• il y a 11 mois

Guillaume Pépy, président d’Initiative France, répond aux questions d'Alexandre Le Mer. Ensemble, ils reviennent sur les difficultés des entrepreneurs face aux règles administratives, aux normes et à la bureaucratie.
Retrouvez "L'invité éco" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-eco

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Transcription
00:00 - La France croule-t-elle sous les normes ? C'est l'une des grandes doléances des agriculteurs,
00:06 c'est aussi un chantier d'Emmanuel Macron. Alors la promesse présidentielle va-t-elle
00:10 répondre à la lassitude des entrepreneurs ? On en parle ce matin sur Europe 1.
00:15 - Pour votre invité Alexandre Lemaire, c'est Guillaume Pépy, président d'Initiative France.
00:18 - Bonjour Guillaume Pépy. - Bonjour.
00:20 - Initiative France, premier réseau associatif de financement de projets des entrepreneurs.
00:24 On le rappelle, alors vous connaissez évidemment très bien le monde du travail et de l'entreprise,
00:28 les entreprises agricoles, vous comprenez la colère des agriculteurs quand ils disent
00:33 "on n'en peut plus de cette avalanche de règles" ?
00:36 - Bien sûr c'est une colère qu'il faut entendre, mais avant de parler de la colère,
00:39 il faut rappeler ce qui va bien. La France est un grand pays d'entrepreneurs,
00:42 on a créé un million d'entreprises l'année dernière, et il y a toujours en France la même envie
00:47 d'entreprendre, il y a toujours le même bonheur d'entreprendre. Nous notre métier c'est d'accompagner
00:52 gratuitement toutes celles et tous ceux qui veulent entreprendre.
00:56 - Donc si les normes sont une entrave, elles ne sont pas un obstacle ?
00:58 - Voilà, c'est-à-dire que l'envie et la création d'entreprise vont bien.
01:01 Maintenant, quand on interroge nous, nos créateurs d'entreprise, et qu'on leur dit
01:06 "mais vous avez créé votre entreprise depuis un an, deux ans, trois ans, qu'est-ce qui vous fait toujours mal ?"
01:10 Et bien la réponse, elle est à 70% l'inflation législative, réglementaire, les normes,
01:17 la paperasse, la bureaucratie. Et c'est pas neuf, c'est vraiment un mal français,
01:22 depuis très très longtemps.
01:23 - Donc, alors vous, vous êtes là pour... Vous êtes le premier facilitateur de projet,
01:27 en quelque sorte, pour les patrons Guillaume Pépy, mais vous la partagez leur frustration au quotidien,
01:34 en vous disant "voilà, je lève le verrou du financement, mais il reste tous les autres que vous avez décrits,
01:39 celui des normes, de l'administratif."
01:41 - Il suffit de regarder les chiffres, le code de l'environnement, fois 7 en 20 ans.
01:45 Le code de commerce, fois 3 en 20 ans. Et puis rien qu'en 5 ans, le MEDEF vient de sortir une étude,
01:52 plus de 500 nouvelles obligations qui représentent 3700 pages,
01:57 qui sont des obligations "européennes". Donc, tout ça, les gens n'ont pas rêvé.
02:03 Et le dernier exemple, la cerise sur le gâteau, c'est ce fameux bonus réparation dont on nous parle tant.
02:09 7 euros pour faire réparer un trou à un vêtement, ou quelques euros pour réparer le gris pain,
02:17 ou un four, 15 euros pour réparer un four.
02:20 - Sans le papier c'est simple ?
02:21 - Oui, l'intention, pourquoi pas. Mais vous regardez ensuite comment ça marche.
02:26 Il faut que le coordonnier ou le réparateur soit labellisé pour les textiles auprès d'un organisme certifié,
02:34 dont le nom, je vous le donne en mille, s'appelle Refashion.
02:37 - Bon déjà, ça commence mal.
02:38 - Ça commence mal, qui a noué un partenariat avec l'État, et il faut bien entendu que le couturier ou la couturière
02:44 soit labellisé par cet organisme, donc un process administratif.
02:48 - Autrement dit, ça ne vaut pas les 6 euros.
02:50 Et puis, est-ce que l'État n'a pas mieux à faire en ce moment que de créer de nouveaux dispositifs
02:56 dans lesquels il y a de la labellisation, de l'homologation, de la certification ?
03:00 - Alors, le chantier de la simplification, justement, c'est l'un des caps de la politique économique d'Emmanuel Macron.
03:06 C'est un chantier qui d'ailleurs ne date pas d'hier, on rappelle cette circulaire de 2017
03:11 qui disait déjà que pour une norme créée, il fallait en supprimer deux.
03:15 - Ben faisons-le, chiche !
03:16 - On est loin du compte, Guillaume Pépi.
03:18 Je crois que le principal problème dans notre pays, c'est non pas de vider la baignoire avec une cuillère ou une louche,
03:25 c'est d'arrêter de remplir la baignoire.
03:27 C'est-à-dire qu'il faudrait, entre guillemets, que le législateur,
03:31 enfin avec le Parlement, il faudrait que les administrations, quand elles écrivent,
03:35 elles le fassent d'une main tremblante, en se disant
03:38 "Est-ce que je vais vraiment améliorer la vie des gens en faisant ça ?"
03:43 "Est-ce que le bonheur dans notre société, c'est d'avoir des normes de protection toujours plus nombreuses ?"
03:49 "Ou est-ce qu'on n'a pas passé un cap dans lequel en réalité maintenant,
03:53 ce qui nous apporterait à tous un peu plus de joie et de bonheur, c'est la suppression de normes ?"
03:58 - Donc ça serait ça le choc de simplification promis par Bruno Le Maire au printemps,
04:03 pour qu'on parle pas de cosmétique mais de choc, Guillaume Pépi.
04:06 - C'est ça, ça serait la première chose.
04:07 La deuxième chose, ça serait de tester chacune des nouvelles idées, de les tester sur le terrain.
04:14 C'est compliqué, parce que le terrain, évidemment il va réagir,
04:18 mais c'est ça dont on a besoin, c'est qu'il vaut mieux que le terrain,
04:21 c'est-à-dire les territoires réagissent avant plutôt qu'après.
04:26 Et puis la troisième chose à faire, c'est de se re-interroger sur la dématérialisation.
04:33 C'est-à-dire c'est génial d'avoir des plateformes internet sur tout,
04:36 à un moment ou à un autre, nos entrepreneurs nous disent "mais moi je voudrais parler à un humain,
04:41 parce que ce que j'ai à discuter avec, ça ne rentre pas dans tel et tel cas,
04:46 je voudrais juste pouvoir discuter avec quelqu'un".
04:48 - Quand Emmanuel Macron parle de bon sens, là c'est une boussole qu'on a perdue visiblement,
04:52 de simplement avoir un interlocuteur, un référent en face de soi lorsqu'on est un patron
04:56 et qu'on s'adresse à l'administration.
04:58 - Oui, l'une des principales causes de mécontentement chez les jeunes entrepreneurs,
05:02 c'est que tous les systèmes d'aide, d'appui, etc. sont d'une complexité effarante.
05:08 Alors oui, le questionnaire qui vient d'être lancé par l'État,
05:12 la consultation en novembre a identifié ce sujet, mais maintenant il faut le faire.
05:17 - Vous parliez d'idées nouvelles Guillaume Pépy,
05:18 pardon mais effectivement 5 000 propositions ont été envoyées,
05:21 c'est dire le niveau d'attente dans le pays, 30 000 répondants.
05:24 - Voilà, donc il faut commencer à vider la baignoire,
05:27 et pendant qu'on va vider la baignoire, il faut lever le stylo des nouvelles normes,
05:32 des nouvelles réglementations.
05:33 Et c'est ça le choc que tout le monde attend,
05:35 et encore une fois c'est une question de société, c'est une question de culture.
05:38 Je pense que tout le monde, les auditeurs, les chefs d'entreprise,
05:41 tout le monde a conscience qu'aujourd'hui on a franchi un cap
05:44 dans lequel les nouvelles normes détruisent plutôt de la valeur,
05:48 de l'enthousiasme et du dynamisme, plutôt qu'elles n'apportent de réelles protections.
05:52 - Le principe du "dites-le-nous une fois" également,
05:55 autrement dit que l'administration arrête de réclamer plusieurs fois les mêmes documents,
05:59 parce que c'est la réalité aujourd'hui Guillaume Pépy.
06:01 - Oui, c'est la question d'interconnecter les différents systèmes
06:04 pour que vous ne soyez pas... - Qui se parlent entre eux.
06:06 - En fait c'est un énorme sujet, mais on voit bien que dans la politique française,
06:10 ce sujet-là il apparaît de temps en temps,
06:12 il apparaît avec les gilets jaunes, il apparaît avec la crise agricole,
06:15 mais ce n'est pas un sujet de fond de la politique française.
06:18 Or, ça devrait l'être, parce que je crois qu'il y a un très large consensus
06:22 au-delà de tous les partis, sur le fait que nous avons franchi un cap et un seuil,
06:27 qui fait qu'aujourd'hui, si on ne s'occupe pas de ce sujet-là,
06:30 les crises vont venir à répétition.
06:32 - Et on rappelle que vous avez accordé avec Initiative France
06:35 près de 180 millions d'euros de prêts d'honneur,
06:37 8300 euros par entreprise en moyenne,
06:39 vous les accompagnez aussi les patrons sur l'administratif,
06:42 et ils comptent plus que jamais sur vous. - C'est ça qui fait la différence, évidemment.
06:45 Les gens qui viennent nous voir pour dire "je veux créer ma boîte, je veux créer mon emploi",
06:49 nous disent "bon, c'est formidable d'avoir un prêt d'honneur à taux zéro,
06:52 mais le plus important, c'est d'être accompagné humainement
06:57 par des gens qui vont être à votre disposition,
06:59 pour discuter du projet, pour aider à améliorer les choses,
07:02 et puis qui vont vous suivre dans la durée.
07:04 Et ce qui est formidable, c'est que c'est gratuit.
07:05 On a 200 associations partout en France, gratuites,
07:09 et donc il faut trouver les adresses sur initiative-france.fr.
07:12 - Merci Guillaume Pépy, président d'Initiative France.

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