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00:008h15, journée spéciale emploi, désindustrialisation sur votre radio, ici ce mercredi.
00:04Cette question ce matin, craignez-vous de perdre votre emploi ?
00:08Vous témoignez dès maintenant, 0380 82 82 82, c'est notre dossier ce matin Florent.
00:13Oui, on en parle dans les journaux, ce matin entre 9h et 10h dans notre émission spéciale
00:17et dès à présent avec vous Pierre Lamarre, bonjour.
00:20Bonjour.
00:20Vous êtes professeur d'histoire industrielle à l'université de technologie de Belfort-Montbéliard.
00:25Nous sommes sur une terre où le thème de la désindustrialisation résonne tout particulièrement.
00:30Avant de vous demander si on peut vraiment parler de déclin industriel,
00:33je voulais recontextualiser un petit peu avec vous Pierre Lamarre,
00:36pourquoi le Nord-Franche-Comté est ou a été une terre d'industrie ?
00:40Elle est toujours une terre d'industrie, donc je réponds un petit peu à l'avance à votre future question.
00:46Ça démarre fin 18e siècle dans le domaine de l'horlogerie avec les familles industrielles.
00:53On parle déjà à l'époque de Peugeot, de Jappy,
00:56mais Jappy va révolutionner la fabrication des ébauches de montres en utilisant la machine-outil.
01:02Machine-outil, ça veut dire que la main de l'ouvrier est dépossédée de son savoir-faire au profit de l'outil.
01:10Et les brevets qu'il va déposer après la révolution française
01:15va faire que l'industrie horlogère va être extrêmement concurrentielle.
01:23Et pendant une vingtaine d'années, ce territoire d'industrie a dominé le marché des ébauches.
01:30Et c'est le début d'une grande histoire,
01:32parce que quand on sait usiner des toutes petites pièces mécaniques,
01:37les spiraux, les roues dentées, etc., on va pouvoir faire d'autres choses.
01:42On va embrayer sur les casseroles, on va embrayer sur les machines à écrire,
01:46on va embrayer sur les moteurs thermiques.
01:48Et en même temps que la fortune Jappy s'installe, l'excellence Jappy s'installe,
01:54autour, ces technologies vont diffuser.
01:58Des gens qui ont travaillé chez Jappy vont créer leur propre entreprise d'horlogerie.
02:03Auguste Lépée passe chez Jappy.
02:05Ensuite, il y a une deuxième phase qui est l'automobile.
02:10Les Peugeots embrayent sur l'automobile dès la fin du XIXe siècle,
02:15et qui va consolider.
02:16Et une troisième phase, c'est le traité de Francfort.
02:18Le traité de Francfort, qu'est-ce que c'est ?
02:20C'est un traité politique qui cède l'Alsace-Lorraine à l'Allemagne,
02:25sauf le territoire de Belfort.
02:28Et les Mûlusiens, les industriels mûlusiens,
02:30ne veulent pas perdre le marché français,
02:32viennent s'installer, je pense à la SACM,
02:35Société Alsacienne de Construction Mécanique,
02:37qui s'installe là où est Alstom aujourd'hui.
02:39Et ça va renforcer cette dynamique industrielle.
02:44On a eu le petit cours d'histoire,
02:46maintenant qu'on a contextualisé Pierre Lamarre aujourd'hui.
02:48Est-ce qu'on peut parler de désindustrialisation ici, chez nous ?
02:51Il faut être très prudent avec ce concept de désindustrialisation.
02:54Oui, il y a eu une perte d'emploi, c'est exact.
02:58De ce point de vue-là, effectivement,
03:01le Nord-Franche-Comté a perdu des emplois.
03:04En 40 ans, le nombre de salariés a été divisé par 5,
03:07par exemple, à l'usine Stellantis de Sochaux.
03:09Absolument.
03:10Mais c'est rattrapable, ça, ou c'est irréversible ?
03:12Alors, simplement, si on parle maintenant,
03:15technologie.
03:17Je vais vous citer un chiffre.
03:19En 1975, le site de Sochaux
03:22emploie 40 000 personnes,
03:24à Sochaux,
03:26pour 400 000 véhicules à l'année.
03:28Une capacité de production de 400 000 véhicules à l'année.
03:31Nous sommes en 2024,
03:34et aujourd'hui,
03:37les effectifs socialiens sont de l'ordre de
03:407 000-8 000 personnes,
03:43pour 500 000 véhicules à l'année.
03:46Voilà le choc.
03:49La déindustrialisation s'est touchée à un choc technologique.
03:52Est-ce qu'on peut dire que
03:55ce Nord-Franche-Comté, qui est en capacité de production
03:58plus de production qu'il y a 30 ans,
04:01est désindustrialisé ?
04:03Et c'est là où ce concept, il faut le manier
04:06avec beaucoup de prudence. C'est la même chose
04:09chez GE ou chez Alstom.
04:12On continue à livrer des locomotives
04:15partout dans le monde.
04:16Ici, Belfort, Montbéliard, il est 8h20.
04:18Vous pouvez, dès que vous ouvrirez sur votre application ici,
04:20une carte interactive des fermetures et des ouvertures
04:22d'usines en France en 2024,
04:24pris en partenariat avec l'usine nouvelle.
04:26Vous témoignez dès maintenant au 0384 22 82 82.
04:29Dites-nous si vous craignez pour votre emploi dans l'industrie
04:31dans le Nord-Franche-Comté.
04:32On vous attend ici.
04:33Est-ce que le marché de l'électrique,
04:35je me retourne vers vous, Pierre Lammart,
04:36professeur d'histoire industrielle à l'Université de Technologie
04:39de Belfort-Montbéliard, est-ce que le marché de l'électrique
04:41peut être l'avenir de l'industrie chez nous ?
04:43On voit que ça peine à démarrer, en tout cas.
04:45C'est toute la sanction du marché.
04:47Il faut savoir que
04:50dans l'histoire, la première voiture
04:53à dépasser 100 km heure est une voiture électrique.
04:56Nous sommes fin XIXe siècle.
04:59Visiblement, il y a eu un échec de la voiture électrique
05:03pour des raisons d'infrastructures, etc.
05:05La technologie existe depuis longtemps.
05:07C'est le marché qui n'arrive pas à se lancer.
05:10Mais pourquoi ?
05:11Alors pourquoi ?
05:12Peut-être que déjà dans l'imaginaire des usagers,
05:16il y a le problème de la dépendance,
05:20la longueur, la distance de la voiture électrique.
05:22Il faut recharger.
05:24Ce qui aujourd'hui, si vous faites 600 km
05:27avec une Tesla, il faudra vous arrêter.
05:29Mais vous faites 600 km,
05:31est-ce que vous n'arrêtez pas
05:33pour prendre pause déjeuner,
05:35pour faire aérer le chien ou les enfants
05:39qui sont dans la voiture ?
05:41Le temps de pause, il est égal.
05:44Donc il y a une espèce de réticence
05:47sur les longues distances.
05:49Je pense que la voiture électrique
05:51aujourd'hui est acceptée dans la mobilité urbaine,
05:54sans aucun souci.
05:56Je pense aussi à l'hydrogène.
05:57On manque de commandes dans le Nord-Franche-Comté,
05:59dans les usines d'hydrogène.
06:01Je pense à McPhee par exemple.
06:02Elles sont prêtes à produire,
06:04mais il n'y a pas de commandes.
06:05Absolument.
06:06Mais le marché,
06:07ce n'est pas quelque chose
06:08qui se bouge sur un claquement de doigts.
06:10Il y a des résistances culturelles.
06:13L'hydrogène est encore aujourd'hui
06:15attaché à son danger.
06:19On l'utilise dans la mobilité plutôt lourde,
06:22plutôt les trains ou les camions.
06:25Mais il y a là aussi
06:28cette résistance culturelle des usagers
06:31à véritablement trouver cette nouvelle technologie
06:35comme la technologie de demain.
06:37Voilà.
06:38Le marché,
06:39et d'autres raisons plus économiques bien évidemment,
06:42mais le marché,
06:43finalement,
06:44le marché fait passer de l'invention à l'innovation.
06:47Quand il y a innovation,
06:49c'est que le marché a accepté les usages.
06:52Et puis il y a Stellantis
06:53qui traîne quelques casseroles
06:54depuis plusieurs mois
06:55à commencer par les rappels des moteurs PureTech.
06:57Ça ne renvoie pas
06:58à une très bonne image de l'industrie.
07:00Absolument,
07:01ça n'aide pas.
07:02Merci beaucoup Pierre Lamarre
07:03d'être intervenu ce matin.
07:04Vous êtes professeur d'histoire industrielle
07:06à l'Université de Technologie de Belfort-Montbéliard.