• il y a 8 mois
Après des années de bataille judiciaire, les travaux d'enfouissement des déchets toxiques à Stocamine ont commencé. L'association Alsace Nature, opposée au projet, est l'invitée de France Bleu Alsace lundi 25 mars, par la voix de son directeur Stéphane Giraud.

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Transcription
00:00 Ça prête des années de bataille judiciaire Théo, les travaux d'enfouissement ont commencé dans l'ancien site de Stockhamine à Vittelsheim.
00:07 Même si tous les recours ne sont pas épuisés, on semble approcher de l'épilogue de cette opération industrielle.
00:12 Alors que les défenseurs de l'environnement sont toujours mobilisés.
00:15 Bonjour Stéphane Giraud.
00:16 Bonjour.
00:17 Directeur de l'association Alsace Nature, avec la reprise des travaux de bétonnage des déchets qu'a permis le Conseil d'État en février,
00:24 est-ce qu'on peut dire que c'est la fin de Stockhamine ?
00:27 Alors non, ce n'est pas la fin parce qu'il reste un élément majeur qui s'appelle le jugement de fonds du tribunal administratif de Strasbourg,
00:33 qui n'est toujours pas intervenu.
00:34 Et c'est bien là le problème, c'est qu'aujourd'hui, une nouvelle fois l'État nous joue la politique des terres brûlées,
00:40 à attaquer les travaux très vite en n'attendant pas le jugement.
00:44 Alors que le référé avait été quand même relativement sévère pour l'État,
00:50 qui avait invoqué le droit des générations futures à vivre dans un environnement sain.
00:55 Et donc voilà, ce n'est pas une grande surprise de la part de l'État dans ce dossier.
00:59 Depuis le début, de toute façon, on a affaire à une sorte de mépris des citoyens qui est assez inouï.
01:04 Mais par contre, c'est un moment fort parce que soit effectivement,
01:11 un certain nombre de juridictions vont se prononcer sur la suspension de ces travaux très rapidement,
01:15 soit on est en train de faire disparaître le fond de ce dossier,
01:19 c'est-à-dire quels sont les déchets qui sont stockés là,
01:21 et quelle est la véritable toxicité de ces déchets pour les générations futures.
01:25 - Parce que l'entreprise, elle, répond qu'il y a un problème de sécurité,
01:28 que la galerie est en train de s'effondrer,
01:31 et qu'il faut mener ces travaux de bétonnage pour cloisonner,
01:34 pour enfermer tous les déchets avant qu'il soit trop tard,
01:37 et que les conséquences soient irréparables.
01:40 - Oui, alors c'est un dossier très compliqué.
01:41 Vu le peu de temps qu'on a, on ne va pas pouvoir rentrer dans les détails.
01:44 Mais effectivement, on nous a sorti une date de 2027,
01:46 qui est les 30 ans de l'arrêté initial,
01:49 qui est la concession, et d'un seul coup,
01:51 apparemment à partir de 2027, tout s'effondre.
01:54 Alors même en admettant ça, l'Etat n'a qu'à engager les travaux
01:57 pour renforcer les puits, renforcer les éléments.
02:00 Nous on a démontré, c'est dans des rapports fournis par l'Etat,
02:03 qu'il y avait un manque d'entretien des mines qui avait été remarqué.
02:07 Donc voilà, on est face à quelque chose où on est dans une espèce de grand mensonge,
02:10 depuis maintenant 20 ans, depuis l'incendie à Stocamine,
02:14 d'inaction de l'Etat, et de pourrissement de la situation.
02:18 Et aujourd'hui, on voudrait nous faire croire qu'il faut aller très très vite.
02:21 Si on regarde en Allemagne, sur la mine de Haas,
02:23 les Allemands, eux, ont pris à bras le corps le problème.
02:25 C'est pas déstocké encore aujourd'hui, ça mettra encore des années,
02:28 mais ils y mettent les moyens, y compris en recherche et développement,
02:31 pour aller chercher ce qu'ils n'arrivent pas à chercher par des moyens humains.
02:34 On est face à deux politiques différentes.
02:36 D'un côté, côté Allemands, on prend en main les erreurs du passé.
02:40 Côté Français, on balaye la poussière sous le tapis.
02:42 - Vous l'avez dit, c'est quand même un moment fort
02:44 dans cette succession de recours et de manifestations
02:48 qu'il y a pu y avoir autour du site.
02:50 On parle quand même de bétonner, c'est-à-dire, on ne voit pas
02:52 comment est-ce qu'on pourrait revenir sur du béton qui serait coulé
02:55 et qui empêcherait d'accéder à ces endroits-là.
02:58 - Alors moi, je ne le vois pas, vous non plus,
03:00 M. le ministre, lui, le voit, puisqu'il nous a expliqué
03:03 sans trembler les genoux, comme on dit,
03:05 que c'était pas un problème, d'ici quelques années,
03:07 on enverrait des robots qui démontraient tout ça
03:10 et ressortiraient les déchets sans aucun souci,
03:12 un peu à la Marie Poppins.
03:14 - Je crois qu'effectivement, quand on veut tuer son chien,
03:16 on l'accuse d'avoir la rage.
03:18 Là, le ministre nous fait croire que dans 1 000 ans,
03:22 on saura faire, dans 150 ans, dans 400 ans, on sait pas bien.
03:25 Il y a une seule certitude sur laquelle tout le monde est d'accord,
03:27 c'est que la nappe phréatique sera touchée par les déchets de stockamine.
03:30 Donc aujourd'hui, c'est juste de la responsabilité.
03:33 Est-ce qu'en responsabilité, on se dit, d'ici là,
03:36 ils sauront faire pour déstocker et dépolluer ?
03:39 Ou on se dit, on prend nos responsabilités,
03:41 on assume nos erreurs du passé ?
03:42 Je rappelle que la réversibilité, elle est bien dans l'art éthique préfectoral
03:45 et c'est bien à l'État, normalement, de la faire respecter.
03:47 Et on ressort ses déchets, une fois pour toutes,
03:49 et on règle ce problème définitivement.
03:51 - Êtes-vous inquiets des conséquences du projet stockamine,
03:55 de son impact sur la nappe phréatique que vous venez de mentionner ?
03:58 On en parle avec vous, 0388 25 15 15.
04:00 Bonjour, Christiane.
04:02 - Bonjour, Hubert. - Bonjour.
04:04 - Bienvenue, Christiane.
04:05 Qu'est-ce que ça vous inspire, tous, là, ces déchets ?
04:07 - C'est un scandale, une future catastrophe écologique.
04:11 Moi, il y a 40 ans, j'étais encore bien jeune,
04:14 j'avais beaucoup, je m'étais énormément investie
04:16 quand la décision devait être prise par les trois maires de la région,
04:21 de la région des mines,
04:24 et je m'étais investie avec mes enfants et les seuls qui avaient agi à l'époque,
04:30 je dis chapeau à Alsace-Nature,
04:32 c'était les gens d'Alsace-Nature à l'époque déjà,
04:35 et ils persévèrent, et chapeau pour eux.
04:38 Par contre, les écologistes politiques, si vous voulez,
04:41 ils n'étaient pas présents du tout.
04:42 C'est pour ça, je n'y crois plus, la politique absolument pas,
04:46 ils n'ont rien fait, ils n'étaient pas présents à l'époque.
04:49 - Donc pour vous, Christiane, c'est un drame,
04:51 un drame environnemental, ce qui est en train de se jouer, tu vois.
04:55 - Oui, c'est un futur, c'est un...
05:00 comment vous dire, un crime contre l'humanité, voilà.
05:03 Parce que ça va remonter.
05:05 Ils disent, dans 1000 ans, tu parles,
05:07 mais même dans 1000 ans, il y a peut-être aussi encore des gens,
05:10 peut-être sur Terre dans 1000 ans.
05:12 - Oui, tout à fait, c'est l'objet du débat, Christiane,
05:15 savoir dans combien de temps ça pourrait affecter l'anaphréatique.
05:19 Merci beaucoup de nous avoir appelés ce matin
05:21 pour partager votre avis sur le sujet.
05:24 Stéphane Giraud, en effet, c'est là l'enjeu,
05:26 c'est ce sur quoi vous vous appuyez
05:28 pour lutter contre le projet d'enfouissement.
05:31 On parle en effet, selon les études, quand même,
05:32 d'un horizon très, très, très, très lointain,
05:35 dont on n'est même pas sûr que ça arriverait,
05:36 de la contamination à l'anaphréatique.
05:38 - Alors ça, si on est tous sûrs, d'abord, merci, Christiane,
05:41 de témoigner qu'on était déjà là, effectivement,
05:43 à ce moment-là, pour se battre.
05:44 Et je crois que ce qu'elle vient de dire
05:46 est assez symptomatique de la situation.
05:48 C'est-à-dire que là, on n'est pas au-delà des débats d'experts,
05:51 de savoir quand c'est que ça remonte.
05:52 On est juste à savoir quand est-ce qu'un citoyen
05:55 peut faire confiance à l'État ou pas.
05:58 Et ce n'est pas que ce dossier-là.
05:59 Enfin, je veux dire, on a des écureuils dans les arbres à Strasbourg
06:03 pour lutter contre la 69 depuis hier.
06:06 Je crois que ces dossiers-là commencent à se multiplier de plus en plus.
06:08 Et quand on parle un peu de l'engagement des citoyens,
06:11 des intérêts pour le vote, etc.,
06:14 tout ça se nourrit aussi de ça.
06:15 Donc voilà, je tiens à dire,
06:17 c'est pas juste un problème écologique à un endroit donné,
06:19 c'est quand même un problème d'organisation systémique de notre société
06:23 et de la place du citoyen et de l'écoute que peut avoir l'État
06:26 de la volonté du citoyen.
06:28 - Parce que votre problème, c'est sur la nature des déchets
06:31 qui sont enfouis dans les sous-sols de...
06:34 - On va prendre juste un exemple très simple.
06:36 Le Ziram, qui est un pesticide qui ne devait jamais être dans la mine,
06:41 quand il y a eu le déstockage partiel qui avait été fait,
06:44 on nous a dit "on va trouver quelques tonnes",
06:46 on en a sorti 140 tonnes.
06:48 Le bloc 15 qui a brûlé,
06:50 c'est des produits qui ne devaient pas y être, soi-disant.
06:52 Donc oui, à un moment, on a le droit de se demander
06:54 qu'est-ce qui a été stocké là-bas en bas.
06:56 Et puis un dernier point, c'est qu'on est dans le bassin potassique.
06:58 Des puits dans le bassin potassique, il y en a eu partout.
07:01 Donc aujourd'hui, on est en train de nous expliquer
07:02 qu'avec le béton, on va rétarder, on va empêcher l'eau,
07:05 le sel va faire que machin, etc.
07:07 Tous les autres puits autour n'ont jamais été bouchés de la même manière.
07:11 Ils ont tous été bouchés pour pas que les gens tombent dedans.
07:13 Donc quand la nappe phréatique va rentrer dans ces puits-là,
07:16 elle va circuler et on aura un stock à mine à l'échelle du bassin potassique.
07:20 - Mais alors la question aussi, c'est...
07:22 L'alternative, c'est sortir ces déchets-là
07:24 et là, l'entreprise répond que ça prend énormément de temps,
07:27 ça coûte très cher et on ne saurait pas quoi faire
07:29 de toutes ces matières dangereuses, quoi qu'il arrive.
07:31 - Alors si, on saurait quoi en faire.
07:32 Déjà parce que toute une partie de ces déchets
07:33 qui étaient des déchets ultimes il y a 20 ans ou 30 ans ne le sont plus.
07:37 Donc on sait aujourd'hui les traiter.
07:39 Et puis même si on ne sait pas quoi en faire,
07:40 il vaut mieux les stocker en surface
07:43 et là, faire confiance après à l'évolution du traitement des déchets
07:47 plutôt que de les garder à 500 mètres sous terre.
07:49 - Tenez, d'une Christiane à l'autre.
07:51 On était avec Christiane de Kemps il y a quelques minutes.
07:53 On accueille Christiane de Bissheim, oui.
07:55 C'est pas Bicham mais Bissheim ce matin.
07:57 Christiane, bonjour !
07:58 - Oui, bonjour !
07:59 - Bonjour Christiane !
08:00 - Dites-nous votre ressenti.
08:01 - C'est juste pour vous dire, pour vous demander
08:04 qui a décidé de mettre des déchets aussi toxiques dans la nappe phréatique.
08:11 Dans notre nappe phréatique,
08:13 on fait des grands maux autour de la nappe phréatique
08:17 mais pour la polluer,
08:18 alors là, il n'y a pas de défenseur dans notre système.
08:22 Voilà.
08:23 - On vous sent très énervée, Christiane.
08:26 - Pardon, et c'est celui, c'est StoKamine.
08:30 Comment se fait-il qu'on a trouvé ça,
08:33 qu'on a inventé ça, StoKamine ?
08:36 On n'a pas un StoKé ici, ça va pas, ça marche pas.
08:40 - On entend votre colère, Christiane, votre colère assez véhémente ce matin.
08:44 Merci de l'avoir partagée avec nous, en tout cas sur France Bleu d'Alsace,
08:46 c'est ça chaque jour, votre moment pour discuter de l'actualité,
08:50 Christiane, depuis Bissheim donc ce matin.
08:52 - Alors Stéphane Giraud, directeur d'Alsace Nature, toujours avec nous.
08:56 La colère de Christiane, elle tient aussi sur le fait que forcément,
09:01 ça traîne depuis très longtemps et on voit les conséquences qui sont compliquées.
09:03 Qu'est-ce que vous comptez faire aujourd'hui, dans ce cas,
09:06 maintenant que les travaux sont lancés à Alsace Nature ?
09:08 Qu'est-ce qu'il reste à faire pour vous ?
09:10 - Alors je crois qu'il reste plusieurs choses à faire.
09:11 Il reste quelques cartouches juridiques que nous allons bien évidemment employer.
09:16 Et puis je pense qu'après, il reste,
09:19 on ne va jamais désespérer dans la prise de conscience de notre ministre,
09:25 mais il reste un élément très simple, c'est de dire,
09:28 on a un jugement du tribunal administratif de Strasbourg sur le fond du dossier
09:31 qui va arriver sous peu.
09:32 Je rappelle qu'il y a 13 magistrats qui se sont déjà penchés sur le dossier
09:36 et les 13 nous ont donné raison.
09:37 Donc il y a des magistrats qui vont se pencher dessus, on attend juste ça.
09:42 On voit bien que ce n'est pas la tendance,
09:44 c'est allons vite, faisons au maximum.
09:47 - Est-ce que vous-même, vous allez pouvoir aller aussi vite
09:48 que les travaux sont en train de se faire ?
09:50 - Ça c'est notre boulot, d'essayer d'être aussi rapide
09:52 et aussi efficace que les bétonnières à Stocamine,
09:56 mais je ne peux pas dire si on réussira.
09:59 Et puis la deuxième chose, c'est que je pense que politiquement,
10:01 les citoyens, les élus, les parlementaires alsaciens
10:05 ont à se mobiliser aujourd'hui, très concrètement,
10:08 parce que là on est à un tournant et que c'est maintenant qu'il faut faire valoir.
10:11 - Bien à ce sujet, je voudrais vous faire écouter ce que disait Yann Flory
10:15 lors de la manifestation devant le site de VitalSign d'Estocamine,
10:19 c'était vendredi, où il parlait justement de cette mobilisation
10:22 qui a l'air de faiblir un petit peu.
10:24 - Vous voyez bien, ce qui nous manque, c'est la décision d'une population,
10:27 et c'est dommage, c'est elle qui est entièrement concernée par ce qui se passe,
10:31 c'est les habitants d'ici, on ne les voit pas,
10:33 il y a 11 000 ou 12 000 personnes, on les voit rarement,
10:35 pourtant c'est chez eux que ça se passe, ils ne se bougent pas,
10:38 et c'est là qu'il y a une incompréhension totale de notre part,
10:42 on ne comprend pas ce peu de mobilisation, d'ailleurs de l'Alsace en général.
10:45 Vous voyez, nos amis allemands viennent souvent en force,
10:48 plus nombreux que nous, franchement, il y a un problème.
10:50 - Est-ce qu'il n'y a pas une fatigue autour du dossier Estocamine
10:53 qui ferait qu'aujourd'hui on préférait simplement que ça se termine
10:56 et que les travaux aillent jusqu'à son terme ?
10:59 Jusqu'à leur terme.
11:00 - Non, je ne sais pas s'il y a une fatigue,
11:02 je ne sais pas si c'est de la fatigue, si c'est le fait que ce ne soit pas visible,
11:04 c'est toujours plus visible quand c'est un chantier en surface
11:07 que quand c'est enfoui à 500 mètres.
11:09 C'est un dossier compliqué, c'est un dossier serpent de mer,
11:13 et puis à un moment il y a une espèce de découragement des citoyens,
11:17 à dire "on est dans un pays où c'est cause toujours".
11:19 Enfin, on a quand même eu quelques grandes vagues comme ça
11:23 d'expressions citoyennes plus ou moins virulentes
11:27 autour de ces questions environnementales, sociales, etc.
11:30 Et la réponse n'est jamais à la hauteur.
11:33 Enfin, politiquement aujourd'hui, il n'y a pas de réponse à ça.
11:35 Et donc c'est extrêmement inquiétant pour la suite.
11:38 Rien que ce week-end, il y avait une manifestation au champ du feu
11:40 contre un biathlon, il y a des gars qui montent dans des arbres
11:44 en face du Parlement des droits de l'homme,
11:46 il y a Stockhamming, enfin on a une espèce de multiplication de ça
11:50 et une criminalisation en vis-à-vis.
11:52 Enfin, vendredi, la manifestation qui rassemblait quelques centaines de personnes
11:56 était survolée par des drones.
11:58 Enfin, on commence à rentrer dans des choses où on a des libertés
12:01 qui commencent à être un peu compliquées
12:02 et surtout mise à mal systématiquement, à bas bruit.
12:05 Donc oui, je pense qu'il y a un moment une espèce de lassitude des gens.
12:08 - Merci beaucoup Stéphane Giraud d'avoir été avec nous ce matin,
12:12 directeur d'Alsace Nature, pour pouvoir vous exprimer sur les travaux
12:15 Bravo qui commence donc de bétonisation à Astocamine.
12:17 Merci d'avoir été avec nous.
12:18 Merci à vous d'avoir invité.

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