François Asselin, président de la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises, répond aux questions d'Alexandre Le Mer. Le gouvernement souhaite faire la chasse aux arrêts de travail abusifs.
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00:00 - Europa, il est 6h40 dans son plan de lutte contre la fraude sociale annoncée le mois dernier.
00:04 Le gouvernement veut faire en particulier la chasse aux arrêts maladies abusifs.
00:08 A son tour, la Confédération des petites et moyennes entreprises propose des mesures de lutte contre les abus.
00:14 Vous en parlez avec votre invité Alexandre François Asselin, président de la CPME.
00:18 - Bonjour François Asselin. - Oui bonjour.
00:21 - Les arrêts maladies explosent +30% en 10 ans selon Bruno Le Maire.
00:25 Près de 9 millions d'arrêts maladies l'année dernière.
00:28 Le ministre de l'économie estime qu'une partie de ces arrêts de travail sont abusifs.
00:32 Est-ce que vous partagez ce sentiment ?
00:34 - Écoutez, il faut bien reconnaître que nous sommes de plus en plus victimes d'arrêts de courte durée,
00:42 d'arrêts intempestifs de courte durée.
00:44 Alors on pourrait se poser la question d'où cela vient.
00:47 On est prêt à discuter des conditions de travail.
00:50 Mais quand bien même vous améliorez les conditions de travail,
00:53 quand bien même la durée au travail augmente avec le départ retardé en retraite,
00:58 eh bien cela concerne surtout cette augmentation, les jeunes populations et les cadres.
01:03 Donc oui, il y a un sujet.
01:05 Est-ce que les hommes d'un seul coup deviendraient en sucre ?
01:08 Je ne pense pas.
01:09 Je pense tout simplement que notre assurance maladie c'est un bien commun précieux.
01:14 Et on utilise l'assurance maladie un petit peu comme un droit de tirage.
01:17 Voilà, on se met en arrêt.
01:19 Et puis pour une raison parfois futile, il faut bien le reconnaître,
01:23 et nous sommes un petit peu désarçonnés lorsqu'on est à la tête d'une petite entreprise
01:27 et qu'on ne sait plus comment s'organiser.
01:29 Vous avez parfois des indépendants qui eux-mêmes ne peuvent absolument pas prendre de vacances
01:33 parce que dans une petite équipe, une personne clé qui vous manque,
01:35 eh bien c'est tout simplement impossible de faire tourner son entreprise.
01:39 Alors justement, que constatent les patrons dans les PME que vous représentez au quotidien ?
01:43 Il y a vraiment une hausse des arrêts maladie de confort ?
01:47 Ce sont les informations qui vous remontrent ? François Asselin ?
01:50 Vous savez que l'arrêt maladie bien évidemment est couvert par le secret médical.
01:55 Donc ce n'est pas à nous de juger si c'est un arrêt maladie de confort ou pas.
02:00 On ne peut simplement que constater que vous avez une inflation des arrêts maladie de courte durée.
02:05 Et puis lorsqu'on regarde statistiquement,
02:08 ceux qui sont couverts par l'absence de jours de carence,
02:12 eh bien généralement dans ce secteur-là, il y a plus d'arrêts maladie.
02:15 Vous prenez par exemple la fonction publique territoriale,
02:18 c'est en moyenne 15 jours d'arrêt maladie par an.
02:20 Si vous prenez le secteur marchand, le secteur privé, les entreprises,
02:24 c'est 10 jours d'arrêt maladie en moyenne par an.
02:27 Et plus l'entreprise est grande et plus elle est couverte par une convention
02:31 qui finalement fait qu'il n'y a pas de jours de carence à la charge du salarié,
02:35 eh bien il y a plus d'arrêts maladie.
02:37 Et quand vous prenez par exemple la population des indépendants,
02:40 il y a quand même 4 millions d'indépendants,
02:42 vous avez les chefs d'entreprise parmi ces indépendants,
02:44 eh bien c'est 2,5 jours de travail d'arrêt de jour de travail par an.
02:49 Ce qui fait que finalement, avec une petite maligne,
02:52 je dirais mettez-vous à votre compte, vous serez moins malade que les autres.
02:55 - François Asselin, vous mentionnez le secret médical,
02:57 il est intangible et c'est tant mieux,
02:59 mais tout de même, quels vont être les cas de figure
03:02 où un patron va suspecter un arrêt de travail abusif ?
03:05 Est-ce que c'est par exemple l'été arrive ?
03:07 Est-ce que c'est une semaine de congé refusée
03:10 et qui se transforme à la dernière minute en arrêt maladie par exemple ?
03:13 - Oui, ça peut être cela, ça peut être un week-end un petit peu festif
03:18 et un lundi compliqué, ça peut être une contrariété de titre à titre personnel
03:23 qui déborde sur le cadre du travail,
03:26 c'est des raisons effectivement parfois assez futiles.
03:30 On ne peut simplement que le sub-odorer
03:32 puisque c'est couvert par le secret médical.
03:34 Ce qu'il faudrait faire en fait, c'est agir dans plusieurs directions.
03:38 D'abord, retrouver le sens du bien commun de notre système d'assurance maladie.
03:43 En instituant pour tous les salariés, quel que soit leur statut,
03:46 fonction publique comme secteur marchand,
03:49 trois jours de carence d'ordre public.
03:51 C'est-à-dire qu'on ne pourrait pas y déroger.
03:54 Vous avez plein de pays en Europe qui ont un plancher
04:00 ou un plafond de couverture santé
04:05 qui fait qu'il y a une sorte de franchise avant de pouvoir bien sûr accéder à un remboursement.
04:09 - Ce que vous dites, c'est que notre système est trop laxiste en réalité ?
04:11 - Notre système est trop laxiste, notre système est très généreux
04:14 si bien que tout le monde en use et parfois en abuse.
04:18 Notre système risque tout simplement de s'effondrer.
04:20 Et le jour où on aura vraiment d'être couvert par l'assurance maladie,
04:24 on aura des difficultés à l'être.
04:26 Et puis l'autre direction dans laquelle il faudrait agir, c'est bien évidemment les contrôles.
04:30 Beaucoup de médecins aussi sont désarçonnés face à ces demandes.
04:33 Si jamais ils interdisent un arrêt maladie et qu'il y a une vraie pathologie,
04:36 ils peuvent être "mise en cause" eux-mêmes.
04:40 Donc ce qu'il faudrait, c'est prévoir d'abord,
04:43 vous savez, dans les arrêts maladie de moins de 7 jours,
04:46 faire en sorte que les sorties libres soient beaucoup plus encadrées.
04:49 Ça permettrait d'assurer un contrôle et que ces contrôles soient vraiment effectifs.
04:53 - Est-ce qu'il y a de ce point de vue, diriez-vous, un avant et un après Covid que vous observez ?
04:58 On veut son temps libre, on le veut en temps et en heure,
05:01 et certains salariés peut-être sont prêts à s'en donner tous les moyens.
05:05 - Oui, alors c'est vrai que la tendance était quand même présente avant le Covid,
05:10 mais là, force est de constater qu'elle s'accélère,
05:13 et surtout sur des populations où on pourrait imaginer qu'elles soient quand même plus solides
05:18 que des personnes qui arrivent en fin de carrière, c'est-à-dire chez les jeunes.
05:20 Donc oui, je pense que l'après Covid, finalement, parfois se traduit dans des comportements
05:25 un peu légers par rapport effectivement au travail et au fait qu'il suffit d'aller voir un médecin
05:32 qui parfois peut être un peu conciliant pour se mettre en arrêt de travail et ne pas aller au travail.
05:36 - Quand un patron n'est pas convaincu de la bonne foi d'un salarié en arrêt de travail,
05:39 il y a toujours la possibilité de demander une contre-visite médicale à domicile ?
05:42 Alors c'est très encadré sans doute, François Asselin.
05:44 - Oui, alors on peut le demander, le résultat c'est que ça ne fonctionne pas.
05:48 Déjà vous avez beaucoup de mal à l'obtenir, et quand bien même parfois il y a la contre-visite,
05:53 allez, 9,9 fois sur 10, l'arrêt maladie est confirmé.
05:58 Alors une fois que je vous dis ça, je suis en train de vous dire que les gens ne font pas leur travail,
06:01 mais le constat est là, alors que bien évidemment parfois il y a de vrais constats,
06:05 parfois certaines entreprises même font appel à des sociétés privées pour traquer ceux qui en abusent.
06:12 - Exactement, il y a des entreprises qui engagent des détectives privés maintenant
06:16 pour surveiller leurs salariés en arrêt maladie,
06:19 c'est d'ailleurs devenu une part d'activité importante pour les agences de détective, François Asselin.
06:24 - Oui, alors on est très heureux pour eux, ça leur fait de l'activité, mais c'est une dérive totale.
06:30 Donc il faut se ressaisir, faire en sorte de retrouver "personnellement" le bien commun
06:35 qu'est notre système d'assurance maladie, faire en sorte d'avoir cette franchise médicale
06:38 de trois jours de carence d'ordre public, auquel on ne pourrait pas déroger même par convention collective,
06:44 et puis effectivement encadrer un petit peu plus les arrêts de travail,
06:48 permettre aussi à un médecin, au bout d'un certain nombre d'arrêts de travail,
06:51 de pouvoir basculer son patient vers un autre médecin pour confirmer ou pas les arrêts de travail,
06:56 pour pas qu'il ne soit sous la pression de ses patients.
06:58 Voilà, il y a des solutions, il faut simplement avoir un peu de courage pour les mettre en place.
07:03 - Merci François Asselin, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises, ce matin sur Europe 1. Merci à vous.
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