Débat avec Frédéric Bizard, Professeur d’économie à l’ESCP, Président fondateur de l’Institut santé et Caroline Brémaud, ex-chef du service des urgences de l’hôpital de Laval
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00:00 Le Grand Matin Sud Radio, 7h-10h, Benjamin Gleize, Laurence Perrault.
00:05 Avec ce moment arrivé jusqu'à 10h du Grand Débat,
00:09 et on vous allait parler Benjamin, de l'hôpital public, où va l'argent investi ?
00:13 Vos deux invités pour débattre, Caroline Vremaux qui est ex-chef du service des urgences de l'hôpital de Laval,
00:19 et Frédéric Bizarre, professeur d'économie à l'École supérieure de commerce de Paris,
00:23 président fondateur de l'Institut Santé et également auteur de l'Autonomie solidaire en santé aux éditions Michelou.
00:29 Bonjour à vous deux.
00:30 Bonjour.
00:31 Et merci d'être avec nous ce matin sur Sud Radio pour parler de l'hôpital public et de ses difficultés,
00:38 malgré, on va le voir si ça se confirme ou pas, mais un investissement, en tout cas prôné par le gouvernement.
00:44 On verra s'il est à la hauteur ou pas, si on est dans de l'affichage ou pas.
00:48 Tout d'abord Caroline Vremaux, le directeur de l'hôpital de Laval vous a démis de vos fonctions de chef des urgences.
00:55 Vous comprenez sa décision aujourd'hui ou pas ? Expliquez-nous.
00:58 En fait, c'est une décision avec deux versions, une version officielle et une version officieuse.
01:05 La version officielle, c'est qu'il s'appuie sur un audit de 2021 qui préconise un seul chef pour les urgences et le SEMSMUR.
01:15 Et moi, j'étais chef que des urgences.
01:18 L'audit préconisait aussi que la personne qui devrait être nommée travaille dans les deux services.
01:25 Et en fait, ce n'est pas le cas de la personne qui a été choisie.
01:29 Il faut aussi préciser que cet audit qui date de 2021 a été réalisé avant que nous rentrions en nuit fermée régulée sur l'hôpital de Laval.
01:37 Pour ceux qui ne connaissent pas, Laval, c'est la ville principale du département de la Mayenne.
01:42 Et donc, compte tenu de cet audit un peu bancal qui, pour moi, est périmé et dont on n'applique que ce qui arrange,
01:51 on est quand même très nombreux à penser que c'est une sanction déguisée parce que je dérange dans mes propos lorsque je défends l'hôpital public.
02:03 Et on me reprocherait aussi au niveau local de nuire à l'attractivité en disant simplement la vérité.
02:10 Et j'ai reçu après en off des messages qui confirment que c'est une sanction déguisée.
02:17 Cet audit, en l'occurrence, était un audit de l'ARS qui disait cela pour des motifs d'efficacité.
02:25 En gros, c'est ça ce qu'il disait.
02:27 Oui, sur des motifs d'efficacité.
02:29 Mais voilà, nous, on est en difficulté sur les plannings et la personne qui me remplace régulièrement nous envoie des mails
02:34 pour nous demander de reprendre ses plages où elle travaille parce qu'elle a des réunions importantes.
02:39 Donc déjà, quand on est sous l'eau avec du temps additionnel, il faut qu'on en fasse encore plus pour lui libérer du temps pour faire des réunions.
02:44 Donc, ce n'est vraiment pas opérationnel comme décision.
02:50 Frédéric Wieser, vous avez entendu à l'instant ce que disait Caroline Brémeau,
02:54 audit de l'ARS, de l'Agence régionale de santé, situation un peu ubuesque depuis.
03:01 Ça vous surprend ou pas ?
03:04 Non, malheureusement, ça ne me surprend pas.
03:06 Et c'est un cas extrêmement intéressant parce que le cœur de la crise n'est pas là où les pouvoirs publics et souvent les acteurs,
03:14 parce que la crise de l'hôpital, qui fait partie d'une crise systémique de la santé,
03:18 est une responsabilité collective, y compris d'ailleurs des économistes.
03:23 Donc, je ne vais pas lancer la responsabilité uniquement.
03:26 Mais ce cas-là est le cœur de la problématique de la santé et de l'hôpital public, qui est la crise de la gouvernance.
03:35 Nous n'avons pas les bonnes personnes qui gouvernent ce système-là.
03:39 On a depuis les années 2010, avec notamment la loi Bachelot, mais on peut remonter à l'ordonnance Juppé,
03:49 pris une décision qui était de mettre à la tête du système de santé uniquement la haute administration.
03:56 C'est-à-dire qu'on considérait qu'il y avait trop de liberté, trop de pouvoir médical dans le système,
04:01 qui générait trop de dépenses.
04:03 Et à mon avis, la faute originelle, si vous voulez, remonte à là,
04:06 c'est-à-dire de penser que lorsqu'on met uniquement l'administration,
04:09 c'était la phrase de Sarkozy, "je veux qu'une tête qui dépasse le directeur", c'est-à-dire l'administrateur.
04:15 Et ça, c'est vraiment une faute que l'on paye très, très cher aujourd'hui.
04:19 Je ne dis pas qu'il faut laisser uniquement la place au pouvoir médical pour le diriger,
04:24 mais il est évident que le pouvoir médical doit être au cœur de l'administration de l'hôpital,
04:29 comme au cœur de l'administration du système de santé.
04:31 Il ne l'est plus du tout aujourd'hui, il n'y a aucun équilibre là-dessus.
04:34 Non seulement il ne l'est plus, mais on rejette sur la responsabilité du pouvoir médical et paramédical
04:41 l'essentiel de la faute du dysfonctionnement du système.
04:46 Donc on a une vraie maltraitance, mais pas simplement du pouvoir médical,
04:52 mais du personnel médical et du personnel salarié à l'hôpital public.
04:56 Ce n'est pas propre à l'hôpital de Laval.
04:59 D'ailleurs, dans vos confrères de Paris Match, on sorti quelque chose sur le CHU de Rennes.
05:03 C'est tout ça et c'est assez généralisé.
05:06 Donc moi j'ai créé l'Institut santé, vous l'avez dit, pour refonder le système de santé.
05:11 Tant que l'on limite le périmètre de la crise du système à un problème financier.
05:19 Dernier point, on voit bien que depuis 2020, où on a mis 27 milliards d'euros additionnels
05:25 de dépenses d'hôpital public, dont 14 milliards pour le Ségur de l'hôpital,
05:30 l'impact a été quasi nul.
05:33 C'est quand même incroyable de parler d'autant de milliards et de dire qu'il n'y a eu aucun résultat.
05:38 Oui, mais après ils se sont répartis sur 10 ans, donc on ne les a pas vraiment eus concrètement.
05:42 Oui, Caroline Brémeau, vous précisez.
05:44 Le Ségur de la santé s'est réparti sur 10 ans, ça s'étale,
05:48 donc on ne les a pas eus directement dans nos poches.
05:52 Et donc forcément, c'est des promesses, c'est étalé.
05:57 Donc on ne l'a pas concrètement dans notre poche et forcément,
06:01 on n'en voit pas les résultats et les améliorations.
06:04 Et c'est vrai que le problème de la gouvernance, ils sont hors sol,
06:09 c'est-à-dire qu'ils vont prendre des décisions, mais ils vont voir par exemple dans un planning,
06:14 ils vont nous dire "vous mettez telle personne dans une case, une personne c'est une case".
06:19 Sauf qu'en fait, il y a particulièrement aux urgences, un problème de compétence.
06:23 C'est-à-dire qu'il y a des gens qui travaillent aux urgences qui n'ont pas toutes les compétences.
06:26 Ça fait des années qu'ils ne font plus que de la traumato.
06:29 Et un patient qui va arriver en détresse respiratoire, qu'il faut intuber dans les 3 minutes,
06:32 ils ne savent pas faire. Donc on ne peut pas les laisser gérer les urgences tout seul.
06:37 Donc quand on nous dit "c'est bon, vous êtes tant de personnes divisées par tant d'heures,
06:41 vous remplissez tant de cases", on dit "non, ça ne fonctionne pas comme ça".
06:44 Et c'est ce management un peu hors sol qui fait qu'on n'est pas compris dans nos demandes
06:51 et que les décisions sont à côté.
06:54 Frédéric Bizarre, management hors sol.
06:56 Après, les directeurs d'hôpitaux, on leur demande aussi de faire des économies, tout simplement.
07:00 Ils s'exécutent.
07:01 Justement, le problème, c'est quand vous avez une gouvernance uniquement budgétaire
07:04 avec simplement un fichier Excel comme guide pour gouverner et le système de santé
07:10 à travers l'objectif national de dépense d'assurance maladie,
07:13 qui est quand même le dispositif essentiel de pilotage de 255 milliards d'euros par an.
07:20 Un fichier Excel que l'on fait rentrer pour avoir un objectif national de dépense d'assurance maladie.
07:24 Donc ça, ça ne peut pas fonctionner.
07:26 Je voudrais juste quand même revenir sur ce qu'a dit Mme Sajaud.
07:29 Quand je vous parle des 27 milliards, c'est entre 2020 et 2022.
07:32 C'est ce qui a été, non pas promis, mais consommé.
07:35 Donc il y a eu un vrai effort de faire.
07:38 Mais je rejoins en revanche votre conclusion qui est de dire
07:41 que nous n'en voyons quasiment pas l'impact, le résultat.
07:46 Parce qu'il y a un vrai problème d'allocation de cette ressource-là.
07:49 On a vraiment transformé l'hôpital public en un vrai puits sans fonds
07:53 où plus vous dépensez, moins vous créez du bien-être pour ceux qui y travaillent.
07:59 Mais n'oublions pas qu'au bout de la chaîne,
08:01 la maltraitance des soignants se traduit par de la maltraitance des soignés.
08:06 Il est aujourd'hui courant en France d'avoir des personnes
08:09 qui restent en souffrance des heures sur un brancard dans les services d'urgence,
08:13 voire qui en meurt, puisqu'il y a des cas qui le font.
08:16 C'est devenu quelque chose de courant et quasiment accepté par les pouvoirs publics.
08:20 Donc il y a une dégradation absolument phénoménale
08:24 qui se traduit dans la prise en charge proprement dite des patients.
08:28 Je vais vous donner un exemple si vous voulez.
08:31 Juste pour terminer Frédéric Bizarre sur le dernier point que vous vouliez évoquer.
08:35 Et effectivement, je voulais vous faire réagir dans la foulée Caroline Brémeau.
08:38 Mais tout d'abord, terminez Frédéric Bizarre.
08:40 Il faut juste bien prendre que les causes sont à la fois externes à l'hôpital,
08:44 à la finance qui est inadaptée pour l'ensemble des secteurs,
08:46 la crise des EHPAD, la crise de la médecine de ville
08:50 et l'absence d'investissement dans la prévention.
08:54 Parce que le biais là-dedans, c'est qu'on met de l'argent dans l'hôpital sans impact,
08:57 alors qu'on n'en met pas là où ça allégerait l'hôpital public,
09:01 qui est la prévention et la médecine de ville.
09:03 Et il y a des causes internes propres à l'hôpital public.
09:07 La conférence des hôpitaux universitaires a fait une série de propositions
09:12 qui montrent que tout est à revoir, du statut hospitalo-universitaire
09:16 à l'organisation du CHU, au lien entre le CHU et les autres hôpitaux publics,
09:20 au lien entre les hôpitaux publics et les hôpitaux privés,
09:23 au lien entre le système hospitalier et les autres secteurs.
09:25 Tout est à revoir.
09:27 Donc vous voyez qu'on est vraiment sur une toute petite partie du problème
09:31 quand on parle du financement.
09:33 Caroline Brémeau, vous vouliez réagir, donner un exemple, effectivement.
09:36 Oui, un exemple qui après je rebondirai sur la suite.
09:39 Par exemple, nous, dans notre région, on nous a supprimé des ambulances de garde
09:43 la nuit parce que soi-disant elles n'étaient pas assez rentables.
09:46 Donc on est passé de 7 ambulances de garde pour partir en intervention
09:49 chercher les patients à 3 pour un souci de rentabilité.
09:53 Sauf que très peu de temps après, voire même en même temps,
09:56 on avait déjà des urgences qui fermaient la nuit.
09:59 Donc on envoyait les patients un peu plus loin,
10:01 ils faisaient 30 kilomètres de plus pour être pris en charge.
10:04 Et donc ce qui se passe, c'est que finalement,
10:06 on se retrouve avec 3 ambulances au lieu de 7,
10:08 ce qui fait qu'elles sont tout le temps prises.
10:10 Et qu'est-ce qu'on fait ? On fait appel aux pompiers.
10:12 Ce qui fait que les pompiers vont, alors que ce n'est pas leur mission première,
10:16 et les pompiers refacturent beaucoup plus cher à l'hôpital leur intervention.
10:22 Donc ce qui fait que là où on a fait des économies d'un côté
10:25 parce qu'on a diminué des ambulances que soi-disant elles n'étaient pas rentables,
10:28 finalement on se retrouve dans une dynamique de fonctionnement
10:31 où on en aurait eu vraiment besoin.
10:33 Mais comme les décisions sont prises à très court terme,
10:36 et qu'on ne fait pas les choses en se projetant sur moyen et long terme,
10:40 on a pris une décision qui finalement est plus coûteuse,
10:42 sous prétexte d'une économie.
10:44 Donc ça c'est un exemple qui est vraiment flagrant et qu'on constate nous tous les jours.
10:48 Et pour revenir sur la situation du système de santé,
10:52 et pas seulement de l'hôpital public,
10:54 moi je dis souvent que les urgences c'est l'arbre qui cache la forêt,
10:56 parce qu'en fait il faut prendre en considération tout ce qui se passe en amont des urgences.
11:01 Et donc la médecine de ville c'est vraiment important,
11:03 parce que tous les patients qui sont mal soignés,
11:06 parce qu'ils n'ont pas de médecin traitant,
11:07 parce qu'il y a des millions de français qui n'ont pas de médecin traitant,
11:09 et bien ils vont mal suivre leur diabète,
11:11 ils vont mal suivre leur hypertension,
11:12 donc ils vont faire plus d'infarctus, plus d'AVC.
11:15 Et ça ne va pas être spectaculaire,
11:17 ça ne va pas être comme la canicule avec des milliers de morts l'été,
11:21 non c'est des choses qu'on va voir s'aggraver progressivement
11:25 avec une augmentation de la mortalité infantile,
11:31 une diminution de l'espérance de vie en bonne santé,
11:34 voilà c'est des indicateurs qu'on commence à voir apparaître.
11:37 Donc si on ne prend pas en charge l'amont…
11:39 Oui, l'espérance de vie en bonne santé, on voit que ça baisse,
11:41 effectivement ça baisse.
11:42 Ça baisse, tout à fait.
11:43 Et donc il faut prendre en charge ce qui se passe aussi avant l'hôpital,
11:45 donc en amont des urgences,
11:47 avec la médecine de ville et les spécialistes,
11:50 il faut regarder ce qui se passe aux urgences,
11:54 et puis après ce qui se passe après les urgences,
11:56 dans les services d'hospitalisation aiguë,
11:58 mais aussi dans les soins de suite et les EHPAD.
12:00 Et en fait si on ne prend pas en compte la globalité du système de santé,
12:04 on se plante et on prend des décisions à court ou moyen terme
12:07 qui vont être délétères ou plus coûteuses.
12:09 Caroline Brémeau, vous restez avec nous, Frédéric Bizarre également.
12:12 On revient dans un instant pour poursuivre le débat.
12:14 9h47 sur Sud Radio, à tout de suite.
12:17 Bon matin Sud Radio, 7h10, Benjamin Gleize, Laurence Perrault.
12:22 Et merci de nous rejoindre à 9h50 pour la fin de ce débat,
12:26 pour l'hôpital public, où va l'argent investi ?
12:28 Toujours avec vous Frédéric Bizarre, professeur d'économie
12:31 à l'École supérieure de commerce de Paris,
12:33 et président fondateur de l'Institut Santé,
12:36 et également en compagnie de Caroline Brémeau,
12:38 ex-chef du service des urgences de l'hôpital de Laval.
12:41 Frédéric Bizarre, cette information qui a beaucoup fait réagir l'hôpital George-Pompidou,
12:46 qui a dû lancer un appel aux dons pour acheter un scanner dernière génération.
12:50 Est-ce que c'est anecdotique ? Est-ce que c'est surprenant ?
12:53 On va dire que la façon avec laquelle ça a été annoncé est plutôt surprenant,
12:57 puisque ça laisse un petit peu penser que finalement l'hôpital public,
13:01 l'État français n'a plus les moyens d'acheter un scanner qui est un scanner sophistiqué,
13:07 mais enfin qui vaut autour de 2 millions d'euros.
13:09 Donc évidemment que non, mais là on voit d'abord plusieurs choses.
13:14 D'abord, à quoi sert aujourd'hui l'assistance publique des hôpitaux de Paris,
13:19 qui est un peu le regroupement, ce qui chapote l'ensemble des établissements hospitaliers de l'île de France,
13:28 si ce n'est pour pas assurer quand même une mutualisation des achats des gros équipements
13:33 et garantir qu'il n'y ait pas de moindre problème dans la réponse aux besoins d'équipement.
13:38 Il faut bien voir que l'hôpital c'est deux actifs stratégiques,
13:42 les ressources humaines et les technologies, l'équipement de haute technologie.
13:47 À partir du moment où on prétend ne plus être capable de financer ça,
13:51 finalement on sait qu'on prétend que l'hôpital public n'a plus les moyens de son développement.
13:56 Donc là on revient sur un vrai problème de qui fait quoi,
14:01 comment est organisé cet hôpital public pour plus venir à ses besoins.
14:06 Avec des choses étonnantes aussi Frédéric Bizarre, je ne sais pas si c'est toujours très développé,
14:10 mais on a notamment un problème au niveau administratif avec un certain nombre de médecins
14:15 à l'hôpital qu'une partie de la semaine qui font du privé aussi à côté
14:19 et qui ont deux, trois secrétaires à l'hôpital. Je ne sais pas si c'est toujours le cas.
14:24 Alors, bon, ça a été historiquement assez le cas, mais je ne suis pas sûr qu'il faut y aller.
14:29 Avant d'aller dans ce genre de détail organisationnel,
14:32 ce qui me frappe c'est que les hôpitaux n'ont plus l'autonomie pour gérer leurs propres ressources
14:40 qui doivent être suffisantes évidemment. Mais ce que disait Madame tout à l'heure,
14:43 et nous ne voyons pas la couleur de cet investissement massif,
14:46 c'est bien qu'il y a un problème d'allocation des ressources.
14:49 On est passé d'un mandarinat médical où on reprochait à ses grands mandarins,
14:53 chefs de services d'avoir beaucoup trop de pouvoir, à un mandarinat administratif.
14:57 Et c'est le pire, le mandarinat administratif c'est le pire parce que l'administratif n'a aucune compétence
15:02 dans la bonne allocation des ressources au sein d'un hôpital et au sein d'un service.
15:07 Donc je suis désolé, mais je reviens toujours à ce problème,
15:10 c'est que tant qu'on n'aura pas réorganisé l'hôpital et le système de santé
15:14 pour allouer les bonnes responsabilités aux bonnes personnes,
15:17 c'est comme dans toute institution, quand vous n'avez pas les bonnes personnes
15:21 pour piloter les principales fonctions, Madame était chef de service,
15:26 elle est la mieux placée que quiconque pour répondre aux besoins,
15:30 pour connaître les besoins de son service.
15:32 À partir du moment où on lui dit en fait tu n'as aucun droit d'intervenir
15:37 dans les décisions d'allocation des ressources,
15:40 les personnes se mettent de côté, sont complètement désenchantées
15:43 et on a le pire qui se passe, c'est-à-dire une gap-j,
15:47 où on ne sait pas, où il n'y a pas de priorisation de ces ressources.
15:50 Encore une fois, on s'est aperçu très tard que les ressources humaines à l'hôpital,
15:54 ça ne doit pas être la variable d'ajustement,
15:56 mais ça doit être ce qui est considéré comme la ressource essentielle d'un établissement.
16:01 Alors on s'en est aperçu en augmentant les fonds, mais ça ne change rien
16:06 parce qu'il y a toujours un sentiment que ces fonds sont mal alloués
16:10 et surtout un sentiment d'isolement, après 12 ans d'études,
16:15 finalement de ne pas être bien utilisé à sa juste valeur.
16:18 Caroline Brémont, je rappelle que vous êtes ex-chef du service des urgences
16:22 à l'hôpital de Laval, ça vous parle ce que dit Frédéric Bizard ?
16:25 Oui, je voudrais rebondir surtout sur le mal-être au travail.
16:29 C'est assez flagrant parce que là, on nous a dit récemment,
16:33 mais en fait nous, on veut bien ouvrir des lits,
16:36 mais en fait on n'a pas de soignants, mais il faut arrêter de nous prendre pour des imbéciles.
16:40 Ça fait des années qu'il y a des décisions qui sont prises,
16:43 qui sont délétères sur le fonctionnement de l'hôpital,
16:47 et en fait on dégoûte les soignants, quel que soit leur métier de travailler,
16:55 on dégoûte même les étudiants.
16:57 Il y a quand même énormément d'étudiants en école d'infirmiers et infirmières
17:00 qui ne terminent pas leurs études.
17:01 On a des internes qui se suicident.
17:04 On a reçu hier encore un message d'un externe qui nous raconte
17:08 que la réforme sur les études médicales va aboutir à ce qu'il y ait peut-être
17:14 un millier d'internes en moins l'année prochaine,
17:17 parce qu'on leur demande d'avoir 14 de moyenne minimum à leur premier partiel
17:23 avant de pouvoir se présenter au deuxième,
17:25 et en fait ils vont préférer pouvoir redoubler
17:28 parce que sinon ils ne peuvent pas bien choisir.
17:30 Un micmac pas possible.
17:32 Donc on va se retrouver encore avec moins d'internes à la rentrée prochaine.
17:35 On a allongé les études, donc on se retrouve avec des années blanches,
17:42 avec pas de médecin généraliste formé.
17:44 Il y a quelques années c'était des urgentistes.
17:46 Il y a un mal-être au travail parce qu'on ne nous donne pas les moyens
17:50 de travailler convenablement.
17:51 Moi je le dis tout le temps, le meilleur médicament c'est l'humain.
17:54 Et en fait nous on est des soignants.
17:57 Ce qu'on aime c'est de donner de notre personne pour aider les gens,
18:00 les aider à aller mieux.
18:01 Et si on nous enlève ça, on ne va pas s'épanouir dans notre travail,
18:06 on va s'éteindre et puis on va préférer faire autre chose.
18:09 Moi j'ai un de mes collègues, dans quelques mois,
18:12 il arrête la médecine d'urgence pour faire autre chose,
18:14 alors que c'était le meilleur d'entre nous.
18:17 Et c'est dramatique de voir à quel point on détruit des gens,
18:23 on détruit des soignants et c'est délétère forcément pour ces personnes
18:26 parce qu'elles se retrouvent dans des états psychologiques terribles
18:30 et puis qui peuvent aboutir au suicide.
18:32 Et on se retrouve avec des patients qui ne sont pas bien soignés.
18:38 Et en fait là on nous dit qu'on peut bien rouvrir des lits
18:41 mais on n'a plus de personnel.
18:42 Mais à cause de qui ? On n'a plus de personnel.
18:44 Vous nous maltraitez tous, tout gouvernement confondu depuis des dizaines d'années
18:49 et là vous faites les étonner.
18:50 Non, on ne peut pas laisser ce message véhiculer en disant
18:53 "Nous on veut bien mais on ne peut plus".
18:55 Non, ça suffit.
18:56 Ça fait des années que ça se pérennise,
19:01 cette maltraitance des soignants et des étudiants en santé.
19:07 Oui, effectivement.
19:08 Et il faut se dire aussi que l'hôpital public,
19:10 ce n'est pas juste un budget ou des dépenses.
19:12 Effectivement, vous avez tout à fait raison de le rappeler,
19:14 ce sont des êtres humains qui soignent.
19:17 Frédéric Bizarre, je rappelle, vous êtes professeur d'économie
19:19 à l'École supérieure de commerce de Paris,
19:21 président fondateur de l'Institut de santé.
19:23 Je rappelle notamment votre ouvrage "L'autonomie, solidaire en santé".
19:26 C'est aux éditions Michelon.
19:27 Merci d'avoir été avec nous ce matin sur Sud Radio.
19:29 Un grand merci aussi à vous Caroline Brémeau,
19:31 ex-chef du service des urgences de l'hôpital de Laval.
19:35 Merci à vous deux et bonne journée.
19:37 Merci beaucoup.
19:38 Merci à vous Benjamin.
19:39 Je vous laisse, je pars en vacances à partir de dimanche
19:43 parce que demain je serai dans "On parle auto" à partir de 11h.
19:46 C'était un plaisir d'être avec vous ma chère Laurence Perrault.
19:48 Demain c'est une autre Laurence.
19:50 C'est une autre Laurence, celle qui prend le volant.
19:52 Laurence Garcia qui sera là demain matin pour vous accompagner.
19:55 Et puis lundi, retour de Jean-Jacques Bourdin à cette heure-là
19:58 et puis de Patrick Roger juste avant.
20:00 Passez une très belle journée.
20:01 A suivre, juste après le retour de l'info,
20:03 Valérie Expert et Gilles Gansman pour le Rendez-vous Média.