L'actrice Vahina Giocante témoigne au sujet de l'inceste qu'elle a subi de la part de son père pendant son enfance
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00:00 Votre père a été condamné à trois ans de prison, dont un avec sursis.
00:05 Ce qui est quand même étonnant dans ce livre, c'est que ce livre se termine par une lettre d'amour
00:10 que vous écrivez à votre père, et qui commence par ces mots
00:14 "Papa, ce livre est un cri d'amour, le cri d'amour d'une petite fille à son père."
00:19 Il faut vraiment sacrément de la résilience pour écrire cela.
00:23 Oui, ça peut surprendre. C'est un livre aussi...
00:27 L'aboutissement de cette lettre, c'est le pardon qui m'a aidée.
00:31 Vous avez demandé pardon, lui ?
00:33 À un moment donné, oui. Dans l'intimité, oui.
00:39 En s'expliquant ?
00:41 Non, je n'ai jamais eu d'explication.
00:44 Il avait une faille, une faillure ?
00:47 Certainement, pour faire ça, ce sont des gens qui sont malades, qui ont probablement eu la même chose.
00:51 Mais lui, il n'a pas cherché à l'expliquer ?
00:54 Non, c'est très difficile d'expliquer l'incompréhensible.
00:59 Je pense que lui-même, peut-être, ne sait pas.
01:02 Et pourquoi j'ai terminé par cette lettre ?
01:05 Parce que c'est pour être en paix avec vous-même ? Il faut vous réconcilier ?
01:08 Non, oui, peut-être pour être en paix.
01:11 Mais non, c'est vraiment parce que je pense que, quand on est un enfant,
01:15 on a de l'amour pour ses parents, malheureusement,
01:18 quelles que soient les choses terribles qu'ils nous font.
01:21 Donc, on a une responsabilité en tant que parents.
01:24 Mais il y a toujours cette...
01:27 J'ai eu du mal à la comprendre, cette lettre.
01:30 Il y a quatre lettres, si je me souviens bien, dans votre livre.
01:33 Il y a une lettre aux hommes, une lettre à votre sœur, une lettre à votre mère,
01:37 et puis, ça se termine avec une lettre à l'homme de votre vie aussi.
01:40 - A votre amoureux. - Et puis, la lettre à votre père.
01:43 Mais quand vous dites...
01:45 Un moment, vous écrivez "Je te transmets ce pardon comme un trésor à l'enfant que tu as été".
01:49 Cet enfant brisé qui s'est construit en hurlant intérieurement, lui aussi.
01:53 En fait, souvent, les bourreaux ont été des victimes.
01:57 Moi, à un moment donné, j'ai imaginé que mon père avait été un enfant,
02:01 parce qu'il a été un enfant.
02:03 Mais vous écrivez quelque chose, vous ne savez pas, vous n'avez pas la réponse.
02:06 Au moment où il a été cet enfant, il était un enfant pur.
02:09 C'est-à-dire que tous les enfants sont purs.
02:12 Il aurait lui-même subi un inceste ? J'essaie de comprendre.
02:15 Il aurait reproduit quelque chose qu'il aurait subi lui-même ?
02:17 C'est possible et c'est fort probable.
02:19 - C'est une hypothèse ? - Mais vous ne le savez pas.
02:21 Je ne le sais pas, mais c'est ce que je pense le plus probable.
02:25 - Vous écrivez des lettres aux hommes aussi ?
02:27 - Et après, tous les victimes ne sont pas des bourreaux non plus.
02:29 - Il est en vie, votre père ? - Oui.
02:32 - Vous le voyez ? - Non.
02:34 - Vous lui envoyez ce livre ? - Non.
02:36 - Vous l'avez pardonné, mais vous ne le voyez pas ?
02:38 - Non, on peut pardonner et ne pas vouloir être confronté à la toxicité de quelqu'un.
02:43 J'ai pardonné pour moi aussi, pour ne plus lui donner le pouvoir d'une misance sur ma vie.
02:48 Le pardon, c'est quelque chose qu'on n'est pas obligé d'accorder,
02:51 mais pour moi, c'était un peu la cerise sur le gâteau de la guérison.
02:53 C'était une façon pour moi de retrouver ma liberté.