie
01:14:18industrielle ou écologie économique,
01:14:20il va y avoir l'écologie politique
01:14:22et puis l'écologie
01:14:24tout court des écosystèmes.
01:14:26C'est vrai, cette interface m'interpelle
01:14:28beaucoup. Est-ce qu'il y a
01:14:30une ressource
01:14:32que, à part
01:14:34l'héros auto,
01:14:36est-ce qu'il y a une
01:14:38personne ou en tout cas un
01:14:40livre ou un film ou quelque chose
01:14:42qui illustre bien
01:14:44ces principes de
01:14:46bifurcation ou de planification écologique qui seraient
01:14:48intéressants de partager ?
01:14:50Il y a vraiment
01:14:52beaucoup de travaux qui sont
01:14:54très intéressants aujourd'hui dans le domaine
01:14:56de l'écologie.
01:14:58Donc ça m'embêterait
01:15:00de citer l'un et de ne pas citer l'autre.
01:15:02Je trouve ça un peu
01:15:04gênant, mais peut-être évoquer une des tensions
01:15:06qui, à mon avis, est féconde
01:15:08dans les débats qu'on doit avoir. C'est la question du
01:15:10rapport à la technologie et en particulier du rapport au numérique.
01:15:12Et ça a été une des questions
01:15:14qu'on a beaucoup discuté avec Razmig dans le cours
01:15:16d'écriture du livre. Pourquoi ? Parce que
01:15:18d'un côté, il y a effectivement ce versant
01:15:20optimiste du livre qui
01:15:22dit qu'en tant qu'espèce, on n'a
01:15:24jamais eu autant que par le passé notre capacité
01:15:26à prendre conscience
01:15:28de l'impact sur le
01:15:30métabolisme naturel de nos sociétés.
01:15:32Et
01:15:34en même temps, cette technique nous échappe d'une certaine
01:15:36façon à une dimension destructrice.
01:15:38Et donc, on procède, si vous voulez,
01:15:40d'une forme de logique de rationalisme
01:15:42tempéré. On dit, oui, on va pouvoir
01:15:44mobiliser la technique, on va pouvoir mobiliser le numérique,
01:15:46mais il va falloir discriminer
01:15:48dans les usages. Et dans le numérique,
01:15:50par exemple, il y a des usages qui vont être plutôt
01:15:52positifs du point de vue de leurs conséquences
01:15:54pour l'environnement. Par exemple, être capable de
01:15:56mesurer à l'échelle planétaire les fuites de méthane,
01:15:58ce qui, d'un point de vue déclaratif, ne marche pas
01:16:00du tout. On a besoin des images satellites
01:16:02et de les agréger, de les traiter
01:16:04pour pouvoir avoir cette connaissance-là.
01:16:06Mais, simultanément,
01:16:08on sait bien que le déploiement aujourd'hui
01:16:10à vitesse grand V d'intelligence artificielle
01:16:12ou des véhicules autonomes, etc., sont des choses
01:16:14qui sont extrêmement coûteuses du point de vue
01:16:16de l'impact énergétique et ne sont pas soutenables.
01:16:18Donc ça, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'il va falloir
01:16:20choisir entre les différents usages du numérique.
01:16:22Et ça rentre bien
01:16:24en écho avec cette logique de planification.
01:16:26C'est une logique, finalement, de mettre
01:16:28d'humanité les collectivités humaines
01:16:30devant leurs responsabilités. On a
01:16:32beaucoup de possibilités, mais il va falloir arbitrer.
01:16:34Et on propose
01:16:36dans cette logique d'arbitrage
01:16:38une logique, finalement, émancipatrice
01:16:40dans le sens où elle fait confiance
01:16:42à notre capacité collective
01:16:44à prendre ces décisions-là
01:16:46et donc à reprendre
01:16:48le contrôle ou à limiter
01:16:50la crise de contrôle dans laquelle
01:16:52nous sommes du point de vue de notre rapport à la nature.
01:16:54Je comprends
01:16:56que vous ne voulez pas avoir des favoris,
01:16:58mais est-ce qu'il y a quand même
01:17:00un livre
01:17:02ou un film ?
01:17:04Qu'est-ce que vous êtes en train de lire en ce moment ?
01:17:06Ce que je suis en train de lire en ce moment,
01:17:08je suis en train de lire
01:17:10les travaux de Brett Christopher,
01:17:12sans particulier The Price is Wrong,
01:17:14sur la question de
01:17:16l'impasse du renouvelable
01:17:18du point de vue des capitalistes,
01:17:20parce que le problème n'est pas tant que
01:17:22le coût unitaire
01:17:24de production de l'énergie renouvelable
01:17:26diminue, que le fait que
01:17:28du point de vue des entreprises, les perspectives
01:17:30de profit sont limitées. Pourquoi ?
01:17:32Parce qu'il y a beaucoup de coûts fixes,
01:17:34peu de coûts variables, et donc lorsqu'il y a
01:17:36trop de production, le prix arrive à zéro et donc il n'y a pas de profit.
01:17:38Et donc là, il y a une contradiction extrêmement
01:17:40importante. Voilà un ouvrage, par exemple, que je suis en train de lire
01:17:42et qui est très important, je crois.
01:17:44Merci beaucoup, Cédric Durand,
01:17:46et merci également à vous,
01:17:48toutes et tous, d'écouter jusqu'au bout.
01:17:50N'hésitez pas à nous faire remonter
01:17:52vos expériences de bifurcation, mais aussi
01:17:54vos modèles
01:17:56de comptabilité
01:17:58en nature. Il y a plusieurs personnes qui font
01:18:00de la recherche qui écoutent ceci.
01:18:02Et puis, il y a également dans
01:18:04ces questions-ci de planification,
01:18:06de post-croissance,
01:18:08des épisodes tels que celui
01:18:10avec Herman Daly, Tim Jackson,
01:18:12Kate Rehwerth, voilà.
01:18:14N'hésitez pas à vous balader là-dedans et puis
01:18:16on se revoit bientôt pour un autre épisode.
01:18:18Merci. Merci beaucoup pour cette invitation.

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