• il y a 8 mois
La loi le Meur veut répondre aux inquiétudes posées par le nombre important de locations touristiques dans certaines villes. Cette loi a pour objectif de poser un cadre fiscal et juridique à la location de biens sur des plateformes comme Airbnb. Xavier Demeuzoy, avocat expert en droit de l'immobilier touristique analyse les changements amenés par cette loi.

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00:00 [Générique]
00:04 Et nous commençons tout de suite avec les clés de Limo, le rendez-vous dédié à l'immobilier ou à l'investissement immobilier de Smart Patrimoine.
00:10 Et en l'occurrence aujourd'hui, nous allons faire un point sur la loi Lemaire, cette loi qui inquiète un certain nombre de propriétaires
00:17 qui voudraient continuer à louer leurs biens sur des plateformes, notamment Airbnb, notamment pour de l'allocation touristique ou saisonnière.
00:24 Pour en parler, nous avons le plaisir de recevoir sur le plateau Smart Patrimoine Xavier Demezois.
00:28 Bonjour Xavier Demezois.
00:29 Bonjour.
00:29 Bienvenue sur le plateau Smart Patrimoine.
00:31 Vous êtes avocat expert en droit de l'immobilier et Airbnb.
00:33 Cette loi fait couler beaucoup d'encre depuis qu'elle a été proposée par Madame Lemaire, d'où le nom de la loi.
00:41 Une loi qui propose quelques aspects fiscaux, mais pas que.
00:45 Beaucoup d'aspects également en lien avec une manière d'encadrer la mise en location d'un bien immobilier sur Airbnb ou sur d'autres plateformes.
00:54 Et beaucoup de propriétaires se demandent si ça va continuer à valoir le coup quelque part.
00:58 Alors, est-ce qu'on peut rappeler ce que va, ce que pourrait effectivement impliquer cette loi pour les propriétaires ?
01:04 Alors, en fait, cette loi, c'est ni plus ni moins qu'une boîte à outils qui a été proposée par le législateur en première lecture à l'Assemblée nationale.
01:10 On doit encore attendre la navette vers le Sénat, puisqu'il y a probablement certains textes qui vont être toqués ou assouplis.
01:16 Bien sûr.
01:17 C'est un petit peu le principe de l'échange législatif.
01:20 Mais pour résumer, pour bien comprendre, en fait, cette loi va permettre aux collectivités locales de disposer d'outils juridiques pour restreindre,
01:28 soit sur un plan fiscal, soit sur un plan juridique pur, la faculté pour les propriétaires, notamment résidences secondaires, de pouvoir louer librement leurs biens de façon illimitée.
01:38 D'accord. Et ça, ce n'était pas possible aujourd'hui puisque la ville de Paris l'a fait, par exemple.
01:41 Alors effectivement, dans les grandes villes de plus de 200 000 habitants comme Paris, Lyon, Marseille ou Bordeaux, ce dispositif était déjà en place,
01:49 déjà contrôlé, a déjà fait l'objet d'un important contentieux au tribunal avec des recouvrements d'amende.
01:54 Mais il est vrai que ce dispositif n'était pas encore délocalisé dans toute la France.
01:58 Et alors là, aujourd'hui, la boîte à outils qui sera, du coup, si je comprends bien, accessible à n'importe quelle maire ou à n'importe quel dirigeant de commune.
02:05 Qu'est-ce qu'il y aura dans cette boîte à outils pour permettre justement de contrôler ?
02:09 Alors concrètement, une mesure phare parmi d'autres. Aujourd'hui, lorsque vous vous inscrivez à votre maison ou votre appartement sur Airbnb,
02:16 vous avez l'obligation de prendre à Paris, par exemple, un numéro d'enregistrement sur le portail de la ville de Paris.
02:21 Donc de vous déclarer. Voilà, de le déclarer, de reproduire ce numéro sur la plateforme Airbnb,
02:25 ce qui permet notamment à la commune de savoir en temps réel combien de nuitées le propriétaire a pu effectuer.
02:30 Avec cette nouvelle disposition, l'obligation d'enregistrement va devenir nationale.
02:34 D'accord. Ça veut dire que tous les propriétaires de France auront l'obligation de prendre un numéro d'enregistrement
02:38 au risque de s'exposer à une amende de 5 000 euros, par exemple.
02:40 Donc ça, c'est le premier point. Ça, effectivement, numéro d'enregistrement.
02:43 Alors ça ne changera pas grand-chose pour les propriétaires parisiens, mais effectivement, on l'élargit au reste de la France.
02:48 C'est la seule chose ? Non, il y a beaucoup d'autres dispositions.
02:52 Une des plus importantes, ce sera la faculté pour des plus petites communes d'avoir le même dispositif qu'on traînait en Paris.
02:57 D'accord. Pour faire court, vous ne pourrez plus louer votre résidence secondaire aussi facilement qu'avant.
03:01 D'accord. Vous allez opérer ce qu'on appelle un changement d'usage. Et la commune pourra exiger une mesure de compensation,
03:06 c'est-à-dire que vous devrez compenser votre location en achetant de la commercialité ou en disposant d'un autre bien
03:13 pour compenser ce changement d'usage. D'accord.
03:15 Donc ça, c'est un dispositif qui est contraignant, voire presque bloquant pour les propriétaires.
03:19 Si je caricature ce que vous nous dites, parce que c'est ce qu'on a pu lire à droite à gauche,
03:22 est-ce que ça veut dire que pour louer un appartement sur Airbnb, il faudra que j'ai un autre appartement
03:27 mis en location longue durée pour avoir le droit de le faire ?
03:30 À Paris, par exemple, pour faire simple, si jamais vous louez votre résidence secondaire, il faut opérer un changement d'usage.
03:34 Donc si vous n'avez pas la faculté d'avoir un bien dans le même secteur à compenser,
03:38 vous pouvez « racheter » cette commercialité sur un marché de la commercialité.
03:41 D'accord. C'est extrêmement coûteux, c'est très technique à faire, c'est très complexe.
03:44 Et ce type de mesure pourrait être entendue à d'autres collectivités aujourd'hui.
03:48 D'accord. Ce qui viendrait un petit peu avoir un impact sur la rentabilité de la location qu'on pourrait faire de ce bien.
03:54 Bien sûr. Bien sûr, tout à fait, oui.
03:56 Et vous avez d'autres mesures. Par exemple, le législateur veut restreindre en résidence principale
04:00 la faculté de louer 120 jours par an à 90 jours. D'accord.
04:03 Vous aurez également, par exemple, vous ne pourrez plus louer votre bien si vous avez un DPE négatif.
04:09 Donc ça, c'est quelque chose qui peut toucher vraiment beaucoup de monde.
04:11 Donc ça veut dire qu'on reprend des règles qui existent finalement dans la location longue durée et on les met dans la location saisonnière.
04:16 Tout à fait ça. Il y aura également un régime de durcissement fiscal pour rendre moins « attractif » la courte durée.
04:22 Vous aurez également l'obligation d'informer votre syndic de copropriété si vous faites de la courte durée.
04:27 Mais encore, parmi les autres mesures phares, vous aurez une responsabilité désormais des intermédiaires immobiliers.
04:33 D'accord.
04:33 Donc ça veut être soit les agents immobiliers, soit les conciergeries, qui si jamais demain,
04:37 elles ne respectent pas la mise en location de votre appartement avec les règles locales,
04:41 s'exposeront à la même amende que vous en tant que propriétaire.
04:43 Donc ça veut dire qu'aujourd'hui, les intermédiaires qui...
04:46 Alors effectivement, il y a sûrement des très sérieux, sûrement des moins sérieux,
04:49 mais qui, entre guillemets, n'étaient pas contraints dans la manière d'exercer leur activité,
04:52 demain pourraient être contraints sur les règles à appliquer lorsqu'on fait de la conciergerie.
04:56 Si par exemple, demain, vous avez une conciergerie qui loue une résidence secondaire à Paris alors qu'elle n'a pas le droit de le faire.
05:00 D'accord.
05:01 Aujourd'hui, elle avait une immunité judiciaire de la Cour de cassation.
05:03 Demain, avec ce nouveau dispositif, le propriétaire s'exposera à 50 000 euros d'amende et la conciergerie s'exposera à la même amende.
05:09 Naturellement, si la conciergerie gère plusieurs centaines de lots, il faudra qu'elle soit beaucoup plus prudente dans sa gestion de son parc immobilier.
05:15 Une question, alors peut-être qui surprend certains dans ce que vous nous avez dit, c'est qu'il faudra prévenir son syndic de copropriété,
05:21 mais on ne devait pas déjà prévenir sa copropriété quand on faisait du Airbnb ?
05:24 Non, vous n'aviez pas à prévenir votre copropriété.
05:26 Néanmoins, vous étiez toujours soumis à un contrôle de votre copropriété si elle n'est pas d'accord avec la façon de louer votre appartement.
05:32 Mais aujourd'hui, ce n'est pas une demande d'autorisation que la loi est en train de fixer, c'est une information au syndic.
05:38 Derrière cette information, l'idée sous-jacente, c'est qu'en informant votre syndic, le syndic va probablement se pencher sur votre conformité ou non à faire de la courte durée
05:47 et va faire peut-être, lors d'une assemblée générale, un point d'information.
05:50 D'accord.
05:51 Et la question se posera pour chaque immeuble de savoir s'il y a une conformité ou pas de conformité.
05:54 Et ça veut dire qu'on peut... Est-ce que la copropriété a les moyens d'interdire une location Airbnb suite à cette réunion d'information, par exemple ?
06:02 Alors, c'est très compliqué, la notion de droit de la copropriété et d'Airbnb. C'est une matière qui fait couler beaucoup d'encre.
06:08 Il y a beaucoup de décisions de justice qui sont contradictoires.
06:11 Là, récemment, j'ai obtenu une très belle décision au tribunal de Lisieux.
06:14 Une très grosse copropriété de Deauville avait demandé à mes clients d'arrêter de faire de la courte durée.
06:18 Et en invoquant, justement, le caractère bourgeois de l'immeuble, j'ai fait reconnaître par le tribunal qu'il n'y avait pas de caractère commercial de l'activité.
06:25 D'accord.
06:26 Donc, aujourd'hui, c'est du cas par cas.
06:27 Donc, je ne peux pas généraliser aujourd'hui sur votre plateau le fait qu'on a le droit ou on n'a pas le droit.
06:31 Ça dépend complètement de chaque règlement de copropriété.
06:33 Ça dépend aussi de la localité de l'immeuble.
06:35 Tous ces facteurs sont à prendre en compte par le syndic et le syndicat.
06:38 Et le caractère commercial est lié, quoi, au nombre de nuitées par an ou c'est plus complexe que ça ?
06:42 Alors, on a eu une récente décision de la Cour de cassation qui a été rendue en janvier dernier,
06:46 qui est venue un petit peu rabattre les cartes en nous donnant une définition un petit peu de ce qui était commercial ou non.
06:51 Et la Cour de cassation a pu considérer notamment qu'était une activité commerciale Airbnb lorsque vous aviez des services par hôteliers significatifs.
06:58 D'accord.
06:59 Donc, ça veut dire des transferts à aéroports, un certain nombre de prestations.
07:03 Donc, c'est beaucoup plus difficile aujourd'hui de définir le caractère commercial ou civil de l'activité,
07:07 notamment la lumière de cette décision de la Cour de cassation.
07:10 Dernière question. Je reviens également sur ce que vous nous avez dit.
07:12 90 nuits par an, pour ceux qui louent à Paris, il y a déjà une limitation de 120 nuits par an.
07:21 Ça n'est qu'à Paris, ça, aujourd'hui ? Ou en tout cas dans les grandes villes de France ?
07:23 Dans les grandes villes de France, vous allez être restreint à 120 jours par an,
07:27 sauf dérogation pour motifs professionnels ou médicals où vous pouvez déplafonner les 120 jours.
07:31 Mais sinon, effectivement, c'est 120 jours. Il n'est pas certain que le texte passe à 90 jours au Sénat.
07:35 Mais là, ce serait 90 jours pour tout le monde.
07:37 Alors, non, ce serait 90 jours pour les communes qui le voteront.
07:39 D'accord.
07:40 Sur délibération du Conseil municipal, Paris, demain, pourrait, par exemple,
07:43 si la disposition est adoptée par le Sénat et l'Assemblée nationale,
07:47 à terme, la ville de Paris pourrait voter cette restriction à 90 jours.
07:50 D'accord.
07:50 Pour moi, ça n'a pas beaucoup de sens, mais elle pourrait le faire.
07:52 D'où l'idée de la boîte à outils, c'est-à-dire permettre à tous de pouvoir le faire,
07:55 si jamais ils se mettent d'accord pour le faire.
07:57 Merci beaucoup, Xavier Demesoire, de nous avoir accompagnés dans Smart Patrimoine.
08:00 Je rappelle que vous êtes avocat expert en droit de l'immobilier et Airbnb.
08:03 Et quant à nous, on se retrouve tout de suite dans Enjeu patrimoine.

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