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00:00 On va partir pour Fort-de-France en Martinique.
00:02 Monsieur le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, qui est notre invité ce matin d'En face au territoire,
00:06 c'est Cyril Boutier, qui est directeur éditorial de France Antille, notre partenaire,
00:10 qui a une question à vous poser depuis Fort-de-France. On l'écoute.
00:13 Bonjour Jean-Marc Ayrault. Vous êtes un connaisseur de la région Caraïbe,
00:16 notamment à travers la Fondation pour la mémoire de l'esclavage que vous présidez.
00:20 J'aimerais vous interroger sur la situation chaotique que vit Haïti depuis des mois, pour ne pas dire des années.
00:26 Pour vous, comment est-il possible de se sortir de l'ornière politique dans laquelle est le pays,
00:32 et surtout de la violence effrayante que vivent les Haïtiens depuis ces dernières semaines, face aux gangs notamment ?
00:40 – Pays francophone d'ailleurs. – Je suis avec la Fondation pour la mémoire de l'esclavage
00:43 très attentivement sur cette situation. Vous savez que l'année prochaine,
00:47 ce sera le 200e anniversaire de la signature de l'ordonnance royale de Charles X,
00:51 qui a imposé à Haïti une dette considérable de 100 milliards de francs de l'époque,
00:56 que les Haïtiens, les paysans haïtiens, qui avaient conquis leur liberté et leur indépendance,
01:02 ont remboursé jusque dans les années 1950. Et donc c'est une vraie pénalisation pour ce pays.
01:07 Je suis sûr que ça joue encore. – Comment sortir aujourd'hui ?
01:10 – Et donc aujourd'hui, quand je vous dis qu'on suit très près,
01:13 nous avons dans notre conseil d'administration Yannick Lahaïs, qui est une écrivaine très rénommée
01:17 et très courageuse et qui continue de vivre dans son pays, en particulier à Port-au-Prince.
01:22 Elle nous tient au courant, évidemment, et elle appelle au secours, comme tous les Haïtiens,
01:27 qui aujourd'hui, ce sont les gangs qui ont pris le pouvoir.
01:29 Donc on ne peut pas laisser faire ça, on ne peut pas laisser… Il n'y a plus d'État, il n'y a plus rien.
01:32 Donc c'est un pays qui va à la dérive. – Une seule fois, il faut passer quoi ? Par l'ONU ?
01:35 – Il faut une intervention internationale pour permettre de rétablir l'ordre public,
01:40 et puis en même temps permettre à la démocratie de s'exprimer,
01:43 puisqu'il n'y a plus… depuis très longtemps, il n'y a pas eu d'élection,
01:45 il n'y a pas de gouvernant, il n'y a pas de parlement, plus rien ne se réunit.
01:48 Et puis ce que dit Yannick Lahaï, c'est que dans la société civile haïtienne,
01:51 il y a énormément de potentiel. Il n'y a pas que les gangs,
01:55 il y a aussi cette population extrêmement résiliente et courageuse,
01:57 pleine de projets, et qui attend ce message, qui attend cette intervention.
02:01 – Une proximité avec nous. – Et puis s'agissant de la France,
02:03 parce que la France a une certaine dette morale, en quelque sorte,
02:06 par rapport à toute cette histoire, je pense que la France est trop silencieuse.
02:09 Il faut qu'elle participe à une initiative avec les Américains,
02:12 qui ont aussi leur part de responsabilité, qui ont occupé pendant longtemps Haïti,
02:16 et puis évidemment les pays de la région, la Caraïbe qui déjà est impliquée,
02:21 et qu'il faut vraiment mettre autour de la table pour avancer et trouver une solution.