Laurent Desplancques

  • il y a 6 mois

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00:00 Le 6/9, France Bleu Belfort Montbéliard.
00:02 Avec l'invité du 6/9 aujourd'hui à 8h moins le quart,
00:06 nous parlons de la semaine de la presse et des médias à l'école Thierry Comprès.
00:09 L'occasion de voir comment les élèves comprennent l'actualité
00:12 et la façon dont ils cherchent l'information.
00:15 Et ce matin on aimerait avoir vos témoignages.
00:17 Comment parlez-vous de l'actualité à vos enfants ?
00:19 Est-ce que vous êtes attentifs à la façon dont ils cherchent l'info ?
00:22 Dites-le franchement en nous appelant dès maintenant au 03 84 22 82 82.
00:27 Bonjour Laurent Desplancques.
00:28 Bonjour.
00:29 Vous êtes professeur d'histoire et d'éducation morale et civique au collège Vauban à Belfort.
00:34 Cela fait maintenant une dizaine d'années que vous faites de l'éducation aux médias auprès des jeunes.
00:39 Quel est votre rôle concrètement ?
00:41 Alors mon rôle en tant que prof d'histoire et de prof d'éducation morale et civique,
00:47 c'est d'essayer d'amener les élèves d'abord à la curiosité.
00:51 Parce que je pense qu'il ne faut pas confondre la faim et les moyens.
00:53 Le média c'est quelque chose qui est censé les amener à une curiosité,
00:58 une envie de connaître, une envie de comprendre, etc.
01:00 Donc je pense que le point de départ c'est vraiment la curiosité.
01:02 Ensuite une fois qu'on a essayé de faire ça et que ça fonctionne avec certains élèves,
01:06 parce que ça ne fonctionne pas avec tout le monde,
01:08 ensuite essayer de travailler sur l'esprit critique,
01:11 la prise de recul, mettre en perspective certaines choses.
01:13 L'histoire et la géographie sont des outils super intéressants pour ça, très complémentaires.
01:17 Et puis peut-être qu'on y viendra un petit peu après sur l'esprit critique.
01:20 J'anime aussi un atelier de philosophie et c'est un endroit incroyable
01:24 justement pour prendre du recul sur tous les sujets d'actualité, etc.
01:27 - Alors on le sait pour les jeunes, les réseaux sociaux sont très souvent
01:31 une source d'information très importante avec toutes les dérives, ceux qui vont avec.
01:35 Comment vous en parlez avec vos élèves ?
01:37 - Alors c'est un sujet complexe parce qu'ils y passent du temps.
01:40 Je ne suis pas certain vraiment qu'ils passent beaucoup de temps à s'informer
01:44 sur les réseaux sociaux, ils passent du temps sur les réseaux.
01:47 Leurs sources d'informations finalement elles sont classiques quand ils s'informent.
01:53 Moi ce que je constate c'est surtout qu'ils s'informent de moins en moins.
01:55 Alors est-ce que c'est lié au fait que moi j'ai des adolescents en collège
01:59 qui se sentent un peu dépassés par les événements, par la complexité des événements.
02:03 Comprendre à 13 ans les enjeux de la guerre en Ukraine en ce moment c'est quand même très compliqué.
02:07 Ou alors il y a une espèce parfois de sur-information,
02:13 je pense aux chaînes d'info en continu, sans parler forcément des pires, on les reconnaît,
02:17 c'est news pour ne pas la citer, mais qu'on cite souvent quand même pour travailler l'esprit critique.
02:23 Il y a beaucoup d'informations et donc peut-être que la première chose à faire avec les ados
02:28 c'est les inciter à hiérarchiser l'intérêt de ce qu'ils cherchent.
02:32 Et il y a la question des fake news aussi, comment on permet à des élèves de déceler le vrai du faux ?
02:36 Merci de la question. Demandez à monsieur Huchon qui est un grand spécialiste de ça,
02:41 mais c'est très compliqué. On a beaucoup de travers psychologiques, personnels,
02:46 le biais de confirmation ou des choses comme ça qui font qu'il faut 3, 4, 5 fois plus d'arguments
02:52 pour démontrer quelque chose contre lequel on pense au départ, alors qu'on a tendance à croire tout de suite
02:58 quelque chose avec lequel on était déjà plus ou moins d'accord.
03:01 Penser contre soi-même, c'est un exercice qu'on fait par exemple en atelier philo,
03:05 ça prend du temps mais ça marche, ça fonctionne. Ils arrivent en s'exerçant finalement
03:10 à aller à l'encontre de leurs convictions. D'ailleurs des convictions de jeunes ados,
03:15 c'est pas non plus très compliqué. - Et ça évolue très souvent.
03:17 - Exactement. - Ici matin il est 7h48 à l'occasion de la semaine de la presse à l'école,
03:21 comment parlez-vous de l'actualité à vos enfants ? Est-ce que vous êtes attentifs à la façon
03:25 dont ils cherchent l'info ? Dites-le franchement, vous nous appelez dès maintenant 0384 82 82 82.
03:30 - Et nous recevons ce matin Laurent Desplans, professeur d'histoire et d'éducation morale et civique
03:34 au Collège Vaux-Mont-Belfort. Justement, quels conseils vous pourriez donner aux parents
03:39 qui nous écoutent ? Comment aider leurs enfants à chercher les "bonnes infos" ?
03:44 - Alors peut-être déjà les inciter. D'abord il y a des supports quand même, je pense à Mon Quotidien
03:50 ou à l'Actu, en support papier, qui sont très bien faits. C'est pas non plus la peine d'utiliser
03:55 tout le temps des outils numériques. D'abord parce que le temps d'écran, on sait très bien,
03:59 c'est aussi une chose contre laquelle il faut lutter. Je crois vraiment que si on parle des
04:05 parents, de la responsabilité des parents, il faut d'abord que les parents eux-mêmes soient un peu
04:10 au clair sur l'information, que eux-mêmes ça les intéresse, et peut-être qu'il faut dédramatiser,
04:14 non pas les événements eux-mêmes, mais se dire par exemple que ça peut être un sujet de
04:18 conversation au cours d'un repas en se disant "tiens au fait, t'as compris quoi toi de la guerre
04:21 en Ukraine ?" - Et quand on est parent, on a le droit de dire aussi "je ne sais pas".
04:25 - Exactement, mais le doute est le début de la réflexion et de la sagesse. Donc plutôt les
04:29 inciter à douter qu'à gober. - Ce qui explore souvent quand on écoute les
04:34 parents et les enfants, c'est que l'information est de plus en plus anxiogène. Et donc beaucoup
04:39 de personnes préfèrent ne plus regarder, lire ou écouter les journaux. C'est le cas d'un de vos
04:43 collègues d'ailleurs au Collège Vauban à Belfort, Sofiane Hénocq, professeure de mathématiques.
04:47 Écoutez son témoignage. - Moi j'ai tendance à m'éloigner des sources
04:50 d'infos et en général les infos je les ai par les gens que je fréquente. Désolé de vous le dire,
04:54 je pense que c'est simple s'éloigner des sources d'infos parce qu'elles sont souvent anxiogènes.
04:59 Il y a très très peu de bonnes nouvelles en général quand vous regardez les sources
05:02 d'informations. - Vous n'avez pas l'impression d'être à l'écart du monde ?
05:05 - Non parce qu'en général quand il y a des choses importantes qui se passent, elles finissent par
05:09 ressortir dans les discussions assez naturellement. Ça permet d'avoir un premier filtre et d'être moins
05:14 atteint par toutes ces infos. - Alors, vous comprenez ce sentiment,
05:19 est-ce que vous vous retrouvez aussi avec certains de vos élèves trop anxiogènes ?
05:24 - Oui, certains de mes élèves et puis personnellement. On est tous d'abord des
05:29 individus, des citoyens et celui qui va essayer de nous démontrer que l'info n'est pas anxiogène,
05:33 il va lui falloir une matinée entière, je ne sais pas quels arguments il va utiliser. Elle
05:37 est anxiogène. C'est ce que j'expliquais sur ne pas confondre le moyen et la fin. Si l'idée
05:43 c'est de se surinformer soi-même, effectivement il faut accepter ce côté anxiogène parce que
05:46 l'info elle est comme ça. On peut aussi s'informer moins pour privilégier s'informer mieux. C'est-à-dire
05:52 choisir ses préoccupations, ne pas toujours choisir des sujets anxiogènes. Il y a quand même de la
05:58 diversité dans l'information en France, on a cette chance-là. On n'est pas en Russie donc on peut
06:02 quand même choisir d'aller chercher. On discutait un petit peu avant l'émission de France Bleue qui
06:07 donne quand même beaucoup de choses positives. Ça paraît comme ça être un peu anecdotique sur
06:12 le terrain mais pas du tout. C'est une question de ligne littorale aussi. Évidemment. On cherche
06:16 peut-être moins à générer des émotions très très fortes et peut-être que finalement on informe
06:22 un peu mieux. Les relations entre les élèves et les médias, on en parle cette semaine à l'occasion
06:26 de la semaine de la presse, mais est-ce qu'il faudrait le faire plus souvent en intégrant par
06:30 exemple une discipline à part entière dans les programmes scolaires ? Comme je vous le disais
06:34 pour la philosophie, moi c'est un de mes rêves, c'est d'intégrer la philo par exemple dans les
06:39 cours mais on pourrait envisager une discipline qui s'appellerait "décryptage de l'information" qui
06:44 serait transversale. Pourquoi pas par exemple sur le volcan en Islande, en ce moment on confiait ça
06:50 à la collègue de SVT, sur quelque chose qui concernerait les progrès technologiques aux
06:55 collègues de techno, sur l'industrie, etc. Voilà ça pourrait être tout à fait transversale. Une heure
06:59 par semaine, parce qu'évidemment le temps n'est pas extensible si tant est qu'il existe. Mais oui
07:05 parce que sinon, trop transversale, on le voit avec la laïcité ou d'autres, c'est les profs de MC qui
07:10 s'en occupent. Et peut-être faire en sorte que les médias viennent plus souvent également au
07:14 contact des élèves et des parents peut-être ? Oui tout à fait, tout à fait, et puis inciter les
07:17 élèves à être un peu acteurs aussi, pourquoi pas les inciter à faire des reportages eux-mêmes,
07:22 parce qu'avec le matériel qu'on a aujourd'hui on est tous susceptibles d'être des reporters
07:26 finalement. Maintenant ça nécessite des qualités et des compétences, donc les envoyer un peu sur
07:30 le terrain pour faire des petits reportages ça pourrait être sympa, avec l'aide de journalistes
07:34 professionnels qui parleraient eux de leur éthique, de leur déontologie. C'est pour ça qu'on reçoit très
07:38 souvent des stagiaires ici à France Bleu, à Belfort-Modard et des apprentis. Merci en tout
07:42 cas Laurent Déplan, professeur d'histoire et d'éducation morale et civique au collège Vauban
07:46 à Belfort, merci à vous. Merci beaucoup. Et retrouvez cet entretien sur l'application
07:50 ici par France Bleu et France 3, il est 7h52.

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