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Transcription
00:00 Bonjour à vous Dominique Pranay. Bonjour à vous et bonjour à tout le monde.
00:03 Merci d'avoir accepté notre invitation sur le plateau de France 24.
00:06 Vous êtes la présidente de la Fédération internationale des journalistes.
00:09 Dans son dernier tableau détaillé à l'instant dans ce sujet,
00:13 RSF s'inquiète de la désinformation au sens large
00:17 avec une menace majeure pour la liberté de la presse dans le monde.
00:20 Comment est-ce que cette liberté de la presse, elle s'abîme au fur et à mesure du temps ?
00:25 Qu'est-ce qui explique qu'elle se dégrade à ce point-là ?
00:27 Eh bien, il y a de plus en plus de régimes autoritaires d'une part
00:31 et d'autre part de plus en plus de puissants intérêts financiers qui ne sont pas freinés,
00:36 qui sont même aidés par certains gouvernements,
00:39 qui s'appuient sur des mafias tout simplement.
00:42 Et c'est surtout qu'il y a une impunité pour les assassins de journalistes
00:47 et surtout pour les commanditaires.
00:49 Cela fait des années que nous réclamons maintenant et nous espérons que nous allons y arriver
00:54 que les Nations Unies adoptent en Assemblée Générale
00:59 une Convention Internationale contre l'impunité des assassins et des commanditaires de journalistes.
01:05 Pourquoi ? Parce que les journalistes sont des citoyens et des civils comme tout le monde,
01:10 mais ils ont une mission particulière, celle d'informer.
01:13 Or, en toute impunité, s'il suffit de tuer un journaliste pour faire disparaître un témoin
01:19 sans courir aucun risque, pourquoi se gêner ?
01:23 Et si nous n'avons pas cette Convention, dans quelques années, il n'y aura plus de journalistes.
01:28 Nous ne sommes pas des héros, ni vous ni moi.
01:30 On ne se lève pas le matin en disant "Voilà, je vais être une héroïne". Pas du tout.
01:36 Cette Convention a trois points essentiels.
01:39 Le premier, c'est de contraindre les pays à annuellement donner un bilan
01:46 de ce qu'ils font en faveur de la liberté de la presse.
01:49 Le deuxième, il n'y a pas vraiment d'ordre, c'est d'avoir un comité permanent de surveillance.
01:54 Et le troisième, qui est le plus important,
01:57 c'est d'avoir la possibilité de mener des enquêtes internationales et indépendantes
02:02 dans tous les pays où ce n'est pas possible de le faire,
02:05 et ainsi d'affaire en justice les assassins.
02:09 Rien que ça aurait déjà un effet dissuasif.
02:13 Vous évoquez à l'instant ces journalistes que l'on fait taire, dont on note la vie.
02:19 On pense à certains pays, par exemple, comme le Mexique,
02:21 où les assassinats de journalistes sont malheureusement assez fréquents et réguliers.
02:26 On pense à la liberté de la presse, qui recule aussi dans des États dits "démocratiques".
02:30 On va prendre l'exemple de la France. Nous sommes au 21e rang. Ce n'est franchement pas bon.
02:35 Écoutez, nous sommes au 21e rang parce que nous avons monté, semble-t-il,
02:41 d'après les critères de RSF, parce que les autres sont descendus.
02:45 Donc c'est mécanique, ce n'est pas parce qu'on a fait des progrès.
02:47 Non, c'est un mécanisme. Je ne pense pas que ça ait à faire.
02:49 Quant à la Fédération internationale, que j'ai l'honneur de présider,
02:53 qui représente environ 600 000 journalistes dans le monde,
02:57 nous avons des rapports de tous nos affiliés dans 147 pays
03:02 qui, jour par jour, nous parlent de cette régression terrible
03:08 et des dangers que cela fait peser sur les démocraties.
03:12 Et c'est quoi la menace première pour les journalistes en France ?
03:14 On sait que, par exemple, des cas sont judiciarisés, des journalistes sont convoqués par la police.
03:19 C'est aussi ça ? Ce qui vous est remonté, c'est qu'on ne peut plus forcément exercer le métier
03:25 comme on le faisait peut-être dans le temps. Je ne sais pas si c'est mieux aujourd'hui,
03:28 mais en tout cas, les convocations de journalistes sont de plus en plus nombreuses.
03:31 Si on parle de la France, les États généraux de l'information,
03:34 qui sont les premiers à être conçus par le président de la République,
03:38 inquiètent beaucoup la profession car elle en est exclue.
03:41 C'est quand même extraordinaire. Aimé Césaire disait,
03:45 « Tout ce qui est fait pour nous, sans nous, est fait contre nous. »
03:49 Donc là, nous avons à nous inquiéter. Nous comptons beaucoup sur les citoyennes et citoyens
03:54 afin qu'il n'y ait pas une législation encore plus restrictive que celle qui existe.
03:58 Maintenant, en faveur de la liberté en France,
04:01 on peut revenir sur Gaza, où il y a plus de 100 journalistes tués.
04:05 109, c'est le dernier chiffre que vous avez publié sur votre site,
04:08 la Fédération internationale des journalistes ?
04:10 Absolument. C'est pour ça que je dis plus de 100,
04:13 parce qu'il y a aussi quelques travailleurs des médias.
04:15 Premièrement, ces journalistes palestiniens viennent d'avoir le prix Guilherme O'Cano de l'UNESCO,
04:23 qui représente le courage des journalistes qui se battent pour la liberté de la presse.
04:29 C'est extraordinaire et ça a été donné à tous les journalistes palestiniens,
04:33 au président du PGS, notre affilié sur place, Nasser Aboubakr.
04:38 Et ça, c'est essentiel.
04:40 Deuxième point, nous souhaitons que soit inscrit le nom de toutes les mortes et les morts,
04:45 il y a 13 femmes, à Bayeux, au mémorial. Nous pensons que c'est essentiel.
04:51 Et troisième point, nous sommes devant la Cour pénale internationale de la haie,
04:56 comme pour Shereen Abou Akhle, dont vous savez qu'elle fut tuée par l'armée israélienne il y a bientôt deux ans.
05:04 Merci beaucoup Dominique Pradalier. Merci d'avoir pu répondre à nos questions sur France 24.