• il y a 7 mois
La loi du 27 juillet 2023 a pour objectif de réduire la procédure d'expulsion du locataire et prévoit de lourdes sanctions économiques. Une juridiction qui permet aussi de faire une différence entre les squatteurs et un potentiel locataire défaillant. Raphaël Richemond fait le point dans SMART PATRIMOINE sur la sécurisation des rapports locatifs.

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Transcription
00:00 [Générique]
00:04 Et c'est parti pour les Clés de Limoges, le rendez-vous dédié à l'investissement immobilier de Smart Patrimoine.
00:09 Et en l'occurrence aujourd'hui, nous allons revenir sur cette loi anti-squat qui a été votée il y a près d'un an, quelques 10 mois.
00:18 Donc 27 juillet 2023, loi anti-squat qui criminalisait notamment les locataires qui restaient dans l'appartement
00:27 après toutes les procédures en cours, donc les squatters.
00:30 Nous allons tenter de comprendre ce qu'il en est aujourd'hui avec Raphaël Richemont, avocat en droit de l'immobilier.
00:35 Bonjour Raphaël Richemont.
00:36 Bonjour.
00:37 Bienvenue sur le plateau de Smart Patrimoine.
00:39 Donc cette loi a fait beaucoup de bruit à l'époque, cette loi anti-squat.
00:43 L'idée était, j'ai envie de dire, d'égaliser finalement les peines entre locataires qui se maintenaient dans les appartements
00:50 ou dans les maisons après l'aboutissement des procédures et qui devaient normalement partir,
00:54 et de faire en sorte que ces peines-là soient équivalentes à celles où les propriétaires faisaient justice eux-mêmes
01:00 et pouvaient risquer jusqu'à cette loi plus que ceux qui squattaient les appartements.
01:04 Est-ce que ça a fait bouger les choses pour l'avocat en droit de l'immobilier que vous êtes ?
01:08 Écoutez, alors absolument pas.
01:09 Cette loi, de mon point de vue, en tout cas pratique au niveau des procédures au jour le jour, n'a absolument rien changé.
01:16 Elle rend même à certains égards, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais certains points même plus complexes.
01:20 D'accord.
01:20 Parce qu'elle pose une certaine insécurité juridique liée notamment à l'absence de dispositions transitoires,
01:26 donc on ne sait pas trop si ça s'applique en cours à certaines dispositions.
01:30 Je ne rentre pas dans le détail, mais elle a plutôt fait du mal que du bien.
01:33 D'accord.
01:33 En tout cas, effectivement, il y a deux volets, je dirais grosso modo, là encore je schématise,
01:39 mais il y a le volet pénal où on a voulu effectivement arriver à un équilibre entre les sanctions,
01:44 entre les squatteurs et les occupants qui se feraient justice eux-mêmes.
01:47 Et on a voulu aussi criminaliser le locataire qui, en restant dans les lieux non-obstant l'obtention d'une décision de justice
01:55 et l'épuisement de toutes les voies de recours se maintiendraient dans les lieux.
02:02 D'accord.
02:02 Et à ce moment-là, il deviendrait délinquant.
02:04 Alors il y a ce volet pénal et puis après il y a le volet civil où on a raccourci certains délais,
02:08 et ce qui ne change rien.
02:09 Pourquoi ça ne change rien ?
02:10 Parce que les délais n'ont pas été raccourcis finalement ?
02:12 Alors les délais ont été raccourcis, mais quand vous passez par exemple de deux mois à six semaines
02:16 pour un commandement de payer visant une clause résolutoire que vous faites délivrer à votre locataire quand il ne paye pas ses loyers
02:21 et que vous avez un an d'attente pour avoir une date d'audience,
02:24 de passer de deux mois à six semaines, si vous voulez, ça ne change rien.
02:27 Puisque de toute façon...
02:27 Le sujet c'est la date d'audience ?
02:28 Le sujet c'est la date d'audience.
02:29 D'accord.
02:30 Le sujet c'est la disponibilité du juge, c'est l'accès au juge, et c'est le fait que...
02:33 Alors c'est évidemment disparate, ça dépend des juridictions.
02:36 Il y a des juridictions qui, heureusement, fonctionnent bien et où vous avez des dates d'audience assez rapidement,
02:43 un mois, deux mois, bon, et il y en a où c'est trois mois, six mois, un an, un an et demi, parfois, dans certains cas.
02:51 Un an et demi où la situation est bloquée, on ne peut rien faire ?
02:53 C'est-à-dire que vous ne pouvez pas commencer votre procès.
02:55 D'accord.
02:56 Vous ne pouvez pas accéder, c'est la première audience.
02:58 Derrière, il y a encore la procédure judiciaire pour arriver jusqu'à l'obtention du jugement d'expulsion.
03:04 Voilà.
03:04 Et alors la loi a aussi tenté d'améliorer un dispositif de procédure administrative accélérée
03:12 qui permet justement d'éviter la casse-juge.
03:14 Bien sûr.
03:14 Mais ce dispositif-là, certes, il a été amélioré, j'en dis ce qui ne convient pas,
03:18 mais il n'est ouvert qu'à un cas très restreint, en réalité, qui est le cas de squat pur et dur
03:23 où quelqu'un est venu à casser la serrure et donc a commis une voie de fait,
03:27 une entrée dans les lieux par réfraction, et s'est installé.
03:30 C'est vraiment le squat pur et dur.
03:32 Et qui n'est finalement pas le cas le plus...
03:33 Eh bien non.
03:34 C'est même presque le cas le plus rare, finalement.
03:36 Le sujet, c'est plus des locataires qui sont entrés légalement dans les lieux ou...
03:39 Ce sont soit des locataires qui sont entrés légalement et qui se maintiennent dans les lieux
03:42 alors qu'une décision a résilé le bail,
03:44 soit qui se maintiennent dans les lieux alors que vous leur avez délivré congé
03:46 et qui se maintiennent dans les lieux à l'expiration du congé
03:48 parce qu'ils n'ont pas trouvé d'autres solutions de relogement,
03:50 soit quelqu'un à qui vous avez prêté les clés
03:52 ou un locataire a filé les clés à quelqu'un d'autre et qui s'est installé à sa place, etc.
03:57 Il y a plein de...
03:58 En réalité, toute une myriade de situations dans lesquelles il n'y a pas eu d'entrée dans les lieux par réfraction
04:05 et pour autant, vous êtes dans une situation d'occupation sans droit ni titre.
04:09 Et là, du coup, ça n'a rien changé.
04:11 Et ça, la disposition administrative rapide n'est pas applicable.
04:14 Et alors, justement, à quelques mois des Jeux Olympiques à Paris,
04:18 on a vu de nombreux articles de presse
04:20 voir des personnes, des propriétaires envisager de louer leur appartement ou leur maison sur Airbnb,
04:25 parfois à des tarifs particulièrement élevés.
04:28 Quand on fait de la location saisonnière,
04:30 on est dans un cadre juridique différent de celui où son locataire aurait décidé de se maintenir dans les lieux
04:37 à la fin de la location traditionnelle ou pas forcément ?
04:40 - Pas du tout.
04:41 C'est-à-dire que si vous avez le malheur d'avoir un locataire Airbnb qui se maintient dans les lieux
04:46 après la fin de...
04:50 - De la location saisonnière, oui.
04:51 - De la location de courte durée saisonnière,
04:53 vous êtes soumis au même dispositif, c'est-à-dire que vous êtes obligé.
04:58 En plus, là, il n'y a pas eu d'entrée dans les lieux par réfraction.
05:00 Vous avez donné les clés à la personne, elle était locataire.
05:04 Et donc, il faut saisir le juge et vous pouvez en avoir pour un an, deux ans, trois ans
05:09 si jamais vous tombez sur un locataire de mauvaise foi, un occupant de mauvaise foi qui se maintient dans les lieux.
05:14 Donc vous n'êtes pas...
05:15 - Donc vous louez votre appartement un week-end, vous pouvez vous retrouver avec deux ans de procédure
05:18 si jamais il y a eu malheur, s'il y en a eu.
05:20 - Absolument.
05:22 - C'est intéressant, c'est important de l'avoir en tête effectivement
05:25 quand on fait également de la location longue durée.
05:28 Donc le sujet, si je comprends bien, c'est avant tout les délais de traitement
05:32 que la loi n'a pas résolu aujourd'hui.
05:34 - C'est ça, c'est les délais d'audiencement, les délais pour obtenir des dates d'audience devant les tribunaux,
05:38 les délais de renvoi aussi parce que parfois vous avez une audience et renvoyer la dose après
05:42 parce que le locataire ou l'occupant veut prendre un avocat
05:45 et parfois vous avez des renvois six mois plus tard.
05:48 - C'est d'accord.
05:48 - Ça devrait être deux semaines, trois semaines plus tard ou un mois, mais pas six mois.
05:52 Donc là il y a un problème au niveau de l'état.
05:53 Et puis après il y a un deuxième problème, c'est au moment de l'obtention du concours de la force publique.
05:57 C'est-à-dire qu'en fait, une fois que vous avez votre jugement d'expulsion,
06:00 il faut aller voir l'état parce que vous ne pouvez pas vous l'exécuter vous-même.
06:02 L'état est le monopole de la force publique, donc vous devez aller voir l'état qui doit vous l'accorder ce concours.
06:07 Et ça, malheureusement, il y a des dossiers où ça fait trois ans que j'attends.
06:10 - D'accord. Et qu'est-ce qu'on fait dans ces cas-là ?
06:12 - Rien. Alors rien, non. Donc il faut maintenir la pression sur l'état.
06:15 Et le seul moyen que le propriétaire dispose, c'est de faire condamner l'état à lui verser des indemnités d'occupation.
06:21 - Donc un deuxième procès ?
06:22 - Alors un deuxième procès qui, en principe, est quand même plus simple
06:26 parce que l'état sait qu'il va être condamné.
06:28 Donc il peut y avoir ce qu'on appelle un recours gracieux où l'état accepte de négocier avec vous
06:34 et de vous indemniser sans passer par le juge.
06:38 Mais c'est quand même des procédures supplémentaires.
06:41 Mais effectivement, ça permet généralement de remettre votre dossier au-dessus de la pile
06:45 parce que l'état... Personne n'aime payer, l'état n'aime pas payer.
06:48 Et l'état, vous pouvez le faire condamner à payer une indemnité d'occupation.
06:52 C'est-à-dire que vous faites l'emprunt au montant, la valeur locative au montant du loyer de...
06:56 - Lorsque l'on n'a pas le concours de la force publique.
06:58 - Lorsqu'on n'a pas le concours de la force publique, exactement.
07:00 - Merci beaucoup, Raphaël Richemont, de vous être prêté l'exercice de nous synthétiser un petit peu, effectivement,
07:05 la situation dans laquelle se trouve, effectivement, un certain nombre de propriétaires suite à cette nouvelle loi.
07:11 Je rappelle que vous êtes avocat en droit de l'immobilier.
07:14 Quant à nous, on se retrouve tout de suite dans Enjeu patrimoine.

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