Sonia de La Provôté, présidente de la commission sénatoriale d'enquête sur la pénurie de médicaments, fait le point sur les mesures prises pour éviter une rupture de médicaments en France. 3.700 produits ont été concernés l’an dernier
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00:00 8h17, bienvenue sur France 3 et France Bleu Normandie.
00:04 Notre invité ce matin, Didier Charpin et Sonia De La Provote, sénatrice union centriste
00:09 du Kalwados et présidente de la commission sénatoriale d'enquête sur la pénurie de
00:13 médicaments.
00:14 Sonia De La Provote, bonjour.
00:15 Bonjour.
00:16 Beaucoup d'auditeurs nous appellent ce matin témoigne de cette pénurie de médicaments
00:19 que vous aviez quantifié 3 700 médicaments en situation de pénurie ou risque de pénurie.
00:25 La situation est grave, va-t-elle s'améliorer ?
00:29 Ma question est simple finalement mais la réponse…
00:31 La réponse n'est pas aussi simple que la question parce qu'on ne va pas régler la
00:35 question des pénuries en très peu de temps.
00:38 On peut régler les questions d'urgence, c'est-à-dire la surveillance des stocks,
00:42 la disponibilité, un meilleur rapid-trace des répartitions par les répartiteurs dans
00:48 le pays.
00:49 Pour cet hiver par exemple, est-ce qu'on doit craindre, par exemple, pénurie d'amoxycyline,
00:53 l'antibiotique le plus utilisé en France ?
00:54 En fait, ce qui a été mis en place est quand même un plan blanc.
00:58 Ce qu'on souhaitait dans notre rapport, c'est un certain nombre de propositions
01:03 qui permettent de régler le problème dans les situations aigües comme une épidémie
01:07 ou une triple épidémie comme on a connu l'année dernière.
01:09 Et donc c'est peu de médicaments qui doivent être mieux stockés, mieux distribués, qui
01:14 peuvent être distribués à l'unité, qui peuvent être fabriqués dans les 42 officines
01:19 qui fabriquent ou par la GEPS, par exemple la structure qui dépend de la PHP et qui
01:24 peut fabriquer des médicaments.
01:25 Donc des mesures un peu exceptionnelles mais qui ne sont pas les mesures structurelles
01:29 de prévention et de régler la pénurie de médicaments puisqu'il y a la fabrication
01:33 des principes actifs, de l'usine, de l'outil de production qu'il faut mettre en place
01:37 et ça on ne fabrique pas une usine en 6 mois.
01:39 Il a fallu faire des concessions, le gouvernement a accepté d'augmenter de 10% le prix de
01:44 vente de l'amoxycyline.
01:45 Fallait faire cette concession pour assurer les stocks ?
01:48 La concession c'est de pouvoir accompagner les quelques médicaments absolument essentiels
01:53 et qui sont présenciens donc non-converts par brevet et qui pour un certain nombre
01:56 étaient vendus au prix inférieur au prix de fabrication.
02:00 Et donc ce n'est pas complètement délirant d'imaginer qu'on les paye au juste prix
02:05 au regard du caractère indispensable du médicament.
02:08 C'est le cas de l'amoxycyline mais ça ne règle pas la question de la pénurie puisque
02:12 ce n'est pas parce qu'on paye un peu plus cher qu'on aura plus de comprimés disponibles.
02:17 En contrepartie il faut fournir je crois 13 millions de boîtes au marché français
02:22 l'hiver prochain.
02:23 Ça fait partie des mesures de crise.
02:26 Donc on traite dans l'urgence, ceci dit il n'est pas légitime que tout au long de l'année
02:32 on se pose la question de "est-ce qu'on va être en pénurie d'amoxycyline ?"
02:35 C'est un antibiotique indispensable.
02:38 L'année dernière il y a eu un effet domino, par défaut tous les antibiotiques ont manqué
02:41 les uns après les autres parce qu'on les a remplacés les uns après les autres et
02:44 donc derrière c'est des problèmes sanitaires assez dramatiques.
02:47 Donc il faut régler de toute façon la question de la fabrication et la disponibilité hors
02:51 crise de l'amoxycyline.
02:52 Comment on la règle ? Comment on incite, on contraint les fabricants de l'industrie
02:57 pharmaceutique à se réimplanter en France ?
02:59 Alors on ne contraint pas.
03:01 Disons qu'il y a des négociations sur le prix de médicaments et notamment sur la disponibilité
03:06 de ce qui est le plus rentable pour ces entreprises-là, c'est-à-dire les médicaments innovants qui
03:11 sont de plus en plus des médicaments "on le liche".
03:13 On va jusqu'à un million d'euros pour un traitement pour une personne pour l'année.
03:16 Donc on voit bien que tout de suite ce n'est pas du tout la même chose que de vendre beaucoup
03:20 de volumes de boîtes d'amoxycyline.
03:22 Parce que ça c'est pas rentable clairement, de livrer un amoxycyline ?
03:25 Une fois que les brevets sont libres, c'est pas rentable.
03:28 En plus des génériques arrivent et sont très concurrentiels sur le marché.
03:31 Et puis ce qui n'est pas rentable évidemment c'est de produire en France puisque ça coûte
03:35 plus cher du point de vue environnemental et social bien sûr.
03:38 Emmanuel Macron a annoncé un plan pour qu'on retrouve une souveraineté sur le médicament.
03:43 Grosso modo c'est possible ou c'est une illusion ?
03:45 Alors c'est possible mais pour ça il faut être un petit peu clairvoyant sur ce qu'on
03:50 propose.
03:51 La souveraineté c'est d'abord remettre de la chimie.
03:52 Et c'est pas parce qu'on remplit des gélules et qu'on fait beaucoup de boîtes qu'on est
03:58 devenu souverain sur un médicament.
03:59 On devient souverain sur un médicament quand on peut traiter toute la chaîne de valeur
04:03 de fabrication.
04:04 Et donc ça commence par la chimie et les principes actifs et les exhibitions.
04:07 Et puis après fabriquer le médicament.
04:10 Et donc la souveraineté ça ne peut pas être que de l'affaissage.
04:12 C'est-à-dire que c'est pas que de la production des boîtes, c'est bien tout le reste.
04:16 Et donc ces questions-là doivent être posées.
04:17 Et évidemment qu'on n'arrivera pas à remettre toute l'industrie en France.
04:21 Et que la souveraineté elle se réfléchit aussi au niveau européen.
04:24 Et qu'il vaut mieux avoir des principes actifs produits en Allemagne par exemple qu'en Inde
04:28 ou en Chine qui nous rend extrêmement dépendants.
04:31 Ce que la Covid a montré d'ailleurs.
04:33 Quel regard vous portez sur Sanofi et Alizieux qui d'un côté investit 20 millions d'euros
04:37 pour développer et de l'autre dit "on va plus faire des médicaments qu'on ne vend
04:41 pas sans ordonnance".
04:42 - Eh bien Sanofi se débarrasse de ce qui est le moins rentable.
04:46 Alors se débarrasse du moins son plan stratégique c'est de revenir à son cœur de métier
04:51 qui n'était pas celui-là.
04:52 C'était fabriquer des médicaments son cœur de métier et des vaccins.
04:55 Bon le nouveau cœur de métier c'est une partie du cœur de métier d'avant c'est
04:59 faire que de l'innovation et donc aller sur des médicaments de niche qui ont évidemment
05:04 un rapport plus important.
05:05 - Dans le bras de fer avec Sanofi, quelle est la marche, la force du politique ?
05:10 - Eh bien la marche c'est que l'innovation elle est accompagnée financièrement en France
05:15 par le crédit d'impôt recherche entre autres qui est quand même, les laboratoires sont
05:18 les premiers ou les seconds consommateurs de crédit d'impôt recherche en France.
05:22 Donc c'est quand même massif en termes d'accompagnement financier et donc évidemment la contrepartie
05:28 c'est que Sanofi assure une meilleure production dans notre pays et s'engage sur les stocks.
05:37 - C'est là où on baisse le crédit, c'est ça, vous appelez le gouvernement ministère.
05:39 - C'est du don en donnant, c'est-à-dire qu'à partir du moment où l'argent public, ça
05:42 vient de la poche des Françaises et des Français, l'argent public il faut être un peu trivial
05:45 par moment et donc la santé des Françaises et des Français ça doit être la priorité
05:49 parce que cet argent-là il doit servir en priorité à ça.
05:51 - Très bien, merci Sonia de la Provoté, sénatriste centriste du Calvados, président
05:56 de cette commission sénatoriale d'enquête sur la pénurie de médicaments.
05:59 Invité France Bleu, France 3, bonne journée.
06:01 - Merci à vous.
06:02 - Écoutez bien sûr sur votre application ici.