Dr Christelle Ratignier-Carbonneil, la directrice générale de l’Agence nationale de sécurité du médicament, était mercredi 4 octobre l'invitée de la matinale de franceinfo. Elle répondait aux questions de Jérôme Chapuis.
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00:00 Antibiotiques, paracétamol, depuis le Covid il y a trois ans, la France redécouvre les ruptures de stock pour certains traitements.
00:07 L'Agence Nationale de Sécurité du Médicament prend les devants à l'approche de l'hiver.
00:11 Et sa Directrice Générale est avec nous ce matin. Bonjour Christelle Ratigny-Carboneil.
00:15 Bonjour Jérôme Chapion.
00:16 On parle avec vous de ce plan de prévention que vous dévoilez. Un mot d'abord de la situation actuelle.
00:20 Il y a des pénuries. Comment est-ce que vous qualifiez la situation ? C'est préoccupant ? C'est tendu ? C'est un risque ?
00:26 Alors sur la situation que nous gérons au quotidien pour garantir la couverture des besoins sanitaires pour les patients sur le territoire national,
00:35 on a des situations qui sont différentes. Si on se focalise sur les molécules que l'on utilise pendant les pathologies hivernales,
00:42 les médicaments contre la fièvre, le paracétamol, les antibiotiques, la moxiciline ou des corticoïdes aussi également,
00:48 ou également des médicaments contre l'asthme, on est dans une situation où les stocks sont là.
00:52 Les stocks sont là au niveau des industriels. On y reviendra j'imagine après.
00:56 Concernant le sujet de la moxiciline, on a encore des situations de disparité d'accès au niveau des officines.
01:03 Et donc notre objectif c'est de pouvoir garantir qu'il y ait un accès en tous points du territoire.
01:07 Et on s'y prend comment justement pour que tout le monde, si par exemple j'ai besoin d'antibiotiques, d'amoxiciline, trouve ce médicament dans sa pharmacie ?
01:15 Alors on ne fait rien seul évidemment à l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament que je dirige.
01:20 On le fait avec les acteurs, avec l'ensemble des acteurs, les professionnels de santé, avec les patients et les acteurs de la chaîne d'approvisionnement.
01:27 On a un système en effet en France qui est particulièrement régulé sur le médicament avec des industriels
01:32 et c'est leur première responsabilité de mettre à disposition les quantités suffisantes.
01:37 Ensuite vous avez des acteurs de la distribution, les grossisses répartiteurs qui sont sur le territoire national avec un maillage
01:44 et qui vont approvisionner en effet l'ensemble des officines.
01:47 Et ensuite vous avez les officines, les pharmacies de ville et vous avez l'hôpital.
01:50 Et l'objectif là est de s'assurer qu'en chaque point il y ait bien un accès.
01:54 C'est la raison pour laquelle nous nous demandons en effet à ce que les industriels livrent prioritairement les grossisses répartiteurs
02:01 pour qu'ensuite ils puissent approvisionner toutes les officines, qu'elles soient petites ou qu'elles soient grandes.
02:05 Ça c'est pour la logistique, votre plan il va très loin dans certaines hypothèses,
02:08 vous envisagez de limiter les importations ou de réduire les doses disponibles en pharmacie ?
02:12 Alors pas limiter les importations, les exportations.
02:17 Tout à fait, pour tous les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, qu'ils soient pour le plan hivernal ou pas,
02:23 lorsqu'on a des tensions, une déclaration de risque de tension ou de rupture,
02:28 je bloque automatiquement toutes les exportations.
02:30 Les grossisses répartiteurs n'ont plus le droit d'exporter les médicaments qui sont sur le territoire national.
02:36 C'est déjà arrivé ça ?
02:37 Oui, c'est arrivé. Dès que j'ai une déclaration de tension, je bloque systématiquement.
02:42 Ce qui permet de garantir la couverture de nos patients sur le territoire national.
02:46 Donc ça c'est une mesure qui est en effet très forte.
02:48 Ensuite, on va regarder si on peut importer des médicaments, s'il y en a d'autres en effet sur d'autres territoires.
02:54 Il y a une solidarité européenne ?
02:55 Donc oui, il y a en effet une solidarité européenne, voire même internationale.
03:00 Si jamais il y a des médicaments qui n'existent pas au niveau européen,
03:03 mais qui sont disponibles hors de nos frontières européennes, dans ces cas là on importe.
03:07 Et puis on a d'autres mesures aussi, lorsque vraiment on a des tensions importantes,
03:12 on va dans ce cas là limiter certaines indications, limiter en effet les volumes,
03:16 et puis appeler au bon usage du médicament.
03:18 Parce que c'est ça qui est indispensable.
03:20 Ça veut dire notamment qu'on va demander aux pharmaciens de faire des tests
03:24 quand il s'agit par exemple de la distribution des antibiotiques ?
03:26 Alors ce sont les mesures qui sont proposées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale,
03:30 pour s'assurer en effet de l'adéquation de l'utilisation des antibiotiques.
03:35 Un antibiotique, on le sait, ce n'est pas automatique, on se rappelle en effet du slogan,
03:40 et il doit être utilisé uniquement lorsque l'on a une infection bactérienne.
03:44 Et les tests permettent de définir si c'est une infection bactérienne ou pas.
03:48 Par exemple sur les infections ORL, dans 90% des cas c'est viral, on n'a pas besoin d'antibiotiques.
03:54 Donc dans ces cas là, évidemment, ça nous permet d'épargner dans 90% des cas l'utilisation d'un antibiotique.
04:00 Et il y a une dernière chose, on peut fabriquer maintenant, enfin on redécouvre que les pharmaciens
04:04 fabriquent leurs médicaments, on en entendait dans le journal tout à l'heure,
04:07 dans les pharmacies elles-mêmes, ça peut surprendre.
04:08 Moi je me représente toujours, peut-être à tort, le pharmacien qui fait ses mélanges dans l'arrière-boutique.
04:13 On peut s'assurer de la qualité du produit qui est délivré ?
04:15 Alors ce n'est pas tout à fait comme cela, en effet, on ne le fait pas complètement dans l'arrière-boutique,
04:20 notamment sur les mois passés pour la saison précédente, il y a eu une mobilisation
04:24 des pharmacies sous-traitantes qui sont spécialisées dans la préparation,
04:29 notamment de gelules d'amoxycyline lorsque l'on avait des pénuries sur les formes pédiatriques d'amoxycyline.
04:34 Cela est évidemment conforme aux bonnes pratiques de fabrication des préparations
04:39 qui sont édictées par l'agence avec des règles extrêmement strictes pour s'assurer
04:44 de la qualité, de l'efficacité et de la sécurité.
04:47 C'est une option qui permet d'être mobilisée lorsque l'on n'a pas assez de spécialités
04:52 avec une autorisation notamment de mise sur le marché et fabriquée par les industriels.
04:56 Donc on a une boîte à outils et avec l'ensemble des acteurs et la responsabilité de chacun,
05:01 à chaque niveau, on permet de garantir de la manière la plus adéquate possible
05:06 la couverture des besoins des patients.
05:07 On a bien compris que c'était toute une chaîne d'approvisionnement qui était concernée.
05:11 Merci beaucoup Christelle Ratigny-Carboneil, directrice générale de l'Agence nationale
05:15 de sécurité du médicament, invitée d'Actu de France Info ce matin.