Souvenez-vous la semaine dernière, je vous ai parlé du Malade Imaginaire qui se joue en ce moment au Théâtre des Amandiers et bientôt au cinéma. Or, du côté du film, on n’a guère apprécié que j’en dise un peu de mal avant sa sortie. Il parait que cela ne se fait pas.
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00:00 Ce matin, vous nous parlez donc de critique, cinéma et calendrier.
00:03 Oui, souvenez-vous, la semaine dernière, je vous ai parlé du « Malade imaginaire »
00:07 qui se joue en ce moment au Théâtre des Allendiers et bientôt au cinéma.
00:11 Or, du côté du film, on a guère apprécié ce que j'en dis un peu de mal avant sa sortie.
00:17 Il paraît que cela ne se fait pas.
00:19 Seulement voilà, que ne m'auriez-vous dit, vous, Léa et Nicolas, si je n'avais rien
00:24 dit ? Quoi, Coco ? Comment, Coco ? J'imite bien Léa, surtout.
00:28 Je sais, je sais, j'ai peaufiné.
00:30 Une pièce et un film autour du « Malade imaginaire » sortent en même temps et vous
00:34 ne nous dites rien du second ? Impossible, en effet, pas très pro en tout cas.
00:38 Il m'est alors revenu en mémoire que déjà, en novembre 1999, il y a donc un quart de
00:44 siècle, des cinéastes français lançaient un appel pour que, je cite, « aucune critique
00:50 négative d'un film ne soit publiée avant le week-end qui suit la sortie en salle ».
00:56 Notons au passage qu'il aurait été évidemment permis d'en dire du bien, beaucoup de bien,
01:02 mais que du bien, donc.
01:03 Un ange passe, mais c'est bien connu qui veut faire l'ange fait la bête et c'est
01:08 un peu ce que faisaient les cinéastes signataires.
01:10 En oubliant par exemple que ce faisant, délai d'impression oblige, ils empêcheraient les
01:15 mensuelles de cinéma de faire paraître leur critique en temps utile.
01:19 À la trappe, les cahiers du cinéma, premier et positif, sans oublier désormais, ce film
01:25 est la 7ème obsession, ainsi que les précieuses fiches du cinéma.
01:28 Avec cet agenda-là, bon nombre de films auraient déjà disparu des écrans avant l'apparition
01:35 de leur critique.
01:36 Cette proposition a heureusement fait flop.
01:38 Et pourtant, le fossé demeure entre les critiques et le monde du cinéma.
01:42 Manifestement oui, Léa, avec des présupposés qui font toujours un peu sourire.
01:47 Ainsi, une critique négative à ce micro et à cette heure serait un désastre.
01:52 Comme si vous, qui nous écoutez, étiez de dociles moutons, prêts à rester chez vous
01:57 si je fais la grimace, ou bien à vous précipiter en masse si je jubile.
02:02 Mais nos auditeurs n'attendent pas des consignes, tout juste des avis, dont ils savent très
02:07 bien d'ailleurs qu'ici même, d'un journaliste à l'autre, ils peuvent radicalement changer.
02:12 Et pour se faire leur opinion, la seule qui compte, ils iront en salle, s'ils en ont
02:19 l'envie.
02:20 Car d'enquête d'opinion en enquête d'opinion, c'est le seul critère qui est évoqué
02:24 par les spectateurs pour justifier le choix des films qu'ils vont voir.
02:29 L'envie encore, toujours et loin devant les critiques, les affiches et autres campagnes
02:34 de communication.
02:35 L'envie qui se fiche donc des avis et remet chacun à sa place, avant, pendant et après
02:42 la sortie des films.
02:43 Mais je voudrais rassurer ici les cinéastes, les producteurs, les distributeurs et les
02:48 attachés de presse.
02:50 Jamais, jamais, jamais, les critiques de cinéma ne prendront au pied de la lettre la formule
02:55 de leur malicieux et talentueux confrère hélas disparu, Michel Bouju.
03:00 « Je ne vais pas voir les films dont je parle, ça pourrait m'influencer ».