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Septembre 1944, le maréchal britannique Montgomery propose un plan audacieux afin de franchir le Rhin et encercler la Ruhr. L'opération Market Garden est lancée. Pendant que des milliers de parachutistes alliés s'emparent des principaux ponts, les chars d'assaut britanniques empruntent une route de 100 kilomètres pour les rejoindre. Mais, très vite, d'importantes failles viennent gripper le plan.

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00:00 1944, la seconde guerre mondiale déchire la planète.
00:07 Les bombes volaient de tous côtés.
00:11 Les alliés se livrent à une guerre sans merci pour libérer l'Europe, occupée par les nazis.
00:17 C'est une guerre au cours de laquelle les deux camps vont jouer une véritable partie d'échec.
00:22 Depuis les plages de Normandie...
00:24 L'eau de la mer était couleur rouge sang.
00:27 Aux forêts allemandes...
00:30 Des milliers de cadavres gisaient devant moi.
00:33 Chaque camp déploiera des armements de plus en plus puissants et sophistiqués.
00:39 Ces tanks donneront un avantage de taille aux américains. C'est une arme très efficace.
00:45 Voici l'histoire de l'ultime campagne des alliés, comptée par les hommes qui l'ont directement vécue.
00:52 On tirait, et ensuite on manœuvrait.
00:58 Il était comme un frère pour moi.
01:01 Septembre 1944.
01:11 Les alliés se rapprochent du cœur de l'Allemagne.
01:15 Mais devant eux se dressent les formidables défenses de la ligne Siegfried.
01:20 Les alliés imaginent donc un plan audacieux afin de contourner les défenses allemandes...
01:25 Et traverser le Rhin d'un seul trait.
01:28 Avec à leur côté, le plus grand déploiement aérien jamais vu dans l'histoire.
01:33 Dès qu'on a vu tous ces avions au-dessus de nos têtes...
01:37 On a compris l'ampleur de l'opération Market Garden.
01:40 Chez les alliés, les soldats d'élite sont en première ligne.
01:43 Et ils réalisent très vite que ce plan comporte des failles.
01:47 C'était un vrai désastre, du début jusqu'à la fin.
01:50 Et qu'il n'est jamais très sage de sous-estimer l'armée allemande.
01:54 On était en pleine guerre, et on savait ce que ça impliquait.
01:58 Il y avait énormément d'Allemands aux Pays-Bas,
02:02 et je peux vous assurer qu'on les a tous trouvés.
02:06 Voici comment l'opération Market Garden s'est déroulée.
02:15 Juin 1944, les alliés débarquent en Normandie.
02:19 Après des semaines d'affrontements acharnés,
02:21 ils parviennent à faire battre en retraite l'armée allemande.
02:25 Pour les Allemands, les pertes sont énormes.
02:30 400 000 soldats sont tués, blessés ou capturés.
02:34 Des milliers d'armes lourdes et de véhicules sont détruits.
02:38 En septembre 1944, l'Allemagne est en train de reconstruire ses forces armées.
02:44 Elle se prépare à la bataille finale pour défendre l'Allemagne elle-même.
02:48 Mais au même moment, les alliés rencontrent des problèmes qu'ils n'avaient pas anticipés.
02:54 En septembre 1944, les alliés souffraient d'un manque d'approvisionnement,
03:02 puisque le matériel devait être acheminé depuis les plages de Normandie.
03:07 Les Allemands le savaient, et ils savaient aussi que les alliés avançaient lentement
03:11 à cause du manque de matériel.
03:14 Pour résoudre la situation de crise, les alliés ont besoin d'un port donnant sur la Manche.
03:20 Mais la plupart de ces ports, comme celui de Cherbourg, sont encore aux mains des Allemands.
03:25 Les autres ont été détruits par les soldats du Reich avant leur retraite.
03:30 Les lignes d'approvisionnement des alliés s'étendent sur près de 480 kilomètres,
03:36 et il n'est plus possible de livrer suffisamment de carburant et de munitions
03:41 pour maintenir la cadence de progression.
03:44 Le Field Marshal Bernard Montgomery a donc élaboré un plan audacieux.
03:48 Un plan qui permettra aux alliés de régler la crise de l'approvisionnement
03:53 et de mettre fin à la guerre avant la fin de l'année 1944.
03:57 Bernard Montgomery, surnommé "Monty" par ses hommes,
04:01 a été à la tête de toutes les forces armées terrestres lors du débarquement en Normandie.
04:05 Mais désormais, les troupes américaines surpassent en nombre les troupes anglaises et canadiennes.
04:09 D'un point de vue politique, il n'est plus acceptable que cette armée demeure sous commandement anglais.
04:14 C'est pourquoi Churchill décide de promouvoir Monty au rang de Field Marshal,
04:18 le rang le plus élevé de l'armée anglaise.
04:20 Mais en réalité, il ne peut commander que le 21e groupe d'armée,
04:24 composé majoritairement d'Anglais et de Canadiens.
04:27 Les rapports des services d'espionnage des alliés montrent que le flanc allemand nord,
04:32 qui fait face au 21e groupe d'armée, n'est que faiblement protégé.
04:36 Monty propose donc de traverser la Belgique pour atteindre les Pays-Bas et attaquer par le nord.
04:42 Cela lui permettra ainsi de contourner les défenses allemandes les plus solides,
04:46 d'encercler le cœur industriel allemand dans la vallée de la Roure,
04:49 et d'ouvrir la voie vers Berlin.
04:51 Il bâtisse son plan "Opération Market Garden".
04:55 Il lui reste à le faire accepter par le commandant des forces alliées,
05:00 le général Dwight Eisenhower, qui a déjà son propre plan.
05:03 Pour des raisons politiques, et pour des raisons d'alliance,
05:09 Eisenhower souhaitait maintenir une progression plus ou moins uniforme.
05:13 Et ce, même sur le front.
05:15 C'est ce que l'on appelle une progression générale.
05:19 Dans ce type de progression, tout le monde partage les mêmes risques,
05:23 et les mêmes réussites.
05:24 C'était vraiment le style d'Eisenhower.
05:27 Mais il n'y avait tout simplement pas assez de ressources pour mettre ce plan à exécution.
05:31 Montgomery, lui, souhaitait détourner les ressources vers l'étroite ligne de front d'attaque du nord.
05:37 Il pensait que cela lui permettrait d'atteindre assez rapidement la Roure,
05:41 et de gagner la guerre.
05:43 Mais si Monty obtient des ressources supplémentaires pour l'Opération Market Garden,
05:51 cela veut dire que quelqu'un d'autre en aura moins.
05:54 Le jeu politique qui s'est déroulé pour mettre en place l'Opération Market Garden est fascinant.
05:59 Montgomery a inlassablement fait pression sur Eisenhower
06:02 pour que cette opération puisse être menée à bien.
06:05 Montgomery savait que toutes les ressources qui lui seraient données
06:08 seraient soustraites aux Américains, notamment au général Patton, plus au sud.
06:12 Et Montgomery a donc fait pression sur Eisenhower
06:15 jusqu'à ce qu'il l'autorise à mettre en œuvre son opération aérienne.
06:18 Montgomery reçoit tout le matériel nécessaire,
06:22 et se voit confier le commandement de la première armée aéroportée alliée,
06:26 une force d'élite constituée de 40 000 soldats britanniques, américains et polonais,
06:31 prête à être déployée derrière les lignes ennemies en parachute et en planeur.
06:36 Montgomery fait de ses troupes la pierre angulaire d'un plan audacieux et ambitieux
06:42 qui exigètent une précision extrême.
06:44 Le 30e corps d'armée britannique doit parcourir 100 km,
06:50 le long d'une ligne s'étendant de la frontière belge à la ville néerlandaise d'Arnhem.
06:55 Cependant, cette route traverse plusieurs rivières et canaux,
06:59 et notamment le Rhin inférieur.
07:01 Les trois divisions aéroportées alliées devront donc s'emparer des ponts principaux,
07:07 dont deux sur le Rhin inférieur, à Nijmegen et Arnhem,
07:10 avant que les Allemands ne puissent les détruire ou organiser leur défense.
07:16 Or, ces ponts sont bien défendus par des canons anti-aériens
07:19 destinés à abattre les bombardiers alliés.
07:22 Par conséquent, les troupes aéroportées doivent atterrir à plusieurs kilomètres de leur objectif
07:27 et s'y rendre à pied.
07:29 L'assaut aérien a pour nom de code Marquette, et l'attaque au sol Gardenne.
07:33 Le 30e corps du lieutenant général Orocks est le fer de lance de la division blindée des gardes,
07:39 composée de 268 chars, principalement des Sherman.
07:43 D'après le plan, ils doivent être soutenus par la 43e division d'infanterie Wessex,
07:48 la 50e division d'infanterie, et les chars de la 8e brigade blindée, et les Royal Engineers.
07:54 Les troupes aéroportées sont sous le commandement du 1er corps de force aéroportée britannique,
07:59 du général Browning.
08:01 Ce corps est composé de la 1ère division aéroportée britannique,
08:05 de la brigade de parachutistes polonaise,
08:07 et des 82e et 101e divisions américaines rattachées à l'opération.
08:12 La Royal Air Force et l'armée de l'air américaine fourniront 1500 avions et 500 planeurs.
08:18 Le général de corps d'armée Frederick Browning,
08:24 qui est aux commandes des troupes aériennes alliées, est un officier émérite et largement gradé.
08:29 En outre, il est l'époux de la célèbre romancière Daphné Dumouriez.
08:33 Il partage le commandement de l'armée de l'air alliée avec le général américain Bray-Rayton.
08:38 Leurs relations sont assez tendues, apparemment il est difficile de travailler avec Browning.
08:44 Juste avant la mise à exécution de l'opération,
08:47 des rapports fraîchement écrits indiquent que des unités de blindés allemandes ont été observées près d'Arnhem.
08:53 Un officier des services de renseignement britanniques amène donc les rapports à Browning.
08:58 L'officier des services de renseignement se nommait Brian Urquhart.
09:04 C'est lui qui nous a prévenu que deux divisions SS Panzer étaient en train de former une ligne d'Arnhem jusqu'à Zutphen.
09:12 Il nous a dit qu'il avait prévenu le général Browning
09:20 et que son plan serait voué à l'échec s'il ne prenait pas en compte la présence de ces deux divisions.
09:33 Browning lui avait ordonné de ne rien nous dire.
09:37 Car il ne pensait pas que les chars étaient opérationnels après l'affrontement en Normandie.
09:48 Si des Panzer allemands se trouvaient bel et bien présents près d'Arnhem,
09:53 alors l'opération toute entière devait être annulée.
09:56 Mais Browning ainsi que d'autres gradés d'élite de l'armée de l'air
10:01 étaient fermement décidés à mettre le plan à exécution.
10:04 Les Pays-Bas étaient tombés sous la coupe de l'Allemagne à la suite du Blitzkrieg de mai 1940.
10:10 Mais le pays n'avait pas vraiment été touché par cette guerre mondiale.
10:13 On était comme en temps de paix.
10:17 Aux Pays-Bas, tout semblait aller bien.
10:20 Bon nombre d'arbres poussaient sur le côté de route intact et dénués de toute trace de guerre.
10:29 On pouvait facilement se déplacer en journée.
10:31 Nous étions protégés de potentielles attaques aériennes.
10:36 Ou du moins, c'est ce qu'il nous semblait.
10:39 On ne nous trouvait pas facilement.
10:41 Mais la nuit du 16 septembre, les bombardiers américains et britanniques
10:46 frappent les terrains d'aviation et les unités anti-aériennes déployées aux Pays-Bas.
10:54 Le lendemain, à 9h45, des milliers d'avions décollent de leur base en Angleterre
10:59 et prennent la direction des zones de largage.
11:01 Cette vaste armada forme deux colonnes qui s'étendent sur près de 5 km de large et 150 km de long.
11:20 Pour vous donner une idée, pendant que les soldats étaient parachutés aux Pays-Bas,
11:24 des avions continuaient de décoller en Angleterre.
11:27 On aurait pu sauter d'avion en avion à travers la Manche et se rendre aux Pays-Bas.
11:33 Johnny Peters se trouve dans l'un des planeurs anglais.
11:40 De là-haut, il voit tout ce qui se passe sur le terrain.
11:45 "Ville au moment où on survolait la mer du Nord, nous avons pu voir des bateaux alliés en mer.
11:50 On était donc rassurés de voir que ces bateaux pouvaient nous secourir au cas où nous tomberions dans la mer."
11:57 "C'était un vol magnifique. Le soleil rayonnait et un énorme convoi d'avions de 5 km de large occupait le ciel.
12:08 C'était une vue extraordinaire, tout simplement sublime."
12:13 L'un des plus gros planeurs à prendre part à l'opération Market Garden n'est autre que le Airspeed Orsa.
12:18 Il s'agit d'une construction anglaise composée majoritairement de sections de bois d'épicéa et de contreplaqué assemblés par des menuisiers.
12:27 Le Orsa peut contenir 2 pilotes et 25 troupes ou chargements, ou des petits chargements comme des jeeps ou des armes anti-chars.
12:42 Les planeurs alliés sont tractés jusqu'à la zone d'atterrissage par des avions transporteurs,
12:48 puis ils sont ensuite relâchés pour glisser silencieusement vers leur cible.
12:53 Même s'il n'est pas garanti qu'ils atterrissent aussi silencieusement, les planeurs sont parfaits pour parachuter des unités avec précision, ce qui n'est pas possible avec les avions.
13:08 Lorsque la première vague de l'opération Market Garden atteint les Pays-Bas,
13:12 les soldats découvrent que la majorité des armes anti-aériennes allemandes ont survécu au raid des bombardiers alliés de la veille.
13:19 "Les forces anti-aériennes nous tiraient dessus, puis de l'arrière du planeur, on a entendu quelqu'un crier "on est en train de perdre la queue".
13:30 L'information a été passée à l'avant, j'étais assis derrière les pilotes, et le sergent se trouvait en face de moi.
13:38 C'est lui qui a relayé l'information au pilote.
13:42 Il a ordonné à Ralph Maltby d'aller voir.
13:45 Quand il est revenu, il a arboré un large sourire et nous a dit "tout va bien, c'est le tissu qui a été endommagé, la queue ne se détache pas".
13:54 Puis il s'est rassi, d'un coup on a tous été rassurés."
13:59 Il s'en est fallu de peu.
14:01 Mais alors que le planeur de Johnny Peters approche de sa zone d'atterrissage, les feux ennemis redoublent d'intensité et le copilote est touché.
14:09 "Rien qu'en regardant le sergent Watson, je savais qu'il était mort.
14:15 Je me suis demandé ce qu'il se passerait si le pilote se faisait tuer lui aussi.
14:22 Aucun de nous ne savait piloter. Les allemands ont continué à tirer, et une balle, une seule, a touché un soldat à la jambe.
14:30 Il s'appelait Hugues. Malgré cela on a bien atterri."
14:35 Dans la plupart des zones d'atterrissage, il n'y a que peu de défense antiaérienne et l'attaque prend les allemands au dépourvu.
14:43 La majorité des planeurs atterrissent sans incident dans de grands champs.
14:50 Les parachutés quant à eux arrivent précisément aux endroits prévus.
14:54 Sur les 1000 avions de transport utilisés ce jour, seuls 27 ont été détruits.
14:59 "Nous ne nous sommes pas fait tirer dessus.
15:06 C'était une belle journée.
15:08 C'était un dimanche après-midi aux alentours de 13 heures.
15:12 Le soleil brillait, et pour moi, c'était une opération parfaite."
15:20 La première division du corps aéroporté atterrit à une dizaine de kilomètres au nord d'Arnhem, ce qui n'était pas gagné d'avance.
15:30 "Ca a été une journée parfaite. On a pu atterrir sans problème."
15:39 La 82e division américaine du corps aéroporté, qui s'est posée près de Nijmegen, est immédiatement accueillie par des néerlandais.
15:46 "Des civils néerlandais sont venus à notre rencontre.
15:50 Comme ils parlaient tous un anglais parfait, j'ai demandé à mon ami,
15:53 « On est encore en Angleterre ? »
15:55 Il voulait nous dire où se trouvaient les allemands,
15:57 et nous, on voulait qu'ils sortent de la zone d'atterrissage pour ne pas qu'ils se fassent blesser."
16:05 Au même moment, la 101e division américaine du corps aéroporté atterrit un peu plus au sud,
16:10 près d'Eindhoven, où le sous-lieutenant Frank Craig reçoit un accueil beaucoup moins chaleureux.
16:15 "Nous avons atterri pile dans la zone de parachutage,
16:20 qui était remplie de vaches Holstein, des vaches à lait.
16:26 Bien entendu, quand elles ont vu tous ces parachutes, elles ont paniqué.
16:34 Et je me souviens m'être dit,
16:36 « J'ai vraiment pas envie d'écrire à ma famille depuis l'hôpital,
16:40 à cause d'une blessure causée par une vache.
16:43 Ou encore pire, mourir empalée par une vache.
16:47 Elles couraient vraiment partout dans le champ."
16:50 Les troupes aéroportées américaines prennent rapidement le contrôle de la route entre Eindhoven et Nijmegen.
16:58 À ce moment-là, ça fait 4 ans que les Pays-Bas sont sous occupation nazie,
17:03 et l'arrivée des forces alliées est une grande joie pour les citoyens néerlandais.
17:07 Et ce, surtout pour les membres d'un des meilleurs groupes de résistance d'Europe.
17:12 "J'ai rassemblé toutes mes troupes en direction du pont.
17:17 Et dès le premier pied posé sur le pont,
17:21 un Néerlandais et une très jolie Néerlandaise sont apparues de l'autre extrémité du pont.
17:28 Ils portaient les mêmes manteaux de cuir noir que les Allemands.
17:33 Et ils avaient tous deux une mitraillette.
17:35 Je me suis dit, pas sûr que ces deux-là soient très amicaux.
17:42 Puis quand la femme est arrivée à mon niveau,
17:47 elle m'a dit,
17:49 "Nous faisons partie de la résistance néerlandaise, et nous sommes présents pour vous aider."
17:54 Je l'ai remercié.
17:58 Et elle m'a confirmé qu'il n'y avait pas d'ennemis dans la ville.
18:02 Il n'y avait plus d'Allemands.
18:05 La partie aérienne de l'opération a bien débuté.
18:10 La plupart des troupes ont atterri dans la zone d'atterrissage prévue ou tout proche.
18:14 Il est maintenant vital de sécuriser les ponts présents sur le trajet du 13e corps vers le Rhin.
18:20 Toutefois, tout ne se passe pas comme prévu pour les alliés.
18:25 Une Jeep qui traverse le pont d'Arnhem et transporte à son bord des parachutistes à vive allure,
18:29 finit sa course contre un barrage routier allemand.
18:32 La plupart des soldats sont tués ou capturés.
18:35 Les paras doivent donc traverser le pont à pied, ce qui n'est pas de tout repos.
18:39 L'une des premières erreurs que Browning a commises,
18:43 c'est de nous faire déposer à 10 km du pont.
18:47 On transportait à peu près 40 kg de matériel et d'armes.
18:54 On ne pouvait courir. Et on a donc marché pendant 4 heures.
18:57 Ailleurs, d'autres problèmes voient aussi le jour.
19:03 Au nord d'Eindhoven, des ingénieurs allemands aidés de recrues de la Luftwaffe
19:08 ont fait sauter différents ponts sur le canal Wilhelmin,
19:11 avant que les parachutistes américains ne les atteignent.
19:14 45 km au nord-est de Nijmegen,
19:17 d'autres ponts traversant le canal Masval ont eux aussi été détruits,
19:22 pour que la 82ème division aéroportée ne puisse les traverser.
19:25 A Arnhem, et bien que le commandant Urquhart ait essayé de les prévenir,
19:30 la 1ère division aéroportée britannique est, elle, confrontée à des blindés Panzer.
19:35 Heureusement, les chars n'opèrent pas à pleine puissance.
19:38 En ce qui concerne l'opération Market Garden,
19:41 il existe cette légende selon laquelle la 1ère division aéroportée britannique,
19:46 qui a été parachutée à Arnhem, a atterri sur deux divisions SS armées.
19:51 Deux divisions SS Panzer, pour être plus précis.
19:54 Cette légende n'est pas erronée,
19:56 dans le sens où la 9ème et la 10ème divisions SS Panzer se trouvaient aux alentours.
20:01 Mais les chars avaient subi de tels dommages lors du débarquement de Normandie,
20:04 que les allemands les considéraient comme des Kampfgruppen,
20:07 c'est-à-dire des petites divisions composées de peu de chars.
20:10 Mais même avec les allemands affaiblis,
20:12 les alliés prenaient de grands risques qui ne paraissaient sensés
20:15 que si les allemands ne se battaient pas.
20:17 Or ils se sont battus.
20:20 Sauf que ce n'est pas là la 1ère surprise pour la 1ère division aéroportée.
20:24 En effet, ils ont atterri tout près du quartier général du groupe B de l'armée allemande,
20:29 dans lequel le Feldmarschall Model est en train de préparer une contre-attaque.
20:33 Walter Model est sans doute le meilleur stratège de la Wehrmacht.
20:36 Depuis ses succès sur le front Est,
20:38 Hitler et d'autres généraux haut placés le tiennent en grande estime.
20:42 On le surnomme alors le "Pompier du Führer"
20:44 pour sa capacité à gérer les situations les plus désastreuses,
20:48 et ce, même en situation d'infériorité numérique.
20:51 De nombreux témoignages racontent à quel point c'était un soldat engagé et motivé.
20:56 D'un certain côté, il était très sévère et dur envers ses propres troupes,
20:59 car il voulait atteindre des objectifs,
21:01 mais d'un autre côté, il était tout aussi impitoyable envers lui-même,
21:04 et c'est pour cela que le peuple l'admirait et le respectait.
21:07 Alors que les allemands préparent une contre-attaque au parachutage,
21:11 ils reçoivent du ciel un cadeau inespéré.
21:13 Dans la carcasse d'un planeur qui s'est craché,
21:17 les soldats allemands trouvent un ensemble d'ordres de bataille complets
21:20 en lien avec l'opération Market Garden.
21:22 Prenant connaissance de ce document,
21:25 Model se dit qu'il lui suffit de contenir les alliés à Nîmes
21:28 pour isoler les parachutistes britanniques à Arnhem.
21:31 Ce sera alors l'échec de l'opération Market Garden.
21:33 Il divise alors le corps SS Panzer en deux multiples Kampfgruppen, ou groupes de combat.
21:38 Le Kampfgruppe O-Henschtaufen est censé protéger Arnhem et son pont des britanniques,
21:44 le Kampfgruppe Frundsberg doit se rendre au sud en toute hâte,
21:46 en traversant le pont d'Arnhem pour faire en sorte que les alliés ne puissent atteindre Nîmes.
21:51 Le concept de groupe de combat, aussi appelé Kampfgruppe en allemand,
21:55 est un concept très particulier qui ne se trouve que dans l'armée allemande de la Seconde Guerre Mondiale.
22:01 En fait, l'idée c'est que peu importe l'adversaire,
22:03 il est possible de créer une formation ponctuelle en utilisant des formations existantes,
22:08 qui sont le plus souvent des formations affaiblies ou composées de beaucoup de soldats blessés.
22:13 Cela permet de créer un nouveau corps de combat.
22:15 Ces Kampfgruppes improvisés permettent aux allemands de tirer parti de leur puissance militaire amenuisée,
22:20 et de répondre avec rapidité aux nouvelles menaces.
22:23 On nous a demandé de nous rendre là-bas, et de nous dépêcher.
22:29 Il fallait détruire tout ce qui se mettait en travers de notre chemin,
22:33 et créer une formation avec les autres troupes.
22:39 Cette réponse allemande signifie que les troupes aéroportées alliées vont bientôt s'engager dans un âpre combat.
22:44 L'attaque terrestre alliée est lancée à 14h35.
22:48 Des chars du 13ème Corps britannique traversent la frontière néerlando-belge,
22:53 en suivant la route les menant à Arnhem.
22:55 Ils se doivent d'ailleurs de respecter les horaires,
22:58 et arriver à Eindhoven en fin de journée.
23:01 Malheureusement, la seule route qui mène à Eindhoven est découverte,
23:05 ce qui les rend vulnérables.
23:08 Au bout de deux minutes de marche, ils tombent dans une embuscade allemande, et perdent quelques chars.
23:11 On remontait la route, et on se faisait tirer dessus, sur les flancs.
23:15 Je ne sais pas si vous connaissez les paysages hollandais,
23:18 mais il y a énormément de routes de campagne, et on ne pouvait s'abriter nulle part.
23:22 Les chars ne pouvaient pas quitter la route,
23:24 ils auraient coulé, puisque les Pays-Bas sont construits sur l'eau.
23:27 La plupart du temps, on traversait des fossés.
23:30 Il faisait sombre et humide, ce qui n'était pas vraiment agréable, disons-le.
23:36 Grâce au soutien aérien des bombardiers Typhoon,
23:39 les chars anglais réussissent à avancer, et à traverser ce qu'on a appelé par la suite,
23:44 l'autoroute de l'enfer.
23:46 Le 13e corps, quant à lui, ne réussit à avancer que de 8 km le premier jour,
23:51 et n'atteint donc pas Eindhoven, qui reste aux mains des allemands.
23:55 Seulement 24 heures après son lancement, l'opération Market Garden accuse déjà de gros retards.
24:04 Les unités aéroportées alliées sont maintenant en pleine bataille pour sécuriser les ponts
24:09 qui doivent permettre au 13e corps de traverser les Pays-Bas, et d'atteindre l'Allemagne.
24:14 La 101e division aéroportée s'empare des ponts d'Eindhoven haut la main.
24:19 La 82e division, qui est censée sécuriser les ponts de Nijmegen, se trouve au sud, à Grave.
24:26 A Arnhem, la 1ère division aéroportée britannique est en difficulté.
24:32 Près de 5000 hommes sont disséminés à l'ouest de la ville,
24:35 en pleine lutte contre les forces allemandes locales, ainsi que quelques troupes Waffen-SS.
24:40 Seuls 300 hommes réussissent à atteindre leur objectif, le pont d'Arnhem.
24:46 Ils se retrouvent maintenant retranchés au nord, sous le commandement du lieutenant-colonel John Frost.
24:51 John Frost est un officier expérimenté.
24:56 C'est l'un des premiers à avoir rejoint le nouveau régiment parachutiste créé en 1941.
25:02 Il a dirigé des missions audacieuses en territoire ennemi, dont l'opération Beating en Normandie,
25:06 au cours de laquelle il a réussi à neutraliser un radar allemand, et à s'emparer de son système de fonctionnement.
25:12 Il se trouve maintenant à la tête d'une minuscule force armée de parachutistes britanniques qui ont atteint leur objectif.
25:18 Alors que la nuit tombe, John Frost décide de contacter le quartier général de division pour confirmer la sécurisation du pont.
25:27 En réponse, on lui ordonne de tenir la position jusqu'à l'arrivée du 30ème corps.
25:31 Aux alentours de 21 heures, le groupe de Frost se renforce, en se combinant avec celui mené par le général Tony Ebert.
25:40 On nous avait donné l'ordre de prendre possession du pont d'Arnhem et de le tenir pendant 48 heures,
25:47 le temps que les troupes au sud amenuisent la menace ennemie.
25:54 Et on a suivi les ordres. On a pris possession du pont et on a tenu la position à l'extrémité nord du pont.
26:01 Le deuxième jour de l'opération, la petite force armée de Frost reste retranchée à l'extrémité nord du pont,
26:09 coupée de tout contact avec le reste de la division.
26:12 John Frost avait 600 hommes à sa disposition.
26:22 Il les a dispersés dans un périmètre très restreint.
26:26 Et il ne pouvait aller au-delà de ce périmètre.
26:30 Au même moment, des parachutistes entendent des véhicules approcher depuis le sud.
26:35 Il doit probablement s'agir du 13ème corps qui vient prendre la relève.
26:39 On pensait qu'il s'agissait de nos chars, qu'ils venaient du sud et que le 13ème corps était arrivé pour nous remplacer.
26:49 On était tout excités.
26:52 Il y avait 160 personnes sur le pont.
26:56 Ils ont tous enlevé leurs casques, mis leurs bérets et sont allés accueillir les soldats qui venaient d'arriver.
27:06 Bien entendu, ce n'est que quand les supposés renforts sont arrivés à l'extrémité nord du pont
27:14 qu'ils ont vu qu'ils ne portaient pas le bon insigne.
27:18 Ces véhicules appartiennent à une unité de reconnaissance SS.
27:23 Quand les soldats allemands comprennent que le pont est tombé aux mains des anglais, ils tentent de forcer le passage.
27:28 Mais les parachutistes sont prêts à se défendre.
27:31 On pouvait lire la peur sur leur visage.
27:34 Il y avait trois parachutistes sous le pont et ils ont tiré sur les allemands.
27:39 Ils ont tué tous ceux qui ont tenté de passer le pont.
27:44 Les troupes de reconnaissance allemandes sont décimées par le feu nourri des canons anti-chars et du PIAT,
27:52 une arme portative anti-char spécifique aux anglais.
27:55 Durant les deux premières années de la Seconde Guerre mondiale,
28:00 les anglais utilisaient contre les chars des armes légères qui n'étaient pas efficaces.
28:05 Il a fallu attendre août 1942 pour que la PIAT, l'arme anti-char portative, fasse son apparition.
28:10 Il s'agit d'une arme très étrange, très encombrante, horriblement lourde, environ 15 kg.
28:15 Pour tirer, il était important d'être le plus proche possible de la cible.
28:19 Dans l'idéal, si on veut détruire un char, mieux vaut le faire sur les côtés, sur les flancs ou encore mieux de derrière.
28:25 Et une fois bien placé, il suffit de remonter le viseur et de presser la détente.
28:30 À l'intérieur, un ressort part en avant, frappe le détonateur à l'arrière de la bombe,
28:34 la bombe part à toute vitesse, le détonateur replace le ressort et la prochaine bombe est prête à être insérée.
28:40 L'un des défauts de cette arme, c'est que la queue de la bombe est creuse et qu'elle agit comme un canon de fusil.
28:48 Ainsi, lors de l'explosion, les restes du détonateur sont directement renvoyés vers l'utilisateur du PIAT.
28:55 Il fallait donc se baisser dès qu'on tirait.
28:59 Cette arme était incroyablement efficace.
29:01 Certains commandants d'unités ont même déclaré que c'était l'arme la plus efficace et précise de leur section.
29:06 Elle a détruit plus de chars que les Typhoons et les Tempests.
29:10 Le deuxième jour de l'opération, d'importants renforts aéroportés britanniques décollent de l'Angleterre avec un retard de 4 heures dû à la brume matinale.
29:21 La deuxième vague d'avions ne peut plus profiter de l'effet de surprise.
29:26 Alors qu'elle approche la zone ouest d'Arnhem, une pluie de tirs antiaériens atteint les appareils.
29:31 Bill Higgs est l'un des pilotes de planeurs.
29:34 Les Bosch savaient déjà où nous allions atterrir, parce qu'on avait besoin de grands espaces ouverts.
29:41 Et bien entendu, ils nous ont encerclés.
29:45 Ils étaient armés et ils nous tiraient dessus, dans les airs.
29:50 Moi, je pilotais et je voyais de la fumée ici et là, de partout.
29:56 Je n'irai pas jusqu'à dire que c'était comme du baltrap, ce ne serait pas exact, mais au premier abord, on n'arrivait pas à croire qu'ils faisaient vraiment cela.
30:06 Dans les airs, les britanniques sont sous le feu et au sol, les Allemands attaquent leur zone d'atterrissage.
30:21 Ils étaient tout autour et ils nous décimaient tous. Alors je me suis dirigé vers les arbres.
30:26 Parce que je me disais qu'une fois arrivé dans la forêt, ça serait déjà ça de gagné. Donc bon...
30:32 Les renforts ayant survécu se rassemblent et s'apprêtent à partir.
30:38 Mais un autre problème se pose.
30:42 A Arnhem, alors que les Allemands affluent, le commandant de la première division aéroportée britannique, le Major Général Urquhart, qui a atterri le premier jour, manque à l'appel.
30:51 Et pour ne rien arranger, les radios anglaises cessent de fonctionner.
30:55 Sur le pont, les hommes de Frost ne peuvent atteindre ni le quartier général de division, qui se trouve à 5,5 km de là, ni le quartier général principal, à Nijmegen.
31:05 Quand on est arrivé là-bas, la réception était très mauvaise. Ça commençait mal.
31:11 J'avais l'impression que je ne faisais pas correctement mon travail, parce que je ne parvenais pas à contacter mes hommes.
31:18 Le chaos total et le manque de communication entre les différentes zones de largage ont été les principaux facteurs qui ont fait de l'opération Market Garden un échec.
31:28 Et ce, notamment aux alentours d'Arnhem, où les parachutistes avaient été déployés si loin de leur cible qu'ils n'avaient aucune idée de l'endroit où ils se trouvaient, ni de ce qu'ils devaient faire.
31:40 De plus, leurs radios ne fonctionnaient pas de manière efficace, et ils ne pouvaient même pas se parler pour comprendre ce qui se passait.
31:46 Au moment de l'opération Market Garden, les appareils radios amenés à Arnhem étaient divisés en quatre types.
31:53 L'appareil utilisé pour établir une communication entre les compagnies et les bataillons n'était autre que l'appareil radio sans fil numéro 68.
32:01 Cet appareil est quasiment identique à l'ensemble numéro 18 que vous voyez ici et qui était le standard pour l'infanterie.
32:08 Chacun d'entre eux disposait d'antennes de cuivre qui s'emboîtaient.
32:11 Les soldats qui utilisaient les appareils disaient toujours que c'était comme avoir un énorme néon au-dessus de soi avec cette grande antenne qui ondulait.
32:18 Et l'ennemi pouvait vous trouver très facilement.
32:23 C'est pour ça qu'elle n'était pas très appréciée.
32:26 C'était un pari dangereux, reposant sur des équipements radios qui n'étaient pas vraiment à la hauteur.
32:32 De même qu'il a été dangereux de penser qu'il y avait assez d'opérateurs radios.
32:37 Puisqu'il s'agissait principalement d'une opération aéroportée, il fallait réduire le nombre de personnes à transporter.
32:42 Et donc le problème qui s'est posé, c'est que lorsque les opérateurs radios ont commencé à être blessés ou tués, plus personne n'était assez qualifié pour les remplacer.
32:50 Certaines des radios fonctionnaient avec des piles jetables.
32:53 Évidemment, il y a eu des problèmes de réapprovisionnement, notamment lorsque les soldats se trouvaient en pleine zone de combat.
32:59 D'autres radios fonctionnaient avec des piles rechargeables.
33:03 Et aussi, il était plutôt difficile de recharger des piles ou de trouver un endroit pour les recharger en pleine zone de combat.
33:08 Mais le plus gros problème venait de la procédure à suivre.
33:11 Dans de nombreux cas, les opérateurs radios ou les soldats ne suivaient tout simplement pas la procédure.
33:16 Alors la division essayait de changer de fréquence radio.
33:19 Mais à ce stade, le quartier général de division était déjà déconnecté de la brigade qui tentait de gagner le pont d'Arnhem.
33:25 Donc, lorsqu'ils changeaient de fréquence, il n'y avait plus aucun espoir de reprendre contact avec eux, car ils ne savaient pas que cette fréquence avait été modifiée.
33:33 Tony Ebert a installé huit appareils radios sans fil dans son quartier général, près du pont.
33:38 Le problème, c'est qu'elles avaient été conçues pour fonctionner en plein air, dans de grands espaces.
33:47 Et dès que nous avons mis les pieds à Arnhem, nous avons perdu le contact.
33:55 Frost et ses hommes sont toujours retranchés à l'extrémité nord du pont d'Arnhem.
34:01 Le reste de la première division aéroportée tente en vain de les contacter.
34:05 Les victimes sont de plus en plus nombreuses.
34:09 On était en pleine guerre et on savait ce que ça impliquait.
34:13 Les allemands savaient qu'ils récupéraient leur force plus rapidement que nous.
34:17 Les médecins étaient débordés.
34:20 De temps en temps, le général me disait "Bloisy, va voir combien on a de blessés".
34:24 Alors j'allais voir.
34:27 Parfois il fallait crier et il me répondait avec des signes ou des chiffres.
34:31 Quand on entrait, on voyait tous ces hommes contre les murs.
34:34 On ne pouvait même pas en mettre un de plus.
34:38 Pendant ce temps, à 40 kilomètres au sud-ouest d'Arnhem, le 13e corps atteint son premier objectif.
34:46 La ville néerlandaise d'Eindhoven.
34:49 Là, elle fusionne avec la 101e division aéroportée américaine.
34:54 Les néerlandais sont ravis et acclament les chars britanniques qui entrent dans la ville avec une demi-journée de retard.
35:00 Le prochain objectif est Nijmegen. Mais la ville et son pont sont toujours aux mains des allemands.
35:08 À notre arrivée à Nijmegen, les Sherman, qui transportaient des grenadiers Guards, étaient en tête de file.
35:15 Mais les parachutistes américains n'avaient pas sécurisé le pont qu'ils étaient censés sécuriser.
35:20 Et nous avons donc dû nous battre.
35:23 Se battre pour sécuriser le pont signifie perdre encore quelques heures pourtant cruciales.
35:28 Mais il n'y a aucune autre solution.
35:31 Le troisième jour, une attaque combinée de chars britanniques, d'infanterie et de parachutistes américains tentent de prendre la ville de Nijmegen et ses ponts.
35:40 Mais l'opposition allemande est féroce. L'attaque échoue.
35:43 À Arnhem, le lieutenant général Urquhart a réussi à rallier sa division.
35:50 Mais les chances de parvenir à l'extrémité nord du pont et rejoindre les hommes de John Frost paraissent bien minces.
35:55 Le reste de la division, qui a du mal à tenir sa position, se trouve maintenant encerclée dans la petite ville de Osterbeck.
36:04 Alors que les attaques allemandes s'intensifient, les forces armées du colonel Frost, qui se composent de quelques centaines de téméraires, s'accrochent.
36:12 Et tiennent bon.
36:15 On s'en est bien sortis les trois ou quatre premières heures. Puis bien entendu, les Allemands ont placé leurs unités d'artillerie de l'autre côté de la rivière.
36:25 Et à partir de ce moment-là, ils ne nous ont laissés aucun répit.
36:30 Le lendemain, ils ont commencé à positionner leurs chars.
36:38 Alors que la bataille pour le pont s'intensifie, les Allemands envoient un ingénieur britannique captif porter un message à Frost.
36:46 L'ingénieur s'est présenté sur le pont en agitant un gros morceau de tissu blanc, pour qu'on le voit bien.
36:55 Et il a dit "Oh, monsieur, les Allemands veulent une capitulation".
37:03 Alors Frost lui a répondu "Eh bien, va leur dire de capituler de la bonne manière".
37:10 Qu'ils envoient deux hommes avec un drapeau blanc et sans armes.
37:13 "Non, monsieur, ce n'est pas ce que je voulais dire. Ils veulent que ce soit vous qui vous rendiez".
37:21 Et Frost lui a répondu "Dans ce cas-là, dis-leur d'aller se faire voir".
37:24 Puis l'ingénieur lui a demandé "Vous voulez que j'aille leur dire ça ?"
37:27 Et là Frost a dit "Tu veux retourner les voir ?" "Non, monsieur".
37:31 Malgré toute la détermination de Frost, son destin et celui de ses hommes reposent sur les forces alliées,
37:37 se trouvant à 15 kilomètres au sud de Nîmègue, où le pont restait aux mains des Allemands.
37:42 Mais le commandant de la 82ème division aéroportée a élaboré un plan.
37:47 Le brigadier général James Gavin a reçu la médaille de guerre pour son rôle dans le débarquement de Sicile en 1943.
37:58 Il a également participé au débarquement de Normandie. Seulement 6 semaines avant le lancement de l'opération Market Garden,
38:03 il s'est vu confier le commandement de la 82ème division d'élite aéroportée.
38:07 C'était un chef admiré et charismatique, qui insistait pour que ses officiers soient
38:13 "les premiers à sauter de l'avion et les derniers à être servis à la cantine".
38:17 Face à une armée allemande résistante et déterminée,
38:21 Gavin ordonne au 504ème régiment d'infanterie parachutiste de traverser le Val,
38:27 une rivière qui fait partie du delta du Rhin.
38:29 Une fois sur la rive opposée, il lancera une attaque depuis les deux extrémités du pont.
38:34 La traversée doit s'effectuer dans de petits canaux de bois, sous les tirs nourris de l'ennemi.
38:39 A l'issue de la première traversée, la moitié des soldats sont tués ou blessés.
38:44 Mais grâce aux soldats ayant atteint la rive, les alliés peuvent enfin lancer une attaque simultanée des deux côtés du pont.
38:52 Les Allemands essaient bien de faire sauter le pont, mais les explosifs ne fonctionneront pas
38:57 et les quelques défenseurs survivants prendront la fuite.
39:00 La route menant à Arnhem est maintenant libre,
39:03 mais la progression des alliés sur l'autoroute de l'enfer s'est révélée longue et fastidieuse,
39:08 et les troupes opèrent avec 30 heures de retard.
39:11 L'opération Market Garden accuse de sévères retards qui mettent en péril le plan.
39:17 Ray Cambly, qui était aux commandes d'un char Cromwell des Welsh Guards,
39:21 nous explique sa frustration.
39:23 Quand nous avons traversé le pont, il faisait presque nuit,
39:27 et nous venions de détruire deux chars allemands.
39:30 Mais nous avons été immobilisés toute la nuit avant de pouvoir continuer à avancer le lendemain.
39:35 Et bien entendu, quand nous voulions avancer, il y avait toujours un problème.
39:39 Bien sûr, pendant ce temps-là, les SS se rapprochaient des troupes aéroportées.
39:43 Ils n'avaient aucune chance de survivre, mais nous étions déterminés.
39:46 Nous pensions pouvoir y arriver, mais nous n'y arrivions pas.
39:50 A Arnhem, le lieutenant-colonel Frost et sa petite troupe de parachutistes
39:53 se battent toujours pour conserver l'extrémité nord du pont.
39:57 Mais à chaque heure qui passe, des renforts allemands arrivent à Arnhem,
40:01 et les forces armées de Frost se retrouvent à présent sous le feu de l'artillerie,
40:05 de l'infanterie et des blindés.
40:07 Les Allemands, après avoir fait face à d'autres poches de résistance,
40:12 étaient maintenant en mesure de regrouper leurs forces,
40:16 et, avec l'appui de chars, dont des Tiger,
40:18 pouvaient lancer la dernière et ultime attaque sur le pont.
40:21 Ils sont rapidement parvenus à envahir les positions britanniques,
40:25 tout simplement parce que les Britanniques étaient à court de munitions et de matériel,
40:29 et parce qu'une unité de parachutistes normale
40:32 n'était généralement pas équipée pour faire face aux chars Tiger allemands.
40:36 Le 20 septembre, après avoir tenu le pont pendant 4 jours et 5 nuits,
40:43 les hommes de Frost comprennent que les renforts tant attendus ne viendront pas.
40:46 Ils demandent donc un cessez-le-feu aux Allemands, afin de secourir leurs nombreux blessés.
40:52 Le major de brigade Tony Ebert se souvient encore de ces scènes sinistres,
40:57 dont il a été témoin.
40:59 Il y avait plus de 300 blessés à l'hôpital,
41:05 et le bâtiment était en feu.
41:08 L'incendie était incontrôlable.
41:10 On a non seulement dû demander aux Allemands de cesser le feu,
41:16 mais on a aussi dû leur demander de nous envoyer des hommes pour aider nos soldats blessés.
41:22 Il leur a fallu deux heures,
41:28 et au bout de deux heures,
41:32 les Allemands ont été blessés.
41:36 Et au bout de ces deux heures-là,
41:38 les Allemands avaient déjà infiltré le périmètre que nous avions défendu.
41:43 Dépourvus de toute munition, les hommes de Frost commencent à se rendre,
41:48 même si certains décident de rejoindre le reste de la division,
41:52 qui est retranchée à Osterbeck, à 2 kilomètres à l'est.
41:55 Ça ne servait plus à rien de défendre le pont.
42:00 J'ai donc divisé mes hommes en groupes de 10,
42:05 et je leur ai demandé de retourner dans le périmètre principal d'Osterbeck.
42:09 Mais malheureusement, il y avait beaucoup trop d'Allemands,
42:18 et à chaque fois qu'on en rencontrait, ils nous faisaient prisonniers.
42:23 Durant la trêve, un commandant allemand cherche à entrer en contact avec son homologue britannique.
42:32 Au deuxième jour de l'opération, le colonel Frost avait été grièvement blessé,
42:36 mais était encore capable de parler.
42:39 Le commandant allemand est venu le voir et lui a dit,
42:43 "Colonel Frost, je vous salue.
42:46 Nous venons tout juste de rentrer de Russie,
42:50 où nous avons passé deux ans à nous battre.
42:53 Je n'ai jamais vu personne de ce type.
42:57 Je ne sais pas si vous savez,
43:01 mais je n'ai jamais vu personne,
43:03 vraiment personne, d'aussi courageux que vous et vos hommes.
43:07 Je vous respecte. C'était gentil."
43:12 Le courage et la ténacité avec lesquelles Frost et ses hommes ont maintenu la position n'ont pas suffi.
43:20 Le pont d'Arnhem était trop loin.
43:23 Le 21 septembre, cinquième jour.
43:30 Maintenant que Frost et ses hommes sont vaincus, le pont d'Arnhem repasse sous contrôle allemand.
43:34 Le reste de la première division aéroportée est désormais retranché autour d'Osterbeck,
43:40 du mauvais côté de la rivière, par rapport aux forces britanniques et américaines qui quittent Nijmegen, en direction d'Arnhem.
43:47 Toutefois, la progression du 13e corps sur l'autoroute de l'enfer demeure extrêmement longue.
43:52 De plus, les chars britanniques sont désormais la cible de l'une des armes les plus mortelles de l'armée allemande.
43:59 "On était des cibles faciles, parce que les allemands disposaient de canons de 88mm, c'était leur arme anti-char.
44:06 Je crois que c'est la meilleure arme qui ait été créée pour combattre les chars."
44:11 "Cette capacité de pouvoir faire face à une attaque blindée britannique montre bien à quel point la défense allemande était robuste.
44:20 Ils avaient des armes comme le célèbre canon anti-char PAK 43, que vous pouvez voir ici derrière moi.
44:28 C'est un canon de 88mm qui tire des projectiles perforants pouvant pénétrer la carcasse des chars Sherman britanniques à 2,5 km de distance.
44:39 Les chars britanniques se faisaient donc détruire sans même voir qui leur tirait dessus."
44:44 A chaque fois qu'un canon anti-char détruit le char britannique en tête de convoi, les suivants se retrouvent bloqués tant que la seule route n'est pas dégagée.
44:57 Le commandant du corps, le lieutenant général Oroks, lance l'infanterie à l'assaut.
45:02 Mais les défenses allemandes sont bien trop solides.
45:05 "On souhaitait à tout prix rejoindre la division aéroportée à Arnhem, mais les allemands, eux, ne souhaitaient pas que ça se passe comme ça.
45:16 Ils voulaient les voir se rendre avant même que nous ayons eu la possibilité de traverser le Rhin pour aller les chercher et les sortir de l'armée."
45:25 "Pendant 4 ou 5 jours, on s'est donc retrouvé dans une bataille d'usure."
45:28 Pour le 13ème corps, le temps manque.
45:33 A Osterbeek, la division aéroportée britannique commence à manquer cruellement de munitions et d'eau.
45:39 Les tentatives de réapprovisionnement n'ont pas toutes réussi.
45:43 La plupart des convois sont tombés aux mains des allemands.
45:46 De plus, la division aéroportée britannique continue de subir des attaques incessantes, de tous les côtés.
45:52 "On savait qu'on était en train de perdre, parce que petit à petit notre périmètre rétrécissait.
46:02 On savait donc qu'on n'allait pas gagner."
46:05 Le 13ème corps cherche une solution alternative pour atteindre les troupes aéroportées à Osterbeek.
46:11 Les unités de reconnaissance, qui passent par des petits chemins de campagne, trouvent ainsi un passage vers la rivière,
46:17 qui permet de contourner les principales défenses allemandes.
46:21 A Driel, ils entrent en contact avec la première brigade parachutiste polonaise qui avait été déployée le 3ème jour.
46:27 Dans les jours qui suivent, par plusieurs fois, le 13ème corps tente de traverser la rivière pour rejoindre les parachutistes, et ne former qu'une seule troupe.
46:35 "Nous avons envoyé la 4ème compagnie d'Orsets traverser la rivière pour former une sorte de pont,
46:41 afin que les parachutistes sachent où traverser à leur retour."
46:47 Mais la résistance aéroportée au nord de la rivière commence à s'effondrer, et l'envoi de renforts n'y changera rien.
46:54 "J'ai envoyé toute la compagnie de l'autre côté, et très peu d'hommes en sont revenus. Ils ne se sont pas tous fait tuer, beaucoup ont été capturés."
47:02 Il apparaît maintenant très clairement que l'opération Market Garden est un échec.
47:07 La priorité des britanniques était de secourir et de ramener du bon côté de la rivière le plus de troupes aéroportées possible.
47:16 "À ce moment-là, le vrai problème sur le terrain, c'était les allemands qui étaient sur le point de prendre le dessus sur les positions de la 1ère division aéroportée,
47:25 ce qui aurait peut-être mené à un massacre. Les britanniques savaient que des troupes SS étaient impliquées.
47:31 Ils craignaient un massacre, mais il n'y en a pas eu.
47:35 Les troupes de la Waffen-SS étaient généralement si impressionnées par la façon dont les troupes de parachutistes et de planeurs avaient combattu, qu'elles les traitaient plutôt bien.
47:44 Mais encore une fois, dans l'ensemble, il ne s'agissait pas seulement de traverser Arnhem.
47:49 Il s'agissait d'entrer beaucoup plus au nord des Pays-Bas avec des forces substantielles, et cela ne se produirait manifestement pas à ce stade.
47:58 La décision a donc été prise de retirer ces forces présentes de l'autre côté du Rhin, en lançant, peut-être ironiquement, l'opération Berlin."
48:11 "On a reçu un message qui annonçait un retrait des troupes.
48:17 Il ne fallait pas en toucher un mot aux néerlandais, parce qu'on pensait qu'ils étaient pro-allemands, notamment parce qu'ils habitent près de la frontière allemande.
48:27 Alors on nous ordonnait de ne rien dire, au cas où ils seraient allés prévenir les allemands.
48:33 Alors, nous étions dans une tranchée de l'autre côté du fleuve. Il y avait l'artillerie royale qui tirait avec deux armes à feu sur les côtés droit et gauche.
48:43 Il s'agissait de deux traceurs, et on nous a dit de rester dans le périmètre des traceurs pour ne pas subir de tirs de but.
48:50 Nous sommes ensuite arrivés au niveau de l'église, nous avons traversé la rivière, et de l'autre côté, ça a été horrible.
48:59 Les allemands savaient que nous arrivions. Apparemment, ils avaient d'abord pensé que ce seraient les polonais qui arriveraient de l'autre côté de la rivière,
49:08 puis ils ont compris qu'il s'agissait de nous, et ils ont bombardé l'endroit où nous nous trouvions.
49:13 Ça a été la pire nuit de ma vie. Je revis souvent ce moment en cauchemar. Très souvent."
49:19 "Cette nuit-là, ils sont parvenus à faire traverser 2400 troupes alliées, ce qui a pratiquement mis fin au combat à Arnhem.
49:37 Et bien entendu, les allemands se sont appropriés cette victoire."
49:44 La bataille d'Arnhem se termine dans la mort et le chaos. Les britanniques subissent une défaite humiliante. Très rapidement, des voix s'élèvent.
49:53 "J'avais honte d'être anglais, d'avoir perdu la bataille à cause de l'incompétence de certains."
50:01 "Les anglais ont échoué parce qu'ils n'ont pas su écouter. C'étaient de bons soldats, et surtout très courageux, mais les commandants étaient fous.
50:12 Déployer tous ces parachutistes tout en sachant qu'il y avait des blindés... Les néerlandais les avaient prévenus, et les anglais ne les ont pas écoutés."
50:23 Montgomery a refusé de porter la responsabilité de cet échec.
50:28 "Montgomery était un commandant extrêmement compétent, mais doté d'un égo surdimensionné. Il avait l'habitude d'affirmer qu'il pouvait planifier des batailles à la perfection.
50:38 Pour lui, il suffisait tout simplement d'exécuter le plan pour remporter la victoire. Il affirmait n'avoir jamais perdu aucune bataille.
50:44 Lorsqu'on l'a interrogé sur l'opération Market Garden, il a été confirmé que l'opération avait été à 90% un succès."
50:52 Le plan de Monty n'a pas permis aux alliés de franchir le Rhin ni d'entrer en Allemagne comme prévu, et encore moins de mettre fin à la guerre avant Noël 1944.
51:02 La stratégie du front élargi défendue par Eisenhower allait reprendre dès que les alliés auraient résolu leur crise d'approvisionnement.
51:09 Une crise que l'opération Market Garden n'avait fait qu'aggraver.
51:13 "L'opération Market Garden a retiré une quantité substantielle de matériel à d'autres zones du front allié.
51:20 Plus important encore, les armées du sud des États-Unis, dont notamment la 3ème armée de Patton, se sont retrouvées privées de carburant, ce qui a donc ralenti leur progression.
51:31 L'opération Market Garden a également détourné Montgomery de ses autres responsabilités.
51:36 Et plus grave encore, Montgomery a négligé la capture des zones à proximité du port et de la ville d'Anvers, qui, elle, avait été capturée.
51:44 Les Allemands contrôlaient l'estuaire présent entre Anvers et la mer, ce qui signifiait que les alliés n'ont pu utiliser le port d'Anvers pour se réapprovisionner plus longtemps qu'ils ne l'auraient dû."
51:55 L'opération Market Garden reste l'un des meilleurs choix de la guerre.
52:01 Il s'agissait d'une occasion d'abréger la guerre et ainsi de sauver des milliers de vies.
52:05 Mais cette occasion a été gâchée par une planification médiocre, et ce, malgré l'héroïsme et le talent des nombreux soldats.
52:13 "On avait sauté le 17 septembre et les Canadiens sont venus nous sauver le 11 novembre.
52:19 On a passé tout ce temps à faire face aux Allemands et à attendre.
52:22 Cette opération a vraiment été un grand n'importe quoi, un vrai pétrin, vraiment."
52:28 "Vraiment."
52:29 Musique de l'Hymne aux Marseillaises
52:58 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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