• il y a 4 mois
Dans ce moment extraordinaire, qu'est-ce qui influence le vote ? Les émotions semblent avoir pris le pas sur les critères sociaux et géographiques. La haine, le dégoût, la joie, la paresse... Qu'est ce qui nous fait voter ? Écoutez Pascal Perrineau, professeur émérite des universités à Sciences Po, Chloé Morin, politologue experte associée à la Fondation Jean Jaurès, Paolo Levi, journaliste et correspondant à Paris de l'agence italienne de presse Ansa et Arthur Pereira, reporter à RTL.

Category

🗞
News
Transcription
00:00Bonsoir à toutes et à tous, bienvenue dans RTL Bonsoir, l'édition spéciale de l'information
00:09du débat pour tout comprendre de cette campagne folle et de cette crise politique majeure
00:14qui secoue la France avec cette impression d'un grand saut dans le vide.
00:18L'important, ce n'est pas la chute, c'est l'atterrissage, dit-on, et dans ce moment
00:23extraordinaire, qu'est-ce qui influence le vote ? Les émotions semblent avoir pris
00:27le pas sur les critères sociaux et géographiques, la haine, le dégoût, la joie, la paresse,
00:31qu'est-ce qui nous fait voter ou pas ?
00:58Voilà, ça c'est dit, allez, pour parler de ces émotions au cœur du vote, ce soir
01:05avec nous, Chloé Morin, bonsoir madame, vous êtes essayiste et vous êtes directrice d'un
01:09cabinet de conseil, Pascal Perrineau, comment vous vous appelez ? Je ne sais pas, le sachant,
01:17vous êtes professeur des universités rattaché au CBIPOF, Arthur Pereira, vous êtes un des
01:22excellents reporters de RTL, vous avez sillonné la France à la rencontre de tout un tas d'électeurs,
01:27vous allez nous expliquer, et puis Paolo Levy, vous êtes correspondant italien pour
01:30l'agence italienne ANSA, et vous suivez depuis 15 ans les passions françaises, merci à
01:36tous les 4 d'être là pour cette édition spéciale, 577 députés, donc élus le 7
01:42juillet prochain, et nous sommes à 6 jours du premier tour des législatives.
01:46Voilà, avant de donner la parole à nos éminents spécialistes, RTL, vous le savez,
01:56c'est engagé dans la campagne, donne la parole à des électeurs, c'est RTL événement
02:00au cœur des familles, Arthur Pereira, vous avez sillonné la France avec Cindy Hofberg,
02:05avec Valentin Boisset, à la rencontre des électeurs, et comme le dit Rita Mitsouko,
02:08il n'y a pas que de l'amour, il y a de la haine, il y a du dégoût, il y a de la résignation,
02:14qu'est-ce qui vous a frappé Arthur ? Finalement, cette envie d'un changement radical, c'est-à-dire
02:19qu'à chaque fois le discours est quasiment le même, peu importe le département, je suis
02:25parti de l'aube jusqu'à la creuse, et dans chaque département, j'ai évoqué avec les
02:31habitants une problématique, la santé, l'éducation, l'insécurité, l'immigration, tout un tas
02:37de sujets, le pouvoir d'achat aussi, bien évidemment, et à chaque fois, on a essayé
02:41la gauche, on a essayé la droite, ça n'a pas fonctionné, on a envie d'essayer autre
02:45chose, finalement c'est le Rassemblement National, c'est la dernière alternative.
02:50Mais ce qui est un peu plus frappant, c'est qu'on se dit qu'au premier abord, d'accord,
02:55c'est un dégoût, on a tout essayé et rien ne va, donc on va choisir cette alternative-là,
03:01mais quand on pose la question finalement à ces nouveaux électeurs, c'est tout simplement
03:06qu'il n'y a pas réellement de motivation derrière, c'est-à-dire que quand on leur
03:09demande, par exemple, si on prend le thème de la santé, qu'est-ce qui vous plaît dans
03:13le programme du Rassemblement National, c'est un vide total, c'est-à-dire qu'il n'y a pas
03:16une seule mesure qui est évoquée, pour le pouvoir d'achat, c'est la même chose, typiquement
03:22les seuls qui m'ont répondu sur le pouvoir d'achat, ça me fait penser au reportage à
03:25Montluçon, une entreprise, une usine qui allait fermer, et je discutais avec les travailleurs,
03:30les travailleuses, et elles me disaient mais le Rassemblement National ne va pas nous aider
03:34puisqu'ils n'ont pas voté pour l'augmentation du SMIC, donc pourquoi voter pour le Rassemblement
03:38National ? Mais ce n'étaient pas des électeurs du Rassemblement National ? Alors ça c'était
03:43des électeurs, non, qui ne votaient pas au Rassemblement National, mais qui m'expliquaient
03:46pourquoi eux ne le feraient pas, et après d'autres disaient bah si, ils vont nous aider
03:49pour le pouvoir d'achat, sauf qu'on se rend compte que ceux-là n'ont pas forcément
03:53lu les programmes, et ceux qui finalement peuvent y penser et se disent pourquoi pas
03:58dès qu'ils lisent les programmes, et bien derrière ils se disent non, ça ne va pas
04:00nous améliorer notre quotidien.
04:02Pascal Perrineau, c'est nouveau cette logique du tester pour voir, ou c'est un désespoir
04:07qui s'exprime, c'est quoi cette affaire-là ?
04:09Non, tester pour voir ça existait déjà par exemple en 1980, vous savez lorsque la
04:16gauche arrive au pouvoir en 1981, il y avait eu dans les années précédentes, beaucoup
04:22de français qui disaient non, la gauche ne peut pas arriver au pouvoir parce qu'il
04:25y a les communistes en particulier, et on disait les chars soviétiques vont être place
04:29de la Concorde, il faut se souvenir tout de même de l'ambiance, donc peu à peu en
04:35effet, le parti socialiste a montré qu'il pouvait dominer le parti communiste, c'est
04:40une force plus importante, et à ce moment-là, ça a libéré le test, on s'est dit tiens,
04:46on va voir ce dont la gauche est capable, et c'est le début des deux septennats de
04:53François Mitterrand.
04:54Mais aujourd'hui, comment dire, il y a des passions certes qui existent, des passions
05:03qui sont souvent des passions tristes, dans les années 80, les passions étaient plus
05:08joyeuses, il y avait une passion de partage, il y avait une passion de justice, il y avait
05:13différentes passions qui sont des passions plutôt positives.
05:16Aujourd'hui, les passions sont, comme disait Spinoza, beaucoup plus tristes, c'est-à-dire
05:23qu'il y a beaucoup de rejets, beaucoup de ressentiments, c'est le mot que je trouve
05:29le plus exact pour qualifier ce qui se passe dans la société française, les électeurs
05:35lorsqu'on les interroge sont animés beaucoup par le ressentiment, le ressentiment contre
05:40les gens d'en haut, le ressentiment contre les citoyens du pays d'à côté ou de pays
05:45plus lointains, le ressentiment contre celui qui est dans le même quartier mais qui a
05:51envie d'être public alors que l'autre est obligé de travailler, énormément de
05:57ressentiments et attention aux ressentiments, ça débouche en général sur des votes de
06:03colère qui ne laissent rien présager de bon.
06:05Est-ce que vous êtes d'accord avec Pascal Perrineau, Chloé Morin ?
06:08Oui, oui, bien sûr, j'ajoute que...
06:11Et d'où il vient ce ressentiment ?
06:13Vous savez, 40 ans de...
06:16Oui, c'est le sentiment d'un échec général des politiques qui sont conduites depuis 30
06:23à 40 ans, c'est le sentiment que, mais ça a été très bien dit, la droite et la gauche
06:30finalement ont mené les mêmes politiques globalement et des politiques qui ont conduit
06:36à l'affaissement des services publics, aux déserts médicaux, aux hôpitaux qui s'écroulent,
06:42à l'affaiblissement de l'éducation avec une baisse de niveau, à l'appauvrissement
06:50globalement et à la précarisation des travailleurs, des salariés, donc c'est quelque chose qui
06:57est très global, qui vient de loin et quand on prend le problème, on se demande par quel
07:01bout le prendre en fait, et je rebondis sur le fait que les électeurs du RN ne connaissent
07:07pas le programme.
07:08Effectivement, ils ne connaissent pas le programme, aujourd'hui tout se passe comme si les programmes
07:12étaient secondaires, je pense que c'est pas tout à fait nouveau, c'est-à-dire qu'il
07:16y a aussi une logique à ça, c'est-à-dire qu'on a vécu les gilets jaunes, le Covid,
07:23on a vécu des émeutes inédites, donc on a vécu des situations où ce qui comptait
07:30c'était pas le programme qui avait été écrit un an, deux ans avant, c'était vraiment
07:34la capacité du chef, en l'occurrence c'était Emmanuel Macron, à décider et à prendre
07:40des bonnes mesures.
07:43Et donc je pense que c'est aussi pour ça que les programmes sont devenus secondaires,
07:48c'est évidemment secondaire parce que les gens considèrent que toutes les promesses
07:52ne sont jamais tenues, et du coup aujourd'hui ça n'est pas juste le fait du RN, c'est
07:58aussi le fait de la gauche, aujourd'hui quand on interroge des électeurs de gauche,
08:03ils disent de toute façon on va voter à gauche pour faire barrage au RN, et les mesures,
08:08personne ne les connaît.
08:10Paolo Lévy, ce ressentiment il existe en Italie aussi, c'est ça qui a porté au pouvoir
08:14Georgia Meloni ?
08:15Si, si, tout à fait, disons l'Italie a été un précurseur en Europe ces dernières
08:22années des populismes, elle est souvent un laboratoire de l'Europe pour le meilleur
08:28et pour le pire.
08:29Disons que nous on a connu l'équivalent du phénomène des gilets jaunes déjà en
08:332010 avec les Waffenkuhlodé qui ensuite se sont transformés dans le mouvement 5 étoiles,
08:39pour une fois on a été plus cartésiens que vous dans le sens que nos gilets jaunes
08:43à nous, après avoir fait un an et demi de manifs, battre le pavé quasiment chaque semaine,
08:49ils ont dit bon maintenant quelles sont les règles de la démocratie, on veut se présenter
08:51aux...
08:52Et donc ils se sont structurés, ils ont regardé les règles du jeu, ils sont arrivés jusqu'à
08:57la présidence du conseil, alors que les gilets jaunes ils se sont vite effrités.
09:03Et l'Italie voilà, elle a connu ça, ensuite elle a connu sa vague populiste avec les sœurs
09:11de Matteo Salvini et maintenant avec l'extrême droite de Georgia Meloni et c'est très intéressant
09:17de voir que Georgia Meloni le jour même où elle a pris ses fonctions au Palazzo Chigi,
09:22elle a dû faire un revirement spectaculaire de position, elle s'est ancrée à l'Union
09:30Européenne d'une façon très profonde parce qu'elle a compris qu'aujourd'hui, disons
09:35toute forme de patriotisme passe impérativement par une dimension européenne.
09:39Après il y a aussi je pense un problème de communication ici, nous en Italie ça fait
09:45quatre ans, tout parti confondu de la gauche au centre de Draghi jusqu'à l'extrême droite
09:51de Georgia Meloni, tout le monde a une seule et unique obsession, c'est de pouvoir rendre
09:57structurel cet instrument qui a été approuvé grâce aussi au travail excellent d'Emmanuel
10:04Macron pendant la pandémie qui est le plan de relance européen.
10:07Pour la première fois on a introduit au niveau des 27 une forme de mutualisation de la dette,
10:12cela signifie que c'est la fraternité européenne qui pour la première fois s'est mise en
10:17marche en 70 ans d'histoire européenne.
10:19Tout le monde en Italie, de Georgia Meloni jusqu'à la gauche en passant par Draghi,
10:24chaque jour on est obsédé par ça et on dit que celui-là est le seul instrument pour
10:30pouvoir affronter ensemble les défis de l'avenir, surtout ça peut marcher parce que ça a marché
10:36en l'occurrence pour la crise sanitaire mais ça peut marcher pour la défense, ça peut
10:39marcher pour l'écologie, ça peut marcher pour tous nos défis communs.
10:43Quelle est la position de Marine Le Pen et Jordan Bardella par rapport à ça ? Moi je
10:48l'ai demandé à Jordan Bardella et il s'est mis à rigoler, ah oui le plan de relance,
10:52qu'est-ce qu'il pense le faire tout seul ? La question se pose.
10:56On ne sait pas, on lui posera, nous on est plutôt sur des thématiques genre guerre
11:01civile, Chloé Morin, on en reparle tout de suite après la pause.
11:18Alors dans une interview aujourd'hui, le Président Macron a dit qu'on était dans
11:25un risque de guerre civile et le philosophe Michel Vinocq aussi en a parlé ce week-end
11:33dans une interview de L'Express.
11:35Chloé Morin, est-ce que opposer les deux blocs comme ça, faire peur comme ça puisqu'on
11:40parle des passions, des émotions, de ce qui peut nous pousser à voter, est-ce que ça
11:44a du sens ?
11:46Alors je ne sais pas si ce sera efficace, on voit bien l'intérêt pour Emmanuel Macron
11:52de dire cela.
11:53C'est en gros rappeler aux électeurs que les enjeux sont graves et qu'il vaut mieux
11:56voter pour les gens modérés que voter pour LFI d'un côté et l'URN de l'autre.
12:02Moi ce qui me frappe c'est que quand on interroge les électeurs, que ce soit de droite, enfin
12:10les électeurs non-RN disons, sur le fait à quoi ça ressemblerait si le RN arrivait
12:16au pouvoir.
12:17Et bien ils nous disent que ce serait la guerre civile, pas au sens où on pourrait l'imaginer
12:22c'est-à-dire au sens d'un soulèvement de l'extrême droite mais justement au sens
12:28où l'extrême gauche et une partie du pays refuseraient la prise de pouvoir du Rassemblement
12:36National et donc ce qu'anticipe une partie des Français c'est éventuellement des émeutes,
12:43des grèves, bref un bazar généralisé dans le pays et y compris éventuellement une libération
12:49de la parole raciste ou des propos ou des actes xénophobes.
12:56Donc quand il parle de guerre civile, il faut bien voir que c'est quelque chose qui existe
13:01dans l'opinion publique cette peur-là.
13:04Ce que l'on voit là pour l'instant dans les intentions de vote, c'est que cette peur-là
13:08est moins importante que jamais, c'est-à-dire que jusqu'ici elle contribuait à freiner
13:14l'accession au pouvoir du RN mais aujourd'hui, et c'est toute la stratégie de dédiabolisation
13:20de Marine Le Pen, et c'est pour ça que depuis des mois et des années ils respectent les
13:25institutions, ils essayent en permanence de dire qu'ils vont respecter les institutions,
13:31le rôle de chacun, ils ne vont pas mettre le bazar à l'Assemblée Nationale comme le
13:35fait la France Insoumise, c'est parce qu'il y a derrière cette crainte d'une partie de
13:40l'électorat.
13:41Arthur Donnejan vous avez rencontré, il y a des gens qui vous ont parlé de cette crainte,
13:45de désordre ?
13:46La crainte dont me parlaient certaines personnes, vous parlez des actes racistes ou xénophobes,
13:51je me souviens d'une jeune fille, 18 ans je dirais, dans la ville de Joigny, donc Joigny
13:54c'est une petite commune dans l'Yonne, 10 000 habitants, qui me disait, qui regrettait
13:58parce qu'elle n'était pas allée voter pour les élections européennes, et qui me disait
14:01vous voyez, moi ce que j'ai peur c'est que si demain le Rassemblement National est finalement
14:06à la tête à Matignon, je pourrais plus finalement me balader en marchant avec ma copine, main
14:12dans la main, tout ce genre de choses.
14:14Alors elle le dit ça en étant à Joigny, c'est-à-dire qu'on se dit que c'est une
14:18ville très paisible où finalement sur 10 000 habitants il y a 34 délinquances à l'année,
14:23c'est les chiffres que me donnait Monsieur le Maire, et on se dit que finalement ça touche
14:27aussi ces gens-là, c'est-à-dire qu'on peut se dire que la guerre civile on va l'avoir
14:33dans les grandes villes, à Paris, à Marseille, à Lyon, et en fait même aussi dans les territoires
14:38ruraux reculés, et bien cette crainte elle existe aussi.
14:41Pascal Perrineau, ça a déjà existé cette crainte de troubles vraiment majeurs ? Bon
14:46il y a eu 68 évidemment, mais est-ce que, et surtout, est-ce qu'elle peut influencer
14:52le vote ?
14:53Alors en effet, si vous voulez, nous sommes dans un pays qui a une vieille tradition révolutionnaire,
14:59depuis deux siècles, c'est-à-dire que quand on n'arrive pas à régler nos problèmes
15:02par la voix des urnes, et bien on la règle dans la rue, et ça s'est fait tout le XIXe
15:07siècle, escandé par des émeutes régulières, et au XXe siècle on a donné beaucoup.
15:14Le dernier grand mouvement social, comme on dit de manière très délicate, et bien en
15:20effet c'était mai 68, mais le mouvement des gilets jaunes a été aussi un mouvement
15:24social d'un nouveau type qui a montré que ces mouvements pouvaient être porteurs de
15:28violence et qu'on voulait obtenir par le pouvoir de la rue ce qu'on n'arrivait pas
15:33à obtenir par le pouvoir des urnes.
15:35Et je crois qu'aujourd'hui, oui, il y a ce danger, cependant quand on est président
15:40de la République, on est un homme ou une femme, pour l'instant un homme, en surplomb,
15:46et on est un arbitre, et on doit calmer le jeu, on ne doit pas jeter de l'huile sur
15:51le feu, même si ce feu est modeste, on sait qu'il y a des gens qui ont envie d'en découdre,
15:56et je crois que dire ce que le président a dit est imprudent.
16:01On l'a là, on l'a le président.
16:03La réponse d'extrême droite, ils mettent les Français les uns contre les autres.
16:05Si la réponse passe par la stigmatisation et la division, on est foutu, parce qu'elle
16:09renvoie les gens où à une religion, à une origine, et c'est en ça qu'elle divise
16:13et qu'elle pousse à la guerre civile.
16:14A l'inverse, vous avez de l'autre côté beaucoup de nos compatriotes qui sont de confession
16:18musulmane et ou issus de l'immigration, qui se disent « je ne suis pas bien défendu »,
16:22qui ont peur de l'extrême droite, et qui vont vers une offre qui est une forme de communautarisme.
16:26Mais ça, c'est aussi la guerre civile derrière.
16:28Là, on voit bien, on a un président de la République, si vous voulez, qui est presque
16:32commentateur de la société française.
16:35Ce n'est pas son rôle, une fois de plus.
16:39Il doit en effet calmer les passions, et en particulier les passions tristes qui sont
16:44à l'œuvre dans la société française.
16:46Et attention à ce qu'on appelle la prophétie autoréalisatrice.
16:50Quand on dit « voilà, ma prophétie, c'est qu'il y aura une guerre civile », et bien,
16:57quelque part, on contribue à mettre en place cette réalisation d'une guerre civile.
17:04Attention, ne jouons pas avec le feu.
17:08Vraiment, le pays n'en a pas besoin.
17:10Paolo Lévy, il joue avec le feu, le président Macron.
17:13Oui, de la part d'un président de la République, franchement, dans un tel contexte,
17:18ses déclarations ne contribuent pas à apaiser, je pense, le rôle aujourd'hui.
17:23Mais est-ce que ce n'est pas un jeu politique, en fait ?
17:26Est-ce que ce n'est pas pour récupérer de la voix ?
17:28Oui, mais peut-être ce n'est pas dans son rôle de chef de l'État d'évoquer un tel
17:34risque.
17:35Franchement, aujourd'hui, je pense qu'en France, comme en Europe, on a un besoin criant,
17:40criant, criant d'unité et de fraternité.
17:43C'est pour ça que les autres pays européens, à commencer par l'Italie, on est très inquiets
17:48que la France puisse se replier sur elle-même.
17:51La France et l'Italie, ensemble, ces dernières années, ont fait l'incroyable.
17:57On est arrivés ensemble, deuxième et troisième économie de la zone euro, Rome et Paris,
18:02main dans la main.
18:03On est parvenu à convaincre l'Allemagne de la nécessité de donner un nouveau cap à
18:08l'Europe.
18:09Et on a adopté ce plan de relance qui est la fraternité européenne, grâce aussi à
18:12Emmanuel Macron.
18:13Donc, il faut absolument suivre cette voie de cette fraternité européenne, surtout
18:18pas penser, prétendre qu'on puisse résoudre les grands enjeux, les grands défis du quotidien
18:25à l'échelle nationale, parce qu'on va droit contre le mur.
18:29Aujourd'hui, Jordan Bardel, dans sa conférence de presse fleuve, il a dit une phrase, à
18:34mon avis, complètement incompréhensible, il a dit « Emmanuel Macron a capitulé pendant
18:42sept ans face à l'Union européenne ». Il a capitulé ! Emmanuel Macron a orienté,
18:49réorienté l'Europe vers une Europe plus unie et fraternelle.
18:52Il a adopté le plan de relance.
18:54Si pour lui, ça c'est une capitulation, le plan de relance, moi je suis un blanc suédois.
18:59Non, non, mais c'est incroyable ce qu'a dit Jordan Bardel, c'est le monde à l'envers.
19:04Il a dit qu'Emmanuel Macron a capitulé face à l'Union européenne, alors qu'il
19:08a, à travers le discours de la Sorbonne, dicté l'agenda européen et aujourd'hui,
19:13même Giorgia Meloni revendique l'impératif d'une autonomie stratégique européenne,
19:19qui est, disons, l'invention plus importante qu'a faite le Président de la République.
19:24Voilà, on ne peut pas dire n'importe quoi non plus.
19:26Full sentimental pour vous, Pablo Lévy ! Allez, on se retrouve juste après quelques notes
19:33de la petite chanson, la magnifique chanson d'Alain Souchon.
19:37Et avec moi, l'excellente Chloé Morin, le remarquable Pascal Perrineau, le sublime
19:57Paolo Lévy et l'excellent aussi Arthur Pereira.
20:01Pascal, une petite question quand même pour vous, on parlait de la peur, etc.
20:06Vous avez publié en 87 un livre intitulé le Symptôme Le Pen, radiographie des électeurs
20:10du FN.
20:1135 ans plus tard, la radiographie des électeurs du RN n'est plus la même.
20:17Non, elle n'est plus la même pour plusieurs raisons.
20:20D'abord, ce parti a opéré une montée en puissance à laquelle très peu de Français
20:28s'attendaient, même encore récemment.
20:30Que ce parti soit aujourd'hui aux alentours de 35% des suffrages exprimés, ça le propulse
20:36dans la situation de ce qu'on appelle sous la Ve République un parti dominant.
20:40Il y a eu un parti gaulliste et néo-gaulliste dominant sous De Gaulle, Pompidou et Giscard.
20:45Puis ensuite, il y a eu un parti socialiste dominant, en particulier sous Mitterrand.
20:49Et tout le monde était persuadé que le système de parti s'était défait et qu'on n'avait
20:54plus que des partis exsangues.
20:55Et tout d'un coup, vous avez un parti qui est passé en quelques années de 15-17%.
21:03C'était le score de Jean-Marie Le Pen en 2002 et on parlait déjà de tsunami électoral
21:08à 35% aujourd'hui.
21:10Donc, il y a là quelque chose qui forcément, c'est devenu un vrai parti national.
21:16Au fond, le Front n'était pas un Front national, c'était un Front régional, surtout
21:21sur l'arc méditerranéen, quelques régions de l'Est.
21:24Aujourd'hui, vous vous rendez compte que dans 93% des communes, c'est vertigineux.
21:2993% des 35 000 communes, le RN est arrivé en tête.
21:34Et donc, les seuls îlots qui échappent à cette pénétration massive du Rassemblement
21:40national, qui sort de son bastion des couches populaires pour aller vers les couches moyennes,
21:46même les retraités, les retraités des classes supérieures, toutes les tranches d'âge,
21:50les jeunes sont à égalité aujourd'hui avec ELEFI.
21:55Il y a à peu près 40% de jeunes qui s'apprêtent à voter ELEFI, 40% RN, ce qui montre la polarisation
22:04dans la jeunesse.
22:05Tout ça a entraîné une mutation du Rassemblement national qui est devenu un vrai parti national.
22:11Arthur Perreira, vous avez rencontré des jeunes aussi qui votent ELEFI dans vos pérégalisations
22:17pour RTL.
22:18Alors, racontez-nous un peu.
22:20Ces jeunes, finalement, ils ne voient pas en le Rassemblement national l'alternative
22:25qui pourrait finalement leur redonner tous les espoirs et surtout améliorer leur vie
22:31quotidienne.
22:32Ils le disent très clairement et ça rejoint ce que vous disiez tout à l'heure sur l'Europe.
22:35C'est-à-dire qu'ils disent, mais actuellement, vivre sans l'Europe, ce n'est plus possible.
22:39On ne peut pas vivre...
22:40Enfin, l'Union européenne, ça fait des années maintenant qu'elle existe, ça fait des années
22:44que la France, finalement, vit aussi grâce à ses voisins européens.
22:49Et ils disent, rien que pour les études, certains parlaient d'Erasmus, c'est un exemple
22:54tout bête.
22:55Mais ça prouve bien que sans l'Europe, il n'y aurait pas Erasmus, on ne pourrait pas
22:59finalement aller étudier dans les pays voisins.
23:00Ils parlent aussi des mobilités, de pouvoir aller travailler à l'étranger, dans des
23:05pays très proches et puis aussi se déplacer, tout simplement.
23:08Il n'y a plus la question des frontières, on peut typiquement aller en Pologne plus
23:13facilement que si on doit aller, je dis une bêtise, aux Etats-Unis.
23:17C'est des choses un peu basiques que je dis, mais c'est ça qui revient aussi.
23:20Et aussi sur la question du pouvoir d'achat, les jeunes avec qui je discutais, pour le
23:25coup, ne pointaient pas du doigt ce que m'ont dit certains électeurs du Rassemblement national,
23:30c'est-à-dire, ce sont les étrangers, finalement, qui nous piquent notre boulot.
23:33C'est une phrase aussi qui revenait régulièrement et surtout dans des endroits où il n'y avait
23:38pas finalement un très grand nombre d'étrangers, pour le coup, ce qui perdait aussi un petit
23:42peu son sens.
23:43Et là, on me disait, mais en fait, pour le coup, le projet d'LFI, peut-être un peu
23:47utopiste, mais en tout cas, c'est l'autre alternative, finalement, qui est possible.
23:52Alors, Chloé Morin, tout à l'heure, Pascal Perrineau disait au début, le front n'était
23:56pas si national et il l'est devenu.
23:58On pourrait dire exactement le contraire du Front Populaire, qui était infiniment populaire
24:05à l'époque de Léon Blum et qui l'est, alors vraiment, ils les ont tous perdus, c'est-à-dire
24:1080% des ouvriers ont choisi de voter pour la liste portée par John-Anne Bardella le
24:159 juin.
24:16Ce score est huit fois plus important que ceux du PS et de LFI, arrivés ex aequo en
24:20deuxième position au sein de cet électorat.
24:22C'est en fait un front qui n'a vraiment plus rien de populaire, Chloé Morin ?
24:27Oui, ça fait un moment que la gauche a perdu le peuple, les partis de gauche sont devenus
24:34des partis urbains, plutôt éduqués.
24:38Donc cette question-là, elle revient en fait dans les partis de gauche, dans la réflexion
24:45comment retrouver les catégories populaires, etc.
24:48Elle est dans tous les discours des responsables politiques de gauche et d'ailleurs ils mettent
24:52en avant énormément de mesures sociales qui visent ces catégories populaires, mais
24:57de fait, et sans doute que le programme de la gauche avantage les catégories populaires
25:03plus sur le plan strictement social et économique, plus que d'autres partis et notamment le
25:09RN, mais étant donné que ça n'est pas uniquement pour des raisons économiques
25:14que les catégories populaires se déterminent dans leur vote, mais aussi parce qu'il y
25:20a aussi la question de la sécurité, la question de l'immigration qui compte énormément,
25:25avec derrière un malaise identitaire en fait, un sentiment d'être dépossédé de son
25:31propre pays et d'avoir un pays qui est en train de tomber, d'être déclassé et le
25:36sentiment de soi-même être déclassé dans son propre pays et donc en fait, la gauche
25:41n'arrive pas à avoir un récit qui parle à ces catégories-là et notamment le récit
25:48qui était porteur pendant des décennies de l'ascension de la promesse républicaine,
25:54donc la capacité des uns et des autres, l'ascenseur social, cet ascenseur-là tout le monde a compris
26:00qu'il était cassé et la gauche, en dépit du fait que tous ses discours soient tournés
26:05vers cela, n'arrive plus à convaincre sur ce sujet-là et donc oui, il y a eu en fait,
26:12la gauche dans son ensemble n'est plus un parti populaire comme vous l'avez dit et
26:19en plus, j'ai l'impression qu'à rebours de ce qui se fait ailleurs en Europe, quand
26:23la gauche essaye de conquérir le pouvoir en ce moment ailleurs, elle se désextrémise,
26:29elle renonce aux éléments les plus à l'extrême gauche de son programme ou de ses partenaires
26:37et en fait, nous ici, on fait exactement l'inverse.
26:40Ah oui, le contraire, il y a un petit problème à gauche, c'est Monique qui nous l'a dit
26:44ça, Monique de Brest.
26:45Mélenchon doit partir, Mélenchon c'est un répulsif, un répulsif qui ne sait pas
26:52parler, qui ne sait pas dialoguer, Mélenchon a été, mais il n'est plus, c'est la vie
27:00et comme dit Charles Aznavour, il faut savoir laisser sa place.
27:04Il faut savoir, coûte que coûte, et on se retrouve dans un instant sur RTL.
27:13Et on continue à parler de ça, de ce qui nous fait voter en fait.
27:22RTL bonsoir, édition spéciale, Anaïs Bouton, et avec moi, Chloé Morin, Pascal Perrineau,
27:28Arthur Perreira et Paolo Lévy, alors il y en a un qui essaye de retrouver un peu d'enthousiasme
27:32puisqu'on parle des émotions et c'est François qui va faire l'écouté.
27:36Nous avons retrouvé l'envie, l'envie d'avoir envie, l'envie d'avoir envie, l'envie d'avoir
27:44envie, Paolo Lévy, vous ne connaissez pas, mais c'est Johnny, notre Jody national, quel
27:49regard vous portez sur cette alliance de la gauche ? Comme disait Chloé peut-être,
27:55du NPA au PS, ça ne peut pas tenir ?
27:58A mon avis non, ils ont déjà essayé il y a deux ans et ça a duré quelques mois.
28:03Franchement, moi j'ai été très déçu parce que j'ai beaucoup admiré ce score incroyable,
28:12cet essai fantastique qu'a fait Raphaël Glucksmann pendant les européennes.
28:15Qui s'est fait piquer son truc.
28:16Dans la presse italienne, on a écrit des pages et des pages sur ce phénomène Glucksmann
28:23qui finalement semblait réanimer cette gauche, ce parti socialiste qui depuis quelques années
28:31était complètement perdu à l'image de ce siège de la rue Solferino qui a fermé.
28:36C'est toute une métaphore si vous passez par là.
28:39Et en fait, qu'est-ce qu'il se passe ensuite qu'il fait l'alliance avec Jean-Luc Mélenchon ?
28:45Franchement, moi je suis peut-être naïf, mais j'étais très déçu.
28:49J'aurais aimé qu'il aille soutenir les centristes Emmanuel Macron pour qu'on fasse
28:54tous ensemble une forme de cordon sanitaire contre les extrêmes et ça n'a pas été
28:58le cas.
28:59Il a fait un calcul plus personnel.
29:01Vous croyez personnel Pascal ?
29:03Je ne sais pas.
29:04A mon avis, c'était dans l'ordre des choses qu'il allait avec Emmanuel Macron pour sauver
29:09la France et l'Europe.
29:10Il était en désaccord.
29:11Je dirais deux choses là-dessus.
29:13C'était la seule condition de sa survie en fait.
29:15Vous savez, dans l'électorat de gauche, il y a un mot magique.
29:19Union.
29:20Alors l'union, voilà, on en reste là.
29:23L'union se fait sous influence de lfi, c'est pas grave, on oublie l'influence de lfi
29:27et on fait, on retient l'union.
29:29Parce que l'union, ça a été la stratégie qui, dans les années 80, 70-80, a amené
29:35la gauche au pouvoir et a amené une vraie alternance.
29:37Alors que l'histoire de la gauche, c'est l'histoire avant tout de sa désunion.
29:40Si on regardait l'histoire de la gauche sur un siècle, allez, aux doigts mouillés,
29:45il y a 25 années d'union et 75 années de désunion.
29:49Parce que la désunion, c'est la logique.
29:51Oui, il y a deux gauches irréconciliables.
29:53Elles sont d'accord à peu près sur rien.
29:54Même, nous disait Glucksmann, je crois, il y a quelques semaines, le rapport à la vérité.
29:58Alors si en effet, on n'a pas le même rapport à la vérité, ça pose problème pour s'unir.
30:03Bah, c'est pas grave.
30:04Ils ont jeté la rancune à la rivière, ça durera à mon avis quelques semaines.
30:07Et puis, ils ont fait l'union.
30:10Donc, en effet, on a une gauche, mais beaucoup d'électeurs n'y croient pas.
30:15Beaucoup d'électeurs n'y croient pas.
30:17Et à mon avis, on va avoir des surprises.
30:19Au second tour, une partie des électeurs de gauche ne suivront pas ou n'iront pas voter
30:25pour un candidat éléphi, si c'est lui qui représente la gauche au second tour.
30:30Donc, on va avoir, à mon avis, des surprises.
30:33Parce qu'on a voulu faire semblant et le semblant va éclater particulièrement lors du second tour.
30:38Il y a un gros enjeu sur ces triangulaires, Chloé Morin, non ?
30:43Oui, alors, pour le coup, l'enjeu et la difficulté, dans les triangulaires, reposent toujours sur le troisième.
30:51Surtout quand, ce qui sera le cas dans beaucoup de circonscriptions, le RN sera en tête.
30:55Et donc, la question, ça va être la question du désistement républicain entre les candidats
31:01de la majorité sortante et les candidats de gauche.
31:05Or, les candidats, à ce stade, selon ce que nous disent les sondages,
31:10le plus fréquent, ce sera d'avoir le candidat macroniste en troisième position.
31:14Donc, c'est lui qui va devoir, éventuellement, se désister en faveur de la gauche.
31:20C'est là que se pose le problème de renvoyer dos à dos les deux extrêmes.
31:27C'est-à-dire que quand il va s'agir de demander des désistements
31:31ou de suggérer aux électeurs de porter leur voix sur ceux dont on a dit,
31:38quelques jours avant, que ce sont des extrêmes et qu'ils portent la guerre civile, ça va être compliqué.
31:43Pour autant, je pense qu'effectivement, il y a des fractures au sein de la gauche qui sont très importantes,
31:49que tout le monde a conscience qu'elles existent.
31:52Il suffit de regarder sur les réseaux sociaux la manière dont quelqu'un comme Raphaël Glucksmann
31:56est insulté par les militants insoumis.
32:00Comme François Hollande, quand il a dit hier à Jean-Luc Mélenchon de se taire,
32:06a été insulté, y compris par des députés insoumis.
32:09Donc, il y a une haine et des rancœurs qui sont extrêmement tenaces.
32:13Personne n'imagine ces gens gouverner ensemble.
32:16En réalité, c'est là aussi où il y a un manque de responsabilité de certains alliés dans cette alliance.
32:25C'est-à-dire qu'ils ont, les socialistes, cédé sur le fond du programme,
32:31sur la responsabilité économique et budgétaire, sur un certain nombre de points
32:35qui étaient fondamentaux pour eux dans l'exercice du pouvoir jusqu'à présent.
32:40Et s'ils ont cédé là-dessus, c'est parce qu'ils ne croient pas un instant qu'ils vont exercer le pouvoir ensemble.
32:45Donc, aujourd'hui, leur enjeu, c'est mobiliser un maximum d'électeurs
32:49pour être les plus puissants à l'Assemblée nationale possible
32:52et éviter éventuellement que le Rassemblement national n'ait une majorité absolue.
32:56Mais leur enjeu aujourd'hui, ce n'est pas du tout comment ils vont gouverner demain.
33:03Arthur, est-ce que vous avez croisé des gens qui disent, comme cette auditrice qui a appelé le 30 juin 2010, qui a appelé RTL ?
33:11Je ne voterai pas le 30 juin ni le 7 juillet, d'ailleurs.
33:16Je suis écœurée par tous les partis politiques, autant qu'ils sont.
33:22Ma conclusion est que les Français sont des vaux et que je n'irai plus voter.
33:30Voilà. Est-ce que vous avez trouvé des gens aussi radicaux quand vous avez scionné un peu la France ?
33:36Oui, il y en a plusieurs. Et puis, il y en a qui n'ont jamais voté et qui partent du principe qu'ils n'iront pas voter,
33:42puisque qu'importe ce que ce soit la gauche, la droite, ce sera la même chose.
33:46Et puis, il y a surtout ceux qui sont finalement désabusés.
33:49C'est ça, je dirais, le plus inquiétant.
33:51C'est ceux qui ont toujours voté toute leur vie, à chaque élection, que ce soit municipale, régionale, législative, européenne,
33:58enfin toutes les élections, et eux disent qu'on en a marre, on ne va pas aller voter.
34:03Alors au début, ils disent qu'ils n'iront pas voter, qu'ils en ont marre, etc.
34:06Mais il y a quand même ce sentiment au deuxième tour de « est-ce qu'on va quand même laisser passer ? ».
34:12Alors là, je parle de ces électeurs qui, eux, étaient opposés littéralement au Rassemblement national,
34:18mais qui disaient « s'il y a le Rassemblement national face à un autre parti, est-ce qu'on va quand même ne pas y aller ? »
34:23Il y a un petit peu aussi ce sentiment de « est-ce qu'on ne peut pas quand même... on va laisser faire les choses, quoi. »
34:30Parce qu'à l'PRNO, l'abstention...
34:32L'abstention est une variable extrêmement intéressante, parce que c'est elle qui peut bouleverser les équilibres.
34:37Sinon, ce sera la reproduction de ce qui s'est passé lors des européennes.
34:41Or, l'abstention bouge. Elle est en train de fondre, même.
34:46Nous sommes, d'après ce que disent les enquêtes, aux alentours de près de 2 Français sur 3 qui prévoient de se déplacer.
34:54C'est dingue ! Ça fait longtemps que ça...
34:56Ça fait longtemps que c'est pareil.
34:57Parce que les dernières législatives...
34:58Parce que les dernières législatives, c'était la reproduction de la présidentielle, donc les gens ne se déplaçaient pas.
35:03Là, tout change. Vous comprenez ?
35:05C'est une législative qui ne vit pas à l'ombre d'une présidentielle.
35:08Elle vit à l'ombre des européennes, ce qui est une situation radicalement nouvelle sous la Ve République.
35:13Elle est assez folle, d'ailleurs.
35:14Ces abstentionnistes, en effet, peuvent bousculer, ici et là, leur rapport de force.
35:19Cependant, est-ce que ces abstentionnistes auraient une couleur politique qui ferait que tel ou tel a une réserve de voix pour inverser le cours des choses ?
35:29Non. J'ai fait une étude qui a été publiée dans le journal Le Monde il y a quelques semaines sur les abstentionnistes des européennes.
35:37On s'aperçoit que j'ai distingué plusieurs types d'abstentionnistes,
35:40ceux que vous décrivez comme étant... Ils ont le bol de la politique. Ils se retirent de la politique.
35:45C'est les retraités de la politique. On en a de plus en plus.
35:47Et puis, il y a ceux qui s'interrogent.
35:50Je n'irai pas, mais en effet, si il y a une situation particulièrement bipolarisée, peut-être que je sortirai de ma léthargie.
35:58Et puis, il y a l'abstentionnisme de protestation, qui est utilisé presque comme un vote protestataire.
36:03Et ces abstentionnistes, j'ai regardé, j'ai distingué ces trois catégories d'abstentionnistes.
36:07Chez les trois catégories, c'était le Rassemblement National qui arrivait en tête des proximités partisanes.
36:15Parce que je leur disais, certes, vous n'allez pas voter, mais de quelle partie êtes-vous le plus proche ou disons le moins éloigné ?
36:21Ce qui est le plus prudent. Eh bien, c'était l'ERN qui arrivait en tête.
36:25Donc, l'ERN a encore des réserves.
36:27L'ERN a encore des réserves. Allez, on en parle dans une seconde après la pause.
36:32A tout de suite.
36:37Anaïs Bouton.
36:40Passez un bel été sur RTL.
36:47RTL, vivre ensemble.
36:51Anaïs Bouton.
36:52RTL Bonsoir, édition spéciale.
36:54Et avec moi, Chloé Morin, Pascal Perrineau, Arthur Perreira et Paolo Lévy.
36:58Alors, écoutez Marie-Thérèse.
37:02Je voulais simplement dire qu'on en avait assez d'ententes pour qui on devait voter, tout ça.
37:07On est des gens, quand même, sensés.
37:10On n'a pas besoin des conseils de tout le monde, de tous les milieux, etc.
37:14Oui, Marie-Thérèse de Maison-Alfort a laissé ce message au 30 au 10 sur RTL.
37:18Les tribunes d'artistes, les consignes de vote de la CGT, les footballeurs, les humoristes, ce n'est pas une bonne idée, Paolo Lévy ?
37:27Ecoutez, non, je pense que ça fait partie de la normale vie démocratique d'un pays.
37:35Chacun a une grande démocratie comme la France.
37:38Chacun est libre de s'exprimer.
37:41Et aussi, je pense que chacun d'entre nous, à tous les niveaux, il ne faut jamais se sentir impuissant, vraiment.
37:49Chacun d'entre nous, dans une démocratie comme la France, a vraiment un pouvoir énorme de changer les choses.
37:55Donc, quand ils disent non, je ne vote pas, de toute façon, ils sont tous pareils.
37:59Ça, ce n'est pas vrai. Il faut combattre cette idée.
38:01Parce qu'il y a encore des partis qui représentent des projets de sociétés différents entre eux.
38:07Il y a un gouffre entre le Rassemblement National, la France d'Emmanuel Macron et celle du Nouveau Front Populaire.
38:12Donc, il suffit. C'est magnifique.
38:14Il y a dans les kiosques, j'étais hier à la Bastille.
38:18Vous avez trouvé un kiosque ?
38:19Oui, un kiosque. Il y a des journaux en France magnifiques.
38:24Et voilà, c'est vraiment une nourriture.
38:27Lire le journal de différents partis, de différentes orientations, de différents tout.
38:32Et s'abeuvrer de tout cela.
38:34Et ensuite, raisonner sur la meilleure recette.
38:38Est-ce que ce n'est pas contre-productif ?
38:40C'est-à-dire, ces élites, entre guillemets, que les gens disent coupées du monde.
38:45Dans un climat qui est un climat très anti-élite, aujourd'hui.
38:49Toutes les élites, les élites intellectuelles, les élites économiques, les élites journalistiques, les élites religieuses,
38:55toutes les élites syndicales, partisanes, tout le monde y passe.
38:58Il y a véritablement un sentiment anti-élite vis-à-vis des gens d'en haut, comme on disait,
39:03qui est extrêmement puissant, à droite, à gauche et ailleurs.
39:08Et donc, ceux qui interviennent, c'est ceux qui, dans leur secteur, sont en haut du système.
39:13Kylian Mbappé, tel ou tel artiste, etc.
39:18Et voilà, ces représentants ne représentent plus grand-chose, sauf eux-mêmes.
39:24Ils renvoient à eux-mêmes, et non pas aux gens qu'ils sont censés représenter.
39:29Et donc, il peut y avoir même un agacement, que l'on sent très bien chez l'autodidictrice,
39:34un agacement que ces gens-là lui disent, bah voilà, faudrait plutôt voter dans ce sens-là.
39:39Et j'étais très surpris hier d'une autocritique, d'un début d'autocritique,
39:44on ne peut s'attendre qu'à de l'intelligence de la part de Pierre Arditi.
39:48Pierre Arditi qui dit, je commence à en avoir ras-le-bol de signer, lors de chaque élection,
39:53et cette fois-ci, je vais peut-être m'abstenir.
39:56C'est, dans le climat actuel, la voie de la sagesse.
39:58La voie de la sagesse. Vous l'avez senti, ça, Arthur Perreira, quand vous avez sillonné la France,
40:04ce ras-le-bol des Français, qui en ont marre qu'on leur dise ce qu'ils doivent faire ?
40:10Ce ras-le-bol, oui, mais ce n'est pas la première chose à laquelle ils pensent.
40:14C'est-à-dire que moi, les Français que j'ai rencontrés, pour le coup, c'est savoir,
40:18est-ce qu'ils vont avoir assez de sous pour remplir le frigo, mettre de l'essence,
40:21ou finalement, tout simplement, se faire soigner ou aller à l'école.
40:27C'est-à-dire que, oui, pour le coup, ils ne veulent pas avoir des consignes qui soient dictées,
40:32mais après, peut-être que ces personnalités profitent aussi de leur statut,
40:36ils sont certes déconnectés, mais pour essayer de faire passer un message.
40:40Et pour le coup, comme dans certains territoires où je suis allé, dans des milieux ruraux,
40:44où on n'a pas accès forcément à la culture, à ce genre de choses,
40:47c'est finalement les réseaux sociaux, ou du moins, comment on a vu les Youtubers,
40:52Squeezie, ou même, on parlait de Kylian Mbappé, c'est leur façon, eux aussi, de savoir être reconnectés.
40:58Et ce qui préoccupait les Français, selon vous, c'est le pouvoir d'achat ?
41:02Ah, le pouvoir d'achat, c'est la question qui...
41:04L'accélération des services publics, c'est ça ?
41:06Exactement, c'est-à-dire que, l'exemple de trois femmes qui me reviennent en tête,
41:10dans le Cher, donc, sud du Cher, à 40 km de Bourges,
41:14deux ans pour avoir un rendez-vous chez un orthophoniste,
41:16six ans pour avoir un rendez-vous chez un dentiste,
41:19c'est-à-dire que, leur problématique à ces gens-là, c'est tout simplement,
41:22et la dame le disait...
41:24Six ans ?
41:25Six mois, six mois pour un dentiste, et deux ans pour un orthophoniste.
41:28Mais c'était même plus...
41:30Ces gens-là ne me disaient plus comment on va vivre, c'est comment on va survivre.
41:33Donc, on est dans un stade tout à fait différent.
41:36On a dépassé toutes ces problématiques-là, et même, on parle de l'éducation aussi,
41:40on parlait de l'affaissement des services publics,
41:42mais des écoles qui ferment les unes après les autres,
41:44de faire 20 km, quand des familles monoparentales...
41:47Une maman me disait, mais moi, en fait, j'ai dû renoncer à un travail,
41:50puisqu'en fait, j'arrivais en retard à ce travail-là,
41:52et l'employeur ne le comprenait pas.
41:54Donc, c'est toute une...
41:56C'est finalement leur vie quotidienne qui est chamboulée,
41:58qu'ils souhaitent un peu essayer de...
42:00Ils ont encore espoir, finalement,
42:02que les services publics puissent peut-être les aider,
42:05et que les écoles reviennent.
42:06Chloé Morin, vous croyez qu'il y a encore de l'espoir ?
42:09Ah ben, il y a...
42:11Les électeurs du RN ne sont pas là que...
42:14Enfin, ça a été très bien dit.
42:16C'est pas juste une forme de revanche sur les élites,
42:20une forme de ressentiment vis-à-vis des étrangers
42:23qui leur piqueraient leur travail et les ressources publiques.
42:26C'est aussi une forme d'espoir,
42:28une forme d'espoir que ça change.
42:30Aujourd'hui, le changement est incarné.
42:32C'est un changement que chacun espère radical,
42:35mais il est incarné d'une part par le RN,
42:38et d'autre part par LFI,
42:40parce que ces deux parties-là,
42:42d'une manière ou d'une autre, n'ont jamais gouverné.
42:44C'est beaucoup plus le RN, aujourd'hui,
42:46parce que LFI semble faire l'impasse
42:48sur deux autres préoccupations majeures
42:50pour les Français,
42:51que sont l'immigration, d'une part,
42:53et l'insécurité.
42:54Mais c'est vrai aussi, d'une certaine manière,
42:56pour LFI.
42:57C'est-à-dire que chacun va chercher,
42:59dans la radicalité,
43:01depuis quelques cycles électoraux,
43:03le changement que la droite de gouvernement
43:07et la gauche de gouvernement
43:08n'ont jamais réussi à faire advenir.
43:10Une petite question un peu malicieuse
43:12pour les deux politologues éminents sur ce plateau.
43:15Est-ce que les sondages, ça peut aussi influencer le vote ?
43:20Écoutez, des enquêtes très sérieuses
43:22ont été faites, en particulier aux Etats-Unis,
43:25là-dessus,
43:26et il n'y a pas d'influence majeure.
43:29Le sondage est plus un élément d'information.
43:31On écoute les sondages comme on écoute la radio,
43:34comme on écoute RTL, etc.
43:36Et il y a, en effet, aller vers le gagnant,
43:39il y en a certains qui sont tentés,
43:41mais il y en a d'autres aussi qui vont vers le perdant,
43:44qui défendent la veuve et l'opprimé,
43:48et qui vont vers le parti animaliste,
43:51vers l'alliance rurale.
43:53Ah oui, ça existe ?
43:54Oui, c'est ça.
43:55On va essayer de sauver ceux qui sont utiles au débat public.
43:58C'est ce qui s'est passé un peu pour les verts
44:00dans les élections européennes.
44:01Il y a un certain nombre de personnes
44:03qui disaient qu'ils allaient voter pour les écolos
44:05parce qu'ils ont une voix intéressante,
44:07même s'ils ont fait une mauvaise campagne.
44:09Mais regardez, à cet égard, le vote Lassalle.
44:11Vous savez que le vote Lassalle n'est pas loin du vote communiste.
44:13Il faut le faire, tout de même, le vote de l'alliance rurale.
44:16Et le vote Lassalle, c'est caractéristique de ça.
44:18Aucun électeur de Jean Lassalle se dit qu'il sera Premier ministre.
44:22Ce n'est pas tellement la question qu'il se pose.
44:25Mais en effet, il y a dans ce vote Lassalle,
44:30le côté, il existe dans les sondages,
44:33mais il est tout de même très faible.
44:34Donc on va aller vers ce perdant
44:36qui, en plus de ça, a été un berger dans les pires élections.
44:39C'est vrai, ça c'est magnifique.
44:41Bon, écoutez, merci vraiment à tous les quatre
44:44d'être venus discuter avec nous,
44:46de savoir ce qui fait qu'on vote
44:48et ces émotions qui nous poussent.
44:51Et n'oubliez pas les petits papiers.
44:53Les petits papiers le 30 juin et le 7 juillet.
44:56Laissez parler les petits papiers.
44:57Allons donc tous voter.

Recommandations