Invitée FBDA Matin : Elisabeth Foucault, de l'Association pour le Droit à Mourir dans la Dignitié

  • il y a 6 mois
Le projet de loi sur la fin de vie sera étudié à partir de la fin mai, par les députés. La déléguée de l'Association pour le Droit à Mourir dans la Dignité en Ardèche nous dit ce qu'elle attend de ce texte.
Transcript
00:00 8h moins le quart, l'invité du matin, on va parler du projet de loi sur la fin de vie, Alexandre Bertheau.
00:05 Projet de loi présenté par Emmanuel Macron, il sera d'ailleurs étudié en mai à l'Assemblée Nationale.
00:10 Pour en parler avec nous, on reçoit l'Association pour le droit de mourir dans la dignité.
00:15 Bonjour Elisabeth Foucault.
00:17 Bonjour à vous.
00:18 Vous êtes la déléguée de l'ADMD en Ardèche, donc le président Macron vient de le dire,
00:23 a présenté les principales orientations pour la loi sur la fin de vie.
00:27 C'était très attendu de votre côté.
00:30 Oui, nous sommes très satisfaits parce que c'est la suite d'un long combat qui date de plus de 40 ans.
00:38 Et enfin, on sort des hésitations, des reports, des tergiversations,
00:43 et on nous propose un calendrier clair, un cadre général qui est posé,
00:49 même si tout ne nous donne pas satisfaction.
00:53 Mais il y a quand même déjà une étape très importante qui est franchie.
00:57 Le fait d'en parler, oui.
00:58 On va essayer d'être très clair puisque c'est un sujet très sensible et très complexe.
01:03 Le président a parlé d'une aide à mourir possible sous conditions strictes pour les personnes majeures,
01:10 avec plein discernement, discernement entier, maladie incurable à court ou moyen terme,
01:16 à court ou moyen terme, pardon, et dont on ne peut pas soulager les souffrances.
01:20 Voilà les quatre conditions.
01:21 Elisabeth Foucault, sur quels points précisément vous n'êtes pas d'accord ?
01:26 Il y a deux points en particulier sur lesquels ça risque de bloquer.
01:31 Et le premier, c'est la notion de court ou de moyen terme.
01:36 Parce que d'ailleurs, Jean-Léon Ettile lui-même a fait remarquer dès hier
01:43 que ça rendrait l'application de la loi très difficile.
01:47 Il a dû dire c'est quoi moyen terme, un an, deux ans, d'autres disent six mois, un an.
01:54 Il n'y a aucun médecin qui va pouvoir garantir qu'un malade va mourir dans telle proportion de temps.
02:05 Donc on risque de faire traîner les choses au maximum
02:11 pour attendre d'être sûr que la mort approche.
02:16 C'est le problème qui s'est posé déjà avec la loi Leonetti qui parlait de court terme.
02:21 Et on sait que du coup elle n'est appliquée que dans moins de 2% des décès.
02:27 Parce qu'on traîne pour l'appliquer.
02:31 Alors là en plus, le fait de parler de court ou de moyen terme,
02:35 ça condamne les patients qui sont atteints de maladies neurodégénératives
02:40 à éprouver les drames des derniers stades de la maladie.
02:45 Par exemple Luc Rézy-Bois qui a beaucoup parlé,
02:48 cet ancien policier atteint de la maladie de Charcot,
02:53 qui a parlé à la suite de cette proposition de loi,
02:57 il dit mais chez les gens atteints d'une maladie comme la mienne,
03:02 la souffrance peut être insupportable des années avant le décès.
03:05 Donc nous on dit c'est au malade d'évaluer sa propre résistance,
03:11 sa propre souffrance et à partir de là de dire je n'en peux plus,
03:15 je souhaite qu'on m'aide à mourir.
03:18 Ça veut dire que vous souhaitez des critères un peu moins stricts
03:21 pour l'application de cette aide à mourir.
03:25 Est-ce qu'il y a d'autres points sur lesquels vous n'êtes pas d'accord
03:30 avec la prise de parole du président Macron ?
03:33 Alors là, il est question d'une collégialité médicale.
03:38 Et là, ça n'est pas très clair non plus.
03:41 S'il s'agit comme en Belgique, que le médecin,
03:45 en particulier le médecin traitant du malade,
03:47 demande l'avis d'un confrère spécialiste de la pathologie,
03:51 oui, ça nous semble tout à fait normal.
03:54 En revanche, s'il s'agit d'être plusieurs à débattre,
03:57 que chaque médecin s'exprime en fonction de ses convictions personnelles,
04:02 ça risque, s'il y en a un qui s'y oppose,
04:05 ça risque de créer, comme dit le président, un dissensus.
04:09 Alors lui, ses confiances aux médecins pour se mettre d'accord,
04:13 ça n'est pas sûr du tout.
04:16 Et à ce moment-là, il nous parle de possibilité de recours
04:19 à un autre collège de médecins.
04:22 Non, tout ça, c'est beaucoup trop compliqué.
04:24 Il faut que ce soit deux médecins.
04:27 Le médecin qui connaît bien son malade,
04:30 le pathologiste spécialiste,
04:33 et puis qu'en fonction de ça, la décision soit prise.
04:37 Le rôle des médecins, en fait, c'est de dire si oui ou non
04:40 les conditions fixées par la loi sont respectées.
04:43 Ça n'est pas de décider si oui ou non le malade mérite
04:47 qu'on lui accorde le droit de mourir.
04:49 - Elisabeth Foucault, vous êtes la déléguée de l'association
04:52 pour le droit à mourir dans la dignité en Ardèche.
04:55 Évidemment, vous espérez, on l'entend dans vos paroles,
04:58 des amendements, puisqu'il va y avoir tout un parcours entre l'Assemblée,
05:01 le Sénat, il va être examiné deux fois dans chaque chambre.
05:04 Mais il y a beaucoup d'opposition aussi à ce texte.
05:10 L'Église qui a beaucoup critiqué,
05:13 mais aussi des associations de soignants,
05:16 notamment les défenseurs des soins palliatifs.
05:19 Est-ce que ça veut dire,
05:23 les annonces d'Emmanuel Macron,
05:26 qu'on mette côté les soins palliatifs,
05:29 est-ce que ça ne suffit pas les soins palliatifs selon vous ?
05:32 - Alors d'une part, nous aussi,
05:35 on a beaucoup défendu les soins palliatifs.
05:38 Il n'y a pas que l'Assemblée qui l'a défendu.
05:41 Nous, grâce à notre combat,
05:44 alors que depuis 2018, il n'y avait plus de plan
05:47 concernant les soins palliatifs.
05:50 - On a un milliard de pouces là, pour annoncer.
05:53 - Maintenant, oui, mais grâce à nous, il y a déjà eu Olivier Véran
05:56 qui a fait un plan de 2021 à 2024.
05:59 Et puis cette nouvelle loi propose effectivement
06:02 un volet sur les soins palliatifs,
06:05 le premier volet avec un plan décennal
06:08 et puis un milliard de pouces mis sur la table.
06:11 Donc ça, c'est aussi grâce à notre combat.
06:14 - Mais ça ne suffit pas les soins palliatifs ?
06:17 - Pardon ? - Pour vous, ça ne suffit pas les soins palliatifs ?
06:20 - Les soins palliatifs ne suffisent pas
06:23 parce qu'ils laissent de côté des gens
06:26 qui, comme vous le savez, vous l'avez dit, ont des souffrances inapaisables
06:29 et même une prise en charge
06:32 palliative de qualité n'est pas suffisante parfois.
06:35 Il y a des récentes études
06:38 qui l'ont montré, par exemple, l'étude de Moho
06:41 "Mourir à l'hôpital"
06:44 qui s'est basée sur 2000 dossiers médicaux
06:47 de malades en fin de vie. Malgré des soins palliatifs
06:50 et des soins palliatifs, il en restait quand même
06:53 3% qui continuent à demander une euthanasie
06:56 et ceux-là, la loi ne doit pas
06:59 les laisser sur le bord du chemin.
07:02 - Ce n'est pas toujours suffisant, on l'entend bien. Merci beaucoup d'avoir été
07:05 notre invitée Elisabeth Foucault pour ce débat.

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