Regardez Lenglet-Co du 22 janvier 2024 avec François Lenglet.
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00:02 RTL Matin
00:06 Il est 7h37, LangueLeco avec vous, François Langlet.
00:08 Bonjour à tous.
00:09 Alors, les manifestations des agricultures se poursuivent, en particulier dans le sud-ouest de la France.
00:13 Mais la colère gagne, que se passe-t-il vraiment dans nos campagnes ?
00:16 Une accumulation de difficultés économiques et de contraintes réglementaires.
00:20 Un étau qui se resserre sur les paysans depuis plusieurs années.
00:23 Et si l'étau se ferme, c'est d'abord à cause d'un paradoxe.
00:26 L'agriculture est le secteur qui est le plus pénalisé par le changement climatique.
00:30 Et c'est aussi celui à qui on demande d'en faire le plus dans la transition écologique.
00:34 Les paysans payent donc des deux côtés.
00:37 Mais cette transition écologique est si difficile que cela à réaliser ?
00:40 Deux exemples, ils sont très concrets.
00:42 Le gouvernement veut supprimer l'avantage fiscal sur le litre de gazole
00:46 qui sert à faire fonctionner les tracteurs, parce que c'est une énergie carbonée.
00:50 Seul problème, il n'y a pas de tracteur électrique.
00:53 On ne peut donc tout simplement pas travailler sans carburant.
00:56 La suppression de l'avantage fiscal, ce serait donc mécaniquement des coûts en plus.
01:00 Alors que depuis deux ans, l'électricité, le gaz, les engrais ont vu leur prix exploser.
01:06 Autre exemple, l'utilisation des pesticides comme le glyphosate,
01:10 qui est aujourd'hui permise en France, mais avec de fortes restrictions,
01:14 notamment sur les zones en lisière d'habitation.
01:17 On comprend l'objectif, dépolluer.
01:19 Mais pour l'exploitant, c'est un travail supplémentaire considérable.
01:22 Voir l'abandon de certaines parcelles, alors qu'il peine déjà à gagner sa vie.
01:27 - En fait, il souffre de ne pas être compris, c'est cela ?
01:30 - Oui, c'est ça. C'est même presque pire que ça,
01:32 d'être ignoré, considéré comme la variable d'ajustement
01:35 pour une population citadine qui cherche les meilleurs prix pour s'alimenter
01:39 et voudrait que tout soit produit de façon invisible.
01:42 Vous savez comment d'ailleurs les paysans allemands appellent ces citadins ?
01:45 - Faites-nous rire.
01:46 - Les Tesla.
01:47 C'est la bourgeoisie qui ne veut pas se soucier de l'arrière-cuisine.
01:51 Le symbole de cette incompréhension, c'était la décision de justice récente
01:54 condamnant un agriculteur à payer 100 000 euros de dommages et intérêts à ses voisins
01:59 à cause du bruit et de l'odeur de ses vaches.
02:02 Bon, idem sur l'affaire des bassines d'eau controversées
02:05 dont les cultivateurs ont besoin et qui suscite la contestation des écologistes.
02:10 La guerre de l'eau naissante va encore aviver les tensions
02:14 entre rats des villes et rats des champs,
02:16 en particulier dans le sud-ouest qui est frappé par la sécheresse.
02:18 - La solution ne serait-elle pas de monter en gamme avec une agriculture moins productive ?
02:23 - C'est exactement ce qu'on se dit.
02:25 Depuis 10 ans, on les pousse là-dedans
02:28 avec des résultats qui ne sont pas très probants
02:30 parce que c'est la crise inflationniste.
02:32 L'eau de gamme plus chère, il est plus difficile à vendre.
02:35 Du coup, nourriture importée, viande, fruits et légumes
02:38 qui arrivent massivement en France et qui leur fait concurrence.
02:41 Avec là encore des aberrations.
02:43 Chez nous, on a réglementé les caches à poules de façon draconienne.
02:47 L'éclairage, la poussière, le bruit, la densité d'animaux, la litière,
02:52 les plateformes de repos, au millimètre près.
02:55 Alors qu'on importe des produits du Brésil ou de Thaïlande
02:57 qui ne respectent pas ces réglementations.
03:00 Concurrence déloyale en plus.
03:02 - C'est Bruxelles qui est responsable de tout ça ?
03:04 - Oui, en partie.
03:05 - Ce chaos d'ailleurs.
03:06 - En fait, il y a eu deux événements concomitants.
03:08 La réforme de la politique agricole commune,
03:10 qui avait quand même beaucoup profité à la France naguère.
03:13 Et puis, l'élargissement de l'Europe
03:15 qui a transféré tous les bénéfices de la PAC à l'Est.
03:18 Les dégâts ont été particulièrement élevés en France en 30 ans.
03:21 Retenez bien ce chiffre.
03:23 En 30 ans, le revenu agricole a perdu 40% en euros constants,
03:28 malgré une baisse de 60% du nombre d'exploitation.
03:31 Au plan national, on maintient un excédent agroalimentaire,
03:34 mais grâce aux ventes de vin, de champagne, c'est spiritueux.
03:38 Alors que pour la viande, les fruits et légumes, les produits d'épicerie,
03:41 les déficits se creusent.
03:43 C'est l'autre paradoxe.
03:45 Nos agriculteurs ont faim, alors que la souveraineté alimentaire française
03:49 n'est même pas assurée.
03:51 - Le revenu agricole a perdu 40% en 30 ans.
03:53 Merci beaucoup de toutes ces précisions, François Langlais.
03:55 On vous retrouve bientôt.
03:57 [SILENCE]