La société medtech française CARMAT, pionnière en matière de technologie médicale, ouvre de nouvelles perspectives pour les patients souffrant d'insuffisance cardiaque avancée avec son cœur artificiel révolutionnaire, Aeson®. Doté d'une hémocompatibilité inégalée et d'une régulation automatisée, Aeson® offre une solution de pointe pour les patients en attente de greffe cardiaque.
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00:00 Le grand entretien avec Stéphane Piatt, qui est directeur général de CARMAT.
00:10 Bonjour Stéphane Piatt.
00:11 Bonjour.
00:12 Quelle est l'activité de CARMAT ?
00:13 Alors l'activité de CARMAT, on est dans le domaine de la santé et on essaie de résoudre
00:18 un problème qui est croissant, qui est l'insuffisance cardiaque.
00:21 Donc l'insuffisance cardiaque c'est la première cause de mort dans le monde entier
00:24 aujourd'hui et nous on s'occupe de la fin de la maladie, donc l'insuffisance cardiaque
00:28 avancée.
00:29 La pompe, le cœur ne marche plus.
00:32 Alors vous allez me dire comment ça marche, qui sont vos clients, tout me dire sur cette
00:35 entreprise qui a été créée quand, comment, quelle est son histoire ?
00:38 Alors son histoire elle est assez intéressante, c'est une histoire d'une rencontre entre
00:43 deux visionnaires, Jean-Luc Lagardère qui était fondateur de Matra, qui est devenu
00:48 ensuite Airbus et Alain Carpentier qui a révolutionné l'histoire de la chirurgie.
00:52 Et ça s'est passé dans un salon parisien, alors je ne connais pas totalement les détails
00:57 mais c'est type verre de whisky et cigare.
01:00 Alain Carpentier à l'époque était encore assez jeune et il avait déjà inventé les
01:05 valves chirurgicales, donc c'est une grande révolution.
01:07 On arrivait à changer les valves qui étaient défaillantes dans un corps humain avec des
01:11 valves avec des tissus bovins.
01:13 Et Lagardère lui a dit "mais qu'est-ce que tu veux faire, maintenant tu es très
01:17 jeune, tu as déjà fait beaucoup, what's next ?" Et là il lui a dit "ben écoute,
01:22 il y a un américain, il a une idée farfelue mais qui n'est pas très bonne, il veut
01:25 changer le cœur humain quand on est en manque de cœur et il a fait une machine mais la
01:30 machine est nulle, moi je voudrais faire une machine qui se rapproche du cœur humain".
01:33 Et à ce moment-là, Jean-Luc Lagardère lui a demandé "mais de quoi as-tu besoin ?"
01:38 Il a dit "la difficulté c'est qu'une fois qu'on ouvre le thorax, on met la
01:41 machine dedans, après on ne peut plus y toucher".
01:43 Et là-dessus, Jean-Luc Lagardère lui aurait dit "ben co, parce que moi je fais des satellites
01:48 et à l'époque les satellites on n'allait pas les réparer, une fois qu'ils étaient
01:50 lancés ils mourraient de leur mort naturelle".
01:53 Donc il a dit "moi c'est ce que je fais".
01:55 Et donc, pour revenir à la question, il y a plus de 20 ans, Jean-Luc Lagardère a donné
02:00 gratuitement plus d'une dizaine d'ingénieurs qui travaillaient sur des missiles à base
02:03 pour développer le projet.
02:04 Et en 2008, quand le projet est devenu un peu plus concret, c'est devenu une société
02:10 indépendante.
02:11 Comment êtes-vous arrivé là ?
02:12 Alors moi je travaille depuis 25 ans dans l'implant cardiaque, j'ai travaillé sur
02:18 les drug-luting stent, donc les stent qu'on met pour les occlusions d'artère et puis
02:22 il y a 10 ans je me suis occupé du développement d'un produit mitraquip pour le cœur gauche,
02:28 disons pour les valves mitrales.
02:29 Et donc ça m'a beaucoup intéressé depuis le début, puis j'ai été dans l'innovation,
02:34 j'ai toujours voulu faire l'innovation et je suis revenu de San Francisco, j'étais
02:38 chez Abbott et on m'a appelé pour voir si je voulais relever le défi, c'est vraiment
02:43 un défi avec un grand D et comme j'adore l'innovation et les défis, j'ai dit banco
02:47 et ça fait 7 ans que je suis là.
02:49 Quelle est la mission principale de Karmat aujourd'hui ?
02:51 La mission principale c'est l'innovation, donc c'est avoir raison avant les autres
02:58 et embarquer le plus de gens avec vous.
03:00 Et c'est ça la difficulté parce qu'en fin de compte c'est un peu comme Elon Musk
03:03 disait il y a 25 ans avec son roadster, toutes les voitures seront électriques, tout le
03:07 monde disait que c'était un fou, là c'est la même chose, on arrive avec une technologie
03:11 qui est disruptive et on dit que dans 20 ans beaucoup de gens seront équipés dans la
03:15 rue et on ne verra rien du tout et ça c'est difficile à comprendre.
03:18 Qu'est-ce que Eson, je ne sais pas si je l'ai bien prononcé, Eson, A-E-S-O-N ?
03:22 Oui tout à fait, alors Eson ou Eson en français, ça vient de la mythologie grecque en fin
03:27 de compte, c'est un héros de la mythologie grecque qui a perdu sa vie et qui est revenu
03:31 à la vie plus jeune qu'il n'était avant de mourir.
03:34 C'est un peu l'idée.
03:35 Et donc qu'est-ce que c'est aujourd'hui ?
03:37 Alors l'idée pour nous c'est, bon il y a 200 000 personnes qui meurent tous les
03:42 ans et il y a une croissance importante de l'épidémiologie qui meurt du défaillance
03:47 de cœur, donc d'une insuffisance cardiaque.
03:50 Et le problème c'est qu'il n'y a pas de vraie solution, c'est un problème
03:52 mécanique.
03:53 Donc soit on les aide à attendre une greffe de cœur ou soit on les aide à vie avec une
04:00 machine.
04:01 Alors aujourd'hui il faut savoir que sur 200 000 personnes qui ont besoin de transplantation,
04:04 il n'y a que 6 000 cœurs dans le monde entier.
04:06 Donc ça veut dire qu'il y a des centaines de milliers de gens qui meurent tous les
04:08 ans, donc il faut trouver une solution et nous on essaie de trouver cette solution.
04:12 Donc on a implanté une quarantaine de patients.
04:14 Et cette solution ?
04:16 Cette solution c'est remplacer le cœur, donc c'est assez invasif.
04:20 Donc on ouvre le thorax, on enlève le cœur natif et on remplace avec une machine qui
04:26 fonctionne assez similaire en fin de compte à la fonction du cœur puisqu'on fait
04:32 varier le flux en temps réel.
04:34 Et ça c'est une machine qui marche aujourd'hui ?
04:36 C'est une machine qui marche aujourd'hui.
04:38 Aujourd'hui on a trois patients qui sont vivants et depuis une heure je crois, je
04:42 n'ai pas encore eu de nouvelles, dans un hôpital français on a traité un patient
04:46 ce matin, donc ce sera le quatrième en ce moment.
04:49 Après il y en a d'autres qui ont été transplantés dans le passé.
04:50 Comment a-t-on accès à Eizen ?
04:53 On a accès malgré soi assez rapidement, c'est-à-dire qu'une fois qu'on est
04:58 arrivé en fin de course, les hôpitaux qui vous mettent sur liste d'attente et qui
05:03 ne reçoivent pas de greffons, décident de nous appeler pour dire écoutez on a une
05:08 personne qui est en détresse et qui doit recevoir une machine assez rapidement.
05:13 Donc ça doit s'organiser très rapidement, autrement le patient meurt.
05:16 Et comment vit-on avec une machine à la place du cœur ?
05:20 Alors c'est une observation parce que bien sûr quand on n'est pas confronté personnellement,
05:26 c'est compliqué.
05:27 D'ailleurs le premier réflexe des gens c'est de dire moi si j'avais eu cette
05:31 maladie j'accepterais jamais d'avoir une machine.
05:33 Le fait est que très peu de personnes ont refusé.
05:35 Quand on est dans des conditions de vie qui sont difficiles et compliquées depuis des
05:40 années, on est content de revenir à une qualité de vie normale.
05:43 Donc ce qui se passe c'est qu'on a une machine avec des batteries externes, donc
05:47 avec un câble qui sort de l'abdomen et il y a des vidéos qui ont été faites par
05:52 la BBC etc qui montrent les gens, on en connaît plein et qui étaient très contents en fin
05:56 de compte.
05:57 Aujourd'hui Jean-Luc Lagardère n'est plus là, qui finance un tel dispositif ?
06:00 Alors vous savez je ne m'attendais pas à cette question, c'est une très bonne
06:04 question puisque je pense que c'est une question d'hommes, de grands hommes.
06:09 Et comme vous le savez, ma trace est devenue dans l'histoire Airbus et tout ce qui est
06:15 héritage on l'oublie.
06:19 Donc Lagardère chez Airbus aujourd'hui ce n'est plus tellement un argument présent.
06:24 Donc Airbus nous aide quelques fois mais ils sont de moins en moins présents, ce n'est
06:29 pas leur core business.
06:30 Donc ce sont des familier office, ce sont des gens qui ont fait fortune dans d'autres
06:35 secteurs, qui ont décidé d'aider leurs prochains et la recherche.
06:39 Quel est le coût de Aizen ?
06:41 Alors le prix de vente c'est 205 000 euros, ce qui est ce qu'on dit un cost saver pour
06:48 la santé parce que les gens qui sont traités vont tout le temps à l'hôpital, donc c'est
06:51 un coût extrêmement élevé.
06:53 Qui sont vos clients alors ?
06:55 Alors c'est intéressant également parce que nos clients ce sont les hôpitaux mais
07:02 à la fin nos end users c'est les patients.
07:05 Donc les patients et ceux qui achètent le produit ce sont les hôpitaux.
07:08 Bien sûr on ne peut pas vendre un dispositif médical, en tout cas dans les pays européens,
07:12 directement à un patient.
07:13 Alors on va voir les chiffres de votre société avec Virginie Masse et on se retrouve juste
07:17 après.
07:18 La société Karmat a été créée en 2008.
07:21 Aujourd'hui l'entreprise travaille avec une équipe pluridisciplinaire de plus de
07:25 200 personnes hautement spécialisées.
07:27 100% des recherches sont effectuées en France.
07:30 Karmat a aussi une orientation résolument internationale et vise les marchés européens
07:35 et américains.
07:36 Pour preuve, Eason a déjà été implantée dans 8 pays.
07:40 Enfin, Karmat est une société cotée sur Euronext Growth depuis 2010.
07:44 Donc vous êtes cotée sur Euronext ?
07:46 Tout à fait, donc c'est la décision qui a été prise en 2010, deux ans après la
07:51 création parce qu'étant donné la difficulté pour trouver des capitaux importants au niveau
07:57 de financiers privés, donc il a été décidé d'ouvrir le capital au public.
08:01 Quelles sont les difficultés rencontrées au développement de Karmat ?
08:04 Alors les difficultés, c'est toujours la même chose dans une startup.
08:09 Une startup meurt une dizaine de fois, donc c'est la course si vous voulez au prochain
08:15 objectif.
08:16 Donc vous promettez un prochain objectif, vous levez de l'argent jusqu'au prochain
08:20 objectif et vous relevez de l'argent.
08:21 Donc c'est un peu la difficulté parce que vous devez la financer jusqu'au moment
08:25 où vous faites des profits et ça peut durer longtemps.
08:27 Et Eason aujourd'hui est vendu en France et à l'extérieur, à l'étranger ou pas ?
08:33 Alors c'est vendu dans les pays de la communauté européenne.
08:35 En France, ce sont des systèmes différents d'accès au marché, donc aujourd'hui
08:40 on est en train de mener une étude qui s'appelle Efficace, qui est financée en partie et donc
08:45 on est vendu dans tous les pays d'Europe plus la France à travers l'étude.
08:49 Comment accompagnez-vous ce qu'on peut appeler vos clients ?
08:51 Alors on les accompagne vraiment par la main de A à Z, dans le sens où, bon bien sûr
08:57 on fait un training classique sur des animaux etc.
09:01 Mais plus que ça, il faut qu'on les accompagne de la sélection du patient jusqu'au rétablissement
09:07 du patient.
09:08 Malheureusement, la science cardiaque, pour des raisons qui sont difficiles à comprendre,
09:12 c'est une maladie qui est en forte croissance, mais le parcours du patient n'est pas encore
09:15 bien établi et les sociétés doivent jouer un rôle important.
09:19 Ce ne sera pas nous bien sûr, parce qu'on est très petit, on compte plutôt sur les
09:23 plus gros acteurs, mais c'est clair que l'industrie, une fois encore, aura un grand rôle à jouer
09:28 pour justement établir un parcours patient.
09:31 Quelles sont en dernière question les évolutions à venir pour la société ?
09:34 Alors l'évolution à venir pour une start-up, c'est toujours durer dans le temps et avoir
09:38 le temps nécessaire pour démontrer que la vision était réelle.
09:42 Merci beaucoup.
09:43 Merci à vous.
09:44 [Musique]
09:46 Bismarck