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00:00 * Extrait de « Les Matins de France Culture » de Guillaume Erner *
00:06 C'est un livre qui fait beaucoup parler et qui a été également beaucoup lu.
00:12 « La défaite de l'Occident », votre livre Emmanuel Todd, publié aux éditions Gallimard,
00:17 avec des thèses que d'aucuns qualifient de poutinophiles, d'autres de salutaires.
00:22 On va en débattre ce matin.
00:24 Nous sommes en compagnie d'Emmanuel Todd.
00:28 Bonjour.
00:29 Vous êtes le député Bernard Guetta.
00:31 Bernard Guetta, vous êtes député européen Renew Europe, mais vous avez été aussi correspondant
00:36 à Washington et à Moscou avec une question première et principale.
00:43 L'Europe et les États-Unis se sont-ils trompés sur la Russie de Vladimir Poutine ?
00:48 Votre point de vue à ce sujet, Emmanuel Todd.
00:50 Trompé ? De toute façon, moi je suis historien, donc je ne pose pas les questions en termes
00:55 de responsabilité.
00:56 Fallait-il, ne fallait-il pas ?
00:57 Pour moi, ce qui est important, c'est de voir ce qui se passe, d'analyser des séquences
01:03 et de voir vers quoi on se dirige.
01:08 Alors, j'aurais tendance, le dos au mur, à répondre que les États-Unis ont été
01:14 entraînés dans une guerre qui les met au pied du mur.
01:20 C'est-à-dire qu'ils sont, dans une certaine mesure, tombés dans un piège.
01:23 C'est-à-dire que le paradoxe historique qu'on vit, finalement, depuis l'effondrement
01:29 de l'Union soviétique, c'est qu'on ne s'était pas rendu compte que l'effondrement
01:34 de l'Union soviétique était un phénomène endogène, qui était une crise du système,
01:39 et que ça a été interprété comme la victoire de l'Occident, des États-Unis, du capitalisme.
01:45 Et on ne s'est pas rendu compte que cet Occident, ce capitalisme, particulièrement les États-Unis,
01:52 s'affaiblissait lui aussi en son cœur.
01:54 C'est-à-dire que c'est une étude historique de longue durée que je propose.
01:58 On voit que dès 1965, le niveau éducatif baisse aux États-Unis, suit la régression
02:05 industrielle à partir des années Reagan.
02:09 Et donc, on a vu ce système s'affaiblissant en son cœur, s'étendre vers l'Est,
02:19 atteindre les marges de la Russie, dans un état de surestimation considérable de ses
02:27 forces réelles.
02:28 Et pour aller vite, parce que je ne veux pas manipuler la parole, en fait, ce qui s'est
02:33 passé en Ukraine, je pense qu'on reviendra sur les détails, mais c'est que les États-Unis,
02:39 l'OTAN, s'est trouvé engagé dans un soutien à un régime ukrainien, auquel ils
02:46 avaient promis beaucoup, mais en s'apercevant qu'ils n'avaient juste pas les moyens matériels
02:51 de le fournir suffisamment en armes.
02:53 Et donc, en ce sens, les États-Unis sont tombés dans un piège, parce que quand on
03:00 est une puissance qui dépend pour son approvisionnement à ce point du reste du monde, le déséquilibre
03:07 commercial américain est considérable, ce piège, ce n'est pas juste une farce,
03:13 ça pose une question existentielle.
03:14 Bernard Guetta.
03:15 Écoutez, je crois en effet que les Européens ont commis sur Poutine une erreur que les
03:24 États-Unis n'ont pas commise.
03:25 Les Européens, jusqu'à l'entrée même des troupes russes en Ukraine, n'ont jamais
03:33 cru, moi le premier, n'ont jamais cru que Poutine serait assez stupide pour se lancer
03:42 dans cette agression.
03:43 Guerre d'agression qu'il a perdue.
03:45 Guerre d'agression qu'il a perdue.
03:47 Son objectif était d'arriver en quelques jours à Kiev, de renverser Zelensky, évidemment
03:52 de le faire assassiner, éventuellement avec un bon paquet de ses ministres, et de transformer
03:59 l'Ukraine en protectorat, si ce n'est de l'intégrer à la Fédération de Russie.
04:02 Si ce n'est de l'intégrer à la Fédération de Russie.
04:05 Alors, premièrement, il a échoué là-dessus.
04:08 Deuxièmement, il comptait diviser les Européens.
04:12 Il a resserré leur rang comme jamais.
04:15 Il comptait éloigner, accentuer l'éloignement des États-Unis d'Europe.
04:21 Et c'est exactement ce qui s'est produit.
04:24 Il y a eu une forme de retour des Américains en Europe, à mes yeux extrêmement provisoire,
04:31 parce que je crois que le phénomène de l'éloignement des États-Unis d'Europe est très très profond
04:38 et irréversible.
04:39 Donc, oui, les Européens, je le répète, se sont trompés sur Poutine, parce qu'ils
04:47 n'ont pas cru, ils n'avaient pas cru, excusez-moi, qu'il pourrait être aussi stupide.
04:52 Ce qui veut dire, Emmanuel Todd, que beaucoup ont été surpris par la résistance économique
04:59 de la Russie et par la résistance militaire de l'Ukraine.
05:03 Oui, c'est toujours pareil.
05:04 Quand une guerre commence, les gens ont des objectifs.
05:07 Je ne suis évidemment pas du tout d'accord avec Bernard.
05:10 Moi, je suis plutôt sur la ligne du Pentagone, qui considère que la guerre est perdue.
05:14 Donc je suis par les Occidentaux.
05:17 Mais, comment dire, une guerre, et surtout si cette guerre devient finalement, dans sa
05:25 dimension économique, d'échelle mondiale, c'est toujours des surprises et c'est toujours
05:28 ce qu'on n'attend pas.
05:30 Au début de mon livre, je fais la liste des dix principales surprises de la guerre.
05:35 Et parmi les dix principales, il y a les deux principales que vous avez évoquées, qui
05:42 est la résistance des Ukrainiens, que les Russes, effectivement, alors là, pour ça,
05:46 je suis tout à fait d'accord avec Bernard, n'attendaient pas.
05:50 Les Ukrainiens, bien équipés en missiles Javelins par les Américains, et spécifiquement
05:56 sous la présidence de Trump, les Ukrainiens ont fait face et arrêté.
06:02 Alors, ça pose des questions historiques, en fait.
06:05 C'est-à-dire qu'on ne peut pas se dire "ah, c'est formidable, c'est bien".
06:08 Je veux dire, on peut admirer en un certain sens, moral, psychologique, la résistance
06:17 ukrainienne.
06:18 Mais il faut comprendre aussi, parce qu'avant la guerre, tout le monde, les Occidentaux
06:24 comme les Russes, considéraient que l'Ukraine était ce qu'on appelle un "failed state",
06:29 c'est-à-dire un État en faillite, en décomposition, avec une population qui diminuait à toute
06:34 vitesse, qui fuyait vers l'Est et l'Ouest, en fait.
06:38 Et moi, l'interprétation que je donne, c'est que finalement, l'Ukraine a trouvé, dans
06:45 la résistance à la Russie, une raison d'exister, en fait.
06:50 Ça, c'est pour la première surprise.
06:51 Peut-être que je vais laisser la parole avant d'embrayer sur la deuxième surprise.
06:55 Bernard Guetta.
06:56 C'est là, précisément, là je rejoins Emmanuel Todd, c'est là la troisième ou
07:04 quatrième des stupidités de Vladimir Poutine.
07:09 Parce qu'en envahissant l'Ukraine, eh bien évidemment qu'il a serré les rangs d'une
07:16 nation, bien entendu.
07:18 Et aujourd'hui, on voit bien que quand l'Ukraine ne perd pas, elle gagne.
07:28 Et quand la Russie ne gagne pas, elle perd.
07:32 C'est la situation dans laquelle on est aujourd'hui.
07:35 Parce que à quoi est parvenu Vladimir Poutine ? Il contrôle aujourd'hui 17,5% du territoire
07:44 ukrainien.
07:45 Il en contrôlait beaucoup plus jusqu'au printemps 2022, c'est-à-dire jusqu'au moment
07:52 où les Ukrainiens l'ont pour la première fois repoussé.
07:55 À l'été suivant, les Ukrainiens l'ont pour la deuxième fois repoussé.
08:01 Et depuis, le front est figé.
08:03 Depuis, les Ukrainiens n'arrivent plus à enfoncer les défenses russes et les Russes
08:09 n'arrivent plus à relancer, peut-être provisoirement, ça je n'en sais rien, on
08:12 verra.
08:13 Et peut-être que les Russes n'arrivent plus à relancer une offensive.
08:16 Emmanuel Todd ?
08:17 Oui, moi je vais laisser de côté les questions militaires, puisque, encore une fois, je le
08:20 répète, je fais plutôt partie des gens qui pensent que les Russes ont de fait gagné
08:25 la guerre et que la contre-offensive...
08:27 Ça veut dire quoi pour vous, Emmanuel Todd ?
08:29 C'est-à-dire que les Ukrainiens sont épuisés, ont les envoyés à la mort avec un armement
08:35 insuffisant.
08:36 Et à un moment donné ou à un autre, la situation va se débloquer dans un sens favorable
08:47 aux Russes.
08:48 Il y a toujours des moments dans des guerres d'attrition où on a l'impression que le
08:51 front est figé.
08:52 Et d'ailleurs, les États-Unis et les Occidentaux luttent pour installer l'idée que le front
08:58 ne va plus bouger, etc.
09:00 Mais il est tout à fait hors de question pour les Russes d'arrêter.
09:04 D'autant plus que, comme je le souligne dans mon livre, les Russes sont dans une situation
09:13 favorable de par leur supériorité industrielle et militaire.
09:16 Mais je souligne que les classes creuses démographiquement russes arrivent et que les classes mobilisables
09:24 vont diminuer en taille en Russie dans cinq ans.
09:29 Donc en fait, ils ont cinq ans pour gagner la guerre et en aucun cas, ils n'ont intérêt
09:35 à négocier maintenant.
09:37 Je crois qu'ils ont cinq mois pour gagner la guerre et pas cinq ans.
09:41 Cinq mois, pourquoi ? Parce que dans cinq mois, peut-être six, je n'en sais rien,
09:47 les Ukrainiens disposeront pour la première fois d'une véritable couverture aérienne.
09:53 Enfin, les avions militaires qui ont été promis par les Occidentaux arriveront.
09:59 Et là, c'est un élément de modification de la donne.
10:03 Je ne dis pas que ce soit la modification absolue, mais c'est un élément très important
10:07 de modification.
10:08 Deuxièmement, si Poutine n'a pas réalisé une percée vraiment significative dans les
10:16 cinq mois qui viennent, il sera obligé de lancer un nouvel ordre de mobilisation dans
10:21 son propre pays, naturellement.
10:22 Et s'il lance un nouvel ordre de mobilisation, et bien là, le mécontentement qui est en
10:29 train de croître à tout petit pas, à toute petit pas, à basse intensité, mais de croître
10:34 jour après jour, et bien là, le mécontentement risque d'exploser.
10:38 Emmanuel Todd ?
10:39 Là, je crois que c'est une très belle ouverture pour parler de la deuxième surprise,
10:45 qui pour moi est en fait presque plus importante que la première.
10:48 La première surprise, c'était la résistance ukrainienne, ou d'une partie de l'Ukraine.
10:52 Il faudrait y revenir aussi là-dessus.
10:54 C'est la résistance de l'économie russe.
10:56 C'est-à-dire que tout le monde s'attendait sur la fois au calcul du produit intérieur
11:01 brut, le produit intérieur brut de la mesure conventionnelle de la Russie, plus de la
11:07 Biélorussie, c'est 3,3% du produit intérieur brut occidental, c'est-à-dire en intégrant
11:13 l'Europe, les Etats-Unis, le Japon et la Corée.
11:17 Et c'est ce produit intérieur brut si faible qui s'est révélé capable de produire au
11:22 stade actuel plus d'armes.
11:24 Mais c'est surtout qu'on attendait, il faut se souvenir de Bruno Le Maire annonçant
11:30 que la coupure de Swift, le réseau interbrancaire, allait mettre à genoux l'économie russe,
11:39 alors que nos dirigeants auraient dû savoir que ce n'était pas possible.
11:41 Il y avait un excellent bouquin de David Tertry qui était paru un peu avant la guerre, "Russie,
11:46 le retour de la puissance", qui expliquait que les Russes s'étaient préparés à ça.
11:50 Mais en fait, ça s'est passé encore mieux que prévu pour les Russes.
11:54 C'était ça la surprise.
11:55 Et l'économie russe a eu des difficultés d'adaptation.
12:00 C'est une guerre économique, mais ils ont réussi leur adaptation.
12:05 Ils se sont installés dans une économie qui n'est pas complètement une économie de guerre.
12:13 L'une des raisons de la lenteur de l'armée russe, c'est que l'un des soucis du régime
12:21 russe, on peut dire de Poutine pour faire court, c'est de préserver les acquis du
12:27 retour à la normale de la société russe dans les 20 dernières années.
12:32 Donc il va tout doucement.
12:33 Bernard Guetta, dans une vingtaine de minutes, vous répondrez à Emmanuel Leod sur la question
12:41 de la résilience de l'économie russe, voire sa force.
12:46 Toutes ces thèses qui sont développées dans votre livre, Emmanuel Todd, "La défaite
12:51 de l'Occident", publié aux éditions Gallimard.
12:54 6h39, les matins de France Culture, Guillaume Erner.
13:01 Avec un dialogue entamé entre l'essayiste et anthropologue Emmanuel Todd, vous publiez
13:07 "La défaite de l'Occident" et le député européen Renew Europe, Bernard Guetta, ancien
13:14 chroniqueur géopolitique à France Inter, correspondant à Washington et à Moscou.
13:19 Emmanuel Todd, vous nous expliquez il y a quelques instants qu'il y avait eu pour vous
13:23 deux surprises dans cette guerre en Ukraine.
13:26 Tout d'abord le fait que l'Ukraine ait résisté, puis ensuite le fait que l'économie
13:32 russe ait résisté.
13:34 Votre réponse Bernard Guetta par rapport à la seconde analyse sur l'économie russe
13:40 d'Emmanuel Todd, le fait notamment que les sanctions semblent aujourd'hui vaines.
13:45 Pour s'étonner que l'économie russe ne se soit pas effondrée, il faut avoir ignoré
13:55 le précédent des sanctions prises contre le régime d'Apartheid en Afrique du Sud,
14:00 ou des sanctions prises contre le régime des mollahs en Iran.
14:06 Aucun de ces deux trains de sanctions n'avaient fait s'effondrer ces régimes.
14:15 En revanche, elles avaient créé des difficultés considérables et organisé une pression économique
14:24 et politique gigantesque sur ces régimes.
14:27 C'est exactement la même chose qui se passe aujourd'hui en Russie.
14:32 J'entends dire, vous venez de le dire vous-même à l'instant, en reprenant ce qu'énormément
14:37 d'hommes politiques et d'analystes disent, les sanctions se sont avérées inefficaces.
14:43 Mais qu'est-ce que ça veut dire inefficace ? Je constate qu'aujourd'hui dans l'industrie
14:50 civile, l'industrie automobile, etc.
14:52 Tout simplement, on manque de pièces de rechange, on manque de matières premières.
14:57 Je ne dis pas qu'il n'y en ait pas du tout.
14:59 Évidemment qu'on peut toujours contourner les sanctions.
15:02 Il suffit d'aller par exemple à Dubaï pour voir à quel point les Iraniens contournent
15:08 les sanctions.
15:09 Mais néanmoins, les difficultés sont là.
15:11 On dit deuxièmement, regardez l'économie russe a 3,5% de croissance.
15:16 Oui, effectivement, l'économie russe a 3,5% de croissance.
15:20 Mais premièrement, à partir de quoi ?
15:22 Et deuxièmement, pourquoi est-ce qu'il y a cette croissance ?
15:25 C'est très simple.
15:26 On a vidé, vous me comprenez, pas à 100%, mais considérablement amoindri les budgets
15:33 de la santé, les budgets de l'éducation, les budgets des infrastructures, des routes,
15:38 etc.
15:39 Pour bourrer l'industrie militaire de budget.
15:44 Évidemment qu'à ce moment-là, en faisant ça, on booste une croissance.
15:49 Et premièrement, cette croissance est extraordinairement artificielle.
15:52 Et deuxièmement, l'économie russe continue de s'affaiblir, mais à vitesse grand V.
15:59 Emmanuel Todd ?
16:00 Oui, alors l'un des éléments, je suis bien entendu en désaccord, il va de soi, mais
16:06 l'un des éléments quand même qui explique la résistance de l'économie russe, c'est
16:10 que le reste du monde, comme on dit maintenant, au fond, très discrètement et de moins en
16:16 moins discrètement, et pas simplement la Chine, l'Inde, mais aussi les pays musulmans,
16:21 ont finalement au fond pris le parti de la Russie et soutiennent l'économie russe.
16:26 C'est pour ça que l'économie russe, attenue par sa restructuration interne, un mélange
16:31 d'actions de l'État forte et de marché, les Russes sont maintenant très attachés
16:36 à l'économie de marché, mais aussi finalement de choix du reste du monde, de commercer,
16:43 de soutenir la Russie.
16:45 Je crois que dans ce que dit Bernard Guetta, il y a quelque chose qui finit par me perturber,
16:51 c'est que j'ai entendu plusieurs fois le mot « stupide » appliqué à Poutine, aux
16:58 Russes, à tout le monde, et bon, il est clair…
17:02 Je ne l'ai pas appliqué aux Russes, pour ma part.
17:03 Oui, mais bon…
17:04 Et à Poutine, certainement.
17:05 Voilà, bon, alors dans ce cas-là, on peut préciser, c'est réduire le problème géopolitique
17:11 à un homme qui serait stupide.
17:15 Alors, j'espère que ça ne va pas me faire encore accuser de « poutinophilie » le
17:22 fait que je lis les textes des dirigeants russes, pas simplement Poutine, l'Avrofet,
17:27 etc., et que l'honnêteté m'oblige à dire, je l'avais dit bien avant la guerre
17:31 d'ailleurs, que ce sont des textes fort intelligents.
17:34 Donc on a affaire à des gens intelligents.
17:36 C'est-à-dire ?
17:37 Je veux dire, il y a une vision du monde, il y a une vision de l'histoire, une vision
17:40 politique, et intellectuellement, les diplomates russes sont très au-dessus du niveau des
17:46 géopoliticiens américains.
17:47 Je ne dis pas ça…
17:48 Alors, dites-nous pourquoi les Américains sont stupides selon vous ?
17:51 Non, mais j'ai une analyse dans mon bouquin, j'ai une analyse de ce qu'on appelle le
17:57 BLAM, c'est-à-dire le groupe des géopoliticiens américains à Washington, et j'explique
18:04 les visions simplices, etc., et surtout comment ce groupe a perdu sa culture directrice centrale.
18:11 C'est-à-dire, le cœur du livre, le cœur de mon livre, n'est pas tant la Russie et
18:16 l'Ukraine.
18:17 Avec Bernard Guetta, on doit en parler, c'est plutôt ce sujet.
18:19 Je pense que les gens seront très surpris, je pense que les lecteurs des journaux directeurs
18:25 en France, comme le monde, seront très surpris de mes chapitres sur la Russie et l'Ukraine,
18:28 et se demanderont ce qu'on leur fait lire dans leurs journaux.
18:31 Donc ça, c'est utile.
18:32 Le cœur de mon livre n'est pas là, c'est une analyse de la décomposition interne,
18:37 intellectuelle et morale du système américain.
18:40 Et économique aussi.
18:41 Et économique, mais mon livre s'intéresse aux procédures de longue période, et en particulier
18:47 au rôle de la disparition de la religion protestante, et au-delà de ses valeurs, pour
18:56 expliquer le déclin de l'intelligence, de l'industrie et de ce qui faisait la force
19:04 de l'Amérique.
19:05 Bernard Guetta sur le déclin de l'empire américain.
19:07 Vision donc, Emmanuel Todd.
19:10 Écoutez, ça me laisse perplexe, parce que l'obsession justifiée aujourd'hui au Parlement
19:17 européen, à la Commission, au Conseil, c'est-à-dire dans les 27 capitales, c'est le plan de relance
19:25 économique de Joe Biden, qui est effectivement très très menaçant pour le reste du monde,
19:33 parce que c'est un plan formidablement bien financé et formidablement intelligent.
19:39 C'est exactement ce que nous tentons de faire aujourd'hui dans les 27 pays de l'Union
19:46 européenne, et que nous n'arrivons pas suffisamment à faire, loin de là.
19:52 Joe Biden a véritablement donné un coup de... enfin, impulsé une relance de l'économie
20:00 américaine qui est tout à fait spectaculaire, et c'est pour ça que les électeurs républicains
20:07 sont extraordinairement injustes vis-à-vis de lui.
20:11 Alors, juste une phrase.
20:13 J'ai mille critiques, et probablement beaucoup plus encore qu'Emmanuel Todd, à faire à
20:19 l'empire américain, à la puissance américaine, mais l'intérêt comme il le fait, ça me
20:25 semble incroyablement rapide.
20:27 Oui, parce qu'Emmanuel Todd, dans votre livre, Autrement dit, dans la défaite de l'Occident
20:31 aux éditions Gallimard, vous évoquez finalement à la fois une économie russe plus puissante
20:37 qu'on ne le dit et...
20:38 Solide et stable.
20:39 Une économie américaine qui, selon vous, repose en partie sur du vent.
20:45 Sur du vent, ou sur la production de dollars, qui ne coûtent pas cher.
20:49 Ce n'est pas cher de produire du dollar pour la planète.
20:51 Je crois que le problème des efforts de Biden, qui suivent ceux de Trump, qui suivent ceux
20:59 d'Obama, de reconstruction finalement protectionniste des États-Unis, ce que l'Europe ne peut pas
21:06 faire, je dirais, presque par définition, sont logiquement de l'extérieur tout à
21:13 fait raisonnables.
21:14 Mais le problème des États-Unis actuellement, c'est qu'ils n'ont plus, je dirais, les capacités
21:20 humaines de profiter de ces mesures.
21:22 C'est-à-dire que l'une des choses sur lesquelles j'insiste dans le livre, c'est le déficit
21:30 des États-Unis dans la production de scientifiques et d'ingénieurs.
21:33 Ils doivent en importer.
21:34 Mais avec une population qui est plus du double de la population russe, par eux-mêmes, les
21:41 États-Unis produisent moins d'ingénieurs que les Russes.
21:45 C'est pour ça que les Russes tiennent en fait, parce que la guerre, c'est pas distribuer
21:48 des dollars.
21:49 C'est pas avec des dollars ou des injonctions de payés qu'on fait la guerre.
21:53 C'est avec des ingénieurs.
21:54 Ce qui explique la flexibilité d'une économie, c'est la présence d'ingénieurs, ce qui résulte
22:00 et d'ouvriers et de techniciens qualifiés.
22:03 Et je crois que ce qui paralyse fondamentalement, j'ai un chapitre, les gens me disent que mon
22:08 chapitre de dégonflement de l'économie américaine est le plus drôle de mon livre.
22:13 Je suis vraiment très content d'avoir fait un chapitre d'économie amusante, etc.
22:17 Mais je crois que ce qui désarme les États-Unis, c'est fondamentalement la production du dollar.
22:22 C'est-à-dire que même si vous faites des études aux États-Unis, les études doivent
22:27 vous mener à gagner votre vie correctement ou au mieux.
22:29 Mais ce qui rapporte, c'est pas de faire des études scientifiques ou d'ingénieurs,
22:34 c'est de se rapprocher des professions qui vous mettent près de la production de dollars,
22:39 les productions d'avocats, de financiers, de ces trucs-là.
22:43 Mais avec ces gens-là, quand on est en guerre, la guerre est un test de réalité incroyable,
22:48 on ne va nulle part.
22:49 C'est ça le problème.
22:50 - Bernard Guetta, le fait que l'économie américaine soit remplie de "bullshit jobs",
22:55 comme le disait le regretté David Graeber, avec donc une vision pour Emmanuel Todd d'une
23:03 économie bâtie sur du sable, du vent, ce que vous voudrez.
23:05 - Écoutez, "bullshit jobs", ça existe malheureusement partout, pas seulement aux
23:13 États-Unis et bien loin de là, premièrement.
23:16 Deuxièmement, j'aimerais que nous, en Europe, nous ayons les mêmes faiblesses économiques
23:24 que les États-Unis.
23:25 Vous comprenez mon ironie.
23:27 J'aimerais que nous ayons la faiblesse de la Silicon Valley, j'aimerais que nous
23:31 ayons la faiblesse du système financier américain, parce que ça pèse considérablement dans
23:37 la balance.
23:38 J'aimerais que nous ayons la faiblesse des innovations industrielles, notamment dans
23:43 le domaine de l'intelligence artificielle.
23:45 Non, écoutez, soyons un petit peu sérieux.
23:49 Encore une fois, enterrer à cette vitesse l'économie américaine et surtout, surtout
23:58 dire que par rapport à l'économie américaine, l'économie russe serait une économie, comment
24:05 dites-vous Emmanuel Todd, stable et...
24:07 - Équilibrée.
24:08 - Stable et équilibrée.
24:09 Alors oui, ça me laisse sans voix, parce qu'elle n'est certainement pas stable et
24:14 deuxièmement, elle est totalement déséquilibrée, puisqu'elle repose fondamentalement sur l'exportation
24:22 du sous-sol russe des matières premières.
24:24 Il n'y a rien d'autre.
24:26 Depuis les sanctions, les Russes se sont mis enfin à avoir un semblant d'industrie agricole,
24:37 d'industrie agroalimentaire.
24:38 Mais depuis les sanctions, c'est tout.
24:41 C'est tout.
24:42 L'économie russe, c'est le gaz et le pétrole.
24:45 - Alors ça, c'est le...
24:46 - Emmanuel Todd.
24:47 - Oui, alors là, on est dans le cœur du problème, je dirais, politique-pratique,
24:51 qui n'est pas vraiment l'objet de mon livre.
24:55 Pour moi, mon livre, c'est un bouquin d'analyse qui, en théorie, ou en tout cas dans mon
25:00 espoir, devrait servir à tout le monde.
25:04 C'est-à-dire, évidemment, peut-être montrer à des gens qui ne sont pas hostiles à la
25:09 Russie, qui ne sont pas tout seuls intellectuellement, et qu'il y a des gens qui sont encore capables
25:14 de penser que la Russie, ce n'est pas juste Poutide, Poutide le monstre, mais Poutide,
25:18 un type intelligent, mais surtout Poutide qui exprime une culture russe qui a ses traits
25:22 autoritaires, que j'explique en tant qu'anthropologue, mais que c'est...
25:30 Je veux dire, ce qui est...
25:33 Comment dire ? J'écris aussi pour les russophobes, d'une certaine façon.
25:38 Je veux dire, mon rêve serait d'avoir plein de lectures russophobes qui seraient mieux
25:42 informées de ce qu'est leur adversaire.
25:45 - Et les américainophobes...
25:46 - Parce qu'on ne gagne pas une guerre en disant que l'adversaire est idiot, qu'il n'a pas
25:51 d'industrie, qu'il n'existe pas.
25:54 - Ça en effet...
25:55 - Les Russes sont des joueurs d'échecs.
25:57 - Les américanophobes, Emmanuel Todd, parce qu'il y a une part d'américanophobie dans
26:03 votre livre et vos analyses.
26:05 Vous dites que l'économie américaine est bidon et que cette guerre est une guerre que
26:11 les Américains ont intérêt à mener ?
26:13 - Je sais que je suis souvent traité d'être américanophobe quand je fais de la critique
26:20 de l'Amérique.
26:21 Moi j'ai toujours pensé, quand je critiquais l'Amérique, que j'étais sur la position
26:25 en fait d'un démocrate de gauche, etc.
26:28 - Sur les deux points que je viens de résumer, l'économie bidon, vous venez de le dire,
26:31 sur le fait que cette guerre en Ukraine était importante pour les Américains, pour l'Amérique
26:38 plus exactement, que l'Amérique avait intérêt à la mener.
26:41 - Non, elle n'a pas du tout intérêt à la mener.
26:44 - Elle pense avoir intérêt.
26:45 L'intérêt géopolitique de l'Amérique, quand on lit ce qui reste de rationalité
26:51 chez les géopoliticiens américains, c'était d'empêcher le rapprochement entre une Allemagne
26:57 dominant l'Europe et la Russie.
26:59 Ça c'est la terreur des stratéges américains.
27:01 Et on pourrait dire qu'au stade actuel, on a l'impression qu'ils ont réussi.
27:05 Moi, ce que je dis dans mon livre, c'est que je pense que l'OTAN va perdre cette guerre,
27:09 que l'un des effets de cet échec militaire sera la dissolution de l'OTAN et qu'inévitablement,
27:18 dans leur intérêt, et je dirais dans l'intérêt de la paix, l'Allemagne et la Russie finiront
27:24 par se retrouver en fait.
27:25 - Il est très possible que l'OTAN soit dissoute, mais pas du tout par l'effet d'une victoire
27:32 russe en Ukraine.
27:35 - L'OTAN pourrait être dissoute par Donald Trump s'il est réélu en novembre prochain.
27:40 Et son ambition déclarait, et non pas de dissoudre formellement, mais d'affaiblir tellement
27:48 l'alliance atlantique que plusieurs pays se retournent vers les États-Unis dans une
27:55 tentative d'accords bilatéraux avec Washington.
27:58 Protégez-nous, protégez-moi, protégez-moi l'Estonie, je ne sais pas, tel ou tel pays.
28:05 Et l'ambition de Donald Trump serait par là de casser l'Union européenne et en vérité
28:14 de s'entendre avec Vladimir Poutine sur le dos non seulement des Ukrainiens mais des
28:20 Européens.
28:21 Donc effectivement, l'alliance atlantique est aujourd'hui considérablement menacée,
28:26 mais par cette partie trumpiste des États-Unis et certainement pas par Vladimir Poutine.
28:35 Mais si vous me permettez, Guillaume, j'aimerais ajouter un mot.
28:38 Moi, je ne suis pas du tout russophobe.
28:43 Non seulement je ne suis pas du tout russophobe, mais comme vous le savez, Emmanuel Todd, je
28:47 suis plutôt russophile.
28:49 - Je confirme.
28:50 - Mais comme le dit mon ami Adam Michnik, l'intellectuel polonais, je suis un russophile
28:58 poutinophobe, comme le sont d'ailleurs beaucoup et de plus en plus de Russes.
29:03 - Et vous, Emmanuel Todd ?
29:04 - Je pense que c'est une erreur d'opposer Poutine aux Russes.
29:10 Je suis anthropologue, donc j'analyse d'ailleurs même les différences de système familial
29:15 entre l'Ukraine centrale, la petite Russie et la grande Russie pour montrer dans mon
29:20 livre que le tempérament ukrainien central est plus individualiste, effectivement, que
29:25 le tempérament russe communautaire, plus autoritaire, égalitaire.
29:30 Et le régime Poutine exprime finalement, on aime ou on n'aime pas, mais c'est l'acceptation
29:39 de la réalité, un tempérament russe qui est plus communautaire.
29:44 Mais il y a une chose sur laquelle je voudrais vraiment répondre, c'est les accusations
29:49 d'anti-américanisme.
29:50 C'est-à-dire, moi, les États-Unis et les pays anglo-saxons sont pour moi des pays
29:55 proches familialement et sur lesquels j'hésite.
29:58 Alors l'anti-américanisme, j'ai écrit des livres, mais je voudrais montrer mon honnêteté
30:04 en citant un chapitre du livre.
30:07 J'ai un chapitre, on m'accuse, Bernard Guetta le fait souvent, d'être un anglophile
30:13 congénital ou de naissance.
30:16 Insecouable.
30:17 C'est vrai, j'ai été formé à la recherche en Angleterre, à Cambridge.
30:20 Et là, j'ai fini par admettre que le processus de décomposition interne touchait le Royaume-Uni,
30:29 qui expliquait le bellicisme incroyable des États-Unis.
30:32 Et j'ai écrit un chapitre d'une cruauté exceptionnelle contre l'Angleterre, ma maman
30:41 intellectuelle.
30:42 Vous voyez, donc là je défends mon intégrité de chercheur.
30:46 Il y a une chose qui m'a terriblement choqué dans le livre d'Emmanuel Todd et qui me
30:55 choque encore ce matin dans son propos.
30:58 C'est cette idée, je vais caricaturer naturellement, mais c'est cette idée selon laquelle, fondamentalement,
31:05 les Russes seraient restés des serfs.
31:07 Ce n'est pas vrai.
31:09 Ce n'est pas vrai.
31:10 Quand j'étais correspondant du Monde pendant la période de la perestroïka à Moscou,
31:15 en Union soviétique à l'époque, j'ai vu, j'ai vu, mais de mes yeux vu et entendu,
31:23 l'amour de la liberté, l'amour de la démocratie dans ce peuple.
31:29 Dès que Gorbatchev a soulevé un tout petit peu le couvercle, mais il y a eu une explosion
31:36 de pluralisme, de revendications, d'intelligence, de fonctionnement démocratique.
31:41 Attends, arrêtons de dire, arrêtons de dire que les Russes seraient des serfs.
31:47 Vous savez, j'entends cela, j'entends cela énormément au Parlement européen,
31:52 dans la bouche de beaucoup de mes collègues, pas la majorité, mais de beaucoup de mes
31:56 collègues qui me disent "Mais Bernard, enfin voyons, jamais les Russes ne pourront être
32:00 des démocrates".
32:01 Ce n'est pas vrai.
32:02 Ce n'est pas vrai.
32:03 D'abord, je n'ai jamais dit dans mon livre que les Russes étaient des serfs.
32:08 J'ai parlé…
32:09 Comme vous le sous-entendez.
32:10 Non, non, j'ai parlé d'une culture autoritaire, concept que j'applique également à l'Allemagne,
32:17 qui fait partie du camp occidental.
32:18 Et j'évoque une évolution, et au contraire, je dis pourquoi est-ce qu'on ne donne pas
32:24 aux Russes le droit d'évoluer comme les Allemands.
32:29 Donc vraiment, c'est tout à fait injuste.
32:31 Je ne dis que simplement le point d'équilibre de la société russe avancée, dont je souligne
32:35 la modernité par une fécondité qui est la même que celle de l'Allemagne ou même
32:39 des autres occidentaux.
32:40 Non, vraiment, je trouve cette accusation très…
32:44 Je dis simplement que dans la modernité, les peuples avancés gardent des tempéraments
32:51 assez différents.
32:52 Bernard Guetta, en conclusion, au stade où nous en sommes dans cette guerre entre la
32:58 Russie et l'Ukraine, qu'est-ce qui pourrait se dérouler ? Vous avez dit qu'il restait
33:03 cinq ou six mois à Vladimir Poutine.
33:06 Je pense que Vladimir Poutine va essayer de lancer une offensive au tout début du printemps,
33:13 dès la fin du dégel, et que s'il marque des points, ce qui n'est pas impossible,
33:18 et que s'il marque des points, je ne dis pas s'il gagne la guerre, s'il marque
33:21 des points, à ce moment-là…
33:23 Parce que vous ne l'envisagez pas qu'il la gagne dans cette échéance-là ?
33:29 Non, absolument pas.
33:30 Son objectif de guerre, il l'a répété il y a peu de temps, c'est ce qu'il appelle
33:35 la dénazification de l'Ukraine.
33:38 Qu'est-ce que ça veut dire dans sa bouche, la dénazification de l'Ukraine ? C'est
33:42 la chute du gouvernement et l'entrée des troupes russes à Kiev.
33:45 Donc ça, non, il n'y arrivera pas.
33:47 Mais après le succès d'une percée, il pourrait proposer un cessez-le-feu pour figer
33:55 le front et annexer les territoires qu'il contrôle.
33:57 Un mot de conclusion.
33:59 Emmanuel Todd, comment voyez-vous ?
34:01 Alors moi, je pense que si je devais, on est presque dans un jeu télévisé, on doit dire
34:07 quelque chose.
34:08 Mon sentiment, c'est que les Russes veulent récupérer l'ancienne partie russophone
34:14 qui a été privée du droit d'expression après le coup d'État de Maïdan.
34:19 Je donne des cartes dans le bouquin qui montrent à quel point l'Ukraine russophone a été
34:25 éliminée du jeu politique.
34:26 Ce n'est pas une démocratie l'Ukraine.
34:28 Ils veulent récupérer ça.
34:29 Et je pense effectivement, et là je serais assez d'accord avec Bernard Guetta, de dire
34:34 qu'ils veulent mettre à Kiev, dans ce qui restera d'Ukraine, un régime, pas satellite,
34:42 mais neutralisé.
34:43 Ils peuvent y faire une manière.
34:44 Mais ce dont je suis sûr...
34:45 Mais vous approuvez ça ?
34:46 Mais ce n'est pas...
34:47 Cet objectif de guerre ?
34:48 Mais ce n'est pas...
34:49 Moi, je suis historien.
34:50 Je ne suis pas député européen.
34:53 Non, non, non.
34:54 Vous écrivez un livre très polémique.
34:56 Vous écrivez un livre très polémique avec une thèse.
34:58 Mais non.
34:59 Assumez vos thèses.
35:00 Non.
35:01 Comment dire ? Mon objectif dans ce livre, s'il y a un objectif politique, c'est de rétablir
35:06 le pluralisme en France, que quelqu'un ou quelques-uns aient la capacité de dire autre
35:14 chose qu'un discours écrasant et absurde sur la Russie, sur la Suisse.
35:20 Mais ce discours n'écrase qu'Emmanuel Todd.
35:23 Emmanuel Todd, on peut vous lire, donc, dans « La défaite de l'Occident », publié
35:27 aux éditions Gallimard.
35:28 Merci Bernard Guetta.
35:30 Je rappelle que vous êtes député européen, Renew Europe.