Lina , une adolescente de 15 ans, a disparu samedi dernier dans un village dans le Bas-Rhin. Elle se rendait chez son petit-ami à Strasbourg lorsqu'elle a disparu. Depuis 9 jours, les recherches se poursuivent. Une information judiciaire a été ouverte pour enlèvement ou séquestration de plus de 7 jours.
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00:03 -Avec nous pour en parler, le général François Daoust,
00:06 ancien directeur de l'IRCGN et du pôle judiciaire
00:09 de la gendarmerie. Vous êtes professeur
00:11 de sciences criminelles à l'université de Cergy-Paris.
00:14 Merci d'être avec nous, ce matin,
00:16 aux côtés de Vincent Wantigem, du service police-justice de BFM TV.
00:20 Les gendarmes ont continué, ce week-end,
00:22 de refermer des portes, comme on dit,
00:25 avec notamment le témoignage d'un homme
00:27 qui affirme avoir vu Lina monter dans une voiture
00:30 le matin de sa disparition.
00:32 Écoutez d'abord son témoignage.
00:34 -Je l'ai vue passer, là, dans une voiture bleue.
00:38 Elle était habillée en clair, qu'elle a fait recours en passant,
00:42 mais elle avait l'air normale.
00:43 Elle avait pas l'air d'être sueuse ou quoi que ce soit.
00:47 Elle n'a pas fait d'appels ni quoi que ce soit.
00:50 -Ce sont des témoignages, parmi d'autres,
00:52 que les gendarmes vont devoir éplucher.
00:54 Vous êtes en direct de Plaine.
00:56 Dans le village de Plaine, dans la commune de Plaine,
00:59 un climat général de suspicion n'est pas en train de s'emparer,
01:03 puisqu'on est maintenant à une dizaine de jours
01:05 de la disparition de la petite Lina, et toujours rien.
01:10 -Oui. Déjà, pour contextualiser,
01:14 la ville de Plaine, c'est un millier d'habitants à peine.
01:17 C'est plusieurs petits hameaux, comme celui de Dispar,
01:20 qui compte à peine quelques dizaines de maisons.
01:23 Et forcément, lorsqu'on voit débarquer
01:25 une dizaine de voitures de gendarmerie hier
01:27 et tout autant de caméras, ça bouleverse le quotidien.
01:30 Une maison a été expertisée ici, juste derrière,
01:33 pendant près de trois jours.
01:35 Et lorsqu'on a échangé avec les habitants, les voisins,
01:38 il n'y a pas vraiment beaucoup de monde
01:40 qui a émis des suspicions sur le propriétaire de cette maison.
01:43 Tout le monde se connaît.
01:45 Ca a un peu surpris les habitants de savoir
01:47 que l'enquête pouvait avoir lieu ici.
01:49 On est à peine 3 km du lieu de la disparition de Lina.
01:53 Pas vraiment de suspicions, à proprement parler,
01:55 mais forcément une ambiance qui a changé en 10 jours
01:58 et une grande solidarité, malgré tout, dans la vallée.
02:01 Ca, on l'a vu il y a une semaine, avec les battues citoyennes,
02:04 plus de 500 personnes qui y ont participé.
02:06 On commence à trouver le temps long, forcément,
02:09 parce qu'il y a eu plusieurs pistes.
02:11 Il y a eu les étangs qui ont été fouillés,
02:13 la piste de la Clio bleue-grise,
02:15 avec 10 voitures expertisées dans le secteur.
02:17 Cette maison, encore ce week-end,
02:19 et à chaque fois, rien de probant n'a été remarqué
02:22 par les enquêteurs.
02:23 Ici, on se pose de plus en plus de questions
02:26 et on attend les premiers résultats probants de cette enquête.
02:29 -Merci, Antoine Forestier, avec Médric Soltani.
02:32 Vincent, on va essayer de comprendre
02:34 en quoi l'évolution de la procédure peut faire bouger l'enquête.
02:38 On est passé, ce week-end, à une information judiciaire
02:41 pour enlèvement ou séquestration de plus de 7 jours.
02:44 Ca change quoi ?
02:45 -On change de cadre et surtout, on change de magistrat.
02:48 Jusqu'à présent, c'était la procureure de la République
02:51 qui dirigeait l'enquête, ce qu'on appelle "diriger l'enquête".
02:54 Désormais, c'est deux juges d'instruction
02:57 du pôle criminel du tribunal de Strasbourg
02:59 qui vont diriger cette enquête et les enquêteurs,
03:02 parce qu'ils sont plus habitués à cette procédure
03:05 et qu'ils auront plus de temps.
03:07 C'est le 2e changement.
03:08 On a basculé d'une enquête de flagrance,
03:11 qui dure 7 jours, à un temps plus long des investigations
03:14 pour déterminer ce qui s'est passé.
03:16 -De quels outils supplémentaires disposent-ils ?
03:19 -Les magistrats ont des pouvoirs d'enquête élargis.
03:22 Ils vont pouvoir faire plus de choses,
03:24 notamment des perquisitions,
03:26 mais aussi de placer quelqu'un en garde à vue.
03:29 On était sur une enquête pour disparition inquiétante.
03:32 On passe sur une enquête criminelle
03:34 pour enlèvement et séquestration,
03:36 avec des pouvoirs d'enquête élargis,
03:38 d'investigation, notamment sur les écoutes,
03:41 pour pouvoir avancer plus rapidement.
03:43 -Est-ce que les magistrats, à l'heure où l'on parle,
03:46 vont découvrir le dossier ?
03:48 Est-ce que l'enquête va un peu temporiser ?
03:51 -Il va y avoir le temps de prendre connaissance
03:54 de toutes les investigations menées.
03:56 Il y en a beaucoup, mais ils ne partent pas de zéro.
03:59 Avec toujours ces 3 hypothèses.
04:01 On le rappelle, depuis le départ,
04:03 l'Ina a eu un accident.
04:05 Est-ce qu'elle est tombée ? A-t-elle fait un malaise ?
04:08 Il y a eu les battues citoyennes.
04:10 On l'aurait retrouvée.
04:11 Il y a toujours la thèse de la disparition volontaire,
04:14 mais on peut se douter qu'avec le batage médiatique,
04:17 on a un cas à sa mère.
04:18 Ces 2 hypothèses se rétrécissent, se rapetissent,
04:21 que l'hypothèse criminelle prend plus d'épaisseur
04:24 et nécessite l'ouverture de cette information judiciaire.
04:27 -L'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie
04:30 est intervenu ce week-end, général Daoust,
04:33 dans une maison et une voiture.
04:35 Pour ce qui est de la fouille de la maison,
04:37 comment procèdent les gendarmes de l'IRCGN
04:40 quand ils arrivent dans une maison
04:42 comme celle qu'ils ont fouillée ce week-end ?
04:44 -Il faut savoir que ce sont des experts,
04:48 ce sont des spécialistes,
04:49 inscrits en cours d'appel, voire cours de cassation,
04:52 avec des bagages scientifiques de très haut niveau,
04:56 jusqu'au doctorat.
04:58 Quand ils arrivent, ils ne sont pas isolés.
05:01 Il y a avec eux les techniciens en identification criminelle
05:04 qui étaient déjà sur place.
05:06 C'est avec méthodologie.
05:07 C'est-à-dire qu'on ne rentre pas et on ne fouille pas
05:10 toute Azimuth, une maison comme ça.
05:12 Pour donner un exemple,
05:14 lors de l'affaire réflective Le Grand Bornand,
05:16 un chalet, une famille qui disparaît,
05:18 quand nous sommes descendus, nous sommes restés une semaine
05:22 à faire l'ensemble des trois niveaux pour travailler.
05:26 Là, ça a duré longtemps.
05:28 Des prélèvements sont faits en vue de recherche d'ADN,
05:33 en vue de recherche de traces de sang, de fibres,
05:37 de tout ce qui peut ramener
05:40 vers la présence de la jeune disparue.
05:43 -Dans ce cadre, quels sont les outils dont vous disposez ?
05:47 Par exemple, pour le sang, on a l'impression,
05:49 on dit souvent que c'est le Bluestar.
05:51 Ca fonctionne comment ?
05:53 -Le Bluestar, c'est une pulvérisation
05:55 d'un produit chimique qui va réagir
05:57 avec les ions métalliques qui sont présents dans le sang.
06:01 Même si cela a été nettoyé par un éclairage UV,
06:05 on voit une luminescence.
06:07 La luminescence dit qu'il y a eu du sang.
06:10 Derrière, il faut quand même attendre l'analyse de laboratoire
06:14 parce que, est-ce que c'est du sang animal ou du sang humain ?
06:18 Ici, c'est du sang humain.
06:19 Est-ce que c'est celui de la disparue
06:22 ou celui de quelqu'un d'autre,
06:23 qui appartient à la maison, qui se serait blessé ultérieurement ?
06:28 -Général, vous faites des prélèvements.
06:30 Comment on cherche un cheveu ?
06:33 Comment on cherche un poil ?
06:36 Comment procédez-vous ?
06:38 -C'est pas à pas.
06:40 C'est pour ça que c'est très long.
06:42 Vous avez une pièce isolée
06:46 qui va être traitée la première
06:48 et qui va servir de PC, en quelque sorte.
06:52 A partir de celle-là, on va faire pièce après pièce
06:55 et on va observer minutieusement chaque pièce,
07:01 chaque latte du parquet, entre les lattes du parquet,
07:04 les murs, les lits, les caves,
07:08 tout ce qu'il y a pour voir l'infiniment petit.
07:11 On a à la fois des lampes à multi-ondes,
07:16 ce qui permet de travailler sur différents éclairages
07:19 qui peuvent mettre en évidence
07:21 certaines choses que l'on ne verrait pas à l'œil nu.
07:24 Vous avez des éclairages puissants, rasants,
07:26 qui vont permettre aussi la vision,
07:29 vous parlez de fibres ou autres.
07:31 Là, on les verra beaucoup mieux en éclairage rasant
07:34 qu'en éclairage direct, etc.
07:36 Donc on voit bien que là,
07:38 ce sont des techniques, des protocoles scientifiques
07:41 qui permettent d'aller recueillir l'infiniment petit,
07:45 mais c'est très long.
07:47 -On comprend que ça puisse prendre du temps.
07:49 Merci infiniment à tous les deux.